L’Antéchrist (Renan)/XVII. Fortune du livre

Michel Lévy (p. 454-480).


CHAPITRE XVII.


FORTUNE DU LIVRE.


L’ouvrage se termine par cet épilogue :


Et c’est moi, Jean, qui entendis et vis toutes ces choses ; et, après les avoir vues et entendues, je tombai devant les pieds de l’ange qui me les montrait, pour l’adorer. Et il me dit : « Garde-toi de le faire, je suis ton coserviteur ; nous avons un même maître, toi, moi, tes frères les prophètes et ceux qui gardent les paroles de ce livre[1]. Adore Dieu. » Et il me dit ensuite : « Ne scelle[2] pas les discours de la prophétie de ce livre, car le temps est proche ! Que l’injuste devienne plus injuste encore ; que celui qui est souillé se souille encore[3] ; que le juste fasse encore plus de justice ; que le saint se sanctifie encore ! »


Une voix lointaine, la voix de Jésus lui-même, est censée répondre à ces promesses et les garantir.


« Voilà que je viens vite ! Et avec moi j’apporte la récompense que je décernerai à chacun selon ses œuvres[4]. Je suis l’Α et l’Ω, le premier et le dernier, le commencement et la fin. Heureux ceux qui lavent leurs robes ! Ils auront droit à l’arbre de vie, et ils entreront dans la ville par les portes. Arrière les chiens, les artisans de maléfices, les impudiques, les meurtriers, les idolâtres, quiconque aime et commet le mensonge ! Moi, Jésus, j’ai envoyé mon ange pour vous attester ces choses dans les Églises. Heureux qui garde les paroles de la prophétie de ce livre ! Je suis la tige et le rejeton de David, l’étoile claire du matin[5]. »


Puis les voix du ciel et celles de la terre s’entrecroisent et arrivent moriendo à un finale en accord parfait.


« Viens, » disent l’Esprit[6] et l’épouse[7]. — Que celui qui entend cet appel dise aussi : « Viens. » Que celui qui a soif vienne ! L’eau de la vie se donne ici gratuitement à qui veut.

(J’affirme à quiconque entendra les paroles de la prophétie contenue en ce livre que, si quelqu’un y ajoute quoi que ce soit, Dieu fera tomber sur lui les plaies décrites en ce livre. Et si quelqu’un retranche quoi que ce soit aux discours du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l’arbre de vie et de la ville sainte dont il est question en ce livre[8].)

« Oui, je viens vite, » dit le révélateur de tout ceci.

Amen. Viens, seigneur Jésus.

La grâce du seigneur Jésus soit avec tous.


Nul doute que, présenté sous le couvert du nom le plus vénéré de la chrétienté, l’Apocalypse n’ait fait sur les Églises d’Asie une très-grande impression. Une foule de détails, maintenant devenus obscurs, étaient clairs pour les contemporains. Ces annonces hardies d’une prochaine convulsion n’avaient rien qui surprît. Des discours non moins formels prêtés à Jésus se répandaient chaque jour et se faisaient accepter[9]. Pendant un an, d’ailleurs, les événements du monde purent sembler une merveilleuse confirmation du livre. Vers le ler février, on apprit en Asie la mort de Galba, et l’avènement d’Othon. Puis chaque jour apporta quelque indice apparent de la décomposition de l’empire : l’impuissance d’Othon à se faire reconnaître de toutes les provinces, Vitellius maintenant son titre contre Rome et le sénat, les deux sanglants combats de Bédriac, Othon abandonné à son tour, l’avènement de Vespasien, la bataille dans les rues de Rome, l’incendie du Capitole allumé par les combattants, incendie d’où plusieurs conclurent que les destinées de Rome tiraient à leur fin, tout cela dut paraître étonnamment conforme aux sombres prédictions du prophète. Les déceptions ne commencèrent qu’avec la prise de Jérusalem, la destruction du temple, l’affermissement définitif de la dynastie flavienne. Mais la foi religieuse n’est jamais rebutée dans ses espérances ; l’ouvrage, d’ailleurs, était obscur, susceptible en beaucoup d’endroits d’interprétations diverses. Aussi, peu d’années après l’émission du livre, chercha-t-on à plusieurs chapitres un sens différent de celui que l’auteur y avait mis. L’auteur avait annoncé que l’empire romain ne se reconstituerait pas et que le temple de Jérusalem ne serait pas détruit. Il fallut sur ces deux points trouver des échappatoires. Quant à la réapparition de Néron, on n’y renonça pas de sitôt ; sous Trajan encore, des gens du peuple s’obstinaient à croire qu’il reviendrait[10]. Longtemps on garda la notion du chiffre de la Bête ; une variante se répandit même dans les pays occidentaux, pour accommoder ce chiffre aux habitudes latines. Certains exemplaires portaient 616, au lieu de 666[11]. Or 616 répond à la forme latine Nero Cæsar (le noun hébreu valant 50).

