Histoire des doctrines économiques/3-2-1

CHAPITRE II

L’HISTORISME ET LES LOIS ÉCONOMIQUES

I

L’ÉCOLE HISTORIQUE


L’historisme et le socialisme d’État, comme l’hégélianisme, sont des produits d’une origine bien allemande. C’est, donc en Allemagne que nous en trouverons les principaux doctrinaires et les premiers apôtres.

Nous avons cité déjà parmi eux Knies et Hildebrand[1].

Knies, professeur à l’Université de Heidelberg, publia en 1853 le manifeste le plus systématique et le plus complet de la nouvelle école, sous ce nom : l’Économie politique regardée du point de vue de la méthode historique[2].

On ne saurait pourtant nier qu’il y ait une part sérieuse de vérité dans le chapitre où il décrit l’influence que les événements et les circonstances ont toujours exercée sur les économistes classiques et sur la forme spéciale dans laquelle ils ont exprimé des principes[3]. Nous en avons fait nous-même la remarque pour les physiocrates ; on peut la répéter pour Malthus et Ricardo, qui voyaient l’Angleterre emprisonnée dans son territoire et ne soupçonnaient pas l’importation à vil prix des blés d’Amérique ; pour Carey, à qui le voisinage du Far-West épargnait le souci de l’exiguïté d’un monde trop petit pour l’humanité ; pour Bastiat, enfin, que la crainte très légitime du socialisme jetait dans l’enthousiasme d’une liberté pleine d’harmonie et de bienfaits.

Hildebrand avait déjà fait paraître, en 1848 son Économie nationale du présent et de l’avenir[4], conçue dans le même esprit. Hildebrand a jeté aussi dans le monde économique une classification des états sociaux qui lui a survécu. C’est la distinction entre une Naturalwirthschaft (ou économie naturelle) et une Geldwirthschaft (ou économie monétaire), selon que les marchandises et les services sont ordinairement payés en denrées ou payés en argent, ou plus exactement selon que les produits sont consommés la plupart du temps avant échange ou bien qu’ils le sont après[5] : car on ne conçoit guère une société qui ait multiplié les échanges autrement qu’avec la monnaie. Le passage de l’un à l’autre régime peut être observé plus ou moins nettement pour tous les peuples du moyen âge. Mais Hildebrand voulait une classification tripartite : aussi, après l’économie monétaire, prédisait-il une économie fiduciaire ou Creditwirthschaft, dans laquelle la monnaie devait être remplacée par les papiers de crédit. Par malheur pour Hildebrand, ce dernier terme de la trilogie a été repoussé, même en Allemagne, entre autres par Knies et Wagner, de la même école historique cependant.

À vrai dire, Roscher les avait déjà tous précédés[6]. Roscher avait donné, dès 1843, son Plan d’un cours de science politique d’après la méthode historique[7], suivi en 1854 des Principes d’économie nationale[8].

Les économistes, dit Roscher, se demandent tantôt : « Qu’est-ce qui devrait être ? » et tantôt « Qu’est-ce qui est ? ». Ils font de la méthode idéaliste dans le premier cas ; dans le second, de la méthode historique, physiologique, descriptive. Chez les idéalistes, il y a des tiraillements incessants et des discordes, parce que les théoriciens, en cherchant ce qui devrait être et en le cherchant d’après la pure raison, ne peuvent pas cependant s’empêcher d’être les interprètes des aspirations de leur époque. À quoi bon chercher l’idéal économique ? Il n’y en a pas qui soit commun aux divers peuples. Il faut débuter par l’étude de l’anatomie économique et faire une sorte de physiologie. Ainsi l’économie politique quitte le caractère de science abstraite : elle devient d’une part une description comme l’histoire, et de l’autre côté un art pratique[9]. Roscher, après Hildebrand, appelait « économie nationale » cette conception nouvelle de l’économie politique. Peu à peu le penchant vers l’analyse descriptive et pour ainsi dire anatomique le domina de plus en plus, et il finit en écrivant une Histoire naturelle du césarisme, suivie d’une Histoire naturelle de la démocratie.

Il a laissé, dans un autre ordre d’idées, une Histoire de l’économie politique en Allemagne, qui a obtenu un grand et légitime succès[10].

Bien d’autres noms peuvent être cités après ceux-là, notamment ceux de Lujo-Brentano, professeur à l’Université de Vienne[11], de Rœssler[12], de Stein[13], et bien d’autres encore. Nous ne pouvons nous arrêter que sur l’influence que ces doctrines ont exercée en dehors de leur pays.

Deux hommes surtout personnifient l’école historique allemande contemporaine, Wagner et Schmoller.

