Journal de l’expédition du chevalier de Troyes/008

Texte établi par La Compagnie de L’Éclaireur,  (p. 107-108).

appendice d


Monseigneur

L’application et les soins que vous donnez si charitablement a l’aventage de ce pais, a donné Courage aux principaux habitans et marchands, d’y former une compagnie, pour prendre possession des terres decouvertes par les francois, et Commencer par Mer un cômerce au Nord de cette Colonie. Vous avez sceu, Monseigneur, qu’ils s’estoient postez dans les Rivieres de Bourbon et de Ste. Thérèse, que le Roy leur a données par son arrest du 20e. may dernier et ou ils avoient basty des maisons et magasins, mesme Commencé d’y faire une grande traitte avec les sauvages des Environs, durant et après leur hyvernement, lorsque trois ou quatre Renegats francois assistez d’une Compagnie particulière d’anglois de Londres, les ont pris, brûlez leurs maisons et Magazins et pillez pour plus de quatre cents mil livres de pelleteries, ce qui est sans exemple, entre des nations de bonne Intelligence, ils ont fait plus, car ils gardent les dites Rivières de Bourbon et de Ste. Thérèse avec vingt pièces de Canon et une garnison de Cinquante hommes, ce qui fait craindre a la dite Compagnie de ne pouvoir reprendre avec ses seulles forces, ces Rivieres et terres, qui appartiennent de temps Immémorial au Roy, C’est surquoy ils reclament vostre protection. Monseigneur, pour obtenir de sa Majesté, un Navire avec lequel ils puissent attaquer par mer les ds. pyrattes Anglois et Renégats francois Ils sont bien aussy dans l’Intention de s’Efforcer de les prendre par terre.

Un de leurs Navires retournant en cette année des ds. Rivieres occupées par Langlois, a fait prise d’une Caiche[1] chargée pour le cômerce desd. anglois, qu’il a amenée icy, et ou la compe. en poursuit la Confiscation par droit de represaille elle Estime, Monseigneur, que vous le trouverez bon.

Comme elle est dans une forte passion, d’appliquer tous ses soins, pour commencer divers cômerces, qu’elle est composée des principaux habitans, et que tous ceux de la Colonie seront receus a Entrer dans lad. Compe. ils prennent la liberté de vous representer, non seulement que les commis, et soubs fermiers de la ferme du pays, font commerce comme s’ils estoient habitans, mais encore qu’ils les ont menassez d’obtenir divers arrests, pour Establir de Nouveaux Bureaux, et avoir la faculté d’achepter pour de L’argent les castors, des mains de ceux qui retournent des bois, qui est un privilège d’habitant Comme le droit du fermier est, de les achepter tous pour des Lettres de Change.

Ce pays est pauvre et ne commence qu’a respirer soubz vostre protection. C’est pourquoy, ils vous supplient Monseigneur, qu’ils puissent estre continuez dans leurs droits, et qu’il sera deffendû comme en france aux agens et soubs fermiers de faire aucun cômerce. Ils priront Dieu toutes leurs vies pour vostre prospérité et grandeur Et sont avec un très proffond Respect Monseigneur Vos tres humbles et tres obeissans serviteurs. De Comporté, Charles Aubert de la Chenaye, Le Ber, Chanjon, Pâchot, Migeon de Loranssat (Bransac) Gobin, J. Gitton, d’Iberville, Catignon, F. Hazeur, & Routhier.

A Québec ce 10e. Novembre 1685.
A Monseigneur de Seignelay.

Arch. publ. du Canada. Corr., par. Vol F. 7 C 11 1 p. 320.




  1. La « Perpetuana » prise par le Sieur Bermen de la Martinière dans le detroit d’Hudson.