Durant les trois premiers siècles, le sens général du livre se conserva, au moins pour quelques initiés. L’auteur du poëme sibyllin qui date à peu près de l’an 80, s’il n’a pas lu la prophétie de Patmos, en a entendu parler. Il vit dans un ordre d’idées tout à fait analogue. Il sait ce que signifie la sixième coupe. Pour lui, Néron est l’anti-Messie ; le monstre s’est enfui derrière l’Euphrate ; il va revenir avec des milliers d’hommes[12]. L’auteur de l’Apocalypse d’Esdras (ouvrage daté avec certitude de l’an 96, 97 ou 98) imite notoirement l’Apocalypse de Jean[13], emploie ses procédés symboliques, ses notations, son langage. On peut en dire autant de l’Ascension d’Isaïe (ouvrage du second siècle), où Néron, incarnation de Bélial, joue un rôle qui prouve que l’auteur savait le chiffre de la Bête[14]. Les auteurs des poésies sibyllines qui datent du temps des Antonins pénètrent également les énigmes du manifeste apostolique, et en adoptent les utopies, même celles qui, comme le retour de Néron, étaient décidément frappées de caducité[15]. Saint Justin, Méliton paraissent avoir eu l’intelligence à peu près complète du livre. On en peut dire autant de Commodien, qui (vers 250) mêle à son interprétation des éléments d’une autre provenance, mais qui ne doute pas un instant que Néron l’Antechrist ne doive ressusciter de l’enfer pour soutenir une lutte suprême contre le christianisme[16], et qui conçoit la destruction de Rome-Babylone exactement comme on la concevait deux cents ans auparavant[17]. Enfin, Victorin de Pettau (mort en 303) commente encore l’Apocalypse avec un sentiment assez juste. Il sait parfaitement que Néron ressuscité est le véritable Antechrist[18]. Quant au chiffre de la Bête, il était perdu probablement avant la fin du IIe siècle. Irénée (vers 190) se trompe grossièrement sur ce point, ainsi que sur quelques autres d’importance majeure, et ouvre la série des commentaires chimériques et des symbolismes arbitraires[19]. Quelques particularités subtiles, comme la signification du Faux Prophète et de Harmagédon, se perdirent de très-bonne heure.

Après la réconciliation de l’empire et de l’Église, au IVe siècle, la fortune de l’Apocalypse fut gravement compromise. Les docteurs grecs et latins, qui ne séparaient plus l’avenir du christianisme de celui de l’empire, ne pouvaient admettre pour inspiré un livre séditieux, dont la donnée fondamentale était la haine de Rome et la prédiction de la fin de son règne. Presque toute la partie éclairée de l’Église d’Orient, celle qui avait reçu une éducation hellénique, pleine d’aversion pour les écrits millénaires et judéo-chrétiens, déclara l’Apocalypse apocryphe[20]. Le livre avait pris dans le Nouveau Testament grec et latin[21] une position si forte, qu’il fut impossible de l’en expulser ; on eut recours, pour se débarrasser des objections qu’il soulevait, aux tours de force exégétiques. L’évidence cependant était écrasante. Les Latins, moins opposés que les Grecs au millénarisme, continuèrent à identifier l’Antechrist avec Néron[22]. Jusqu’aux temps de Charlemagne, il y eut une sorte de tradition à cet égard. Saint Béat de Liebana, qui commente l’Apocalypse en 786, affirme, en y mêlant, il est vrai, plus d’une inconséquence, que la Bête des chapitres xiii et xvii, qui doit reparaître à la tête de dix rois pour anéantir la ville de Rome, est Néron l’Antechrist. Un moment même, il est à deux doigts du principe qui, au XIXe siècle, conduira les critiques à la vraie supputation des empereurs et à la détermination de la date du livre[23].

Ce n’est que vers le XIIe siècle, quand le moyen âge s’enfonce dans la voie d’un rationalisme scolastique assez peu soucieux de la tradition des Pères, que le sens de la vision de Jean se trouve tout à fait compromis[24]. Joachim de Flore peut être considéré comme le premier qui transporta hardiment l’Apocalypse dans le champ de l’imagination sans limites, et chercha, sous les images bizarres d’un écrit de circonstance qui borne lui-même son horizon à trois ans et demi, le secret de l’avenir entier de l’humanité.

