L’Âme nue/Petites Chansons de jadis

G. Charpentier et Cie, éditeurs (p. 143-144).
◄  L’AUBE
L’AUBE


PETITES CHANSONS DE JADIS


à madame p. h.





J’ignore les amours impures ;
J’ignore les âpres levains
Des sens qui mêlent leurs souillures
Aux rêves chastes et divins.


Mon amour a peur de la fièvre ;
Les regards noyés lui font peur
Et le feu qui brûle la lèvre
A toujours fait froid à mon cœur.

J’ai la tendresse humble des âmes
Qui se donnent sans désirer ;
Mon culte ne demande aux femmes
Que de se laisser adorer :


Mains jointes, front nu, tête basse,
Comme on adore, sous l’autel,
La vierge qui luit dans sa châsse,
Blanche sur le bleu clair d’un ciel.


Et je conserve à mon idole
Ce que Dieu lui mit de plus beau :
La pureté, cette auréole,
Et l’innocence, ce manteau.