Éditions Édouard Garand (60p. 3-9).




I

OÙ MAÎTRE JEAN FAIT SES VISITES DU MATIN.


— Bonjour et salut, Maître Jean !

C’était une voix d’adolescent — voix claironnante, fière et audacieuse déjà — qui faisait retentir cette matinale salutation.

— Hé ! bonjour, Louison ! Tu vas à la classe ?

— Oui, Maître Jean. Je serai en retard de trois minutes au moins, et c’est pourquoi je me hâte.

— Vraiment, tu seras en retard ? et pourquoi ?

— Voyez-vous, reprit la petite voix de l’adolescent, avec une certaine importance qui aurait pu faire sourire de dédain un personnage moins indulgent que cet interlocuteur de l’enfant… oui, voyez-vous, Maître Jean, avant de quitter la maison je n’étais pas trop sûr de ma leçon d’Histoire, et j’ai voulu la repasser.

— Ah ! ah ! fit paternellement l’autre personnage avec un bon sourire.

— À présent, continua l’enfant, je suis sûr de ma leçon, et je saurai bien la rapporter à mon maître de classe sans en échapper une virgule.

Et il y avait un certain orgueil satisfait dans cette réponse de l’adolescent. C’était un jeune gars canadien, orphelin de père et de mère… ou plutôt on lui connaissait aucun parent, et un profond mystère entourait sa naissance. Il avait tout au plus quinze ans. Il était de belle taille déjà, une taille mince et droite que serrait presque élégamment une petite soutanelle noire. Sous son bras gauche et contre son flanc souple il tenait serrés précieusement des livres qu’une cotonnade grisâtre enveloppait. Et sur ce paquet souvent son regard s’abaissait avec une sorte de tendresse ravie ; de son œil bleu sombre jaillissaient, à ces moments, des rayonnements de plaisir, des effluves de joie mystérieuse. Il devait les aimer gros ces livres, et il les aimait, à la vérité, profondément, puisqu’ils constituaient le bonheur de sa jeunesse. On pouvait voir que les connaissances qu’il y puisait l’enivraient et lui ouvraient dans la vie terrestre des horizons nouveaux et larges dont sa jeune intelligence demeurait tout éblouie. Sa physionomie ouverte étincelait, et sous la couche d’une certaine timidité on pouvait voir naître l’énergie, l’audace et la hardiesse. Malgré ce point d’orgueil naïf qui déjà tourmentait son cerveau et son cœur à mesure qu’il grandissait en science, le collégien demeurait modeste et courtois, et l’on pouvait le constater à la déférence et l’admiration qu’il manifestait à l’égard de l’autre personnage.

Celui-ci était un vieillard, de taille moyenne. Ses longs cheveux blancs pouvaient indiquer son âge sans qu’il fût besoin de le lui demander. Mais lui n’avait nulle honte à le dire : il portait aisément ses soixante-dix ans. Il les portait si aisément qu’on ne les lui aurait pas donnés. Son visage, sans rides encore, était replet et légèrement rosé aux joues. L’œil était clair et vif, un œil bleu pâle au fond duquel on lisait la bonté et l’honnêteté. Son regard était, comme ses lèvres, souriant, hormis, de temps à autre, une ombre d’amertume qui s’y glissait furtivement. À tout prendre, ce personnage âgé de soixante-dix ans était tout au plus un jeune vieillard. Il possédait en outre la souplesse et la vigueur de ses anciens quarante ans. Sa voix conservait tout le timbre clair et sonore de la jeunesse.

Lorsque ce personnage passait par les rues de Québec, il était salué tout aussi bas que l’était le gouverneur du pays, M. de Frontenac. C’est qu’il avait un air distingué et affable qui invitait le respect. Sans avoir la mise d’un grand gentilhomme, il était vêtu avec beaucoup de soin et portait des étoffes de la meilleure valeur. Sous un grand manteau de velours noir il portait une longue houppelande brune ; une culotte de soie noire, des bas violets et des souliers noirs à boucles d’argent terminaient son vêtement. Un chapeau de feutre de forme ronde sans ornement coiffait sa tête. Hors de son logis, il tenait toujours dans sa main une longue canne à pomme d’or sur laquelle il s’appuyait de temps en temps pour marcher.

La finesse de ses traits, le sourire doux et un peu mélancolique de ses lèvres, la suavité de sa voix lui donnaient un peu l’air monastique. Chose certaine, on pouvait le prendre ou pour un bourgeois à l’aise ou un personnage de la petite noblesse.

Bourgeois à l’aise ?… Oui… c’était un ancien boulanger qui avait pour nom Jean Colonnier, mais qu’on n’appelait plus depuis de longues années que Maître Jean tout court.

Il poursuivit l’entretien commencé avec l’écolier.

— Et dis-moi, mon ami, interrogea-t-il, quelle est ta leçon d’Histoire pour ce matin ?