Les commentaires chimériques auxquels a donné lieu cette fausse idée ont jeté sur le livre un injuste discrédit. L’Apocalypse a repris de nos jours, grâce à une plus saine exégèse, la place élevée qui lui appartient dans les écritures sacrées. L’Apocalypse est, en un sens, le sceau de la prophétie, le dernier mot d’Israël. Qu’on lise dans les anciens prophètes, dans Joël par exemple[25], la description du « jour de Jéhovah », c’est-à-dire de ces grandes assises que le justicier suprême des choses humaines tient de temps en temps, pour ramener l’ordre sans cesse troublé par les hommes, on y trouvera le germe de la vision de Patmos. Toute révolution, toute convulsion historique devenait pour l’imagination du juif, obstiné à se passer de l’immortalité de l’âme et à établir le règne de la justice sur cette terre, un coup providentiel, prélude d’un jugement bien plus solennel et plus définitif encore. À chaque événement, un prophète se levait pour crier : « Sonnez, sonnez de la trompette en Sion ; car le jour de Jéhovah vient ; il est proche[26]. » L’Apocalypse est la suite et le couronnement de cette littérature étrange, qui est la gloire propre d’Israël. Son auteur est le dernier grand prophète ; il n’est inférieur à ses devanciers qu’en ce qu’il les imite ; c’est la même âme, le même esprit, L’Apocalypse offre le phénomène presque unique d’un pastiche de génie, d’un centon original. Si l’on excepte deux ou trois inventions particulières à l’auteur et d’une merveilleuse beauté[27], l’ensemble du poëme est composé de traits empruntés à la littérature prophétique et apocalyptique antérieure, surtout à Ézéchiel, à l’auteur du livre de Daniel, aux deux Isaïes. Le Voyant chrétien est le véritable élève de ces grands hommes ; il sait par cœur leurs écrits, il en tire les dernières conséquences. Il est frère, moins la sérénité et l’harmonie, de ce poëte merveilleux du temps de la captivité, de ce second Isaïe, dont l’âme lumineuse semble comme imprégnée, six cents ans d’avance, de toutes les rosées, de tous les parfums de l’avenir.

Comme la plupart des peuples qui possèdent un brillant passé littéraire, Israël vivait des images consacrées par sa vieille et admirable littérature. On ne composait presque plus qu’avec des lambeaux des anciens textes ; la poésie chrétienne, en particulier, ne connaissait pas d’autre procédé littéraire[28]. Mais, quand la passion est sincère, la forme, même la plus artificielle, prend de la beauté. Les Paroles d’un croyant sont à l’égard de l’Apocalypse ce que l’Apocalypse est à l’égard des anciens prophètes, et cependant les Paroles d’un croyant sont un livre d’un véritable effet ; on ne le relit jamais sans une vive émotion.

Les dogmes du temps présentaient comme le style quelque chose d’artificiel ; mais ils répondaient à un sentiment profond. Le procédé de l’élaboration théologique consistait en une transposition hardie, appliquant au règne du Messie et à Jésus toute phrase des anciens écrits qui paraissait susceptible d’une relation vague avec un idéal obscur. Comme l’exégèse qui présidait à ces combinaisons messianiques était tout à fait médiocre, les formations singulières dont nous parlons impliquaient souvent de graves contresens. Cela se voit surtout dans les passages de l’Apocalypse qui concernent Gog et Magog, si on les compare aux chapitres parallèles d’Ézéchiel. Selon Ézéchiel, Gog, roi de Magog, viendra, « dans la suite du temps[29], » quand le peuple d’Israël sera de retour de la captivité et rétabli en Palestine, lui faire une guerre d’extermination. Déjà, vers l’époque des traducteurs grecs de la Bible et de la composition du livre de Daniel, l’expression qui désigne simplement dans l’hébreu classique un avenir indéterminé signifiait « à la fin des temps », et ne s’appliquait plus qu’aux temps du Messie[30]. L’auteur de l’Apocalypse est amené de la sorte à rapporter les chapitres xxxviii et xxxix d’Ézéchiel aux temps messianiques, et à considérer Gog et Magog comme les représentants du monde barbare et païen qui survivra à la ruine de Rome, et coexistera avec le règne millénaire de Christ et de ses saints.

Ce mode de création par voie extérieure, si j’ose le dire, cette façon de combiner, au moyen d’une exégèse d’appropriation, des phrases prises çà et là, et de construire une théologie nouvelle par ce jeu arbitraire, se retrouvent dans l’Apocalypse pour tout ce qui touche au mystère de la fin des temps. La théorie de l’Apocalypse à cet égard se distingue par des traits essentiels de celle qu’on trouve dans saint Paul et de celle que les Évangiles synoptiques placent dans la bouche de Jésus. Saint Paul semble, il est vrai, parfois[31] croire à un règne du Christ dans le temps, qui aura lieu avant la fin dernière de toutes choses ; mais il ne va jamais à la même précision que notre auteur. Selon l’Apocalypse, en effet, l’avènement du futur règne de Christ est très-proche ; il doit suivre de près la destruction de l’empire romain. Les martyrs ressusciteront seuls à cette première résurrection ; le reste des morts ne ressuscitera pas encore. De telles bizarreries étaient la conséquence de la manière tardive et incohérente dont Israël forma ses idées sur l’autre vie. On peut dire que les juifs n’ont été amenés au dogme de l’immortalité que par la nécessité d’un tel dogme pour donner un sens au martyre. Au deuxième livre des Macchabées, les sept jeunes martyrs et leur mère sont forts de la pensée qu’ils ressusciteront, tandis qu’Antiochus ne ressuscitera pas[32]. C’est à propos de ces héros légendaires qu’on trouve dans la littérature juive les premières affirmations nettes d’une vie éternelle[33], et en particulier cette belle formule : « Ceux qui meurent pour Dieu vivent au point de vue de Dieu[34]. » On voit même poindre une certaine tendance à créer pour eux un sort spécial d’outre-tombe et à les ranger près du trône de Dieu « dès à présent », sans attendre la résurrection[35]. Tacite fait de son côté la remarque que les juifs n’attribuent l’immortalité qu’aux âmes de ceux qui sont morts dans les combats ou dans les supplices[36].