Adolf Wagner, successivement professeur à Vienne, à Hambourg, à Dorpat, puis à Fribourg et finalement recteur de l’Université de Berlin, se contente d’affaiblir la notion des lois économiques bien plutôt qu’il ne la renverse. Il distingue encore entre elles les lois de mouvement, qui expriment comment certains groupes de faits arrivent à se produire, et les lois d’évolution, qui expriment une régularité dans la succession des hypothèses au milieu desquelles ces lois de mouvement peuvent s’appliquer ; ainsi les lois des prix sont des lois de mouvement, tandis que c’est une loi d’évolution qui a fait arriver le régime de la grande industrie[14] : mais « toutes ces lois n’ont qu’une très faible analogie avec les lois de la nature », tellement «les causes sont variées », et tellement « les mobiles psychiques, qui déterminent les actions humaines et par suite les phénomènes économiques se différencient entre eux, au point de ne pouvoir être compris dans de simples formules[15] ».

Wagner, en effet, a beaucoup insisté sur la pluralité des mobiles de nos actes, avec ce qu’il appelle leur « motivation ». Adversaire d’Adam Smith, il lui reproche d’avoir trop isolé le mobile de l’intérêt pécuniaire et d’avoir aussi trop laissé croire que l’homme soit uniquement conduit par la recherche, de l’avantage économique et par la crainte de la gêne. Il fallait tenir compte, dit Wagner, de trois autres motifs intéressés, qui sont : 1° la recherche des récompenses et la crainte des punitions ; 2° la recherche de l’honneur et la crainte du déshonneur ; 3° la recherche de l’activité et la crainte de la passivité — tous les trois, par conséquent, sous leurs deux formes positive et négative. — Il fallait aussi tenir compte d’un mobile désintéressé, le sentiment du devoir, qui devient dans sa forme négative, le sentiment du remords[16]. Cependant les religions, et en particulier le christianisme, ont donné à tout, jusqu’à ce sentiment même du devoir, un fondement égoïste par l’attrait ou la crainte des sanctions de l’au-delà[17].

Wagner, cependant, essaye de réagir contre les tendances plus avancées de la jeune école historique conduite par Schmoller : car il croit encore à l’universalité de la nature économique et à la constance de l’égoïsme humain[18].

Gustave Schmoller, professeur à l’Université de Berlin, est en effet un évolutionniste plus hardi. Si l’on peut accepter la plupart de ses idées sur le concours que l’étude de l’histoire donne à celle de l’économie politique[19], on ne saurait approuver ses hypothèses indémontrables sur les origines des civilisations, des morales et des religions — systèmes provisoires, selon lui, qui naissent, qui s’entrechoquent et qui meurent, en devenant « le point de départ de temps nouveaux et de nouvelles formes sociales[20] ».

Ses Principes d’économie politique[21] ont voulu être tout ensemble un exposé magistral de la science moderne et un tableau de l’ascension économique de l’humanité. Le même esprit d’évolutionnisme y règne d’un bout à l’autre. On y voit l’économie familiale qui part de la promiscuité bestiale pour arriver à la famille contemporaine à travers le matriarcat et le patriarcat ; on y voit l’habitat se transformer peu à peu en nos vastes agglomérations urbaines et le clan s’élargir pour aboutir à la commune et à l’État[22]. « Le bien, dit expressément M. Schmoller, n’a pas une réalité fixe, mais une réalité en voie perpétuelle de formation : chaque époque, chaque système religieux et philosophique institue une hiérarchie des buts, des vertus, des obligations[23]. » La religion, cependant, est provisoirement bonne pour moraliser les classes inférieures ; car, si pour la remplacer « nous avons un idéal laïque et les spéculations des sciences de la nature……, le noyau et la valeur morale en sont encore douteux, et ce sera la grande question de savoir si les progrès de l’État, de l’école, de l’opinion publique sont déjà aujourd’hui où seront assez forts demain pour que le commun des hommes puisse se passer de l’appui et des règles de la religion[24]. »

Ces prémisses philosophiques ; commandent l’œuvre économique dans son entier : car « les systèmes économiques ne sont que des repousses, des rejetons des systèmes moraux, et ils en dépendent[25] » : et « notre exposé des phénomènes de circulation est un résultat du point de vue social, évolutionniste et éthique que nous avons justifié[26] ». Mais avec cela, dirons-nous, il y a plus d’une erreur de logique non moins que d’histoire : et que signifie, par exemple, une étude du concept de la valeur en général qui suit celle de la monnaie au lieu de la précéder[27] ?

Telle est, dans ses grandes lignes, cette nouvelle économie politique, que maintes fois, après Hildebrand et Roscher, on a appelée « nationale ». Pourquoi cette expression ? Il faut savoir la prendre en un sens tout différent de celui que List y donnait. Ce que List appelait l’économie « nationale », c’était celle qui, tenant le milieu entre l’économie domestique et l’économie universelle, étudiait les causes de la prospérité d’un peuple en face des autres nations qui le concurrencent. Rien de semblable ni avec Roscher, ni avec Lujo-Brentano : l’épithète, ici, n’a d’autre but que de montrer le caractère relatif et tout local de la science, dès qu’on la ramène aux procédés et aux points de vue de l’historisme. On est loin aussi du sens que les premiers commentateurs allemands d’Adam Smith donnaient à leur mot Nationalœkonomie.

Nous en avons dit assez pour faire ressortir les traits essentiels de l’historisme germanique.

