Invantaire du Père Monet/Au lecteur
Es habitudes, contractées par voie de diſcours, ne nous echapent pas aiſémant, pour ce
que les raiſons, qui les ont imprimées, an conſeruent la continuation. Mais celles,
qui par ſeule vſance, & routine, ont ſaiſi, & vſurpé la poſſeſſion des facultez de l’ame,
& du cors, ſont d’ordinaire eterneles, comme fondées au droit de coutume immuable,
quoi que fort contraires à l’equité, & bien ſeance. Toute ma vie i’ai fait experiance
de cete verité, mais particulieremant an matiere de cete orthographe, depuis onze
ans, & des la premiere edition de mon Parallele des deus langues. Dés lors qu’il a
commancé à voir le iour, on ne ceſſe point, de me donner aduis, & me ſolliciter, de
diuers quartiers de France, que ie me deporte de cete nouuelle maniere d’ecriture, &
que ie me conforme à la plus ordinaire, & vulgaire. Et, à ces fins, quaſi tous me chantent le meme, qu’il eſt
beaucoup plus ſeant, de parler, & ecrire, comme le general de la nation, que comme certains particuliers : &
qu’il eſt fort à propos, & ancore neceſſaire, de conſeruer l’origine des mots de notre langue, tirée du Latin :
ce que ſe fait, an pratiquant l’orthographe vulgaire : & au rebours, l’etymologie s’an perd, & abolit du
tout, par cete moderne façon d’ecrire.
Mais les etrangers d’autre part, comme les Italiens, Alemans, Anglois, Flamans, Ecoçois, pratiquans la France, & curieus de ſon langage, me conjurent fort, & de bouche, & de letres, de continuer la forme d’ecriture, qui les ſoulage grandement, à ſe preualoir de notre langue : & les afranchit de grans equiuoques, an la prolation des mots de cet idiome.
Ils me repreſantent l’equité du deſſein, que i’ai eu, lors de ma premier edition du Parallele, de ſuppléer à l’incapacité de la tandre ieuneſſe de ce Roiaume, & de meme, à celle des perſonnes de dehors, qui cherchent, & aprenent les mots François, dans les Dictionaires, & les deſirent au meme ton, que touſiours on les leur iete dans l’oreille : leſquels mots, & an ce ton, ils ne peuuent reconnoitre, dans les Liures de vulgaire orthographe : mais, dans mon Parallele, & Inuantaire, ils les decouurent d’abord, & expedient ſoudain leur beſogne, auec egal plaiſir, & profit.
Leur demande eſt fort ciuile, & equitable, an ce qu’ils requierent d’etre ſecourus, au vn cas de neceſſité, dont ils ne ſçauroient ſe demeler d’eus memes. Ils ſont ancore d’autant plus dignes d’aſſiſtance, qu’il ne demandent cet faueur, qu’à ceus, qu’ils ont experimantés, deia portés de leur gré, à les releuer de peine, & ce, ſans preiudice, ni du particulier, ni du public : Car ils n’importunent pas aucun des autres Ecriuains de France, de ſe ranger à leur defectuoſité : mais ſçauent gré à ceus, qui les aſſiſtent de plein mouuemant, & les font profiter, dans peu de iours, an l’aprantiſſage de notre langue.
Et qui peut nier, que ce ne fut vne eſpece de tyrannie, de les vouloir forcer, pour ſon plaiſir, à vne peine inſupportable, & impoſſibilité eternele, de ſe faciliter le vrai moien d’arriuer à cete langue, an les priuant de toutes les adreſſes, qui leur an fourniſſent l’aiſance ?
Mais, ſous vn beau pretexte, de conſeruer antiers les vieus droits de ſon idiome natal, n’eſt-ce pas lui faire vn tres-grand tort, an ce, qu’etant fort recherché de l’etranger, à cauſe de ſa douceur, naïueté, richeſſe, inacceſſible, ou du moins, de fort difficile, mal-gracieus, & tres-long aprantiſſage ?
Ce ſera donques, Messievrs, qui m’auez maintefois parlé, fait parler, ecrit, ſollicité, an cette matiere ; an ſera, diſ-ie, auec votre courtoiſe permiſſion, que ie coucherai ſur ce papier, les cauſes, qui m’obligent, de gratifier aus plus ieunes aprantis de lettres, an ce roiaume, & aus etrangers, amoureus du langage Gaullois, an continuant de leur parler, de meme ton, que ci deuant.
Or il eſt ſeant, & raiſonable, que vous ſupportiés, & approuuiez tout anſamble, mon procedé, &, an ce nommémant, que ie dogmatiſe point, ſur cete matiere, & ne donne aucun ſigne de pretandre, que chacun doiue ecrire, comme ie fais an ce ſuiet. Au contraire, ie demeure tres-contant, que tous les autres ſuiuent à iamais, ce qui leur paroit plus conuenable.