Le règne de Christ avec ses martyrs aura lieu sur la terre, à Jérusalem, sans doute, au milieu des nations non converties, mais tenues en respect autour des saints. Il ne durera que mille ans[37]. Après ces mille ans, il y aura un nouveau règne de Satan, où les nations barbares, que l’Église n’aura pas converties, se feront des guerres horribles et seront sur le point d’écraser l’Église elle-même. Dieu les exterminera, et alors viendront « la seconde résurrection », celle-ci générale, et le jugement définitif, qui sera suivi de la fin de l’univers. C’est la doctrine qu’on a désignée du nom de « millénarisme », doctrine fort répandue dans les trois premiers siècles[38], qui n’a jamais pu devenir dominante dans l’Église, mais qui a reparu sans cesse aux diverses époques de son histoire, et s’appuie sur des textes bien plus anciens et bien plus formels que tant d’autres dogmes universellement acceptés. Elle fut le résultat d’une exégèse matérialiste, dominée par le besoin de trouver vraies à la fois les phrases où le royaume de Dieu était présenté comme devant durer « dans les siècles des siècles », et celles où, pour exprimer la longueur indéfinie du règne messianique, il était dit qu’il durerait « mille ans ». Selon la règle des interprètes qu’on appelle harmonistes, on mit lourdement bout à bout les données qu’on ne pouvait faire bien coïncider. On fut guidé dans le choix du chiffre mille par une combinaison de passages de psaumes, d’où il semble résulter « qu’un jour de Dieu vaut mille ans[39] ». Chez les juifs se retrouve aussi la pensée que le règne du Messie sera non pas l’éternité bienheureuse, mais une ère de félicité durant les siècles qui précéderont la fin du monde. Plusieurs rabbins portent, comme l’auteur de l’Apocalypse, la durée de ce règne à mille ans[40]. L’auteur de l’épître attribuée à Barnabé[41] prétend que, de même que la création a eu lieu en six jours, de même l’accomplissement des destinées du monde se fera en six mille ans (un jour pour Dieu équivalant à mille ans), et qu’ensuite, de même que Dieu se reposa le septième jour, de même aussi, « quand viendra son fils et qu’il abolira le temps de l’iniquité, et qu’il jugera les impies, et qu’il changera le soleil et la lune et tous les astres, il se reposera encore le septième jour ». Ce qui équivaut à dire : il régnera mille ans, le règne du Messie étant toujours comparé au sabbat qui termine par le repos les agitations successives d’un développement de l’univers[42]. L’idée de l’éternité de la vie individuelle est si peu familière aux Juifs, que l’ère des rémunérations futures est selon eux renfermée en un chiffre d’années considérable sans doute, mais toujours fini.

La physionomie persane de ces rêves se laisse apercevoir tout d’abord[43]. Le millénarisme et, si l’on peut s’exprimer ainsi, l’apocalyptisme ont fleuri dans l’Iran depuis une époque fort ancienne[44]. Au fond des idées zoroastriennes est une tendance à chiffrer les âges du monde, à compter les périodes de la vie universelle par hazars, c’est-à-dire par milliers d’années, à imaginer un règne sauveur, qui sera le couronnement final des épreuves de l’humanité[45]. Ces idées, se combinant avec les affirmations d’avenir qui remplissent les anciens prophètes hébreux, devinrent l’âme de la théologie juive dans les siècles qui précédèrent notre ère. Les apocalypses surtout en furent pénétrées ; les révélations attribuées à Daniel, à Hénoch, à Moïse sont presque des livres persans par le tour, par la doctrine, par les images. Est-ce à dire que les auteurs de ces livres bizarres eussent lu les écritures zendes, telles qu’elles existaient de leur temps ? En aucune façon. Ces emprunts étaient indirects ; ils venaient de ce que l’imagination juive s’était teinte aux couleurs de l’Iran. Il en fut de même pour l’Apocalypse de Jean. L’auteur de cette apocalypse, pas plus qu’aucun autre chrétien, n’eut de rapports directs avec la Perse ; les données exotiques qu’il transportait dans son livre étaient déjà incorporées avec les midraschim traditionnels[46] ; notre Voyant les prenait de l’atmosphère où il vivait. Le fait est que, depuis Hoschédar et Hoschédar-mah, les deux prophètes qui précéderont Sosiosch, jusqu’aux plaies qui frapperont le monde à la veille des grands jours, jusqu’aux guerres des rois entre eux, qui seront les symptômes de la lutte suprême, tous les éléments de la mise en scène apocalyptique se retrouvent dans la théorie parsie des fins du monde[47]. Les sept cieux, les sept anges, les sept esprits de Dieu, qui reviennent sans cesse dans la vision de Patmos, nous transportent aussi en plein parsisme et même au delà. Le sens hiératique et apotélesmatique du nombre sept semble avoir, en effet, son origine dans la doctrine babylonienne des sept planètes réglant le destin des hommes et des empires. Des rapprochements plus frappants encore se remarquent dans le mystère des sept sceaux[48]. De même que, selon la mythologie assyrienne, chacune des sept tables du destin[49] était dédiée à l’une des planètes ; de même les sept sceaux ont des relations singulières avec les sept planètes, avec les jours de la semaine et avec les couleurs que la science babylonienne rattachait aux planètes. Le cheval blanc, en effet, semble répondre à la Lune, le cheval rouge à Mars, le cheval noir à Mercure[50], le cheval jaune[51] à Jupiter[52].

