L’Encyclopédie/1re édition/ATHLETES
ATHLETES, s. m. pl. (Hist. anc. gymnastique.) c’est-à-dire combattans, du Grec ἀθλητὴς, qui vient d’ἀθλεῖν, combattre ; nom qu’on donnoit proprement à ceux qui dans les jeux publics combattoient à la lutte ou à coups de poings, & qui a été ensuite commun à tous ceux qui disputoient le prix de la course, du saut, & du disque ou palet. Les Latins les distinguoient par ces cinq noms particuliers ; luctatores, lutteurs ; pugiles, combattans à coups de poings ; cursores, coureurs ; saltatores, sauteurs ; & discoboli, jetteurs de disque, ou joüeurs de palet ; auxquels répondent ces cinq noms Grecs παλαισταὶ, πύκται, δρομεῖς, ἁλτικοὶ, & δισκοϐόλοι. Voyez Gymnastique.
Les exercices des athletes furent d’abord institués pour exercer & former les jeunes gens aux travaux & aux fatigues de la guerre : mais ils dégénererent bientôt en spectacles ; & ceux qui s’y adonnoient, en hommes publics. Ils menoient une vie dure : & quoique quelques-uns d’eux ayent été fameux par leur voracité, & ayent fait dire à Plaute comme un proverbe pugilicè & athleticè vivere, pour marquer un homme qui mange beaucoup ; il est certain qu’en général ils pratiquoient un régime très-austere, bêchant la terre un mois avant le combat pour se rendre les membres souples, & s’abstenant des boissons fortes & du commerce des femmes : ce qu’Horace nous apprend par ces vers :
Qui studet optatam cursu contingere metam,
Multa tulit fecitque puer, sudavit, & alsit,
Abstinuit venere & vino. Art. poët.
Epictete & S. Paul leur rendent le même témoignage : qui in agone contendit, ab omnibus se abstinet. Ils invoquoient les dieux avant que de combattre, & leur sacrifioient sur six autels. Quand ils avoient remporté la victoire, ils étoient honorés d’une couronne aux acclamations du peuple, chantés par les poëtes, & reçûs dans leur patrie comme des vainqueurs, puisqu’ils y entroient par une breche faite aux murs de la ville ; leurs noms étoient écrits dans les archives, les inscriptions, & autres monumens publics ; enfin les cérémonies de leur triomphe se terminoient par des festins publics & particuliers. Ils étoient toute leur vie révérés de leurs concitoyens, prenoient la premiere place aux jeux publics ; & les Grecs, selon Horace, les regardoient comme des especes de dieux.
Un autre privilége des athletes moins brillant, mais plus utile, c’étoit celui d’être nourris le reste de leurs jours aux dépens du public ; privilége que leur confirmerent les empereurs : & l’on ajoûtoit à cet avantage l’exemption de toute charge & de toute fonction civile ; mais il falloit pour l’obtenir avoir été couronné au moins trois fois aux jeux sacrés ; les Romains y ajoûterent même dans la suite cette condition, qu’une des couronnes eût été remportée à Rome ou en Grece. On leur érigea des statues ; on alla même jusqu’à leur rendre les honneurs divins. Tous les exercices des athletes étoient compris sous le nom générique de πένταθλον, pentathle ; & ceux qui réunissoient tous ces cinq talens, étoient appellés par les Grecs πένταθλοι, & par les Latins quinquertiones. (G)