Ie repondray donques aus raiſons, qu’on m’a oppoſées, & à quelques autres, qu’on pourroit former contre mon deſſein, & apres ce, ou an mem tams, i’etablirai les fondemans, qui m’angagent à faire ferme an mon antrepriſe : & ce, non pour autre conſideration, que du bien de pluſieurs particuliers, hors du deſauantage du public, ni de perſonne qui ſoit. Et, au partir de mes defanſes, & de l’etabliſſemant de mon droit, ie ferai des inſtances à mes aduerſaires, an matiere des langues, Greque, Latine, Gaulloiſe, toutes farcies du mepris de cete ſuperſtitieuſe Etymologie, qu’on me preche tant, & leur ferai touche au doit, par vne infinité d’examples, que de toute ancienneté, an fait de langues, la coutume des plus Doctes a amporté, de faire un peu d’etat de ces originations etymologiques. Or voions les oppoſitions, qui me ſont faites, an matiere d’orthographe Gaulloiſe.
I Les anciennes, & generales coutumes, nommémant de toute vne grande nation, comme la Gaulloiſe, doiuent etre obſeruées de chaque particulier, an tout, & par tout, ſans rien innouer. Or la façon vulgaire d’ecrire an France, eſt vne coutume de cete nature là, tout à fait vniverſele, & de toute memoire.
Les Coutumes, comme puremant, & ſimplemant Coutumes, ne ſçauroient iamais ſe bien autoriſer, ſi, outre celà, elles ne ſont aſſorties de bonnes qualités, qui leur donnent force, & vigueur de loi. Que ſi, d’elles memes, elles ſe trouuent reprochables, pour quelque defectuoſité eſſanciele, iamais dans la durée de tous les ſiecles, elles n’acquierent iuſte titre de vraies Coutumes, mais retiennent touſiours la marque, la nature, & defectuoſité de formel abus. Et à faute de cete deüe reſtriction, les plus enormes crimes, & directemant opposés à la loi de nature, generalement pratiqués iadis, & licitement ſelon le tams, au veu, & ſceu de tout le monde, parmi beaucoup de nations, an ſuite de cete vniuersele, & longue uſance, auroient amporté la condition, & nature d’actions honnorables, & leur exercice ordinaire, le titre, & droit, de legitime, & loüable Coutume. Faites me voir, Messievrs, & clairement, que votre Coutume eſt née avec la raiſon, & bien-ſeance, & a continué auec ces nobles qualités, iuques à preſant, & ie l’ambraſſerai, ſans iamais m’an equarter d’vn trauers d’ongle.
Or ie vous ferai aduoüer, & à tout homme equitable, Que la coutume, d’ecrire autremant, qu’on ne prononce, de prononcer d’autre façon, qu’on n’ecrit, eſt erronée an soi, & reprehanſible deuant tous les hommes, qui an iugeront ſans paſſion : &, qu’an ſuite de cete tare, fut-elle plus vieille qu’Adam, elle dechet du droit de Coutume, & n’oblige point ceus qui s’an departent auec fondemant. Ne m’allegués donc plus de Coutume inueterée, ſi vous ne la faites paroitre mieus aſſortie de belles qualités eſſancieles, que celle-ci.
Votre Coutume est erronée, an ce qu’elle m’abuse perpetuelemant, & me tient an continuel equivoque, & erreur, quant à l’œil, à & l’oreille, portant à cete-ci ses paroles, d’un certain ton, dous, & intelligible, & à celui-là, d’une autre figure, & d’un son tout differant, comme pour se moquer de moi, & me faire lire sur le papier, ce qu’elle n’a pas dit, par sa langue ?
An tout autre langage, & pratique de parler, & d’ecrire, i’oi, & ie lis, les memes propos, fort conformes à eus memes, an chaque mot, & syllabe : & ce d’autant que, la fin de parler, & d’ecrire, eſt vne meme fin, viſant, à ſe faire bien, & egalemant antandre, an l’vn, & l’autre, de ces deus moiens à exprimer ſes conceptions.
Repondés moi de grace, Messievrs, les François ont ils quelque grand auantage, à procéder autremant par leur ecriture, que les autres nations ? Vous ne ſçauriez alleguer choſe de conſideration, qui les oblige, ou les conuie, à cete diuerſité de s’expliquer par ecrit. Dirés-vous point, qu’ils ont raiſon, de le faire comme cela, pour randre leur langue autant reſpectable, comme la difficulté eſt grande aus etrangers, d’accorder l’ecriture, auec la parole Françoiſe ? Croirés-vous pas, que les François ont beaucoup d’intereſt, à voir la perplexité, des Alemans, des Anglois, des Italiens, des Ecoçois, & des autres peuples, à ſe demeler de la lecture d’vn liure, ecrit an votre affecté vulgaire ? Le ſujet de rire, qu’ils donnent à toute heure, an liſant nos liures, & an raportant, ce qu’ils an ont leu : le plaiſir, que d’aucuns prennent, de les voir dans ces difficultés, eſt-ce point le butin, & le fruit du creu de cette langue, que les François ſe ſont propoſé, an l’obſeruance de leur rigide Coutume ?