Comme l’a déclaré un de ses interprètes les plus autorisés, Karl Bücher, « l’école historique veut faire de l’économie politique la théorie de l’évolution économique des peuples, tandis que le smithianisme (lisez : l’économie politique classique) se propose d’approfondir les lois de la vie économique actuelle[28]. »

À ce titre, toutefois, il n’y aurait encore ni contradiction nécessaire, ni même dualité d’écoles : il y aurait seulement deux sciences distinctes, puisque le but de l’une serait différent de celui de l’autre, sans qu’elles soient l’une et l’autre opposées. Ce serait comme un retour à la distinction que Stuart Mill avait faite entre la statique et la dynamique.

Mais ce n’est point ainsi que les « historiques » comprennent et présentent d’ordinaire la différence. Il n’y a pas même seulement une différence de méthode, en ce que les uns auraient fait de la déduction et que les autres ne voudraient faire que de l’induction[29] : il y a bien réellement une véritable contradiction des principes et des lois.

Un auteur que nous avons déjà souvent cité, actuellement professeur à l’Université Harward et précédemment à Oxford, Ashley, dans la préface de son Introduction to English economic history and theory, a marqué très nettement l’antagonisme irréductible des deux écoles.

« Les enseignements de Roscher, d’Hildebrand et de Knies, dit-il, restés oubliés pendant plus d’un quart de siècle, n’ont été appréciés à leur juste valeur que lorsque les besoins pratiques de la vie moderne eurent montré les lacunes des vieilles méthodes économiques. Pendant ce temps, l’idée d’une évolution régulière de la société s’était fait lentement accepter. Soit que cette évolution ait été conçue comme la manifestation progressive de l’âme du monde, ainsi qu’elle l’a été avec Hegel, soit qu’il faille voir en elle, avec Comte, la croissance de l’humanité ; soit enfin qu’il faille y voir, avec Spencer, une adaptation de l’organisme social à tout ce qui l’entoure, l’effet est le même et le regard de l’économiste s’ouvre sur l’avenir et sur le passé avec des perspectives dont on n’avait jamais rêvé. On comprendra mieux ce changement si l’on examine les principes qui vont guider maintenant les recherches.

Ces principes peuvent être ainsi déterminés : 1° l’économie politique n’est pas un corps de doctrines absolument vraies, révélées au monde à la fin du siècle dernier et au commencement de celui-ci[30] ; elle n’est qu’un certain nombre de théories et de généralisations de plus ou moins de valeur ; 2° depuis qu’on a commencé à penser, aucun siècle n’a été sans idées économiques… ; 3° de même que l’histoire de la société, en dépit de ses reculs apparents, présente, un développement régulier, de même il y a eu un ordre régulier dans l’histoire de la pensée humaine et particulièrement dans l’histoire de ce que les hommes ont pensé sur le côté économique de la vie ; 4° de même que les économistes modernes ont pris pour données les conditions qui commençaient à exister de leur temps, ainsi les théories économiques plus anciennes étaient basées, consciemment ou inconsciemment, sur les conditions d’alors ; les théories du passé doivent être jugées par rapport aux faits du passé, et non pas par rapport aux faits du pressent ; 5° l’histoire semble démontrer qu’il n’y a eu aucune grande institution-qui n’ait eu pour un temps sa valeur et sa justification relative ; enfin, 6° il s’ensuit que les théories économiques modernes ne sont pas universellement vraies : elles ne le sont pas pour le passé, quand les conditions qu’elles réclament n’existaient pas ; elles ne le sont pas pour l’avenir, quand les conditions auront changé, à moins que les conditions ne changent pas et que la société ne devienne stationnaire[31]. »

En Angleterre, le représentant le plus illustre de l’école historique est Cliffe Leslie (1827-1882), Irlandais d’origine écossaise, professeur de droit et d’économie politique à Belfast, auteur, entre autres ouvrages, des Essays in political and moral philosophy, parus en 1879. Cliffe Leslie s’est vivement élevé contre la tendance de l’école classique vers les abstractions. Il a particulièrement combattu la formule du wage-fund[32]. Mais a-t -il édifié quelque chose ? M. de Laveleye, qui en fait le plus grand éloge, n’ose pas lui donner ce mérite. « Il a montré, dit-il, que notre science était à reconstruire des fondements jusqu’au faîte, et ensuite il a indiqué d’après quelle méthode il fallait le faire. Il n’a pas essayé de rebâtir l’édifice. Il prétend même qu’il serait prématuré de le tenter, parce que les matériaux ne sont pas encore prêts : mais du moins il en a dégrossi et taillé quelques-uns, et il a esquissé la marché à suivre pour mettre en œuvre ceux qu’un travail approfondi et persévérant préparera successivement[33]. » Il est difficile de juger un sceptique avec plus de scepticisme soi-même.

