Journal de la comtesse Léon Tolstoï/Première partie/Chapitre XIV

Chapitre XIV
Arrivée à Iasnaïa Poliana.

Le trajet de Moscou à Iasnaïa Poliana dura un peu moins de vingt-quatre heures. Le lendemain de notre mariage, vers le soir, nous arrivâmes à la maison ce dont j’étais très contente. C’est étrange ! Me voilà à la maison, et où ? A Iasnaïa Poliana.
Ma première impression en montant l’escalier de cette demeure où je devais vivre un demi-siècle fut l’accueil de petite tante Tatiana Aleksandrovna, qui tenait l’image de l’Annonciation, et de mon beau-frère, Serge Nikolaïévitch, qui me présenta le pain et le sel. Je me prosternai jusqu’à terre, fis le signe de la croix, baisai l’icone et embrassai tante. Léon Nikolaïévitch fit de même, puis nous pénétrâmes dans la pièce où se tenait Nathalie Pétrovna. Ainsi commença ma vie à Iasnaïa Poliana que je ne quittai presque pas pendant les dix-huit premières années de mon mariage. Dans son journal, Léon Nikolaïévitch a écrit : 25 septembre 1862. — « Immense bonheur ! Il est impossible que tout cela ne se termine que par la vie ! »