Vous me repartirés que i’ai beau oppoſer des inconuenians : mais que c’eſt la iuſte Coutume de cete langue, & de toute ancienneté, & d’ainſi ecrire, & d’ainſi parler. Ie vous accorde, que c’eſt vne Coutume, mais Coutume fort abuſiue, & toute compoſée d’impertinances. Et vous ne ſçauriez nier equitablemant, que cet abus Coutumier, ne ſoit fort preiudiciable, & aucunemant iniurieus à tous les peuples de dehors, & aus ignorans de France, comme ie viens de montrer. Ie dis de plus, que cete Coutume fait auſſi grand tort, & à la langue Françoiſe, & à tous les François, & qu’an la pratique de cete opiniatre acoutumance, vous amploiés vos armes, pour vous offanſer vous memes.
Et ie le montre euidammant : car, que me donnerés vous de plus indigne de la courtoiſie Françoiſe, tant recommandée, & tant recherchée de toutes les nations etrangeres, que cete diſſimilitude de parole, & d’ecrirure, dont l’vne attrait doucement l’oreille, l’autre rabroüe mal plaiſammant le regard : comme ſi cete ci deſauoüoit aigrement, ce que cete là a fait courtoiſemant, & par cete voie, donnoit à antandre à l’etranger, que cete courtoiſie de front, & de bouche, n’eſt autre qu’vn faus maſque ; & que la procedure, triſte, & hargneuſe, eſt le vrai naturel du François. Et il s’anſuit donques manifeſtemant de cete raison, que votre annuieuſe Coutume d’ecrire, eſt bien preiudiciable à ſoi meme, & à toute la nation, & non moins deshonnorable à tous les deus.
Vous conſeillerai-ie, {sc}, puis que ainſi an eſt de votre Coutume à ecrire, vous exhorterai-ie, à prononcer, comme vous ecriués ? veu qu’il eſt bien plus facile, d’accommoder vos langues à vos liures, que de reformer tous ceus-ci pour les façonner à celle-là. Ie vous laiſſerai plus volontiers an votre liberté, & informerai cepandant les etrangers de l’origine de cet erreur, de parler, & ecrire tant differammant, & des cauſes, qui l’ont antrerenu, iuques à maintenant : mais ſans accuſer nos vieus peres ; qui ont laiſſé naitre, & anraciner, ce grand manquemant de langage. Car ie veus, comme ie dois, considerer ce que, & le diſcours, & l’experiance m’anſeigent : qu’il est bien plus aiſé, de remarquer, & de regreter an ſon ame, l’inconueniant de pluſieurs tares notables, dans vne grande Communauté, que d’an diuertir la naiſſance, le progrés, la longue perſeuerance.
Trois mauuais principes ont contribué à l’origine, à l’auancemant, & à la ſuite preſque infinie, de la Coutume pretanduë, dont nous parlons ; & toutes les memes cauſes ſont pour la porter, & etablir iuques à la fin du monde. Le premier de ces Principes a eté, la nonchalance ordinaire, & generale de la plus part des pères, voire des plus riches, & releués, à fournir leur tandres anfans de maitres bien idoines, à les dreſſer conuenablemant an la lecture, & ecriture. Certain reſpect d’economie les a portés le plus ſouuant à choiſir pour cet office, des perſonnes ignorantes, & groſſieres, qui n’ont peu montrer à leurs diſciples, que ce qu’ils auoient mal apris dans le vilage, ou ailleurs, & de precepteurs de leur etofe. L’autre Principe de ce malheur, eſt celui de la vieille routine de France, continuée iuques à notre ſiecle, de conceuoir an langage Latin, par parole, & par ecrit, tous actes publics, an matiere d’Etat, de Iuſtice, de Police, de Conuantions, & choſes pareilles. Or ces Actes, aus cas de neceſſité, ont eté traduits, an langage vulgaire, par perſonnes mal vſitées an ſamblable fonction, & exprimés cruëmant, & ric à ric, au pied de la lettre : & de ces ineptes verſions, vniuerſeles, an tout le roiaume, s’eſt formée & etanduë par tout, la façon de toute mauuaiſe ecriture : comme ancore de la traduction impertinante de pluſieurs liures Latins. Le troiſieme Principe de cet inconueniant conſiſte, an la liçance, que ſe ſont donnés pluſieurs hommes, bien plus hardis, que doctes, s’antremettants la reueüe, & correction des vieus textes de liures, deſtinés à l’Imprimerie, forgeans à leur poſte, vne nouuelle ſorte d’orthographe Latine, & Françoiſe, alterans à diſcretion toute maniere de vieilles, & correctes editions de liures manuſcris, & imprimés, & couurants la terre de volumes, rangés à leur fantaſie. Par cete voie, le monde, an peu d’années, s’eſt trouué inondé de ce deluge de traductions, ecorchées du Latin, ſyllabe apres ſyllabe, pour nous donner à antandre, qu’il an faut antretenir l’analogie, la cadance, & racine, dans la langue Françoiſe, comme originaire de la Romaine.