On pourrait aussi classer parmi les économistes de l’école historique Thorold Rogers (1823-1891), professeur d’économie politique à Oxford et membre de la Chambre des communes. Rogers, radical en politique et très sympathique au socialisme, dont il déclarait « ne craindre ni revendication injuste, ni révolution[34] », tenait pour les économistes « profondément ignorants des conditions sociales au sujet desquelles ils dogmatisent à perte de vue ». Plein pour eux du plus profond mépris, il espérait bien « le conserver toujours pour l’économie politique de cette espèce » et rangeait franchement parmi les « logomachies » la théorie de la rente et des revenus décroissants[35]. Cependant c’est par ses études historiques que Thorold Rogers a fait sa réputation, beaucoup plus que par un système d’une construction scientifique[36].

Il ne faudrait pas croire non plus que toute étude analytique ou descriptive des faits ou des institutions économiques du passé autorise à ranger celui qui s’y livre parmi les partisans de l’historisme. Bien plus, des travaux de ce genre peuvent amener à modifier certains jugements trop hâtivement formés ; ils peuvent même donner à croire que les cadres économiques et sociaux dans lesquels les hommes sont providentiellement appelés à se mouvoir, sont beaucoup plus variés que l’étroite observation d’un seul temps et d’un seul pays ne nous aurait induits à le penser : mais il n’y a rien là qui infirme cette idée de vérités abstraites et générales sur laquelle les économistes avaient assis leurs théories des lois économiques naturelles.

En Belgique, M. Émile de Laveleye (1822-1892), professeur à l’Université de Liège, peut être rangé également parmi les maîtres de l’école historique[37]. Par un autre côté, il collabora à l’avènement du socialisme d’État et il a permis à des socialistes proprement dits et révolutionnaires, tels que Benoît Malon, de le regarder comme un de leurs auxiliaires les plus précieux. « Les lois dont s’occupe l’économie politique, disait Émile de Laveleye, ne sont pas des lois de la nature : ce sont celles qu’édicté le législateur. Les unes échappent à la volonté de l’homme ; les autres en émanent[38]. » Il est connu surtout par son ouvrage sur la Propriété du sol et ses formes primitives, dans lequel il préconise le retour aux anciens régimes de propriété communautaire usités chez les peuples primitifs ou plus exactement dans la race germanique[39]. Au reste, sans aboutir aux mêmes conclusions, Knies avait argué déjà, contre l’école classique, des différences que le régime de la propriété avait présentées chez les Grecs, chez les Romains et généralement au cours des siècles[40].

En France, les traces d’historisme sont visibles chez M. Charles Gide, autrefois professeur d’économie politique à l’Université de Montpellier au cours de la publication des éditions successives de ses Principes d’économie politique, il a évolué rapidement de l’école libérale et conservatrice vers le socialisme, auquel il est apparu de plus en plus rallié. Malgré les critiques qu’il fait encore de l’école historique[41], il persiste à poser en principe que « les lois naturelles, bien loin d’exclure l’idée de changement, la supposent toujours[42] ». Il ne désespère pas même qu’un changement radical et profond doive s’opérer un jour dans la nature morale de l’homme, puisque, énumérant les mobiles qui pourraient nous inspirer et n’en trouvant, en dehors de l’intérêt personnel, point d’autres que la contrainte et l’amour, il conclut que « l’amour serait certes la vraie solution et qu’il faut espérer qu’un jour elle se réalisera[43] ». En attendant, dirons-nous, l’augmentation des crimes contre les personnes et des délits inspirés par l’égoïsme le plus féroce ne laisse pas de doute qu’en France nous ne marchions dans cette voie !

L’historisme est bien autrement accusé dans M. Espinas, professeur à la Faculté des Lettres de Bordeaux, auteur des Sociétés animales, ouvrage écrit dans le pur esprit de la sociologie évolutionniste[44], et auteur d’une Histoire des doctrines économiques, qu’il termine par cette conclusion : « Les solutions économiques ne peuvent pas prétendre à l’universalité et a la nécessité des démonstrations scientifiques… Étant un art, l’économie politique doit varier au cours des temps comme la forme des vaisseaux et les procédés de l’industrie comme les maximes d’éducation et d’enseignement. L’art économique obéit dans sa marche aux lois de l’évolution, comme la conscience sociale dont il n’est qu’un aspect[45]. » Mais qu’est-ce donc tout d’abord — dirons-nous — que la conscience sociale ?

Même la méthode des monographies et des enquêtes inaugurée par l’immortel Le Play — au moins quand on n’y apporte pas, comme lui, un esprit élevé et vraiment philosophique — entraîne facilement ceux qui la suivent vers un empirisme étroit et borné, avec lequel la science ne saurait rien avoir de commun. On ne s’est pas assez garanti contre cet écueil dans les études descriptives d’économie sociale qui ont obtenu la faveur du moment. Elles dénotent souvent le travail attentif du naturaliste enregistrant là des faits et ici des chiffres ; mais ce qui leur manque non moins souvent, c’est le sens critique du philosophe ; c’est l’esprit de synthèse et de généralisation du vrai savant. M. du Maroussem, par exemple, dans ses Enquêtes, pratique et théorie, a donné la pleine formule de ce scepticisme historique en décrivant la « méthode empirique de l’esprit », en demandant que « l’économiste empirique se garde surtout des mots travail et capital et de l’expression de valeur », et en comparant finalement le problème de l’étalon monétaire unique ou double à la querelle légendaire des gros-boutiens et des petits-boutiens, que Gulliver avait trouvée au royaume de Lilliput[46]. Parvenu là, on confectionne peut-être des catalogues : mais on a remplacé l’art de les lire par la patience de les dresser. L’historisme lui-même ne commandait pas cette abdication de la faculté de penser et de juger.

