Hetzel (p. 50-65).
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CHAPITRE IV


DANS LEQUEL ON VERRA PALMYRIN ROSETTE TELLEMENT ENCHANTÉ DE SON SORT QUE CELA DONNE BEAUCOUP À RÉFLÉCHIR.


« Ma comète ! » tels étaient les derniers mots prononcés par le professeur. Puis il avait regardé ses auditeurs en fronçant le sourcil, comme si l’un d’eux eût eu la pensée de lui contester ses droits de propriété sur Gallia. Peut-être même se demandait-il à quel titre ces intrus, rangés autour de lui, s’étaient installés sur son domaine.

Cependant, le capitaine Servadac, le comte Timascheff et le lieutenant Procope étaient restés silencieux. Ils tenaient enfin la vérité, dont ils avaient pu s’approcher de si près. On se rappelle quelles furent les hypothèses successivement admises après discussions : d’abord, changement de l’axe de rotation de la terre et modification de deux points cardinaux ; puis, fragment détaché du sphéroïde terrestre et emporté dans l’espace ; enfin comète inconnue qui, après avoir effleuré la terre, en avait enlevé quelques parcelles et les entraînait peut-être jusque dans le monde sidéral.

Le passé, on le connaissait. Le présent, on le voyait. Que serait l’avenir ? Cet original de savant, l’avait-il pressenti ? Hector Servadac et ses compagnons hésitaient à le lui demander.

Palmyrin Rosette, ayant pris son grand air de professeur, semblait maintenant attendre que les étrangers, assemblés dans la salle commune, lui fussent présentés.

Hector Servadac procéda à la cérémonie, pour ne pas indisposer le susceptible et rébarbatif astronome.

« Monsieur le comte Timascheff, dit-il en présentant son compagnon.

— Soyez le bienvenu, monsieur le comte, répondit Palmyrin Rosette, avec toute la condescendance d’un maître de maison qui se sait chez lui.

— Monsieur le professeur, dit le comte Timascheff, ce n’est pas précisément de mon plein gré que je suis venu sur votre comète, mais je ne dois pas moins vous remercier de m’y recevoir si hospitalièrement. »

Hector Servadac, sentant l’ironie de la réponse, sourit légèrement et dit :

« Le lieutenant Procope, commandant la goëlette Dobryna, sur laquelle nous avons fait le tour du monde gallien.

— Le tour ?… s’écria vivement le professeur.

— Exactement le tour, » répondit le capitaine Servadac.

Puis il continua :

« Ben-Zouf, mon ordon…

— Aide de camp du gouverneur général de Gallia, » se hâta d’ajouter Ben-Zouf, qui ne voulait pas laisser contester cette double qualité ni à lui ni à son capitaine.

Furent présentés successivement les matelots russes, les Espagnols, le jeune Pablo et la petite Nina, que le professeur regarda par-dessous ses formidables lunettes, comme un bourru qui n’aime pas les enfants.

Quant à Isac Hakhabut, il s’avança en disant :

« Monsieur l’astronome, une question, une seule, mais à laquelle j’attache une grande importance.. Quand pouvons-nous espérer revenir ?…

— Eh ! répondit le professeur, qui parle de revenir ! C’est à peine si nous sommes partis ! »

Les présentations étant faites, Hector Servadac pria Palmyrin Rosette de raconter son histoire.

Cette histoire peut se résumer en quelques lignes.

Le gouvernement français, ayant voulu vérifier la mesure de l’arc relevé sur le méridien de Paris, nomma à cet effet une commission scientifique, dont, vu son insociabilité, ne fit pas partie Palmyrin Rosette. Le professeur, évincé et furieux, résolut donc de travailler pour son propre compte. Prétendant que les premières opérations géodésiques étaient entachées d’inexactitudes, il résolut de vérifier à nouveau les mesures de l’extrême réseau qui avait relié Formentera au littoral espagnol par un triangle dont l’un des côtés mesurait quarante lieues. C’était le travail qu’Arago et Biot avaient fait avant lui avec une remarquable perfection.

Palmyrin Rosette quitta donc Paris. Il se rendit aux Baléares, il plaça son observatoire sur la plus haute cime de l’île et s’installa pour y vivre en ermite avec son domestique Joseph, tandis qu’un de ses anciens préparateurs, qu’il avait engagé à cet usage, s’occupait d’établir sur un des sommets de la côte d’Espagne un réverbère qui pût être visé par les lunettes de Formentera. Quelques livres, des instruments d’observation, des vivres pour deux mois, composaient tout son matériel, sans compter une lunette astronomique dont Palmyrin Rosette ne se séparait jamais et qui semblait faire partie de lui-même. C’est que l’ancien professeur de Charlemagne avait la passion de fouiller les profondeurs du ciel et l’espoir d’y faire encore quelque découverte qui immortaliserait son nom. C’était sa marotte.