Mais à prandre cette queſtion à ſa ſource, les Romanſiers, ou ecriuains de Romans, an proſe, & an ryme, dés le huitiéme ſiecle anuiron, ont eté les premiers auteurs de cete bigearre ecriture, tout de meme, que de la langue Romande, ou Gaulloiſe, compoſée pour la plus grand part de termes Romains Franciſés, & de quelques mots, & locutions du vieus Gaullois, leſquels Romanſiers ſuiuent pied à pied le Latin, mais an bien peu de paroles, dont il eſt aiſé de dreſſer vn liſte : & pour tout le reſte, s’an ecartent grandemant.
Les hommes doctes, bien dreſſés dés le berceau & preuenus de bons aduis contre ce deſordre, & randus ſoigneus de correctement ecrire, ſont à couuert de ce cataclyſme d’abus, & s’an preſeruent, pour leur regard, autant, que leurs ecritures ſortent an public de leur maine, & non de celle de leurs ſcribes, & copiſtes.
Mais pluſieurs ſçauans, auant qu’etre ſçauans, es iours de leur anfance, ont paſſé par les mains de maitres impertinans, qui les ont ſtylés bien long-tams, à ecrire incorrectemant an François ; & par deſaſtre, ces doctes ont contracté vne grande habitude de mal ecrire, auant que de la reconnoitre, & l’ont reconneuë trop tard, pour s’an pouuoir aiſémant ſecoüer, & defaire.
Car les ſçavans, ſont pour l’ordinaire fort aferés, & an matieres importantes : & la foule de leurs occupations ne leur permet le loiſir, & ſoin requis, à retrancher cete mauuaiſe habitude d’orthographe, & pour mieux dire, de cacographie, imbibée, inſanſiblemant dés le berceau. Mais auſſi eſt-il bien vrai, qu’ils la condamnent en leur ame, comme contraire à la bien-ſeance fort equitable, de ſe touſiours expliquer, an meme ſuiet, & memes termes, vniformemant, & par la bouche, & par la plume : ſi nous ne voulons paroitre monſtrueus, à communiquer nos conceptions : mais ils ne peuuent s’an examter, comme ils deſirent : Et il eſt notoire, que les hommes de tele ſorte ne ſe laiſſent couler à cete mauſſade routine d’ecriture, qu’auec la iuſte conſideration, qu’an certain cas, c’eſt vn moindre inconueniant de permettre à la main, & à la plume, de choper par fois an vne mauuaiſe habitude, formée dés la mammelle, & leur echapant par inaduertance, qu’an epluchant par le menu chaque lettre, retarder des expeditions bien plus importantes.
Deportez-vous doncques ci apres, Messievrs les Zelés de l’ecriture vulgaire, d’apuier votre pretanduë Coutume, ſur les fondemans caduques, & ruineus de ſon antiquité, & generalité, que nous auans ranuerſés, & ne croiez plus, de la pouuoir autoriſer du nom, & de l’approbation des Doctes de la France, qui ne lui adherent, que du bout du doit, par megarde, & auec regret, comme vous ſçauez, quoi que le diſſimuliés à deſſein. Mais oions ce que vous aués à dire de plus, an cete matiere.
II Les veſtiges formels de la langue primitiue, & originale, doiuent euidammant paroitre : & ſoigneuſemant etre gardés, an celle qui an eſt extraite, & ce, an toutes les paroles de cete extraction verbale.
L’obſeruance de cete regle n’eſt du tout point neceſſaire aus lettrés, & eſt fort inutile aus non lettrés, & partant, tout à fait ſuperfluë. Et à cete occaſion, le plus ſouuant, elle ſe treuue hors de pratique, parmi les Grecs, Latins, Gaullois, & autres peuples, bien verſés aux ſciances, & non ſeulemant és mots originaires de langage etranger, mais auſſi du domeſtique. Car nous auons, an toutes langues, l’experiance de trois chefs, au contraire de votre rigide maxime, ſçávoir eſt : Qu’on ne l’obſerue, que bien peu, voire és mots deriués d’autre langue : Qu’on la biaiſe fort, pour donner plus de douceur à la prolation, & pour des autres reſpets, és mots deſçandans d’autre langue : Qu’és paroles Françoiſes, iſſuës du langage Romain, à peine, que de trante, vne ſeule, ait aucun rapport de ſon, & d’ecriture, à ſa langue maternele.
Quant au premier ie peus fournir à force examples, tant de la langue Romaine, que des autres, que i’omets an cet androit, pour an dire ci apres quelque choſe à part. Pour le ſecond article, il s’an preſante ancore bien d’auantage, que ie ne produirai pas, d’autant que mes aduerſaires le ſçauent, s’ils ne les veulent ignorer à deſſein. Le troiſieſme chef ſamble paradoxique, & neantmoins il eſt tres-euidant, que des mots Gaullois, formés des originaus Latins, malaiſémant trouuerés vous, qu’vn ſeul antre trante, ait aucune conuenance, que de fort loin, auec ſa matrice, & dont ie pourrois faire vne liſte infinie : mais ie m’an deporte, pour n’etre annuieus au lecteur, & dont ie donnerai neantmoins vn echantillon ſur la fin de cet aduis. Or ie préuois, que vous me repliquerés à ce ſuiet vne autre de vos notables maximes, & dirés.