Les études sociologiques sur le monde de la préhistoire, que l’on prétend maintenant reconstituer avec l’observation des types sauvages les plus dégradés que l’on puisse retrouver dans l’Australasie, révèlent encore bien davantage cette négation brutale et cynique de l’absolu. Nous ne faisons que les signaler : car ce serait sortir de notre cadre que de rappeler comment les sociologues contemporains refont ; avec Westermarck, la genèse de l’institution du mariage[47], ou bien comment, avec Durkheim, ils s’évertuent à expliquer par un totémisme ancestral notre moderne répulsion contre l’inceste, sans la croire d’ailleurs raisonnable et naturelle[48].

Nous sommes plongés ainsi dans une sorte d’historisme moral, digne et nécessaire pendant de l’historisme économique. C’est que les erreurs se tiennent par un fatal enchaînement. L’absolu, chassé du domaine de l’intelligence, ne peut pas rester longtemps dans le domaine de la conscience et du sentiment. Simmel, professeur à l’Université de Berlin, n’avait-il pas enseigné déjà la relativité de la morale et son évolution perpétuelle[49], en même temps que son collègue Ihering avait enseigné que le droit n’est qu’un produit de l’utilité sociale ? L’idée d’une « force morale » n’est pour Simmel qu’un « mot dans lequel nous condensons en absolu quelque nécessité relative née au cours de l’histoire ». M. Vacher de Lapouge, qui a professé à l’Université de Montpellier, ne craint pas davantage de dire que « les notions du bien et du mal seront, dans un avenir très rapproché, très différentes de celles qui règnent aujourd’hui, et peut-être même opposées dans la plupart des points ». Tout en ne « voyant point de raison pour que l’assassinat ne soit point toujours considéré comme un crime », il est convaincu que « les notions relatives au vol devraient subir de profondes modifications dans un milieu collectiviste[50] ».

Ces théories, éminemment subversives, en sont venues à inspirer nos hommes d’État eux-mêmes. Un d’eux, et non des moins en vue, M. Bourgeois, disait que « les progrès de la pensée humaine ont lentement transformé les idées morales… Une tâche, ajoutait-il, s’impose aux hommes. Il s’agit pour eux, partant des vérités certaines que seule apporte la science, de rechercher en quoi ces vérités ont pu modifier les idées morales traditionnelles et les définitions anciennes du droit et du devoir dans l’humanité[51] ». Le « Collège libre des sciences sociales », soutenu par des appuis officiels, professe cette même doctrine dans ses conférences de morale ; et l’expression en a été rarement plus franche et plus énergique que dans celle que M. Moch y a faite sur l’Ère sans violence[52]. Ainsi la voie est frayée plus facile à toutes les utopies. N’était-ce pas déjà Auguste Comte qui avait assigné à l’utopie, dans la sociologie, le même rôle qu’à l’hypothèse dans les sciences naturelles ? Or, en physique, l’hypothèse est parfaitement permise — sur l’émission par exemple ou l’ondulation de la lumière ; pourquoi donc l’utopie sociale et son expérimentation seraient-elles davantage réprouvées ? « Qu’est-ce qui empêche, écrit le socialiste Fournière, que l’idéalisme ne devienne l’agent conscient de l’évolution ? » Et pour Fournière, ennemi de la propriété — simple « création sociale » — c’est le communisme qui est au terme de l’utopie, avec l’amour libre et l’union non moins libre[53].

Nous devions un instant d’attention à toutes ces théories aussi dangereuses que nouvelles[54]. S’il est vrai, en effet, que l’économie politique étudie, selon la définition de Stuart Mill, la manière dont la recherche de l’intérêt personnel guide l’homme dans la production et le mouvement des richesses « en tant du moins que les phénomènes de cet ordre ne sont pas modifiés par la poursuite d’un autre objet », il est clair qu’une altération profonde de notre nature intellectuelle et morale, ou bien un changement radical survenu dans notre manière de sentir et de juger ce qui est mal et ce qui est bien, ne pourrait pas ne pas avoir une immense répercussion sur les institutions, considérées dorénavant comme des combinaisons et des procédés que les hommes peuvent imaginer pour se soustraire tout ensemble aux lois économiques et aux lois morales.

« Depuis le milieu du siècle, a-t-on dit, une réaction salutaire est partie d’Allemagne. On a reconnu que les prétendues lois naturelles de la vie économique n’étaient au fond que des lois sociales soumises elles-mêmes à la loi supérieure de l’évolution, et que c’était une erreur d’attribuer une valeur universelle à des observations tirées par abstraction de l’étude du présent[55]. » Et la « loi supérieure de l’évolution aurait bien embrassé l’ordre économique, puisqu’il est « hors de doute que l’homme a existé sans travailler pendant d’immenses séries d’années[56] » ; elle aurait embrassé aussi l’ordre moral, puisque « trop d’observations prouvent que le sentiment qui unit parents et enfants est un produit de la civilisation[57] ».

