Histoire de Servian/Chapitre13

CHAPITRE XIII



Le Compois

Il existe à Servian deux compois. Le premier, établi sous Henri iv, est tellement usagé et en mauvais état qu’il est difficile de s’en servir ; il fut refait en 1768. C’est de ce compois que nous allons parler et qui fait foi dans les contestations même de nos jours.

Par une délibération du 24 novembre 1768, les consuls de Servian demandèrent la facture d’un nouveau compois. La Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier le leur accorda. Conformément à l’arrêt du 20 septembre 1689, les consuls durent assembler les habitants en conseil général avec les syndics des forains. Ce conseil se composait de 6 où 12 conseillers politiques et d’un nombre double des plus forts contribuables, avertis 24 heures à l’avance, tenus de se rendre, à peine de 10 livres d’amende. Ils prendront la responsabilité du compois et seront aidés par les entrepreneurs, arpenteurs, etc.

Tout étant préparé, le 25 mars 1771, après-midi, à l’hôtel-de-ville, l’assemblée fut réunie.

Par devant M. Janel, juge pour S.A.S. Mgr le prince Conty, en la justice ordinaire du lieu, assisté de M. Amillon, procureur fiscal ; M. Louis Vialles, premier consul ; le sieur Aiguesvives, second consul ; Bernard Couronne, troisième consul ; M. Martin, syndic des habitants forains : M. de Barrès, capitaine des grenadiers ; Mas du Coussat, Jean-Antoine Rivière, Étienne Vialles, Guillaume Granal, Guillaume Turriès et François Cacarié, conseillers ordinaires et renforcés (quelques notabilités ne s’étaient point rendues à l’appel), sur la proposition du sieur Amillon, gradué en droit, on établit le Compois.

1o La livre allivrante du compois sera de valeur intrinsèque de 480 livres de fonds. La rente est évaluée au dernier vingt qui est cinq pour cent, faisant distraction du tiers de ladite rente qui est pour les réparations et les deux tiers restants seront mis et allivrés en compois conformément à la table suivante ;

A. La livre allivrante du compois sera de valeur intrinsèque de 482 livres de fonds.

2o Les maisons du lieu et faubourgs sont estimés 5 livres la canne ;

3o Les moulins à huile et à blé, selon l’arrêt de la Cour des aides ;

4o Les magasins, remises, écuries, etc, 3 livres ;

5o Les pattus, basse-cours, cazals, 2 livres ;

Les cros à fumier un demi-denier.

Des jardins il est fait 3 degrés.

Le bon estimé 350 livres est allivré 14 sols 7 deniers.

Le second de bon, 8 sols 4 deniers.

Le 3 faible, 6 sols.

Les olivettes ont 5 degrés variant de 6 sols à 1 sol.

Les champs 6 degrés.

Les vignes 6 degrés de 4 sols à 4 deniers.

Puis, on estime les propriétés soit selon leur rendement, leur valeur, leur emplacement. D’après l’examen des titres, en première valeur sont placés les muscats, puis les vignes rouges, puis les jardins, les olivettes, les champs, enfin les hermes.

Il s’agit ensuite d’écrire le Compois : Le 16 juin 1771 eut lieu l’adjudication. Le sieur Verbet, de Florensac, notaire et féodiste, se présenta et demanda, pour ce travail, 4.200 livres, il fournit ses titres et certificats contresignés du premier consul de Florensac.

Après lui, Géraud Revel de Cazouls, fit offre de faire le même travail pour 4.190 livres, il fut agréé. L’Assemblée lui vota 1.499 livres par voie d’hoirie quand il aurait fini l’arpentage, et le reste de la somme quand il remettrait le Compois. Il a signé cet immense travail : Revel aîné, arpenteur de Carcassonne.

Pour l’aider dans ce travail considérable, on lui adjoignit comme experts des terres et estimateurs Vivarel, et Peyriac.

« Les estimateurs tiendront compte des oliviers qui ont péri dans les hivers précédents, surtout en 1709. On ne comptera que les pieds qui ont produit du fruit et non des rejetons. On comptera pour une sétérée, 10 pieds d’oliviers bons et portant du fruit. L’olivette comprend 32 pieds réunis ou séparés ».

Le Compois nous renseigne aussi sur les habitants de Servian et sur leur position sociale.

D’abord sur la noblesse du pays.

Messire Thomas de Barrés, chevalier de Saint-Louis et capitaine des grenadiers. Il possédait en ville une maison, la métairie de Combas, du Mas de Bouran et de Cante-Aussel.

Mme de La Voulte, propriétaire de Saint-Macaire et de La Boutugade.

Noble Jean-François de Manse de La Vidale, ancien capitaine de cavalerie, propriétaire de Pouzac et de la Grange Prepe.

Barthélémy d’Estève, Seigneur direct de Servian, ancien officier d’infanterie, possédait le Masviel.