III Il faut ecrire correctemant, &, qui pour ce faire, on doit connoitre l’etymologie an ecriuant, pour garder le lecteur d’equiuoque.
I’aduoüe, que nous deuons pratiquer l’ecriture correct, mais ie ne vous accorde point, ſous pretexte de vos veſtiques formels de langue pritimiue, que cete pure, & reguliere façon d’ecrire conſiſte, à marquer ſur le papier des caractères oiſeus, voir importuns, & qui ne ſe font ſantir, ni oüir, an parlant, & liſant. Car, veu que vous confeſſés, que certaines lettres ne s’expriment point an liſant, & an parlant hors de lecture, à quel propos m’aſtreindrés-vous, à les pourtraire ſur le papier, hors de neceſſités, & d’vſage : & quele correction d’ecriture me figurés-vous là deſſus, ſans fondemant ?
De m’alleguer, que c’eſt pour donner aduis à mes ïeus, & à mon antandemant, de la ſource, de ces mots, par la note d’vne lettre, muete, mais non oiſeuſe : ce ſont paroles perduës : car mes ïeus ſont ceus, ou d’vn idiot, auquel cet aduis ne ſert du tout point : ou ceus d’vn lettreé, à qui il ne peut profiter, car le docte poſſede cete naiſſance d’ailleurs, & mieus, que de cet admoniteur ſans langue.
Et ie dis, que tele ſuperfluité de lettres, qui ne ſonnent point, an notre langue, ne fait qu’importuner, & troubler les moins experimantés. Pour les deliurer donques de toute matiere d’equiuoque, & de trouble, ie veus afranchir mon ecriture de toutes ces lettres ſurnumeraires, & ce d’autant plus libremant, que c’eſt la pratique, & coutume de toute la France, de ne les faire iamais ſonner an parlant.
Ie mets an outre, A, pour E, comme on prononce, an tout le Roiaume, celui-là, pour celui-ci, an tous les moits originaires du Latin. Et voilà tout le changemant que ie fais an l’ecriture vulgaire, qui ne merite pas tant de bruit, qu’on an a fait, iuques à preſant.
Or an ces deus càs, ie dis, & ſœutiens hardimant, qu’aucune regle d’etymologie, aucune coutume, tant ancienne, & generale ſoit-elle, ne me peut lier, ni angager, à tracer lettre quelconque, qui n’ait point de fonction, ni d’vſage ſur le papier, ſ¨non à deceuoir mon lecteur, & le faire choper à tous momans, & an parlant, & an liſant. I’adioute de plus, qu’au contraire, ie me tiens obligé, non ſeulemant de courtoiſie ; mais d’vne eſpece de iuſtice, de ne marquer aucun caractere, an mon ecrit, qui puiſſe mettre an erreur vn etranger, ou vn François ignorant, qui lira mon papier.
Or quand ie voudrois faire paroitre, an ces lettres muetes, les matrices Latines de notre langue, à quoi ſeruiroit, de le pratiquer, an vne ſeule trantieme portion des mots François, ampruntés du Romain : ne ſe preſantant aucune priſe, pour l’exercer an tout le reſte de notre idiome ? Car il eſt tres-certain, que de ce Latin, adopté, & incorporé an notre langue Françoiſe, de trante parts, les vint-neuf ſont telemant defigurées, & deia de toute ancienneté, qu’on ne put diſcerner, qu’an deuinant, aucun veſtige de leur origine, où ſe face remarquer la teinture, & l’air du viſage de leur pere, & mere.
Hors de ces deus chefs, ci deuant quotés, de certaines conſonantes, tout à fait muetes, & dormantes, dans notre langue : item de l’A, mis pour l’E, ie n’ai pas iugé, que ie deuſſe rien altere, an l’ecriture du vulgaire François, & pour iuſtes cauſes, qui ſeront deduites, an la reponſe, à votre ſuiuante concluſion.
IV Cete conuenance de to, & an l’ecriture, & an la prolation des mots Gaullois, doit etre formée bien vniuerſelemant ſur chaque parole, & non particulieremant ſur quelques vnes : & pource, vous aués deu la dreſſer toute antiere, & an l’etanduë complete de notre langue, ce que vous ne ſçauries faire, ou ne pas vous an meler, & tant imparfaitemant.
Iamais aucun decret de Pythagore, aucun arreſt de l’Areopage, ne fut tant abſolu, que cete votre ordonance, ; Que ſi elle eſt autant bien fondée an droit, que reſoluë an ſes termes, ie ne differe point d’acquieſcer, & de paſſer condamnation, ſans reſerue aucune : mais pour m’an eclaircir, permettés moi de grace, que ie l’examine piece à piece.
