L’Abîme (Rollinat)/L’Égoïsme

L’Abîme. PoésiesG. Charpentier et Cie, éditeurs. (p. 31-32).


L’ÉGOÏSME


« La mort nous ayant mis dans sa barque à couvercle
« Descendra notre oubli sur son fleuve sans fin ;
« En attendant, la vie atroce nous encercle
« Avec son gain, son rut et sa soif et sa faim.

« Il vaut mieux être dans que par-dessus la fosse !
« Le survivant pâtit du cœur et de la main !
« Heureux les libérés de leur service humain ! »
— Ainsi parle et conclut la société fausse.


Et cependant tout homme osant la vérité
Dirait que son remords est sa nécessité,
Qu’il lui faut le tourment des vices qui l’infestent.

Qu’il adhère à son mal, se noue à son ennui,
Et qu’il est bien cent fois trop enterré dans lui
Pour envier les morts et plaindre ceux qui restent.