Traduction par P.-J. Stahl, Lermont.
Bibliothèque d’éducation et de récréation J. Hetzel (p. 41--).


CHAPITRE IV

L’HÔPITAL NUMÉRO 2


L’hôpital no 2 était moins gai que l’autre, car, ne pouvant pas faire trêve aux travaux qui les faisaient vivre, Mme Peck était très occupée, et Jane n’avait pour se distraire que de courtes visites de ses compagnes et les jeux qu’elle inventait elle-même. Elle avait heureusement beaucoup d’imagination et un grand fond de gaieté naturelle, mais cette immobilité absolue était un véritable supplice pour une enfant aussi active, et bientôt cette situation lui devint intolérable. Cependant, le moindre mouvement et le moindre essai de se lever lui occasionnaient des douleurs tellement vives, qu’après ses tentatives il lui fallait reprendre sa position première. Le médecin ne paraissait pas rassuré, et la pauvre Mme Peck commençait à avoir des craintes sérieuses ; mais Jane ne se rendait pas compte de la gravité du mal qu’elle s’était fait en voulant répondre à une bravade insensée.

Le télégraphe fut pour elle une grande source de distractions. Les deux amis se livrèrent, pendant quelques jours, à une correspondante des plus actives et à un échange continuel de denrées en tout genre ; mais cet amusement même finit par devenir monotone. Ils n’avaient pas grand’chose à se dire une fois les bulletins de santé échangés, et peu à peu les voyages du panier se ralentirent et finirent par cesser presque complètement.

Les pauvres enfants ne pouvaient pas lire toute la journée, ils avaient bientôt épuisé tous leurs jeux, et, comme leurs amis ne venaient les voir que pendant les heures de récréation, ils s’ennuyaient tant qu’au bout d’une quinzaine de jours, ils en étaient tout pâlis et énervés.

« Jane se rend malade, madame ; à force de s’agiter, elle se donne la fièvre et je ne sais vraiment que faire pour la distraire. Toutes sortes de choses, auxquelles elle ne faisait pas attention autrefois, lui portent maintenant sur les nerfs. Il n’y a pas jusqu’au papier qui tapisse la chambre qui ne lui déplaise ! Elle prétend que les dessins ressemblent à des araignées et que cela lui fait mal aux yeux. Je ne peux pas la mettre ailleurs et je ne suis pas assez riche pour faire poser d’autre papier. Pauvre petite ! J’ai peur qu’elle n’ait de longs jours de tristesse en perspective. »

Mme Peck parlait ainsi à demi-voix à sa voisine, Mme Minot. Les deux mères étaient inquiètes de l’état de leurs enfants, et leur douleur commune les rapprochait. Tout en écoutant la mère de Jane, Mme Minot examinait la chambre où elle se trouvait et comprenait parfaitement que la petite malade eût de la peine à s’y trouver bien. Il régnait cependant une propreté minutieuse, mais c’était si pauvrement meublé qu’il n’y avait que les objets les plus indispensables. Pas une gravure autour de soi, pas un ornement sur la cheminée ! Quant au papier, il était d’un brun sombre avec des dessins noirs qui, en effet, ressemblaient assez à d’énormes araignées, et qui auraient agacé bien vite des malades plus âgés et plus raisonnables que Jane.

Jane était couchée sur la chaise longue prêtée par le docteur, qui pouvait à volonté s’élever ou s’abaisser ; mais l’enfant, toujours étendue tout de son long, avait à peine gagné quelques centimètres. Un oreiller de crin excessivement mince était tout ce qu’elle pouvait supporter sous sa tête. Ce jour-là, l’ennui l’avait endormie. Elle était bien jolie ainsi, avec ses longs cils noirs formant une ombre sur ses joues rougies par la fièvre, et ses cheveux bouclés cachant à demi sa figure appuyée contre sa petite main. On eût dit une fleur exotique dans cette triste chambre.