Quant à ſon premier chef, eſt-ce point vne regle de droit naturel, diuin, ciuil, canonique, qui vous fait prononcer ; que cete conuenance doit etre formée bien vniuerſelement : Ou ſi c’eſt par fantaſie de votre eſprit, que vous le determinés de la ſorte ? Il eſt euidant, que vous n’etes fondés an aucun droit : reſte donc ſeulemant, que vous le ſoiés an opinion imaginaire ; & an ce cas, il me ſuffit, pour tenir votre Decretal an ſurſeance, que ie ſois de contraire aduis au votre.
Car quel ecriuain a iamais eté, ou peu etre iuſtemant taxp, d’auoir traité à part quelque chef d’vne matiere, & de s’etre deporté des autres, ſur leſquels il n’auoit ancore point de deſſein ? Ie vous ai fait antandre ci deuant, an la premier edition de mon liure, que ie m’etois attaché aus parties de ce ſuiet, qui donnent le plus d’afaire aus etrangers, & aus ignorans de France : qui ſont chefs capables de quelque bon reglemant : & que ie laiſſois arriere les autres, tant pour n’etre aiſés à reduire ſous la regle, que pour n’etre de conſideration.
Au fait de ce dernier point, vous me dites ; Que ie n’an ſçaurois cheuir, & ie vous repars, Que non pas comme les bien braues de France, an cete profeſſion ; mais vn peu mieus, que quelques vns, qui ans parlent trop, & ne l’antandent pas bien. Mais quand vous traités auec moi de ce ſujet, à la maniere, que vous faites, an m’obligeant à cete totale reforme : c’eſt autant, que ſi vous pretandiés m’angager à vous repondre bien diſtinctemant : Quele eſt la plus reguliere, & plus ſtable face de la Lune, laquele n’an eut iamais de permanante, & n’an aura ci apres, ſi elle ne change de nature. La piece de la langue Françoiſe, dont vous me parlés, eſt vne vraie lune, de perpetuel changemant, qui comme la Fortune, n’a autre conſtance, que celle proieter quelque reglemant, pour les aprantis.
V Les ieunes anfans de ce Roiaume, & les etrangers accoutumés à votre façon moderne d’ecriture, an contracteront la mauuaiſe habitude, pour le demeurant de leur vie : & ſemeront cete nouueauté, au long, & au large de l’Eurpoe, au preiudice des ſiecles ſuiuans.
Ils procederont an cet androit, comme ils verront à faire : mais ils ne diront iamais, que ie les aïe exhorté à aucune ſorte d’écriture ; neantmoins, i’aurois eté beaucoup mieus fondé, à leur conſeiller la mienne, que vous à leur ſuader la votre. Et la raiſon de mon dire eſt euidante, dautant que, la choſe de ſoi, leur eſt vtile, bien-ſeante, honnorable, ſæns incommodité du tiers, & fort reuenante à tous ceus, auec leſques ils auront à traiter. Preuués moi le contraire bien à propos, & ie leur donnerai aduis, de s’an departir : comme ie vous conſeille, de me laiſſer an pais, ſi vous n’etes fournis de meilleurs raiſons, pour me combatre, que celles, que vous aués étalées, an cinq foibles propoſitions.
VI Mais auant que conclure cete matiere, ie vous dirai, que ſi i’etois homme de creance auprés de vous, & ſi ie me ſantois aſſés capable, de vous donner aduis, ie coniurerois ce votre grand zele anuers le bien public, & an fait des lettres, , d’exſecuter vn chef-d’œuure, digne de vous, an reformant vn grand abus, qui s’eſt coulé dans ces trois nobles langues, Greque, Latine, Françoiſe, an matiere d’etymologie, qui vous iugés tant importante, & auec raiſon.
Cete votre reforme obligera, & les doctes, & les aprantis aus langues, à l’eternité, & tout anſamble vous acquerra vne reputation glorieuſe, & d’egale etanduë, à celle de toute la terre, & de durée pareille à tous les ſiecles futurs.
Les Grecs ont amprunté grãd quãtité de mots Latins, & les ont biaiſés à leur poſte : les Latins an ont vſurpé autant, & plus des Grecs, & les ont contournés à leur guiſe : les Gaullois ſe ſont accommodés d’vn nombre de paroles Grecques, & Latines, qu’ils ont altérées d’vne etrãge façon. De maniere, que l’original ne s’an decouure an leur lãgue, que fort mal-aiſémant, au grand deſauantage des moins vſités an cete ſciance ; & auec intereſt des nations leſées an leurs idiomes, & au deshonneur des idiomes memes.
Voici donques vn riche ſuiet de gloire immortele pour vois, & bien ſortable au zele, dont vous vous piqués fort, pour la reformation le la naïue, & pure Etymologie des mots de chaque langue, tranſmarchés aus etrangeres. Mais, ſi vous ne le iugés à propos, ie ne vous ſolliciterai pas, de vuider ces vaſtes etableries d’Augias, regorgeantes de fumier de vieille dat, que ie ne contribuë quelque petite couruée à ce trauail Herculien. Et pour cet effet, ie m’en vai dreſſer vn petit echantillon, des vocables, puiſés de ſources d’autrui, & alterés an ces trois langues ſuſdites, pour vous metre an appeti d’i appliquer efficacemant votre braue induſtrie, & grande ſuffiſance, auec la Criſe d’vne iuſte reforme : & ce pour vous releuer de peine, à les rechercher parmi les liures. Que ſi mon ſoin vous agrée, & votre trauail vous reüſſit, ie vous fournirai amplemant, dequoi continuer an cete honnorable taſche, tant vtile au public, ſi toutefois vous n’aimés mieus, an faire vous memes le triage, bien plus à propos, que ie ne ſçaurois faire.
