Idées républicaines, augmentées de remarques/54

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LIV.

Monteſquieu, il faut l’avouer, ne cite pas mieux les auteurs Grecs que les Français. Il leur fait ſouvent dire à tous le contraire de ce qu’ils ont dit.

Il avance en parlant de la condition des femmes dans les divers Gouvernements, ou plûtôt en promettant d’en parler, que chez les Grecs, (Liv. VII. chap. 10.) l’amour n’avoit qu’une forme que l’ont n’oſe dire. Il n’héſite pas à prendre Plutarque même pour ſon garant. Il fait dire à Plutarque que les femmes n’ont aucune part au veritable amour. Il ne fait pas réflexion que Plutarque fait parler pluſieurs interlocuteurs ; il y a un Ptotogene qui déclame contre les femmes, mais Daphneus prend leur parti ; Plutarque décide pour Daphneus ; il fait un très-bel éloge de l’amour céleſte & de l’amour conjugal ; il finit par rapporter pluſieurs exemples de la fidélité & du courage des femmes. C’eſt même dans ce dialogue qu’on trouve l’hiſtoire de Camma & celle d’Eponime femme de Sabinus, dont les vertus ont ſervi de ſujet à des piéces de théatre.

Enfin il eſt clair que Monteſquieu dans l’Eſprit des Loix a calomnié l’eſprit de la Grece en prenant une objection que Plutarque réfute, pour une loi que Plutarque recommande.

LIV.

Le goût de l’Auteur devoit naturellement déterminer ſa critique à juſtifier Plutarque & à venger l’eſprit de la Grece ſur l’amour des femmes. Il eſt néanmoins certain qu’avant la Loi du mariage établie par Cecrops, l’amour conjugal n’étoit guere connu des Athéniens.