Toutefois l’idée de ces changements est plus qu’une hypothèse, elle est une erreur. Le monde physique ne change pas autour de nous ; le monde moral que nous sommes nous-mêmes, ne change pas davantage en nous.

Ce qui peut changer et ce qui change, c’est seulement notre connaissance plus ou moins exacte et plus ou moins complète des forces que ce monde physique renferme et peut être contraint de mettre à notre disposition ; c’est la perspicacité plus ou moins grande que nous apportons à connaître les lois du monde moral ; c’est la bonne ou la mauvaise foi avec laquelle la généralité des hommes s’avouent leur devoir, et la volonté plus ou moins ferme avec laquelle ils cherchent à l’accomplir ; ce sont enfin les jugements erronés ou judicieux qu’ils portent sur les actes de leurs semblables.

La possibilité de ces changements et leur effective réalisation suffisent pour que le monde ait une histoire, pour que l’humanité ait un progrès, et que la suite des temps présente, même sous le côté économique, une variété qui est une des beautés de l’œuvre divine. Mais cette œuvre, si variée qu’elle soit dans l’espace et variée aussi dans le temps, ne peut pas être moins régulièrement ordonnée dans son plan général, ni moins raisonnable et moins fixement sage dans tous les rapports de causalité qu’elle met en action. Par conséquent, dans le monde économique comme dans le monde physique et le monde moral, il doit exister des lois naturelles immuables, placées au dessus de ces hommes qui les connaissent et s’y conforment plus ou moins bien. Ni l’opinion qu’ils en ont, ni la contrainte qu’ils peuvent essayer de leur faire subir, ne changeront jamais rien à l’objectivité intrinsèque de ces lois.

Voilà pourquoi Le Play a pu tracer les grandes lignes d’un « retour au bien », parce qu’il avait foi dans la constance des lois morales du monde économique.

Voilà aussi pourquoi, en sens inverse, les principes de l’école historique, tels que nous les trouvions formulés par Ashley, rendraient éternellement impossible une interprétation économique de l’histoire », malgré le titre ambitieux que Rogers avait donné à son livre. Si, en effet, toutes les vérités économiques sont relatives, s’il n’y a pas « de grande conception, de grand corps de doctrines qui, ayant réellement et longtemps influencé la société, n’ait pas renfermé une certaine vérité et une certaine valeur eu égard à des circonstances temporaires[58] », je demande comment l’on pourrait affirmer, par exemple, la stérilité du travail servile ; je demande comment on pourrait expliquer le progrès ou la décadence des peuples par la supériorité ou l’infériorité de leurs institutions économiques et sociales au regard de celles des autres peuples. Ainsi l’école historique aboutirait à nous fermer l’intelligence de l’histoire. Ce n’est pas assez ; et si l’absolu n’existe pas, je demande comment même on pourrait apprécier, d’une manière absolue les conséquences économiques ou politiques du divorcé, de la débauche et de la promiscuité : car s’ils sont actuellement funestes à la société, qui donc, à moins de croire à un absolu quelconque, voudrait soutenir ou pourrait démontrer qu’ils dussent l’être toujours ?

Vu sous cet aspect, il est hors de doute que l’historisme recèle en lui mille fois plus d’immoralités que les « historiques » n’en ont jamais trouvé à reprocher au classicisme des disciples d’Adam Smith. Nous n’ignorons point cependant que des catholiques se sont insurgés contre la pensée que des lois économiques puissent exister ; quant à nous, nous restons plus que jamais convaincu qu’ils n’avaient pas réfléchi à ce manque d’ordre et de beauté qu’ils voulaient introduire dans un des innombrables royaumes de la Providence.

    doit pas être confondu avec le baron vom und zum Stein, homme d’État prussien, mort en 1831, qui avait pris une grande part à la reconstitution militaire et financière de la Prusse après Iéna.

