L’Enclos du Rêve/Les Vers

Alphonse Lemerre (p. 139-142).

LES VERS

Les vers sont des boutons éclos
Aux buissons feuillus de nos rêves,
De nos heures lentes ou brèves
Ce sont les rires, les sanglots.
Aux buissons feuillus de nos rêves,
Les vers, ce sont de longs murmures
Que nos âmes ont chuchoté
Avec les brises en été,
En automne avec les ramures.

Ce sont les tumultes divers
Que font les voix, que font les ailes ;
Ce sont des roses, des dentelles ;
Ce sont des lumières, les vers ;


Ce sont les prismes, les facettes,
Les rayons et les bleus du jour,
Les rayons et les bleus d’amour,
Les cris et l’effroi des tempêtes ;

Ce sont les traînes de la nuit
Veloutant la pelouse pâle,
La lune à son balcon d’opale
Quand le crépuscule s’enfuit ;

Ce sont nos angoisses, nos doutes,
Nos attentes et nos frissons
Et la gaîté de nos chansons
Que nous semons au long des routes ;

Ce sont les plaisirs, les douleurs
Que la vie inégale donne ;
La douceur du mot qui pardonne ;
Le geste qui tarit les pleurs

Des espérances décevantes ;
Ce sont les robes de beauté ;
Et c’est un peu d’humanité
Qui passe dans leurs voix vivantes ;


Et ce sont des boutons éclos
Aux buissons feuillus de nos rêves,
De nos heures lentes ou brèves ;
Ce sont les rires, les sanglots…