Journal (Eugène Delacroix)/20 mars 1854

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 2p. 313-314).

20 mars. — Enterrement de la pauvre Mme Delaborde. Quantité de figures que je n’avais pas vues depuis longtemps. Villemain très changé ; M. d’Houdetot méconnaissable. Le plus beau temps du monde : les bourgeons naissants verdoyant sous le soleil de printemps au milieu de cette mort et de cette caducité.

Je suis revenu de l’église à pied, par le pont d’Iéna où j’ai été voir la statue de Préault[1], que j’aurais voulu trouver meilleure ; de là chez Riesener, le long de la rive gauche.

Vu chez Comon la jeune personne, en allant acheter l’Artiste ; de là chez Mercey, qui m’a remis la commande du tableau pour l’Exposition.

Dîné chez Mme de Forget avec Laity[2] et Mme de Querelles, très bonne enfant.

Chez Devinck. Musique : morceau de Bach arrangé par Gounod. Le violon Hermann trop maniéré[3].

  1. Le Cavalier gaulois.
  2. Laity, ancien lieutenant d’artillerie, qui avait pris parti avec sa troupe pour le prince Louis-Napoléon lors de l’échauffourée de Strasbourg, où il se trouvait alors en garnison. Traduit devant la cour d’assises et acquitté, il donna sa démission. À l’avènement de Louis-Napoléon à la présidence de la République, il reprit du service dans l’armée, mais il donna de nouveau sa démission après le coup d’État. En 1854, il fut nomme préfet, et devint sénateur en 1857.
  3. Adolphe Hermant, dit Hermann, né à Douai en 1822, élève du Conservatoire de Paris, violoniste distingué.