— Le passage du Rubicon par César ! répondit sur un ton sûr et fier le collégien.

— Ah ! ah ! fit distraitement le vieillard en frappant légèrement le pavé de la rue de sa canne à pomme d’or. Et ce Rubicon, fit-il, aussitôt, ton César l’a-t-il passé ?

— Oh ! oui, Maître Jean, et avec un seul nautonier ! s’écria vivement l’écolier.

— Avec un seul nautonier !… fit admirativement le vieillard. Vertubleu ! ce César était donc un grand homme ?

— Ah ! oui, Maître Jean, un grand grand homme… Mais, ajouta-t-il aussitôt avec un bel accent de fierté, pas aussi grand que notre grand Roi !

Le vieillard esquissa un large sourire.

— Bon ! bon ! dit-il en tapotant la joue blême de l’adolescent, voilà bien une belle et bonne parole à l’adresse de ton souverain, mon Louison, et cela me prouve que tu as de la fierté de sang et de race. Eh bien ! va, je ne veux pas te retenir plus longtemps et encore moins encourir les reproches de tes maîtres ; car cette fois tu seras bien, et par ma faute, six minutes en retard. Va, Louison, et continue de bien apprendre l’histoire des grands hommes, puisque dans la vie de ces grands hommes il est pour le jeune homme plus d’une grande et bonne leçon à apprendre.

L’écolier salua le vieillard en enlevant son petit chapeau et d’un pas léger et hâtif poursuivit son chemin vers le Collège des Jésuites.

Durant une minute le vieillard le regarda aller d’un œil paterne et rêveur, puis il reprit tranquillement sa marche. Il se trouvait aux abords de la porte de la Basse-Ville où du peuple, rassemblé par groupes, s’entretenait avec animation et en gesticulant. Depuis le matin une lugubre histoire courait toute la ville. On disait que, le soir précédent, un malandrin avait violenté une jeune fille, une enfant de pas plus de dix ans, et qu’il avait tenté ensuite de rançonner les parents. Mais le guet, prévenu à temps, avais mis la main au collet de l’individu. Traîné devant le gouverneur, l’intendant et le procureur-royal le malandrin avait été séance tenante condamné à mourir la hart au col à la potence qu’on voyait dressée au pied de la rue Sault-au-Matelot.

Maître Jean entendit bien parler du malandrin et de sa condamnation à mort, mais il n’y prit nullement garde. Il pensait à d’autres choses probablement. Il entendit cependant des hommes et des femmes le saluer respectueusement :

— Bien le bonjour, Maître Jean !

— Merci, mes amis, répondait le vieillard avec son bon sourire. Que Dieu vous garde ainsi que notre roi et notre gouverneur !

Et il continua son chemin dans la rue du Palais.

Parmi les groupes de peuple on s’était tu à l’approche du vieillard ; mais dès qu’il se fut éloigné, les conversations et commentaires sur l’événement du jour recommencèrent de plus belle. C’était, en effet, un événement dans la ville que cette affaire de malandrin accusé de tentative de viol. Les affaires de ce genre étaient très rares : on n’en avait connu que deux encore. Et il était très rare aussi qu’il fût donné au peuple d’assister à une exécution justicière. On s’en donnait donc du meilleur gré, et c’était un vrai plaisir de parler de l’affaire… et d’une affaire dont on ignorait tous les détails. Qu’importe ! on savait une chose certaine : ce jour-là, quand viendrait la brune, un malandrin quelconque, un inconnu, un violateur allait être exécuté aux « Fourches patibulaires » … cela suffisait. Seulement, on avait hâte au soir. Le spectacle était si rare qu’on ne le manquerait pas, et à mesure que grandissait le jour l’impatience croissait.

Mais suivons Maître Jean.

Après avoir descendu la rue du Palais, il s’était engagé dans une rue sombre, étroite et tortueuse en laquelle prenaient leurs ébats des enfants en bas âge… on pouvait même voir des marmots qui, incapables de se tenir sur leurs petites jambes, se traînaient sur les mains et les genoux. Tout ce petit monde, naturellement, à la vue du promeneur solitaire, prenait la poudre d’escampette. Les femmes dans la rue ou sur le pas des portes, saluaient poliment le passant.

— Bien le bonjour, Maître Jean !

— À vous pareillement, bonnes amies !

Et le vieillard, toujours souriant, poursuivait sa route. Or ces femmes étaient en train, elles aussi, de commenter la « grosse affaire ». Et Maître Jean, tout en marchant, put saisir des lambeaux de conversation. L’une des femmes qui l’avait salué disait à une voisine, plus haut qu’il n’était peut-être nécessaire :

— Ce sera encore une bonne besogne pour Mathurin le Bourreau !

— Ah ! oui, Mathurin le Bourreau… faisait l’autre. Le pauvre homme !… il doit joliment languir dans son trou, car voilà bien quatre mois qu’il n’a pas tissé de corde !

