Journal (Eugène Delacroix)/7 août 1850

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 2p. 22-23).

Malines, 7 août. — Couru les églises à Malines.

Église de Saint-Jean : là, l’Adoration des rois, le Saint Jean dans la chaudière, et le Saint Jean-Baptiste, trois chefs-d’œuvre. C’est au rang des plus beaux. Les volets sont beaux aussi. Saint Jean écrivant, l’aigle au-dessus de lui, et de l’autre le Baptême de Notre-Seigneur. J’ai été voir le sacristain pour lui demander de les dessiner.

De là, à la cathédrale de Saint-Rombaud (Rumoldus). Magnifique église. Monuments de tous côtés : statues couchées des archevêques dans le chœur ; statues des douze apôtres dans la nef, adossées aux piliers. La même chose à l’église de Sainte-Marie, où est la Pêche miraculeuse. Il y a dans la cathédrale un Van Dyck, le Christ au milieu des larrons, que j’ai trouvé très faible. Très grand tableau. Les tons bistrés dans les ombres le rendent très triste.

A Sainte-Marie, la Pêche de Rubens, avec les côtés, y compris les volets dont saint Pierre debout, de face, les clefs au-dessus de lui. De l’autre, saint André vêtu de couleurs obscures et déjà presque invisible par la moisissure, ainsi que la Pêche, qui commence à se ternir. Rubens est le peintre qui a le plus à perdre avec cette dégradation. Son habitude constante de faire les chairs plus claires que le reste en fait comme des fantômes quand les fonds sont devenus obscurs. Il est obligé de les pousser au sombre pour faire ressortir les tons des chairs.