Les défauts d’un tel genre sont sensibles, et on essayerait vainement de se les dissimuler. Des couleurs dures et tranchées, une absence complète de tout sentiment plastique, l’harmonie sacrifiée au symbolisme, quelque chose de cru, de sec et d’inorganique, font de l’Apocalypse le parfait antipode du chef-d’œuvre grec, dont le type est la beauté vivante du corps de l’homme ou de la femme. Une sorte de matérialisme appesantit les conceptions les plus idéales de l’auteur. Il entasse l’or ; il a comme les Orientaux un goût immodéré des pierres précieuses. Sa Jérusalem céleste est gauche, puérile, impossible, en contradiction avec toutes les bonnes règles de l’architecture, qui sont celles de la raison. Il la fait brillante aux yeux, et il ne songe pas à la faire sculpter par un Phidias. Dieu, de même, est pour lui une « vision smaragdine », une sorte de gros diamant, éclatant de mille feux, sur un trône[53]. Certes, le Jupiter Olympien était un symbole bien supérieur à cela. L’erreur qui parfois a trop porté l’art chrétien vers la décoration riche trouve sa racine dans l’Apocalypse. Un sanctuaire des jésuites, en or et en lapis-lazuli, est plus beau que le Parthénon, dès qu’on admet cette idée, que l’emploi liturgique d’une matière précieuse honore Dieu.

Un trait plus fâcheux fut cette haine sombre du monde profane, qui est commune à notre auteur et à tous les faiseurs d’apocalypses, en particulier à l’auteur du livre d’Hénoch. Sa rudesse, ses jugements passionnés et injustes sur la société romaine nous choquent, et justifient jusqu’à un certain point ceux qui résumaient la doctrine nouvelle en odium humani generis[54]. Le pauvre vertueux est toujours un peu porté à regarder le monde qu’il ne connaît pas comme plus méchant que ce monde n’est en réalité. Les crimes des riches et des gens de cour lui apparaissent singulièrement grossis. Cette espèce de fureur vertueuse, que certains barbares, tels que les Vandales, devaient ressentir quatre cents ans plus tard contre la civilisation, les juifs de l’école prophétique et apocalyptique l’eurent au plus haut degré. On sent chez eux un reste de l’ancien esprit des nomades, dont l’idéal est la vie patriarcale, une aversion profonde pour les grandes villes envisagées comme des foyers de corruption, une jalousie ardente contre les puissants États, fondés sur un principe militaire dont ils n’étaient pas capables, ou qu’ils n’admettaient pas.

Voilà ce qui a fait de l’Apocalypse un livre à beaucoup d’égards dangereux. C’est le livre par excellence de l’orgueil juif. Selon l’auteur, la distinction des juifs et des païens durera jusque dans le royaume de Dieu. Pendant que les douze tribus mangent des fruits de l’arbre de vie, les gentils doivent se contenter d’une décoction médicinale de ses feuilles[55]. L’auteur regarde les gentils, même croyant à Jésus, même martyrs de Jésus, comme des enfants d’adoption, comme des étrangers introduits dans la famille d’Israël, comme des plébéiens admis par grâce à s’approcher d’une aristocratie[56]. Son Messie est essentiellement le messie juif ; Jésus est pour lui avant tout le fils de David[57], un produit de l’Église d’Israël, un membre de la famille sainte que Dieu a choisie ; c’est l’Église d’Israël qui opère l’œuvre salutaire par cet élu sorti de son sein[58]. Toute pratique susceptible d’établir un lien entre la race pure et les païens (manger les viandes ordinaires, pratiquer le mariage dans les conditions ordinaires) lui paraît une abomination. Les païens en bloc sont à ses yeux des misérables, souillés de tous les crimes, et qui ne peuvent être gouvernés que par la terreur. Le monde réel est le royaume des démons. Les disciples de Paul sont des disciples de Balaam et de Jézabel. Paul lui-même n’a pas de place parmi « les douze apôtres de l’Agneau », seule base de l’Église de Dieu ; et l’Église d’Éphèse, création de Paul, est louée « d’avoir mis à l’épreuve ceux qui se disent apôtres sans l’être, et d’avoir trouvé qu’ils ne sont que des menteurs ».

