L’Encyclopédie/1re édition/ABRACADABRA
* ABRACADABRA, parole magique qui étant répétée dans une certaine forme, & un certain nombre de fois, est supposée avoir la vertu d’un charme pour guérir les fievres, & pour prevenir d’autres maladies. Voyez Charme & Amulete.
D’autres écrivent ce mot abrasadabra ; car on le trouve ainsi figuré en caracteres grecs ΑΒΡΑϹΑΔΑΒΡΑ où le Ϲ est l’ancien Σ qui vaut S. Voici la maniere dont doit être écrit ce mot mystérieux pour produire la prétendue vertu qu’on lui attribue.
Serenus Simonicus, ancien Medecin, Sectateur de l’hérétique Basilide qui vivoit dans le deuxieme siecle, a composé un Livre des Préceptes de la Medecine en vers hexametres, sous le titre De Medicinâ parvo pretio parabili, où il marque ainsi la disposition & l’usage de ces caracteres :
Inscribes chartæ quod dicitur abracadabra
Sæpius & subter repetes, sed detrahe summam,
Et magis atque magis desint elementa figuris,
Singulæ quæ semper rapies & cætera figes,
Donec in augustum redigatur littera conum ;
His lino nexis collum redimire memento :
Talia languentis conducent vincula collo,
Lethalesque abigent (miranda potentia) morbos.
Wendelin, Scaliger, Saumaise, & le P. Kircher, se sont donné beaucoup de peine pour découvrir le sens de ce mot, Delris en parle, mais en passant, comme d’une formule connue en magie, & qu’au reste il n’entreprend point d’expliquer. Ce que l’on peut dire de plus vraissemblable, c’est que Serenus qui suivoit les superstitions magiques de Basilide, forma le mot d’abracadabra sur celui d’abrasac ou abrasax, & s’en servit comme d’un préservatif ou d’un remede infaillible contre les fievres. Voyez Abrasax.
Quant aux vertus attribuées à cet amulete, le siecle où nous vivons est trop éclairé pour qu’il soit nécessaire d’avertir que tout cela est une chimere. (G)