Maître Jean sourit en entendant ces paroles et il continua de marcher.

Il traversa la rue Sault-au-Matelot. Là, à sa gauche, il aperçut la lugubre silhouette de l’instrument de supplice. Là, près ou autour de cet instrument, personne, naturellement. Une crainte superstitieuse éloignait de cet endroit sinistre les honnêtes gens et les bons citoyens.

Le gibet se dressait dans un endroit désert et non loin des premières jetées du fleuve Saint-Laurent. Si ce gibet n’avait pas l’imposante physionomie des potences du roi Louis X le Querelleur, il n’en avait pas moins un aspect farouche. Ce n’était pas non plus une énorme maçonnerie décorée de chaînes et de poulies comme le célèbre Montfaucon, non… c’était plus simple. C’étaient : quatre poteaux enfoncés dans le sol, sur le sommet desquels reposaient deux poutres transversales, lesquelles soutenaient à leur tour quatre autres poutres longitudinales. C’est autour des poutres longitudinales qu’on passait la corde. On pouvait en voir plusieurs bouts qui pendaient encore… ils pendaient, noirâtres, effiloqués, et balancés par le vent ; ce n’étaient plus, à vrai dire, que des bouts de corde pourrie. Sous les poutres et entre les quatre poteaux, qui formaient un carré, on avait élevé une plateforme d’environ quatre pieds de hauteur, et à cette plateforme l’on montait par un escalier de six marches. Comme on le voit, cet instrument de mort « légale » n’était pas très compliqué et n’offrait pas une apparence bien « mortelle ». Ce qui rendait la vue de ces « bois justiciers » plus farouche et repoussante, c’était pour la raison que le nouveau gouverneur de la Nouvelle-France, M. de Frontenac, et dès son arrivée au pays, les avait fait peinturer de rouge, alors qu’auparavant ils étaient peinturés en noir. Or ce rouge — un rouge sang — impressionnait malement les citadins et, surtout, ceux qui se sentaient fautifs. Si par hasard la nécessité obligeait de passer dans l’ombre de ce gibet, on évitait avec grand soin de le regarder. Et alors aussi l’on pressait le pas et l’on sentait sur sa chair courir le petit frisson froid de l’horreur. Beaucoup de gens, en ces circonstances, fermaient les yeux et se signaient…

Maître Jean, lui, n’accéléra pas le moindrement sa marche paisible, il ne ferma pas les yeux et ne se signa point non plus. Il regarda le gibet, ou, plus justement, il lui jeta un long regard… Et comme si ce regard eût vu pendre une forme humaine au bout de l’un de ces câbles que faisait ballotter la brise du Saint-Laurent, ses yeux bons et doux s’emplirent d’une ombre de pitié.

Ayant franchi la rue Sault-au-Matelot et contourné l’angle d’une ruelle où se balançait l’enseigne d’un cabaretier, Maître Jean s’engagea dans cette ruelle. La ruelle était si étroite qu’elle en était très obscure. La solitude y régnait : là, nul enfant, nulle femme… personne. Hormis quelque rare charrette qui passait en cahotant, on eût pensé que cette ruelle était tout à fait inhabitée. Elle était bordée de chaque côté de masures à l’air le plus piteux du monde, et pas une boutique, hormis celle d’un savetier, et pas une taverne. C’était une rue des pauvres…

Maître Jean marchait toujours de son même pas égal et suivait le milieu de la chaussée qui, çà et là, était coupée par un ruisseau encombré de toutes espèces de déchets. Souvent il montait à l’odorat de Maître Jean des odeurs peu odorantes ; mais il paraissait n’en faire nul cas ; seulement, il avait soin de ne pas poser ses souliers dans les flaques de boue grise qui très souvent se posaient sur son passage.

Un peu plus loin, le vieillard obliqua brusquement sur sa droite et s’enfonça, sans hésiter une seconde, dans une sorte d’impasse sombre et malpropre au fond de laquelle reposait le plus paisiblement du monde une bicoque à l’air sordide et lugubre.

Ce qui lui donnait cet air funèbre, c’était la couleur dont on l’avait revêtue : ses planches étaient rouges, du même rouge sang que le gibet de la rue Sault-au-Matelot. La bicoque possédait, pour en éclairer l’intérieur, au jour, deux petites fenêtres que fermaient des volets peints en noir… un noir de mort ! La porte, unique, portait la couleur du jaune safran, et, pour paraître luxueuse sans doute, elle s’agrémentait d’un bel œil-de-bœuf solidement grillagé. Au surplus, cette porte offrait un caractère bourgeois : ses panneaux — quatre en tout — étaient bellement sculptés de figures… mais de figures terribles : ici une roue sur laquelle un malheureux se trouvait attaché… là, une potence à laquelle pendait lamentablement un malandrin. Porte curieuse et macabre à la fois, laquelle, de nos jours, vaudrait un million pour compléter la collection d’un de nos musées. Et il y avait encore bien d’autres figures ou images que le temps avait fini par user. Chose plus curieuse que la porte elle-même, celle-ci n’attirait aucunement la curiosité… plus que cela, l’impasse repoussait et jamais, ou, du moins, très rarement, voyait-on un homme assez hardi pour s’y aventurer.

