L’Encyclopédie/1re édition/AFFIRMATION
AFFIRMATION, s. f. au Palais, est la déclaration que fait en justice avec serment l’une des parties litigantes. Voyez Serment.
L’affirmation est de deux sortes : celle qui se fait en matiere civile, & celle qui se fait en matiere criminelle. C’est une maxime de notre Droit que l’affirmation ne sauroit être divisée ; c’est-à-dire qu’il faut faire droit sur toutes les parties de la déclaration, & non pas avoir égard à une partie & rejetter l’autre. Si par exemple une partie à qui on défere le serment en justice sur la question de savoir si elle a reçû un dépôt qu’on lui redemande, répond qu’elle l’a reçû, mais qu’elle l’a restitué depuis ; on ne pourra pas en conséquence de l’aveu qu’elle fait de l’avoir reçû, la condamner à restituer : il faudra au contraire la décharger de la demande à fin de restitution, en conséquence de ce qu’elle affirmé avoir restitué ; mais cette maxime ne s’observe qu’en matiere civile : en matiere criminelle, comme l’affirmation ne suffit pas pour purger l’accusé, on se sert contre lui de ses aveux pour opérer sa conviction, sans avoir toûjours égard à ce qu’il dit à sa décharge. Si, par exemple, un homme accusé de meurtre avoue avoir menacé la personne qui depuis s’est trouvé tuée, quoiqu’il affirme que ce n’est pas lui qui l’a tuée, la présomption qui résulte de sa menace, ne laissera pas d’être regardée comme un adminicule ou commencement de preuve, nonobstant ce qu’il ajoûte à sa décharge.
Et même en matiere civile, lorsque l’affirmation n’est pas litis-décisoire, comme sont les déclarations que fait une partie dans ses défenses sans prestation de serment, ou même celles précédées de prestation de serment dans un interrogatoire sur faits & articles ; le Juge y aura seulement tel egard que de raison.
En Angleterre on se contente d’une simple affirmation sans serment de la part des Quacres, qui soûtiennent que le serment est absolument contraire à la loi de Dieu. Voyez Quacre & Serment.
Cette secte y causa beaucoup de trouble par son opposition déclarée à toutes sortes de sermens, & spécialement par le refus qu’ils firent de prêter le serment de fidélité exigé par Charles II. jusqu’à ce qu’en 1689. le Parlement fit un Acte qui portoit que leur déclaration solemnelle d’obéissance & de fidélité vaudroit le serment ordinaire. Voyez Declaration & Fidelité.
En 1695, ils obtinrent pour un tems limité, un autre Acte, portant que leur affirmation solemnelle vaudroit serment dans tous les cas où le serment est solemnellement prescrit par la loi ; excepté dans les matieres criminelles, pour posséder des charges de judicature, des postes de confiance & des emplois lucratifs : laquelle affirmation devoit être conçue en cette forme : « je N. en présence de Dieu tout-puissant, témoin de la vérité de ce que j’atteste ; déclare que », &c.
Dans la suite cet Acte fut renouvellé & confirmé pour toûjours. Mais la formule de cette affirmation n’étant pas encore à leur gré, comme contenant en substance tout ce qui fait l’essence du serment, ils solliciterent le Parlement d’y faire quelques changemens, à quoi ils parvinrent en 1721, qu’on la rectifia de la maniere qui suit, à la satisfaction universelle de tous les Quacres : « je N. déclare & affirme sincerement, solemnellement & avec vérité ». A présent on se contente à leur égard de cette formule, de la maniere pourtant, & en exceptant les cas qu’on vient de dire en parlant de la formule de 1695. Et celui qui après une pareille affirmation déposeroit faux, seroit réputé coupable de parjure, & punissable comme tel. Voyez Parjure.
Affirmation, en termes de bureaux, est la déclaration qu’un comptable met à la tête de son compte pour le certifier véritable. Selon l’usage des bureaux, l’affirmation se met au haut de la premiere page du compte, & à la marge en forme d’apostille.
Ce terme se dit aussi du serment que fait le comptable, lorsqu’il présente son compte à la Chambre des Comptes en personne, & qu’il affirme que toutes les parties en sont véritables. Voyez Interrogatoire (H).