L’Émigré/Lettre 118
LETTRE CXVIII.
au
Président de Longueil.
Votre lettre ne me laisse rien à dire,
mon cher Président, et un oui, que je
répéterai en face des autels avec une
sensible joie, sera toute ma réponse.
Le bonheur dont je me fais l’idée, pénètre
mon ame de la plus douce satisfaction ;
décidez, mon tendre ami,
du jour, du moment où je serai entièrement
à vous, où vous me tiendrez
lieu de tout, de parent, d’ami, de
patrie ; croyez que je serai fière de porter le nom de l’homme le plus
estimable que je connaisse, et que je
me ferai un honneur de devoir tout
à l’amitié. C’est après avoir passé par
tous les orages de la vie que nous
arrivons au port, et le bonheur
qu’un de vos amis définissait, l’intérêt
dans le calme, sera à jamais notre partage.
Notre jeune ami est dans le
ravissement de notre union ; il ose
depuis quelques jours soulever le
voile de l’avenir, et l’espoir brille à
ses yeux long-temps obscurcis par
le malheur. Adieu, mon tendre ami,
arrivez et nous serons heureux.