Pourtant, Maître Jean ne parut pas éprouver de répugnance ou d’effroi à y conduire ses pas. Il entra là comme chez lui. Mais si des gens du voisinage l’eussent vu, par hasard, pénétrer dans cette impasse, ils se seraient signés de suite avec effroi et n’auraient pas manqué de se demander non sans le plus bel étonnement :

— Par tous les saints du Paradis ! que va faire Maître Jean chez Mathurin le Bourreau ?

C’est là, en effet, que vivait, seul et solitaire comme un lépreux antique, l’exécuteur des hautes œuvres royales… celui qu’on appelait Mathurin le Bourreau.

Un moment, Maître Jean considéra la bicoque, les panneaux si bizarrement sculptés et les volets noirs. Quoique les volets fussent fermés, il y avait un signe évident que le maître de céans était debout, car la cheminée fumait doucement. Mais nul bruit au dedans. Qu’importe ! Le visiteur frappa la porte de la pomme d’or de sa canne.

Un grognement indistinct partit aussitôt de l’intérieur, et ce fut tout : nulle main hospitalière et bienveillante ne vint ouvrir l’huis verrouillé.

— Eh bien ! eh bien ! Mathurin… cria le vieillard d’un accent jovial, redoutes-tu les voleurs et les meurtriers ? Voyons, ouvre ta porte et reconnais Maître Jean !

Ces paroles firent naître dans la baraque un nouveau grognement plus accentué, cependant, que le premier. Puis dans le silence de l’impasse et de la masure on put percevoir le bruit d’un pas lourd, le craquement d’un plancher et, enfin, un grincement de fer. L’œil-de-bœuf s’ouvrit. Une voix lourde et grossière demanda :

— Ah ! ça, vous, pourquoi venez vous me déranger, ce matin ?

Maître Jean put entrevoir dans l’œil-de-bœuf l’œil clignotant et morose d’un homme. Il se mit à rire placidement.

— Ben ! bon ! fit-il, on reconnaît enfin ses amis… Tout de même, il semble qu’on s’est levé ce matin le gros bout devant ?

— Mais non… mais non… Maître Jean, fit de l’autre côté de la porte la voix radoucie de l’homme. Et puis, après… vous ne savez donc pas la nouvelle. Maître Jean ?

— Au fait, sourit le vieillard, n’ai-je pas entendu parler de malandrin qu’on va prendre ce soir à la brune ?

— Justement. Alors, vous comprenez…

— Mais non, se récria Maître Jean, je ne comprends point.

— Ça, pardi, oui… vous comprenez…

— Pourquoi je te dérange ?

— Et aussi pourquoi je n’ouvre pas ma porte.

— Ah ! c’est juste… Ce matin, tu tisses ta corde ?

— Et, comme vous le savez, il n’y a que moi pour vous tisser une corde de pendu, et, naturellement, je tiens à garder mon secret.

— Tu te méfies donc de moi ?

— Non ! non !… mais, voyez-vous, le secret du métier !

— C’est bon, c’est bon, tisse ta corde, Mathurin, tisse-la solidement pour ne pas manquer ton coup !

— Soyez tranquille, Maître Jean. Mathurin le Bourreau ne manque jamais son coup !

Et l’homme derrière la porte se mit à grincer un rire ironique et méchant qui fit blêmir les joues rosées de l’ancien boulanger.

— Et alors, reprit ce dernier, tu connais ton homme ?

— Celui que je vais pendre ? Non. Mais tout à l’heure, une fois ma corde achevée, j’irai prendre la grosseur de son cou.

— Et tu dis que tu ne sais pas son nom ?

— Pas davantage.

— C’est bon, c’est bon, je te laisse, Mathurin. Je te souhaite chance. Salut bien et bonjour !

Le vieillard allait se retirer, quand l’autre l’interpella derrière son œil-de-bœuf :

— Vous savez, Maître Jean, sans rancune !

— Non, non, pas de rancune… tu me connais !

— Vous serez là, n’est-ce pas ? quand je hisserai le malfaiteur ?

— Ô mon Dieu ! voilà bien un spectacle qui n’a guère d’attrait pour moi.

— Oui, mais ça ne manque pas d’intérêt. Savez-vous comment on met la corde au col de l’homme ?

— Ma foi, non.

— Eh bien ! vous me verrez à l’œuvre… Vous verrez que je m’y connais, vous verrez. Je peux dire que c’est curieux et joli.