Tout cela est bien loin de l’Évangile de Jésus. L’auteur est trop passionné ; il voit tout comme à travers le voile d’une apoplexie sanguine, ou à la lueur d’un incendie. Ce qu’il y avait de plus lugubre à Paris, le 25 mai 1871, ce n’étaient pas les flammes ; c’était la couleur générale de la ville, quand on la voyait d’un point élevé : un ton jaune et faux, une sorte de pâleur mate. Telle est la lumière dont notre auteur colore sa vision. Rien ne ressemble moins au pur soleil de Galilée. On sent dès à présent que le genre apocalyptique, pas plus que le genre des épîtres, ne sera la forme littéraire qui convertira le monde. Ce sont ces petits recueils de sentences et de paraboles que dédaignent les traditionistes exacts, ce sont ces aide-mémoire où les moins instruits et les moins bien renseignés déposent pour leur usage personnel ce qu’ils savent des actes et des paroles de Jésus[59], qui sont destinés à être la lecture, le charme de l’avenir. Le simple cadre de la vie anecdotique de Jésus valait évidemment mieux pour enchanter le monde que le pénible entassement de symboles des apocalypses et les touchantes exhortations des lettres d’apôtres. Tant il est vrai que Jésus, Jésus seul, eut, dans l’œuvre mystérieuse de la croissance chrétienne, toujours la grande, la triomphante, la décisive part. Chaque livre, chaque institution chrétienne vaut en proportion de ce qu’elle contient de Jésus. Les Évangiles synoptiques, où Jésus est tout, et dont on peut dire en un sens qu’il est le véritable auteur, seront par excellence le livre chrétien, le livre éternel[60].

L’Apocalypse, cependant, occupe dans le canon sacré une place à beaucoup d’égards légitime. Livre de menaces et de terreur, l’Apocalypse donna un corps à la sombre antithèse que la conscience chrétienne, mue par une profonde esthétique, voulut opposer à Jésus. Si l’Évangile est le livre de Jésus, l’Apocalypse est le livre de Néron. Grâce à l’Apocalypse, Néron a pour le christianisme l’importance d’un second fondateur. Sa face odieuse a été inséparable de celle de Jésus. Grandissant de siècle en siècle, le monstre sorti du cauchemar de l’an 64 est devenu l’épouvantail de la conscience chrétienne, le géant sombre du soir du monde[61]. Un in-folio de 550 pages a été composé sur sa naissance et son éducation, sur ses vices, ses richesses, ses écrins, ses parfums, ses femmes, sa doctrine, ses miracles et ses festins.

L’Antechrist a cessé de nous effrayer, et le livre de Malvenda[62] n’a plus beaucoup de lecteurs. Nous savons que la fin du monde n’est pas aussi proche que le croyaient les illuminés du premier siècle, et que cette fin ne sera pas une catastrophe subite. Elle aura lieu par le froid, dans des milliers de siècles, quand notre système ne réparera plus suffisamment ses pertes, et que la Terre aura usé le trésor de vieux soleil emmagasiné comme une provision de route dans ses profondeurs. Avant cet épuisement du capital planétaire, l’humanité aura-t-elle atteint la science parfaite, qui n’est pas autre chose que le pouvoir de maîtriser les forces du monde, ou bien la terre, expérience manquée entre tant de millions d’autres, se glacera-t-elle avant que le problème qui tuera la mort ait été résolu ? Nous l’ignorons. Mais, avec le Voyant de Patmos, au delà des alternatives changeantes, nous découvrons l’idéal, et nous affirmons que l’idéal sera réalisé un jour. À travers les nuages d’un univers à l’état d’embryon, nous apercevons les lois du progrès de la vie, la conscience de l’être s’agrandissant sans cesse, et la possibilité d’un état où tous seront dans un être définitif (Dieu) ce que les innombrables bourgeons de l’arbre sont dans l’arbre, ce que les myriades de cellules de l’être vivant sont dans l’être vivant, — d’un état, dis-je, où la vie du tout sera complète, et où les individus qui auront été revivront en la vie de Dieu, verront, jouiront en lui, chanteront en lui un éternel Alleluia. Quelle que soit la forme sous laquelle chacun de nous conçoit cet avènement futur de l’absolu, l’Apocalypse ne peut manquer de nous plaire. Elle exprime symboliquement cette pensée fondamentale que Dieu est, mais surtout qu’il sera. Le trait y est lourd, le contour mesquin ; c’est le crayon grossier d’un enfant traçant avec un outil qu’il ne sait point manier le dessin d’une ville qu’il n’a point vue. Sa naïve peinture de la cité de Dieu, grand joujou d’or et de perles, n’en reste pas moins un élément de nos songes. Paul a mieux dit sans doute, quand il résume le but final de l’univers en ces mots : « Pour que Dieu soit tout en tous[63]. » Mais longtemps encore l’humanité aura besoin d’un Dieu qui demeure avec elle[64], compatisse à ses épreuves, lui tienne compte de ses luttes, « essuie toute larme de ses yeux ».