Plusieurs petits détails prouvaient combien elle avait de goût et de sentiment artistique : un ruban rouge relevait ses cheveux ; un châle aux vives couleurs, quoique fané, couvrait son lit ; et tous les cadeaux qu’on lui avait faits depuis sa maladie étaient soigneusement rangés sur une table auprès d’elle, côte à côte avec les rares bijoux qu’elle possédait. Il y avait quelque chose de si pathétique dans ces efforts d’enfant pour embellir sa pauvre demeure, que Mme Minot en fut touchée jusqu’aux larmes.

« Courage, chère madame Peck ! lui dit-elle en lui tendant la main. Il faudra nous aider mutuellement pendant ce temps d’épreuves.

— Ah ! madame, avec des amis comme vous je ne devrais pas avoir le droit de me plaindre ; mais j’ai le cœur brisé de voir la vie de ma pauvre Jane gâtée peut-être à jamais !

— Ne dites pas cela ; c’est même mal de le penser. Pourquoi désespérer ? Tout est possible avec une jeunesse et une santé comme celles de Jane. Elle se remettra avec le temps, j’en suis convaincue. En attendant, rendons-la heureuse, c’est l’essentiel. Nous allons commencer par lui faire une surprise qui lui plaira. »

Tout en parlant, Mme Minot disposait autour de la petite fille tout ce qu’elle lui avait apporté. Puis elle partit en disant à sa voisine :

« Ne vous découragez pas ; il vient de me venir une idée qui nous fera grand bien à tous, si je puis la mettre à exécution. »

Jane se réveilla presque aussitôt. Quel ne fut pas son étonnement en ouvrant languissamment les yeux, de voir devant elle, à la place des araignées noires, une jolie et grande image représentant une très gentille petite fille, prenant sa première leçon de danse, tandis que son maître de danse jouait du violon, et que sa mère, une aimable dame en robe jaune couverte de dentelles, la regardait d’un air d’approbation.

« Oh ! que c’est joli ! s’écria Jane. D’où cela vient-il ? ajouta-t-elle en regardant les autres images, car il y en avait quatre encore : une chasse à l’éléphant, un navire aux voiles étendues, une cavalcade et un bal, qui garnissaient et égayaient les murailles.

— C’est la bonne fée qui ne vient jamais ici les mains vides, qui vous les a apportées, répondit sa mère. Tournez un peu la tête, ma chérie, et vous verrez encore d’autres trésors. »

Elle lui montra du doigt une rose épanouie, une grosse grappe de raisin et une jolie petite robe de chambre.

Jane battit des mains avec enthousiasme. Elle prit tous les objets les uns après les autres, et les examina sous toutes les faces.

Peu après arrivèrent Merry et Molly, avec Boo, bien entendu, qui trottait sur les talons de sa sœur comme un petit chien fidèle. La joie fut au complet. On se livra à tous les plaisirs imaginables : on essaya la robe ; on goûta les raisins, on admira la rose, et on étudia chacune des images comme de véritables œuvres d’art.

« Cela a été une très bonne idée de couvrir cet affreux papier avec ces amusantes images, dit Merry. À votre place, j’en mettrais tout autour de la chambre.

— Cela me fait penser, s’écria Molly, que j’ai un gros paquet de gravures de modes que ma tante m’a données. Il n’y a rien de plus cocasse ! Je les regarde souvent les jours de pluie pour me désennuyer. Je vais aller les chercher, nous les accrocherons un peu partout, et nous pourrons en faire aussi des poupées en papier. »

Molly partit précipitamment, suivie de loin par son petit frère, qui était dans la désolation lorsqu’il la perdait de vue un seul instant. Elle revint bientôt avec un gros paquet sous le bras, et les petites filles poussèrent de grands éclats de rire en examinant ces costumes d’un autre temps. Elles fixèrent contre le mur toute une procession de dames poudrées et irisées, avec des paniers et des robes à queue et des toilettes impossibles.

« Cette mariée est ravissante avec son voile et sa robe couverte de fleurs d’oranger, dit Jane quand ce fut fini.

— Moi, j’aime mieux les éléphants, s’écria Molly, qui montait sur tous les chevaux et même sur toutes les vaches qu’elle rencontrait, qui possédait neuf chats et n’avait peur de rien. Je donnerais je ne sais quoi pour assister à une chasse pareille.