Le même grincement, le même rire résonna derrière la porte, et l’homme ferma brusquement son œil-de-bœuf.

Maître Jean haussa les épaules avec une sorte d’indulgence et quitta l’impasse.

Il poursuivit sa marche dans la ruelle, tourna plus loin sur une autre ruelle, mais plus large, plus claire et moins sale, et il s’arrêta peu après devant une petite maison, genre baraque encore, mais avec un aspect un tant soit peu coquet à cause du jardinet qui la précédait et où poussait une herbe verte et drue.

Là, encore Maître Jean frappa la porte de sa canne.

Une jeune femme, en jupon rouge et corsage de laine bleue, rougeaude et accorte, les lèvres souriantes sur des dents d’ivoire, vint ouvrir. À la vue du visiteur, elle s’écria avec l’accueil le plus invitant :

— Oh ! c’est Maître Jean !… Entrez, entrez, notre logis est le vôtre.

— Ah ! ah ! belle Chouette, fit le visiteur tout épanoui et riant, je te retrouve ce matin gaillarde et flamboyante… Et ton flandrin de mari ?…

— Il vient justement de sortir du peautre, Maître Jean, et il enfourne ses jambières pour se rendre à son poste.

— Décidément, ce flandrin de Pinchot porte bien son nom !

— Et voulez-vous savoir, Maître Jean, que voilà bien deux bonnes heures que je le tiraille par sa chemise pour le faire sortir du nid ?

Tout en parlant ainsi, la jeune femme riait de bon cœur et s’effaçait pour livrer passage au visiteur.

Comme ce dernier pénétrait dans la maison, qui n’avait qu’une seule et unique pièce, une voix enrouée et lourde encore de sommeil, partant d’un coin plus sombre, dit sur un ton enjoué :

— Ah ! bien, Maître Jean, voulez-vous ne pas trop faire le compliment à ma femme ?… vous me la gâterez !

— Mais non, mais non, répliqua vivement le vieillard. Une femme comme la tienne, Flandrin, ça ne se gâte point. Est-ce pas vrai, Chouette ?

Maître Jean, en même temps, pinça le menton rondelet et fosseté de la jeune femme.

Accoutumée à ces familiarités, la jeune femme se borna à rire candidement.

La maisonnette, nous l’avons dit, ne possédait qu’une seule pièce, et tout y était clair et propre. Le plus bel ordre régnait partout. À une extrémité et dans un coin on apercevait un haut lit à colonnades avec un sous-lit en forme de tiroir, et dans ce sous-lit un jeune enfant d’un peu plus d’un an continuait son paisible sommeil. Dans le coin opposé, on voyait un autre lit, mais plus petit, en forme de grabat, propret et blanc. C’est là que couchait le collégien que Maître Jean, en venant, avait tout à l’heure croisé près de la Porte de la Basse-Ville.

Au centre de la pièce un fourneau pétillait. Sur un côté, une haute et large cheminée se dressait ; mais ce matin-là la cheminée était sans feu, le fourneau à lui seul fournissait suffisamment de chaleur. Plus loin, un buffet ; ici, une huche en bois blanc que recouvrait une sorte de tapis de toile jaune ; là, une haute armoire… enfin, l’ameublement se terminait par des escabeaux, des bancs et deux bergères larges et profondes.

La jeune femme approcha l’une des bergères près du fourneau et dit, invitant le visiteur :

— Voilà pour vous, Maître Jean.

— Merci, belle et ravissante Chouette, tu es vraiment une fille excellente. Ah ! ce chanceux de Pinchot !…

— Et ajoutez bien, Maître Jean : chanceuse de Chouette, fit le maître de la maison en riant. Enfin, poursuivit-il, n’a-t-elle pas eu le choix heureux de mettre la main sur un garçon de mon tempérament ?

Et Pinchot riait plus fort, il riait d’un cœur large et généreux. Son rire était joyeusement accordé et soutenu par le rire de la jeune femme. Maître Jean, lui, comme à son habitude, se bornait à sourire.

Qui était ce Pinchot ?

