Texte établi par Alphonse Constantau bureau de la direction de La Vérité (p. 64-66).

XI

La Liberté


Le despotisme a été l’émancipation violente de l’aristocratie. La force brutale, lorsqu’elle veut se faire libre, asservit nécessairement les faibles, et le tyran est celui qui s’affranchit des devoirs d’homme pour donner à ses passions un essor effréné. La fausse liberté est donc sœur de la tyrannie, et la licence veut nécessairement des esclaves parce qu’il lui faut des victimes.

Or, tant que les passions brutales se disputeront le droit à la licence, il n’y aura pas de liberté possible sur la terre.

L’aristocratie, c’est à dire l’égoïsme de la domination, n’est pas seulement le partage des grands ; elle ronge aussi les entrailles du peuple et se trahit par des cris de rage et d’envie ! Oui, voilà, le grand malheur des classes souffrantes : c’est que le pauvre méprise le pauvre et se fait le servile admirateur du riche qu’il déteste et qu’il envie !

Et de quel droit, misérables envieux, voulez-vous dépouiller le riche, vous qui, à sa place, seriez plus durs et plus insolents que lui ?

Il a gagné ses richesses par la fraude, je le veux, héritier des voleurs, il est lui-même sans conscience : cela peut être. Mais vous, de quel droit voulez-vous le supplanter par la force ?

Est-ce que le brigand qui égorge est préférable au fripon qui fraude ?

Frères qui voulez la communauté entre les hommes, vous voulez ce que le Christ lui-même a voulu.

Mais sachez que la communauté du Christ doit avoir pour fondement le triomphe de la justice et non la réaction des passions brutales.

Avant de songer à combattre pour la liberté, méritez le nom d’hommes libres !

Soyez un peuple si vous voulez avoir des droits à la souveraineté du peuple.

Soyez un peuple, et vous verrez s’il y aura des tyrans qui puissent tenir devant vous ! Quand un peuple vraiment peuple est debout pour sa liberté, aucun pouvoir humain ne lui résiste. — Cette grande et belle parole a été attribuée au chef actuel du gouvernement français.

Si elle était de lui elle suffirait pour répondre, au nom de ce roi, à toutes les injures des partis.

De quoi vous plaignez-vous puisque vous obéissez ? Comme on connaît les hommes on les gouverne. Vous n’êtes pas un peuple, vous êtes des écoliers, et le maître a raison s’il vous châtie.

En vérité, je vous le dis encore, vous ne serez libres qu’autant que vous saurez aimer ; et comment le saurez-vous si vous ne voulez rien apprendre de la femme ?