La leçon de danse est bien plus jolie, dit Merry. Regardez donc ces grandes fenêtres, ces chaises dorées et ces beaux personnages ! Oh ! que j’aimerais vivre dans un château pareil ! »

Elle était très romanesque, et la vieille ferme qu’elle habitait ne répondait guère à ses idées de luxe et d’élégance.

« Ce vaisseau me fait envie, dit à son tour Mme Peck. Je regrette souvent mon pays, et je voudrais bien pouvoir y retourner un jour ! »

Elle ajouta aussitôt comme si elle se reprochait ce souhait :

« Ce navire me rappelle ceux que je voyais partir autrefois pour l’Inde. J’ai bien failli y aller moi-même avec une dame qui se rendait à Siam ; mais, au lieu de cela, je suis restée avec sa sœur qui allait au Canada, et c’est comme cela que je suis venue ici.

— Moi, je voudrais aller partout ! s’écria Molly Loo, l’amie de tous les animaux maltraités et de tous les enfants abandonnés. J’irais dans le pays où les gens jettent leurs enfants aux crocodiles ; je les repêcherais et je les élèverais ; je tiendrais une école, et, quand mes élèves seraient grands, je fonderais une ville où il y aurait de bonnes maisons pour tout le monde.

— Il n’est pas besoin d’aller si loin pour trouver des enfants à élever, dit Mme Peck, on en voit dans toutes les grandes villes. C’est une œuvre à faire que l’on trouve partout, si l’on est capable de l’accomplir.

— Je voudrais qu’il y eût ici beaucoup d’enfants perdus ! Ah ! que j’aimerais à m’en aller par les rues avec des paniers pleins de provisions pour leur donner de bons repas ! s’écria Molly, toute prête à se lancer dans cette voie nouvelle.

— Si nous fondions une société de secours pour les abandonnés ! proposa Merry.

— C’est une idée lumineuse, s’écria Jane. Nous n’y admettrons pas les garçons, et ce sera une société secrète. Nous aurons des insignes et des mots de passe. Ce sera très amusant. Si nous avions seulement de petites sauvages à civiliser !

— Ce n’est pas bien difficile à trouver, lui dit sa mère en lui faisant un petit signe de tête. Je vous en montrerai une tout de suite, si vous voulez, et vous pourrez vous mettre à l’œuvre immédiatement. Convertissez-la en une petite fille douce et obéissante. Cela vous donnera de l’ouvrage pour quelque temps.

— C’est de moi que vous voulez parler, petite mère ? Eh bien, vous avez raison, je commencerai par moi. J’y travaillerai. Je vais devenir si sage que personne ne me reconnaîtra plus. Dans les livres, les enfants malades deviennent toujours des petits modèles. Nous allons voir si c’est la même chose dans la réalité. »

Jane prit un si drôle d’air de componction, que ses amies se mirent à rire ; puis elles demandèrent quel serait leur emploi.

« Vous, Merry, répondit Mme Peck, vous pourriez venir en aide à votre mère et donner le bon exemple à vos frères. Vous êtes fille unique. Une petite personne intelligente, dans ces conditions-là, fait assez généralement tout ce qu’elle veut de ses frères, surtout lorsqu’elle pense à embellir les lieux qui l’entourent, au lieu de rêver des châteaux qu’elle ne peut avoir. »

Merry rougit, mais elle accueillit de bonne grâce ce reproche, se promit de ne plus le mériter et fut toute surprise, après quelques minutes de réflexion, de se sentir tant de choses à faire.

« Par où faut-il commencer ? demanda Molly, je suis prête. À côté de miss Bat, des crocodiles même ne me feraient pas peur.

— Eh bien, ma chère, vous n’avez pas loin à aller pour trouver un petit garçon aussi sauvage que vous pouvez en désirer un, » dit Mme Peck en jetant un regard sur Boo, qui était assis par terre et regardait sa sœur avec de grands yeux effrayés du terrible mot de crocodiles qu’elle venait de prononcer.