Il venait d’une lointaine paroisse de la rive Sud du Saint-Laurent, par en-bas comme on disait, et il était issu d’une famille de paysans canadiens. À l’âge de treize ans, il avait déserté le toit paternel et les champs pour venir se réfugier à Québec, car Pinchot ne possédait aucun goût pour la culture du sol. D’un physique précoce et d’une stature avancée pour son âge — car on lui aurait alors donné dix-huit ans — il s’était jeté dans les rudes métiers. Quelque peu fainéant, par nature, il n’avait pas réussi. Apprenti maçon d’abord, il avait été bientôt renvoyé par son patron, parce que, sur le matin, Pinchot dormait un peu plus que de raison et venait toujours en retard sur le chantier. Là, la patronne l’avait surnommé Flandrin et le nom lui était resté. Quoiqu’il s’appelât en réalité Polydor de par son baptême, on ne l’avait plus appelé par la suite que Flandrin Pinchot. Après avoir été mis à la porte par le maçon, il avait pratiqué tous les métiers jusqu’à l’âge de 25 ans. Alors il avait réussi à obtenir une place de portier au Château Saint-Louis, sous le gouvernement de M. de Mésy. Le métier, quoique peu payant, était facile et bon. Là, Pinchot pouvait dormir tout son soûl, car ses heures de service commençaient à neuf heures du matin pour se terminer à cinq heures du soir. Plus tard, sous M. de Courcelle, il obtint le poste de garde-geôlier en second dans les salles basses du Château, là où l’on enfermait les malandrins, voleurs, escarpes, tire-laine, meurtriers, et tous ceux-là, bref, qui manquaient aux prescriptions de la loi ou contrevenaient aux édits, ordonnances et autres.

Ce poste avait plu particulièrement à Pinchot, parce que son titulaire était investi du droit de porter la rapière et le pistolet ; et Pinchot aimait les armes, bien que, à la vérité, il ne se sentit pas beaucoup d’attrait pour le métier militaire. Mais à quoi bon porter rapière et pistolet, si l’on ne sait se servir adroitement de ces armes ? C’est vrai. Seulement, voilà : il n’y avait que deux gardes-geôliers, et le premier, qui se donnait pompeusement le nom de « Capitaine », se trouvait être une sorte de batteur de fer, matamore, capitan, lequel, d’une remarquable habileté aux armes, avait enseigné à Pinchot l’art de manœuvrer. Et lui, Pinchot, qui ne manquait pas de talent, apprit cet art en peu de temps et bientôt il surpassait son maître. Au cours de la dernière année du gouvernement de M. de Courcelle, l’associé de Pinchot avait été trouvé, un matin et sur la place même du Château, baignant dans une mare de sang et trépassé. Bagarre ? Non. Car son crâne avait été nettement scalpé, ce qui permit de penser qu’il avait été la victime d’un traître sauvage… un sauvage qui, pour une raison inconnue, avait exercé contre le matamore une sournoise vengeance.

L’événement était banal. On fit enterrer sans façon le batteur de fer, et Pinchot hérita le poste de maître garde-geôlier. De même que son ancien camarade, il prit le titre de capitaine, titre auquel, bien entendu, il n’avait aucun droit. Assez souvent on l’appelait Capitaine Flandrin, et rien ne causait autant de plaisir à ce brave Pinchot. Alors, il se grandissait, redressait la tête et essayait à se donner une physionomie terrible ; mais il ne réussissait pas toujours cette mimique, parce qu’il possédait une figure trop bon-enfant, des yeux aux regards trop doux et des lèvres trop portées au rire et au sourire. Car Pinchot se trouva alors l’homme le plus heureux de la terre. Pourtant, il avait un regret : c’est que M. de Frontenac, qui l’avait maintenu à son poste, ne lui eût pas assuré ce capitainat sur bon et valable parchemin.

Pour terminer ce portrait, ajoutons qu’à l’âge de 36 ans, un an après être devenu maître-geôlier, c’est-à-dire durant la première année de l’administration de M. de Frontenac, Pinchot s’était marié. Il avait épousé une orpheline de vingt printemps qui, dès l’âge de dix ans, avait été adoptée par un cabaretier de la Basse-Ville. Et aujourd’hui, en cette année 1674, Pinchot se voyait père, ce dont il s’honorait grandement. Pourtant, Pinchot était père depuis pas moins de onze ans, mais père adoptif seulement, et père adoptif de ce jeune collégien, dont on ne savait pas l’âge précis, que Maître Jean avait ce matin-là croisé sur son chemin. Onze ans passés, une vieille femme, voisine de Pinchot, avait quitté la terre et laissé seul un garçonnet d’environ quatre ou cinq ans. Tout ce que savait Pinchot, c’est que cette vieille femme avait elle-même adopté l’enfant dont on ignorait les parents. Pinchot, qui était généreux, prit l’enfant sous sa protection… le petit Louison, comme on l’appelait. Pinchot lui donna son nom. Puis, moyennant quelques sols chaque semaine, il obtint les services d’une femme du voisinage pour tenir la maisonnette et veiller sur le petit. Plus de dix années après Pinchot épousait cette fille adoptive du cabaretier à laquelle on avait donné le surnom de Chouette, mais qui, de son vrai nom, s’appelait Jeanne-Marie Audelaire. De même que le surnom de Flandrin était resté à Pinchot, la jeune femme de ce dernier conserva celui de Chouette.

La jeune femme avait connu et aimé Louison deux années avant son mariage avec Flandrin Pinchot. Après son mariage, elle le traita avec autant de tendresse que s’il eût été son propre fils, et lui, Louison, apprit bientôt à aimer cette jeune femme comme il aurait aimé sa mère.