VII Abentinos, pour Aventinus : Ammolios, pour Amulius : Ancora, pour Ancyra, Bacylon, pour Baculum : Barron, pour Varro : Bey, pour Veij : Belatura, pour Velatura : Velavron, pour Velabrum ; Bellutus, pour Vellutus : Belon, pour Velum : Berrucoſius, pour Verrucoſus : Beturios, pour Veturius : Brettanos, Brettania, pour Britannus, Britannia : Brettios, pour Brutius : Calandæ, pour Calendæ :Carbilios, pour Carvilius : Kyrinalios, pour Quirinalis : Cyrinos, pour Quirinus : Cyrites, pour Quirites : Dictatoria, pour Dictatura : Fæſtylos, pour Fauſtulus, Fevruarios, pour Februarius : Hortiſios, pour Hortenſius : Labinion, pour Lavinium : Laremia, pour Laurentia : Larenty, pour Laurentes : Lugduneſios, pour Lugdunenſis : Narboneſios, pour Narbonenſis : Nometor, Numetor, pour Numitor : Hoſtylios, pour Hoſtilius : Ouicolas Favios, pour Ouicula Fabius : Phæſtylos, pour Fauſtulus : Poplicos vicos, pour Publicus vicus : Poplios Marcos, pour Publius Marcus : Romos, pour Remus : Scepion, pour Scipio : Serbios, pour Seruius : Tarcynios, pour Tarquinius : Tarraconeſios, pour Tarraconenſis : Tymbris, pour Tiberis.
Achilles, pour Achilleus : Agrigentum, pour Acragas : Alexander, pour Alexandros : Annibal, pour Annibas : Aſdsrubal, pour Aſdroubas : Brundiſium, pour Brenteſion : Buxentum, Pyxus : Carthago, pour Carchedon : Carthaginienſis, pour Carchedonios : Caſſander, pour Caſſandros : Hydruntum, pour Hydrus : Leander, pour Leandros : Lyſander, pour Lyſandros : Machina, pour Mechane : Mæander, pour Mæandros : Meleager, pour Meleagros : Menander, pour Menandros : Periander, pour Periandros : Siculus, pour Sicelos : Sicilia, pour Sicelia : Talentum, pour Talanton : Tarentum, pour Taras : Tarentinus, pour Tarantinos : Velia, pour Helia : Velienſes, pour Heliæi : Vibo, Vibonenſis, pour Hippo, Hipponiates : Vlyſſes, pour Odyſſeus.
Ais, planche : Ais, ville : Aiſſer : alier, fleuue : allier : alliage : aloüete : amande : amandier : amande : amander : ame : amer : amertume : apoſeme : appoſer : approche : apporcher : arbre : arbriſſeau, ars, pour epaules : aſſieger : aſſiegemant : aune : auner : aunage : auoir.
Baieus : Beſſin : bain : baigner : baignoire : baſton : baſtonnet : baſtonner : batre : baterie : bature : Beauſſe : Beausſons : Beauuais : Beauueſis : benir : beniſſon : Berri : Berruiers : Beſiers : beuf : beurre : beuuande : beuuete : beuueur : bien pour bene : bien pour bonum, boire : bouche : Bourguinion : Bourgogne : bras : braſſelet : Bretagne : Bretons : bufle.
Cabus : caillé : caillote : cambre : camus : Cauaillon : cendre : cendrier : cendrer : cepier : cerf : cerne : cerner : cerneau : Chaalons : chaine : chainete : chainon : chair : chaire : chaiſe : chaleur : chaleureus : Chalon : chalumeau : chambre : chambrier : chambriere : chameau : chapitre : char : charbon : charbonnier : chardon : chardonneret : chardoniere : chariot : charme : charmure : charme, arbre : charnel : charnu : charrete : charron : chat : chateau : chatelain : chaud : chauderon : chaudiere : chaume : chauſſe : chef : chenil : cheoir : cherté : cheual : chevre : chevreau : chevron : chien : choſe : chou : cité : citoien.
Ie n’an quoterai pas d’auantage, d’autant que, ce peu eſt plus que ſuffiſant à faire voir au vrai, que ci deuant i’ai afleuré, auec connaiſſance de cauſe, que de trante pieces de notre langue, les vint-neuf, ne reſſamblent que fort peu, à leurs matrices Latines. Que ſi ie voulois faire l’anatomie, par le menu, de chaque mambre, des ſeuls mots capitaus, que i’ai cités, ie ferois voir euidammant, que de çant mots François, originaires du Latin, les quatre vints-dixneuf n’ont aucun rapport au ſon, auec leurs ſources materneles. Et ie le montre, an paſſant, an ce ſeul mot Auoir, lequel nous auons deuiſagé, an lui leuant ſa premiere lettre, & outre ce, delabré an tous ſes mambres : & voiés commant.