Il était enrhumé et n’avait ni mouchoir ni fichu : ses petites mains, plus ou moins propres, étaient couvertes d’engelures, ses habits étaient déchirés et ses cheveux bouclés n’avaient pas eu commerce avec le peigne depuis plusieurs jours.

« Oui, je vois bien, madame, dit Molly toute confuse. Il est négligé. Je tâche bien de le tenir propre, mais j’oublie souvent, et cela l’ennuie tant que quelquefois je n’ai pas le courage de le contraindre à se laisser faire. Miss Bat n’y fait jamais attention et papa se met à rire quand je lui en parle. »

La pauvre Molly s’efforça en vain de remédier aux choses en saisissant Boo par le bras et en l’époussetant des pieds à la tête avec son mouchoir, puis en lui tirant les cheveux comme un vrai sonneur de cloches, et enfin en le laissant retomber à terre, en poussant ce cri de désespoir :

« C’est vrai, nous sommes deux sauvages, et personne au monde ne peut nous sauver si je ne m’en charge pas. »

C’était assez vrai, malheureusement. Le père de Molly était un meunier absorbé par ses affaires et ne s’occupant que de ses moulins. Miss Bat, sa gouvernante, était vieille et paresseuse, de sorte qu’après s’être occupée des enfants pendant plusieurs années, elle se reposait tranquillement et n’en prenait qu’à son aise. Molly commençait à comprendre que bien des choses allaient de travers chez elle, et elle devenait assez raisonnable pour en avoir honte ; mais jusque-là elle n’avait encore rien fait d’autre que d’être bonne pour son petit frère.

« Vous y arriverez avec quelques efforts, lui dit Mme Peck avec bonté. Et maintenant que vous avez toutes les trois votre mission, nous allons voir comment vous la remplirez. Ce sera une société secrète, puisque vous le désirez, et nous nous réunirons une fois par semaine pour en causer. Je suis sûre que vous allez accomplir des choses merveilleuses.

— Nous ne commencerons qu’après Noël, répondit Jane. Jusque-là, nous avons tant à faire que nous ne pouvons penser à rien de plus. N’en parlez à personne, mesdemoiselles, vous entendez. Notre première réunion aura lieu dans la première semaine de janvier. »

La chose fut décidée. N’était-ce pas toujours Jane qui décidait tout ?…

« Il me semble que je suis à un de ces bals masqués dont on parle tant, ajouta-t-elle en passant en revue toute sa galerie de costumes.

— À propos de bal, n’est-ce pas désolant que nous ne dansions pas celle année ? » soupira Merry, pendant que les petites filles s’amusaient à découper des images et à mettre les têtes des unes sur les corps des autres.

Cela produisait des résultats assez comiques, mais nous ne conseillons à personne de les imiter ; c’est un procédé qui n’a d’autre résultat que de détraquer à jamais les poupées.

« Nous ne voulons ni danser ni nous amuser d’aucune façon, aussi longtemps que vous et Jack ne pourrez être des nôtres, dit Molly.

— Oh ! moi, dit Jane, je serai guérie dans quinze jours ; mais il faudra plus longtemps que cela pour remettre la pauvre jambe de Jack. »

Elle jeta un regard d’envie sur la danseuse attachée à la muraille. Elle adorait la danse. Hélas ! elle ne soupçonnait pas combien il se passerait de temps avant qu’elle pût se livrer à son amusement favori.

— Si nous en donnions l’idée à Jack, s’écria la rieuse Molly. Envoyons-lui quelques-unes de ces belles dames, en lui disant qu’elles se proposent d’assister à son bal du jour de Noël. »

La motion fut accueillie avec acclamation.