Maître Jean connaissait à peu près tous les antécédents de cette petite famille ; mais, tout comme les parents adoptifs de Louison, il ignorait de ce dernier complètement l’origine. D’où pouvait donc venir cet orphelin ? Pinchot, qui n’était pas très curieux, ne se l’était peut-être jamais demandé. Mais Maître Jean, lui, dès le premier jour où il avait vu Louison, s’était posé cette question. Puis, avec le temps qui passe, la question lui revenait sans cesse et avec toujours plus d’insistance. C’est que Maître Jean avait de suite trouvé une ressemblance à cet adolescent… une ressemblance qui lui avait rappelé de doux et cruels souvenirs à la fois. Louison, on s’en doute, n’avait nullement les traits de ses parents adoptifs. Il possédait des traits plus fins, plus délicats. Il avait en outre les cheveux d’un blond doux, tandis que Pinchot avait les cheveux noirs et rudes et que sa femme portait des cheveux d’un brun très fort. La différence était frappante entre Louison et le marmot né de Pinchot : le jeune enfant avait la crinière de son père, épaisse et noire. Au surplus, Louison était d’un tempérament tout à fait différent encore de celui de Pinchot et sa femme. Ceux-ci étaient plutôt loquaces, gais et rieurs. Louison était quelque peu taciturne, et souvent ses traits se recouvraient d’une douce mélancolie. Autre différence notable : Pinchot et sa femme, nés tous deux du peuple et sans instruction, possédaient des manières grossières, c’est-à-dire de ces manières de sans-façon et de laisser-aller ; tandis, au contraire, qu’on remarquait chez l’écolier, une dignité de maintien, une retenue dans le langage, et, en général, une certaine distinction de manières. Il est vrai que Louison allait au collège depuis près de quatre ans et qu’il y acquérait l’instruction et les manières. N’importe ! cet orphelin tracassait l’esprit de l’ancien boulanger, et celui-ci se promettait de tout faire pour déchiffrer l’énigme qui l’intriguait.

Pour en revenir à notre récit, Maître Jean arrivait donc, ce matin de mai 1674, dans une maison qui était comme la sienne. Comme nous avons vu, il y était reçu comme le meilleur des amis, sinon comme un bon vieux père qu’on aime et qu’on vénère.

Il avait accepté la bergère offerte, déposé son chapeau sur le plancher près de son siège et gardé sa canne à pomme d’or sur laquelle il tenait ses deux mains appuyées. Dans cette posture, il considérait avec un regard attendri cet intérieur qui lui paraissait le plus heureux du monde. Maître Jean voyait là l’image du parfait bonheur, même dans cet humble logis où la richesse et le superflu n’existaient point. Ce qui lui faisait penser qu’on peut vivre heureux sans posséder nécessairement des coffres bourrés d’écus d’or et d’argent. Là, un homme aimait sa femme et ses enfants ; là, une jeune femme chérissait son mari, ce qu’on ne voit plus guère dans nos sociétés modernes avec la femelle émancipée. Et Maître Jean, en contemplant ce tableau charmant et comme enluminé, se souvenait peut-être d’un passé où le même charme et le même bonheur avaient présidé à son existence. Hélas ! les infortunes et les malheurs étaient survenus… Oh ! comme il souhaitait, en son tréfonds, que ces deux braves cœurs qui l’accueillaient avec tant de respect et d’amitié fussent dans l’avenir exempts des orages et des tempêtes que lui avait traversés !

Tandis que Pinchot achevait de passer ses jambières de cuir noir, Maître Jean demeurait rêveur.

Enfin, Pinchot se dressa sur ses hautes jambes et dit à sa femme :

— Chouette, il faut servir à Maître Jean une tassée de vin. Moi, je me contenterai peut-être rien que d’une miche de pain. Je devrai manger sur le pouce, si je ne veux pas être en retard à mon poste au Château.

La jeune femme s’empressa d’obéir aux ordres du maître.

Pinchot s’étira, bailla sans cérémonie et alla s’asseoir près de Maître Jean, disant :

— J’aurais bien dormi une autre petite heure…

Maître Jean esquissa un sourire, mais garda le silence. La Chouette, près d’une table bien garnie plus loin, préparait du vin et un léger goûter.

Le vieillard qui la regardait faire, dit :

— Pour moi, Chouette, le vin me suffira… je dois avouer que je n’ai pas faim… pas la moindre faim.

— En ce cas, Maître Jean, voici votre vin…

La jeune femme apporta vivement une grande tasse de pierre remplie d’un beau vin rouge. Puis, elle retourna à la table pour revenir ensuite avec une autre tasse de vin et un morceau de fromage étendu sur une tranche de pain qu’elle servit à son mari. Maître Jean, toujours silencieux, se mit à déguster lentement son vin. Pinchot vida d’abord la moitié de sa tasse, puis se mit à manger son pain et son fromage à bouchées énormes.