  1. Précaution contre certaines sectes qui, comme les esséniens, exagéraient le culte des anges. Col., ii, 18.
  2. C’est-à-dire ne tiens pas inédits. Cf. Daniel, xii, 4.
  3. Daniel, xii, 10.
  4. Isaïe, xl, 10.
  5. Isaïe, xi, 1.
  6. L’esprit prophétique répandu dans l’Église.
  7. L’Église.
  8. Deutéron., iv, 2.
  9. Matthieu, xxiv.
  10. Dion Chrysostome, orat. xxi, 10.
  11. Irénée, Adv. hær., V, xxx, 1.
  12. Carm. sib., IV, 117 et suiv., 137-139.
  13. Comp., par exemple, IV Esdr., iv, 35 et suiv., à Apoc., vi, 9 et suiv. ; IV Esdras, vii, 32, à Apoc., xx, 13 ; IV Esdr., x, 50 et suiv., à Apoc., xxi, 2 et suiv. Voir aussi IV Esdras, xv, 5.
  14. Asc. d’Isaïe, iv, 2 et suiv.
  15. Carm. sib., V, 28 et suiv., 93 et suiv., 105 et suiv., 142 et suiv., 363 ; VIII, 151 et suiv., 169 et suiv. Voir ci-dessus, p. 318, note 3. Cf. Carm. sib., III, 397.
  16. Inscr., acrost. xli et xlii, v. 36 et suiv. ; Carmen, v. 816 et suiv., 831, 845, 862, 878, 903 et suiv. (Pitra, Spic. Sol., I ; voir les corrections d’Ebert dans les Abhandl. der phil.-hist. Classe der sächsischen Gesell. der Wiss., t. V, p. 395 et suiv.).
  17. Vers 907 et suiv.
  18. Bibl. max. Patr., Paris, t. I, p. 580-581.
  19. Irénée, Adv. hær., V, xxx, 3. C’est ici la plus forte objection contre les rapports d’Irénée avec ceux qui avaient vu l’apôtre Jean. Commodien, dans ses Instructiones, appelle aussi l’Antechrist Latinus. — Hippolyte, De Antichristo, 50, 52, est bien dévoyé.
  20. Voir Vie de Jésus, 13e édition, p. 297, note 3 ; ci-dessus, p. 374-375, note 3. Déjà Denys d’Alexandrie, au IIIe siècle, sans doute par suite de son éducation littéraire, parle de l’Apocalypse d’un ton très-embarrassé, et avoue qu’il n’y comprend rien. Voir surtout Épiph., De hær., li, 32 et suiv. ; Eus., H. E., VII, xxv. Saint Jean Chrysostome n’a pas d’homélies sur l’Apocalypse.
  21. Les Syriens et les Arméniens ne l’avaient pas anciennement.
  22. Victorin de Pettau, dans la Bibl. max. Patrum, Lugd., III, p. 418 ; Lactance, Instit., VII, 14-20 ; De mort, persec., 2 ; Sulpice Sévère, Hist. sacra, II, 28, 29 ; Dial., II, 14. Dans ces écrits, la théorie primitive de l’Antechrist est modifiée de la même manière que dans le Carmen de Commodien. Comparez saint Augustin, De civ. Dei, XX, c. 19 ; saint Jérôme, in Dan., xi, 36 ; in Is., xvii, 12 ; Jean Chrysostome, in II Thess., ii (Opp., XI, p. 529-530). Qu’on lise le livre VI, De vitiis Antichristi, du traité de Malvenda, De Antichristo ; c’est encore un portrait de Néron.
  23. L’édition du texte de saint Béat par Florez (Madrid, 1770) est presque introuvable. M. Didot a collationné les plus importants passages de ce commentaire sur l’exemplaire unique de l’édition de Florez, qui se trouve à Paris, en possession de M. l’abbé Nolte, et sur deux importants manuscrits, dont l’un lui appartient. Des apocalypses figurées manuscrites et xylographiques (Paris, 1870), p. 3, 16-17, 24-25, 76-77. Édit. de Florez, p. 438, 498.
  24. Et encore il ne se perd pas entièrement. V. Hist. litt. de la Fr., t. XXV, p. 258.
  25. Joël, ii, 1 et suiv.
  26. Joël, ii, 1.
  27. En particulier, l’épisode des martyrs sous l’autel (ch. vi, 9-11), lignes toutes divines, qui suffiront éternellement à la consolation de l’âme qui souffre pour sa foi ou sa vertu.
  28. Voir, par exemple, les cantiques des premiers chapitres de l’Évangile de Luc.
  29. באחרית הימים, Ézech., xxviii, 8.