I’Ai, i’auois, i’ai eu, i’auois eu, i’aurai, i’aie, que i’euſſe, que i’euſſe eu, que i’ai eu, que i’aurois, & le reſte. Voiés ſes bigarrures, ſes detours, à ſe detraquer des briſées de ſon pere, & de quele maniere il ſe replie dans ſoi-meme, pour s’an equarter d’auantage, & nous diuertir de la connoiſſance de ſon eſtoc. Ie me deporte d’an anatomiſer d’autres, autant, pour le moins, extrauagans, que celui-ci, pour n’abuſer de la patiance du Lecteur.
An ſuite donques, de ce que ie viens de prouuer, ie me ſans, & porte pour antieremant dechargé, de repreſanter ci aprés an mon ecriture, par des lettres dormantes, ſuperfluës, importunes, les veſtiges de l’etymologie Romaine, és mots de notre langue : & ce, d’autant plus conuenablemant à la bien-ſceance de cet idiome, que toutes les Gaulles ſe ſont, de toute memoire, departies de cete Regle Etymologique, és quatre-vints, & dixneuf parties de çant, en tout le cors de leur langue.
C’eſt à vous, Messievrs les Zelatevrs Etymologiqves, de perſuader, par puiſſantes raiſons, à toutes la France, de ſe ranguer à vos Maximes, au fait de cete Reforme langagere, & ce, an dreſſant bien à propos l’etat de votre Regle Etymologiſante, dont vous aués le deſſein bien auant imprimé dans l’ame, Zelatrice de l’integrité des langues. Et quand il paroitra manifeſtemant, que vous aurés operé ſur les volontés de tout ce Roiaume, pour cet effet : ie proteſte, que ïe ſerai le premier à reformer tout ce, que i’ai ecrit hors de la teneur de vos Maximes, que ie ſuiurai punctuelement le reſte de mes iours. Et ie ne veus, ni peus douter, que votre ſollicitude pour le bien public, ne s’tande au de là des liures François, à remettre an etat les Latins, & les Grecs, au ſuiet, que ie vous ai marqué ci deuant, & que vous ſçaués trop mieus : an quoi vous obligerés tout ce grand monde d’hommes lettrés, qui foiſonnent an notre France : & recueillirés outre ce, l’aplaudiſſemant vniuerſel de cete nation, & impremirés an ſon ame vne eternele memoire de vos grans merites.
Mais il importe fort à votre reputation, que certains petits Argolets, qui ſe qualifient de votre Eſquadre, mais ſans adueu, n’etandent pas le ſuiet de votre Reformation Etymologique, au de là de ſes limites natureles, & ne me querelent point, hors de propos, an cete matiere. Ils ſe figurent, voire ſe promettent bien aſſeurémant, que, dans votre Bvreav Critiqve des langves, leur ſera donné acte, d’auoir deüemant procedé, à me ſolliciter d’ecrire : En, non pas An, pour De, Ex, Latins au fait de lieu, de ſource : item, En, pour, De ce, De cela : & de meme, ces autres mots ; Encor, Encore, Endeter, Enditer, Endiue, Entendre, Entendement, Enuoi, Enuoier : Item ces autres, pour le regard de leur ſecond ſyllabe : Apprendre, Apprentis, Apprentiſſage, Attendre, Attendu, Attente : & apres ceus-ci, vne infinité de tels propres termes de notre langue, comme s’ils auoient bien quelque raport, par voie d’extraction, ou autremant, auec le langage Romain, d’où ſuiuit quelque deuoir à les lui conformer par l’ecriture : mais ancore que cela fut, i’ai fait voir ci deuant, par viues raiſons, que ie ne ſuis point obligé à cete regle.
Neantmoins, quand votre ſollicitude, à touſiours preceder regulieremant, negligeroit ce dernier chef, & laiſſeroit agir ces Carabins à leur diſcretion : les petits grimaus, de leur mouuemant, huëroient, & ſifleroient ces docteurs à ſimple ſemelle, & leur fermeroient aiſémant la bouche.
Mais quant au principal point, de la reduction des trois langues ſuſdites, aus vraies racines Etymologiques, pour le regard de ce qu’elles ont amprunté des autres idiomes, & grandemant alteré : & au ſon, & an l’ecriture : ie me vieus promettre, & de votre zele, & de votre extraordinaire ſuffiſance, que, dans peu de mois, vous an ferés voir à notre ſiecle vn chef-d’œuure digne de vous : & me donnerés ſuiet d’aimer, & benir votre conteſte, an matier d’orthographe, qui aura fourni la cauſe, fortuitemant, & hors d’attante, à vn ſi profitable, ſi riche, & ſi genereus ouurage.