On ajusta une tête coiffée d’un chapeau vert à une dame en jaune, assise dans un traîneau. La dame qui l’accompagnait, vêtue d’une robe de velours, d’une pelisse et d’un boa d’hermine, reçut une tête de mariée chargée de fleurs d’oranger, et ces chefs-d’œuvre furent expédiés par le télégraphe avec cette inscription sortant de leurs bouches :

« Miss Laura et Miss Lotty Burton demandent à être invitées au bal de Noël de Mme Minot. »

C’était une petite méchanceté de la part de Jane, car elle savait combien Jack aimait les gentilles petites sœurs de Gustave, dont les allures douces et timides faisaient le plus grand contraste avec les étourderies de Jane.

Aucune réponse n’arrivant, les trois amies avaient presque oublié leur plaisanterie en jouant aux mots avec les lettres mobiles, lorsque la sonnette du télégraphe retentit.

Le panier arriva lourdement chargé. Un rouleau de papiers de nuances variées était lié après l’anse, et l’intérieur contenait une grande boîte de perles de toutes couleurs, quelques feuilles de carton mince, un paquet de faveurs, un cornet vert et or pour servir de modèle, une pelote de gros fil, quelques fortes aiguilles et un billet de Mme Minot ainsi conçu :


« Chère petite Jane, j’ai l’intention de faire pour Noël un magnifique arbre de Noël, afin que tout le monde puisse en profiter, même les malades. Vos belles amies de carton seront les bien venues. Voudrez-vous me prêter votre concours ? Je vous envoie de quoi faire des cornets de bonbons et des colliers de perles. Cela fera un très bon effet sur l’arbre, et les petites filles accueilleront bien les colliers, soit pour leur propre compte, soit pour leurs poupées. Faites-moi savoir s’il vous manque quelque chose.

« À vous,
Anna Minot. »

« Elle a compris que Jane avait besoin de distraction et d’occupation ; que Dieu répande ses bénédictions sur elle ! » pensa Mme Peck lorsqu’elle vit le ravissement de Jane, et quelque chose de plus brillant que les plus brillantes perles de Mme Minot tomba de ses yeux sur l’ouvrage qu’elle tenait.

IV

DE JOYEUX CRIS ACCUEILLIRENT L’OUVERTURE DE LA BOÎTE DE PERLES.


De joyeux cris accueillirent l’ouverture de la boîte de perles. Il y eut de grandes discussions pour savoir qu’elles étaient les couleurs les mieux assorties et celles qui faisaient le plus d’effet. Puis on se mit à l’ouvrage. Jane ne pouvait refuser à ses amies de l’aider, et bientôt trois colliers brillaient sur trois petites poitrines, et chacune admirait en conscience son propre ouvrage.

Merry s’écria :

« Je ne demanderais pas mieux que de me casser quelque chose, si je devais avoir toujours d’aussi jolies choses à faire. »

Elle mit à regret son aiguille sur la pelote. Il était temps de partir, et ses devoirs de chaque jour lui paraissaient encore plus déplaisants après ce plaisir inattendu.

« Et moi aussi, dit Molly. Oh ! Jane, croyez-vous que Mme Minot vous permettra de remplir les cornets de bonbons quand ils seront faits. Je serai si heureuse de vous aider. N’oubliez pas de m’envoyer chercher, si elle vous le permet, ajouta-t-elle en se tordant le cou comme un petit pigeon pour mieux juger de l’effet de son collier rouge et or sur sa robe brune.

— Je crois que ce ne serait pas prudent, dit Jane d’un air important. Vous aimez trop les bonbons, et Boo serait encore moins possible dans ce rôle que vous. »

Cette mention du petit garçon le fit chercher. Il avait disparu, mais on finit par le découvrir dans un coin, très occupé à cirer le parquet avec le mouchoir de sa sœur et un peu d’huile provenant de la machine à coudre de Mme Peck.

On l’arracha de force à cette agréable occupation et on l’emporta tout poissé d’huile et poussant des hurlements désespérés.

Jane resta seule, mais sa solitude ne lui pesait plus. Elle se mit gaiement à l’œuvre et chanta comme un heureux petit chardonneret en cage, tout en collant ses papiers sur son carton ou en confectionnant avec ses perles les bijoux, les plus variés.

Mme Minot avait réussi à égayer les deux prisonniers car Jack n’était pas moins occupé de son côté à un ouvrage analogue.