Les biens nobles étaient exempts de la taille. Or, les décimateurs prétendaient la faire payer à Estève pour le fief des Pradels. Cette prétention donna lieu à des recherches faites par la Cour des Aides de Montpellier, dont voici le résultat :

Le fief des Pradels avait appartenu au chapitre de Maguelone, donc fief noble, il fut vendu en 1599, à Bonafos de Servian, avec pièces de terres. Il passa ensuite à Mme de Torches dont le mari était conseiller au Sénéchal de Béziers, en 1631, qui fut reçu à la foi et hommage du roi en 1691.

Acquis par M. de Belleville, en 1758, il fut apporté en dot, par Mlle de Belleville, à Barthélémy d’Estève. Le fief des Pradels fut reconnu noble, et les Estèves eurent le droit d’en ajouter le titre à leur nom. Peut-être est-ce à cause de ce titre qu’ils eurent la Directe de Servian. Ce titre figure dans le Compois et dans les délibérations de la commune.

Le Compois signale encore, parmi les nobles : Bertrand d’Estève, frère du précédent, Messire Auguste Fabre de Latude.

Parmi les biens nobles, on signale encore la métairie d’Amilhac, appartenant aux Dames du Saint-Esprit de Béziers, et un champ du Chapitre de Saint-Nazaire. Le Chapitre de Cassan possédait un champ à Bourgade, un autre champ en friche au rec de la garrigue, une vigne, un champ au rec de la Baume.

Le Compois nous renseigne sur les notables du pays :

Louis Blay, ancien bailli pour le roi à Abeilhan ; Canet, notaire royal, possesseur de la Capouchina, dont un des petits fils vient de mourir doyen de la Faculté catholique de Lille, auteur d’une belle série d’histoire grecque, c’est une gloire de Servian dont nous reparlerons.

Simon Conneau, maître de la Cartoule, l’ancêtre de toute une famille d’aviateurs et de grands défenseurs de la patrie.

Messire Mas du Coussat, avocat au Parlement, possesseur de Cante-Aussel-le-Bas et du moulin du Coussat.

Messire Rivière et son frère Pierre Rivière, prêtre, possesseur de la Grave.

Le chirurgien Mas ; Mas, capitaine, dit Lacrouzette.

Giret, possesseur de la Vioulesse et de Foulery ; Laplace, médecin ; Laplace, gradué en droit ; Jean Bournhonet, possesseur de la Marceille ; Pierre Taix, ménager, possesseur de la Condamine ; Louis Vialles, possesseur du Rouyre ; Barthélémy Bellonet, possesseur de Saint-Peyre ; Étienne Bousquet, possesseur de Saint-Adrien ; Jean Gaches, possesseur de la Massole ; Mazel, possesseur de la Bassouille ; Michel Peyriac, possesseur de Brescou ; Guillaume Rivière, possesseur de la Drossie.

Nous connaissons encore par le compois : Paulhan, Régent des écoles et du greffe de la justice ; François Vivarel, Rivière, apothicaire ; Jean Vivarel, chirurgien. Afin de se reconnaître dans le grand nombre de familles qui portent le même nom, le compois signale les surnoms, survivance de l’histoire romaine où chacun avait son prénom, son nom et son surnom, nullement infamant, mais rappelant un défaut ou une qualité physique ou morale.

Le moulin de Pader appartenant aux héritiers de Pons Pierre de Thézan, baron d’Olargues, avait été acheté par Jacques Augé, curé de Servian, 10.999 livres.

Il sera peut-être utile au lecteur de lire le nom des notaires qui ont rédigé les actes du passé de Servian.

Voici ceux que nous avons rencontrés dans les vieux parchemins :

1287, Raymond de Rodez ; 1370, Pierre Comhenas ; 1375, Guiraud Taix ; 1373, Raymond Gilles, Raymond Sabatery, Sabatier, Pierre de Badones.

Me Latreille, notaire à Servian, a bien voulu nous communiquer le nom des notaires plus récents, nous croyons rendre service aux chercheurs en les transcrivant :

Rebière Guillaume, 1579-1609 ; Rebière Paul, 1610-1632 ; Rivière Jean et Guillaume, 1590-1666 ; Bournonnet, 1655-1675 ; Mas ou Mair, 1682-1716 ; Jalabert, 1719-1738 ; Canet, 1739-1771 ; Anduze, 1771-1776 ; Eustache, 1781-1821 ; Vialles, 1821-1843 ; Jean, 1844-1847 ; Calas, 1847-1871 ; Saumade, 1871-1889 ; Roquebert, 1889-1907 ; Paul Latreille, 1907.

Les minutes du notariat de Servian ont été transportées un peu partout.

Il pourra être utile de savoir où on peut les trouver, cela simplifiera la tâche des travailleurs futurs.

Les actes de 1606 à 1671 se trouvent à Roujan, dans les fonds Capdat et Almary, ainsi que les actes de 1698 à 1704, dans les fonds Mouly et Cassan.

Les actes de 1636 à 1671 se trouvent à Puimisson, dans les fonds Rougier et Mestre.

Les actes de 1669 à 1673 sont à Gabian, dans les fonds Castanié.

Les actes de 1610 à 1635 se trouvent à Bassan, dans les fonds Saide, Massol et Bousquet.

Les actes de 1633 à 1828 se trouvent à Abeilhan, dans les fonds Blay.