  1. Bruno Hildebrand (1812-1878), professeur à l’Université de Breslau, puis à Marburg, député de Marburg à l’Assemblée nationale de Francfort en 1848, obligé ensuite de s’expatrier et professeur d’économie politique à l’Université de Zurich, enfin rentré en Allemagne et professeur à l’Université d’Iéna en 1861. Il fonda en 1862 les fameuses « Annales d’économie nationale et de statistique », Iahrbücher fur Nationalœkonomie und Statistik, qui furent continuées après lui par Conrad, son gendre.
  2. Die politische Œkonomie vom Standpunkte der geschichtlichen Methode.
  3. Knies, op. cit., ch. iii, § 4, pp. 168-206.
  4. Die Nationalœkonomie der Gegemvart und der Zukunft.
  5. Dans les Iahrbücher fur Nationalœkonomie, 1864.
  6. Roscher (1817-1894), professeur à l’Université de Goettingen de 1843 à 1848, puis à celle de Leipzick de 1848 jusqu’à sa mort.
  7. Grundriss zu Vorlesungen über die Staatswissenschaft nach geschichtlicher Methode.
  8. Grundlagen der Nationalœkonomie, 2e édit., 1857.
  9. Grundlagen der Nationalœkonomie, Introduction, ch. iii, §§23-25, « Idealistische Methode ; — §§ 26-29, « Historisch-physiologische Methode ».
  10. Geschichte der Nationalœkonomie in Deutschland, Munich, 1874.
  11. Die Klassische Nationalœkonomie, Leipsick, 1888.
  12. Über die Grundlehren der von A. Smith begründeten Volkswirthschaftstheorie, Erlangen, 1868 ; et Lehrbuch des deutschen Verwaltungsrechts, Erlangen, 1872-1873.
  13. Stein (Lorenz von Stein) (1813-1890), Danois, qui avait habité Paris, s’y était lié sous Louis-Philippe avec les sommités socialistes d’alors et qui publia (outre Der Socialismus und Kommunismus Frankreichs, 1843) un System der Staatswissenschaft ou « Système de la science politique ». Il ne
  14. Sur la bibliographie de l’école historique allemande, voyez Wagner, Fondements de l’économie politique, tr. fr., 1904, §§ 14-15-16, pp. 54 et s. — Richard Schüller, Die Wirthschaftspolitik der historischen Schule, Berlin, 1899.
  15. Ibid., p. 345.
  16. Cette démonstration remplit tout le chap. i du t. 1, pp. 99-197, ce qui indique l’immense importance que Wagner y attache.
  17. Fondements de l’économie politique, tr. fr., pp. 166 et s., p. 189.
  18. Voyez (Op. cit., pp. 73 et s.) comment Wagner explique lui-même ses divergences de vues avec Schmoller. — Comparez Bougie, les Sciences sociales en Allemagne, 1896, pp., 71 et s.
  19. Schmoller, Économie nationale, économie politique et méthode, 1893, § ix, dans Politique sociale et économie politique, tr. fr., 1902, pp. 379 et s.
  20. Op. cit., §§ iv et v, p.354.
  21. Tr. fr., t. 1 et II, 1905 ; t. III, 1906 ; t. IV, 1907 ; t. V, 1908.
  22. Op. cit., t. I.
  23. Op. cit., t. I, p. 110.
  24. Ibid., p. 117.
  25. Op. cit., t. I, p. 168.
  26. Op. cit., t. III, p. 6.
  27. Op. cit., § 170, t. III, p. 241.
  28. Karl Bücher, dans Die Entstehung der Volkswirthschaft, 1893, cité par Block, Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 2e édit., t. 1, pp. 32-33. — Voyez dans le même sens les Études d’histoire et d’économie politique du même auteur, qui renferment l’ouvrage cité ci-dessus et qui ont été traduites en français (Bruxelles et Paris, 1901), avec une préface éminemment suggestive sur l’historisme. Celle-ci a été écrite par M. Pirenne, professeur à l’Université de Gand.
  29. Pour la défense des économistes classiques contre les historiques au sujet de la méthode et de l’observation des faits ; voyez Emilio Cossa, Il Metodo degli economisti classici, 1895, ch. i, ii et iii.
  30. C’est-à-dire XVIIIe et XIXe siècles : la première édition d’Ashley est de 1888.
  31. Ashley, op. cit., 3e édit., t. I, pp. IX-XI. — À ce titre là, est-ce que par hasard Adam Smith devrait être rangé dans l’école historique, pour avoir fait remarquer que la disparition du système militaire féodal et les armements modernes avaient amené l’accroissement des impôts et empêché le souverain de faire face aux charges publiques avec les revenus d’un domaine royal ou princier ? Évidemment non. Cependant c’était bien « juger une théorie du passé d’après les faits du passé » ; On en trouverait bien d’autres exemples chez les classiques. Il est donc faux que cette formule soit exclusivement propre à l’historisme. — Aussi bien Knies (Die politische Œkonomie vom Standpunkte der geschichtlichen Methode, ch. iii, § 3, pp. 147 et s.) et Comte (Cours de philosophie positive, t. IV, p. 212) reconnaissent-ils très justement la différence des méthodes et des appréciations historiques dans Adam Smith d’une part et dans ses successeurs d’autre part comme Malthus et Ricardo.
  32. Il fait contre elle cette objection historique. L’Irlande, dit-il, avait huit millions d’habitants vers 1845. L’émigration causée par la famine en enleva deux millions entre 1846 et 1848, Le salaire cependant né monta pas. Et Cliffe Leslie de conclure : « Le taux du salaire est le résultat d’un contrat entre l’employeur et l’employé. Ce que l’employeur donne dépend de ses ressources et de ses profits, et non du total des fonds dans la possession des autres. » Ici il a raison.