Après un moment de silence, le vieillard reprit l’entretien. Il avait tout à coup perdu son sourire suave, ce qui était assez rare.

— Pinchot, mon ami, dit-il sourdement et d’une voix qu’on aurait dit émue, je désire te demander un éclaircissement… ou plutôt je voudrais que tu satisfasses autant que possible à ma curiosité.

Flandrin Pinchot avait levé un œil lourd et surpris sur le visage devenu grave de son visiteur, puis il avait interrompu son mâchonnement pour demeurer l’air interrogatif.

— Je n’ai pas l’habitude de faire le curieux, reprit Maître Jean en retrouvant une ombre de son sourire, et c’est pourquoi tu sauras me pardonner si, pour une fois, j’ai l’air d’être indiscret. Depuis longtemps, tu le sais et ta femme aussi, je m’intéresse à ton fils adoptif, et tu t’imagines bien encore que je l’aime comme s’il était de mon sang. Veux-tu me dire son histoire… ou plutôt son origine ?

La surprise de Pinchot parut se muer en une sorte d’hébétement comique.

— Son origine ? bafouilla-t-il, la bouche pleine encore, comme s’il n’eût pas très bien compris la pensée de son interlocuteur.

— Oui… où il est né ton Louison ? Quels étaient ses parents ?

Flandrin Pinchot demeura dans son hébétude, mais il mâchonna aussitôt avec ardeur tout en continuant de considérer Maître Jean avec « son air sans comprendre ».

Maître Jean amplifia son sourire et reprit :

— Je ne t’ai jamais posé la question, parce que, à t’entendre parler par ci par là, toi et, quelquefois aussi ta femme, j’ai deviné que tu ne savais pas grand’chose sur ce compte-là. Pourtant, tu dois avoir quelques indices… voyons !

Flandrin avala avec effort pain et fromage à demi mastiqués seulement et, avec un hoquet, répondit :

— Dame ! quels indices peut-on avoir, Chouette et moi. On n’en a qu’un : que Louison n’a pas de parents, vous le savez bien, et qu’on ne sait pas où il est né.

Alors Pinchot put lui faire la petite histoire de cette vieille voisine qui avait adopté l’enfant, avant que lui-même n’en prît charge.

— Il était peut-être l’enfant de cette femme… de cette voisine ?…

— Mais non, ne croyez pas, Maître Jean. Elle était beaucoup trop vieille… soixante-dix ans dans le moins… pour avoir un enfant de quatre ou cinq ans. Je ne sais qu’une chose, Maître Jean, c’est que ma voisine avait reçu cet enfant trois ans auparavant d’un inconnu qui lui avait remis une somme d’argent suffisante pour élever l’enfant durant quelques années.

— Tu ne sais pas autre chose ?

— Non, Maître Jean. Je vous l’ai dit, c’est tout ce que je sais sur le compte de Louison.

Le vieillard garda le silence et parut réfléchir.

Pinchot acheva son fromage et sa tasse de vin et se leva brusquement en déclarant :

— Bon ! voici l’heure d’aller au poste.

Il regardait une pendule accrochée au mur.

— Veux-tu une autre tasse de vin ? interrogea la Chouette.

— Non, Chouette, j’en ai assez. Vous, Maître Jean, continua-t-il, vous allez m’excuser… la Chouette vous tiendra compagnie !

— Non ! non ! fit le vieillard avec vivacité, je ne veux pas faire passer le temps à ta femme. Je t’accompagne, Flandrin, tout en regagnant mon logis.

— C’est bon, venez.

Pinchot avait glissé une longue rapière à sa ceinture, enfoncé un large chapeau à plume sur sa tête, jeté une cape grise sur ses épaules, et déjà il gagnait la porte.

Maître Jean fit ses adieux à la jeune femme et marcha à son tour vers la porte. Mais là, Pinchot s’était subitement retourné pour s’écrier :

— Bon ! qu’allais-je oublier, sang-de-bœuf !

Il fit un bond vers sa femme, la saisit sous les bras, l’éleva jusqu’à lui, car il avait bien un bon pied et demi de taille de plus qu’elle, et il l’embrassa fortement sur les deux joues.

— Voyons, dit-il en même temps sur un ton bourru, sois bonne femme, Chouette, jusqu’à ce que je revienne !

Sur ce, il sortit précipitamment et s’en alla vers la haute-ville à grandes enjambées. Maître Jean, après l’avoir suivi durant quelques minutes, le laissa aller seul et s’arrêta à bout d’haleine.

— Quelles jambes il a ce Flandrin !… murmura-t-il.

Puis, ayant repris vent, Maître Jean continua sa route pour rentrer peu après en son logis au bout de la rue Saint-Louis.