L’Encyclopédie/1re édition/APOSTASIE

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APOSTASIE, ἀποστασία, révolte, abandon du parti qu’on suivoit pour en prendre un autre.

Ce mot est formé du Grec ἀπὸ, ab, contra, & de ἵστημι, être debout, se tenir ferme, c’est-à-dire, résister au parti qu’on avoit suivi, embrasser une opinion contraire à celle qu’on avoit tenue ; d’où les Latins ont formé apostatare, mépriser ou violer quelque chose que ce soit. C’est en ce sens qu’on lit dans les Lois d’Edouard le Confesseur : Qui leges apostatabit terræ suæ, reus sit apud regem ; Que quiconque viole les lois du royaume est criminel de lese-majesté.

Apostasie se dit plus particulierement de l’abandon qu’une personne fait de la vraie religion pour en embrasser une fausse. Telle fut l’action de l’empereur Julien, quand il quitta le Christianisme pour professer l’idolatrie.

Parmi les Catholiques, apostasie s’entend encore de la désertion d’un ordre religieux dans lequel on avoit fait profession, & qu’on quitte sans une dispense légitime. V. Ordre & Dispense.

Les anciens distinguoient trois sortes d’apostasie : la premiere, à supererogatione, qui se commet par un Prêtre ou un Religieux qui quitte son état de sa propre autorité pour retourner à celui des laïcs, & elle est nommée de surérogation, parce qu’elle ajoûte un nouveau degré de crime à l’une ou l’autre des deux especes dont nous allons parler, & sans l’une ou l’autre desquelles elle n’arrive jamais : la seconde, à mandatis Dei, c’est celle que commet quiconque viole la loi de Dieu, quoiqu’il persiste en sa croyance : la troisieme, à fide ; c’est la défection totale de celui qui abandonne la foi. V. Renégat.

Cette derniere est sujette à la vindicte des lois civiles. En France un Catholique qui abandonne sa religion pour embrasser la religion prétendue réformée, peut être puni par l’amende honorable, le bannissement perpétuel hors du royaume, & la confiscation de ses biens, en vertu de plusieurs édits & déclarations publiées sous le regne de Louis-le-Grand. (GH)