  33. É. de Laveleye, Cliffe Leslie et les tendances nouvelles de l’économie politique en Angleterre, dans Essais et études, t. II, p. 254.
  34. Travail et salaires en Angleterre depuis le XIIIe siècle.
  35. Préface de l’Interprétation économique de l’histoire, pp. 3 et 8 de la traduction française.
  36. En ce qui concerne Thorold Rogers notamment, on peut se demander s’il ne lui arrive pas de travestir les opinions des économistes classiques pour avoir l’occasion de les présenter comme fausses ou comme absurdes. — Son Manuel d’économie politique, paru en 1866, n’indiquait encore que des tendances à une rupture : l’Introduction économique de l’histoire, achevée en 1888, révèle un immense chemin parcouru.
  37. Auteur des Éléments d’économie politique (1882), qui ont eu de nombreuses éditions et ont été traduits en sept langues ; de très nombreux articles de revues réunis dans les Essais et Études (3 volumes, 1894-1897) ; de la Propriété du sol et ses formes primitives, 1874, etc., etc. — M. Luigi Cossa, qu’on ne saurait cependant accuser d’intransigeance dans la défense des principes sociaux, juge ainsi : M. de Laveleye : « Ses Éléments d’économie politique montrent son peu d’aptitude à parler de la science pure, dont-il ne connaissait exactement ni l’objet, ni le but, ni la méthode » (Histoire des doctrines économiques, tr. fr., p. 399). Alors que savait-il ?
  38. Éléments d’économie politique.
  39. Voir la réfutation dans le Collectivisme de P. Leroy-Beaulieu.
  40. Knies, Die politische Œkonomie vom Standpunkte der geschichtlichen Methode, ch, iii, § 2, pp. 130 et s.
  41. Principes d’économie politique, 5e édit., pp. 34-35.
  42. « Si le monde était à refaire, dit-il, et s’il pouvait être refait dans des conditions de liberté absolue, rien ne prouve qu’il fût semblable à celui qui existe aujourd’hui. On n’est-pas autorisé à conclure que, parce que les lois naturelles sont permanentes et immuables, les faits et les institutions économiques actuelles doivent avoir aussi un caractère de permanence et d’immutabilité… Les lois naturelles, bien loin d’exclure le changement, le supposent toujours… Et non seulement les faits et les institutions économiques peuvent changer, mais encore notre volonté n’est pas impuissante à déterminer ces changements » (Op. cit., p. 23). — Nous concédons bien que notre volonté change les faits et les institutions ; mais cela change-t-il les principes d’après lesquels le monde est gouverné ?
  43. Op. cit., p. 29.
  44. Paru en 1878.
  45. Histoire des doctrines économiques, s. d. (nous croyons pouvoir donner la date de 1891), pp. 346-348. — À citer pour l’Amérique Francis-Amasa Walker, auteur de Political economy dans le sens historique. — Francis-Amasa Walker est connu également par The Wages question, 1876, où M. Gide a cru voir pour la première fois la théorie du rapport entre le salaire et la productivité du travail. Cependant cette théorie avait été énoncée déjà maintes fois, notamment par Thünen (voyez supra, pp. 346-347 et s., et Block, Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 2e édition, t. II, p. 258). Il ne faut pas confondre cet Amasa Walker avec son père Francis-Amasa Walker (1799-1875), député, sénateur, secrétaire d’État aux États-Unis, qui appartenait plutôt, comme économiste, à l’école classique libérale et qui a laissé des travaux estimés, notamment Nature and uses of money, 1857.
  46. Du Maroussem, Enquêtes, pratique et théorie, Paris, 1900, IIe partie, et particulièrement pp. 225, 250, etc.
  47. Westermarck, l’Origine du mariage dans l’espèce humaine, tr. fr.
  48. « Le totem est un être, animé ou inanimé, plus généralement un végétal ou un animal, dont le groupe est censé descendu et qui lui sert à la fois d’emblème et de nom collectif » (Durkheim, la Prohibition de l’inceste et ses origines, inséré dans l’Année sociologique, 1896-1897, op. cit., p. 2). — Voyez aussi sur le même sujet un autre article de M. Durkheim, le Totémisme, inséré dans l’Année sociologique de 1902.
  49. Einleitung in die Moralwissenschaft, Berlin, 1892-1893.
  50. Vacher de Lapouge, Sélections sociales, 1896, pp. 302-304, 323.
  51. Léon Bourgeois, Solidarité, 1896, p. 78.
  52. Publiée dans le recueil Questions de morale de MM. Belot, Bernès, Buisson, etc., 1900 (voyez op. cit., pp. 31 et s.).
  53. Fournière, l’Idéalisme social, 1898. — Voyez le chapitre « l’idéalisme, forme pensée de l’évolution » ; voyez aussi la IIIe partie du volume. — M. Fournière a été chargé de professer officiellement l’économie sociale à l’École polytechnique.
  54. Voyez dans notre article le Darwinisme et la sociologie évolutionniste (Revue catholique des Institutions et du Droit, août 1897) la « Morale de l’évolutionnisme », loc. cit., pp. 108 et s.
  55. Pirenne, préface aux Études d’histoire et d’économie politique de Karl Bücher, p. vi.
  56. Bücher, Études d’histoire et d’économie politique, p. 6.
  57. Ibid., p. 15.
  58. Ashley, op. cit., p. xi.