  30. V. Gesenius, Thes., au mot אחרית, hebr. et chald. Les juifs du moyen âge appliquent aussi d’ordinaire cette expression aux temps messianiques. Cf. Bereschith rabba, ch. lxxxviii.
  31. I Cor., xv, 24 et suiv.
  32. II Macch., vii, 9, 11, 14, 23, 36. Comp. vi, 26.
  33. II Macch., vii, 36 ; Sagesse, ii-v, surtout iii, 4 et suiv. ; De rationis imperio, 9, 16, 18, 20.
  34. Οἱ διὰ τὸν θεὸν ἀποθανόντες ζῶσι τῷ θεῷ. De rat. imp., 16.
  35. Τῷ θείῷ νῦν παρεστήκασι θρόνῳ καὶ μακάριον αἰῶνα βιοῦσι. De rat. imp., 18.
  36. Tacite, Hist., V, 5.
  37. Cette manière de concevoir le règne messianique comme distinct de l’état qui suivra le jugement dernier, et comme antérieur à cet état, se retrouve dans l’Apocalypse d’Esdras, écrite vers l’an 97.
  38. Cérinthe, dans Eusèbe, H. E., III, 28 ; Papias, dans Eusèbe, H. E., III, 39 ; Justin, Dial. cum Tryphon., 80-81 ; Irénée (voir Eusèbe, III, 39) ; Tertullien, Contre Marcion, III, 24 ; Lactance, Instit., VII, 20.
  39. Ps. xc, 4, rapproché de Ps. lxxxiv, 11. Comp. épître de Barnabé, c. 15 ; II Petri, iii, 8 ; Justin, Dial. cum Tryph., 81 ; Irénée, Adv. hær., V, xxiii, 2.
  40. Pesikta rabbathi, sect. i ; Jalkut sur les Psaumes, no  806 ; Ammonius, dans Maï, Script. vet. nova coll., I, 2e partie, p. 207. Selon l’Apocalypse d’Esdras, vii, 26 et suiv., le règne du Messie sera de quatre cents ans.
  41. Epist. Barnabæ, 15.
  42. Commodien et saint Hippolyte fixent également la durée du monde à six mille ans.
  43. Des idées très-analogues se retrouvent chez les Étrusques et faisaient sans doute le fond des anciens livres sibyllins, si bien qu’une union toute naturelle s’établit entre le sibyllinisme italiote et l’apocalyptisme juif (Virg., Ecl., iv).
  44. Voir l’Ardaï Viraf-Nameh, sorte d’apocalypse, qui n’est pas, comme on l’avait cru, une imitation de l’Ascension d’Isaïe. Cf. Sitzungsberichte de l’Acad. de Munich, 1870, I, 3.
  45. Zeitschrift der d. m. G., 1867, p. 571 et suiv. ; Théopompe, dans le traité De Iside et Osir., 47.
  46. Zeitschrift, endroit précité, p. 552 et suiv.
  47. Traité De Iside et Osir., endroit cité ; Spiegel, Parsigrammatik, p. 194 ; Zeitschrift der d. m. G., vol. cité (1867), p. 573, 575-577.
  48. Voir aussi Apoc., i, 16 ; xii, 1.
  49. Nonnus, XLI, 340 et suiv. ; cf. XII, 31 et suiv. Cf. J. Brandis, Die Bedeutung der sieben Thore Thebens (Berlin, 1867), p. 267-268.
  50. La couleur de Mercure était le bleu foncé, facile à confondre avec le noir.
  51. Χλωρός désigne à la fois le jaune et le vert.
  52. Sur les diverses couleurs mises en rapport avec les planètes, voir Chwolsohn, Die Ssabier, III, p. 658, 671, 676, 677. Comp. le manuscrit supplément turc de la Biblioth. nat., no 242.
  53. Apoc., iv, 3.
  54. Tacite, Ann., XV, 44.
  55. Apoc., xxii, 2, εἰς θεραπείαν τῶν ἐθνῶν, trait ironique.
  56. Apoc., vii, 9 ; xiv, 3.
  57. Apoc., v, 5.
  58. Apoc., ii, 9 ; iii, 9 ; xi, 19 ; xiv, 1-3. Cf. xii et suiv. ; xxi, 12.
  59. Papias, dans Eusèbe, H. E., III, 39.
  60. La rédaction des Évangiles sera l’objet principal de notre tome V.
  61. Aujourd’hui encore, en arménien, le nom de l’Antechrist est Neren. Voir le grand dictionnaire de l’Académie arménienne de Saint-Lazare, au mot Neren.
  62. Th. Malvenda, De Antichristo libri XI (Rome, 1604, in-fol.).
  63. Ἵνα ᾖ ὁ θεὸς πάντα ἐν πᾶσιν. I Cor., xv, 28.
  64. Σκηνώσει μετ’ αὐτῶν. Apoc., xxi, 3.