Le travail de Palmyrin Rosette exigeait avant tout une extrême patience. Chaque nuit, il devait guetter le fanal que son préparateur tenait allumé sur le littoral espagnol, afin de fixer le sommet de son triangle, et il n’avait pas oublié que, dans ces conditions, soixante et un jours s’étaient écoulés avant qu’Arago et Biot eussent pu atteindre ce but. Malheureusement, on l’a dit, un épais brouillard, d’une extraordinaire intensité, enveloppait non seulement cette partie de l’Europe, mais le globe presque tout entier.

Or, précisément, sur ces parages des îles Baléares, à plusieurs reprises, des trouées se firent à l’amas des brumes. Il s’agissait donc de veiller avec le plus grand soin, — ce qui n’empêchait pas Palmyrin Rosette de jeter un regard interrogateur sur le firmament, car il s’occupait alors de réviser la carte de cette partie du ciel où se dessine la constellation des Gémeaux.

Cette constellation, à l’œil nu, présente au plus six étoiles ; mais, avec un télescope de vingt-sept centimètres d’ouverture, on en relève plus de six mille. Palmyrin Rosette ne possédait point un réflecteur de cette force, et, faute de mieux, il n’avait que sa lunette astronomique.

Cependant, un certain jour, cherchant à jauger les profondeurs célestes dans la constellation des Gémeaux, il crut reconnaître un point brillant que ne portait aucune carte. C’était sans doute une étoile non cataloguée. Mais, en l’observant avec attention pendant quelques nuits, le professeur vit que l’astre en question se déplaçait très-rapidement par rapport aux autres fixes. Était-ce une nouvelle petite planète que le dieu des astronomes lui envoyait ? Tenait-il enfin une découverte ?

Palmyrin Rosette redoubla d’attention, et la vitesse de déplacement de l’astre lui apprit qu’il s’agissait là d’une comète. Bientôt, d’ailleurs, la nébulosité fut visible, puis la queue se développa, lorsque la comète ne fut plus qu’à trente millions de lieues du soleil.

Il faut bien l’avouer, à partir de ce moment, le grand triangle fut absolument négligé. Très-certainement, chaque nuit, le préparateur de Palmyrin Rosette allumait consciencieusement son fanal sur la rive espagnole, mais très-certainement aussi, Palmyrin Rosette ne regardait plus dans cette direction. Il n’avait plus d’objectif ni d’oculaire que pour le nouvel astre chevelu qu’il voulait étudier et nommer. Il vivait uniquement dans ce coin du ciel que les Gémeaux circonscrivent.

Lorsque l’on veut calculer les éléments d’une comète, on commence toujours par lui supposer une orbite parabolique. C’est la meilleure manière de procéder. En effet, les comètes se montrent généralement dans le voisinage de leur périhélie, c’est-à-dire à leur plus courte distance du soleil, qui occupe un des foyers de l’orbite. Or, entre l’ellipse et la parabole, dont le foyer est commun, la différence n’est pas sensible dans cette portion de leurs courbes, car la parabole n’est qu’une ellipse à axe infini.

Palmyrin Roselle basa donc ses calculs sur l’hypothèse d’une courbe parabolique, et il eut raison dans ce cas.

De même que pour déterminer un cercle il est nécessaire de connaître trois points de sa circonférence, de même pour déterminer les éléments d’une comète il faut avoir observé successivement trois positions différentes. On peut alors tracer la route que l’astre suivra dans l’espace et établir ce qu’on appelle « ses éphémérides ».

Palmyrin Rosette ne se contenta pas de trois positions. Profitant de ce qu’une chance exceptionnelle déchirait le brouillard à son zénith, il en releva dix, vingt, trente, en ascension droite et en déclinaison, et obtint avec une grande justesse les cinq éléments de la nouvelle comète, qui s’avançait avec une effrayante rapidité.

Il eut ainsi :

1o L’inclinaison de l’orbite cométaire sur l’écliptique, c’est-à-dire sur le plan qui contient la courbe de translation de la terre autour du soleil. Ordinairement, l’angle que ces plans font entre eux est assez considérable, — ce qui, on le sait, diminue les chances de rencontre. Mais, dans le cas actuel, les deux plans coïncidaient.

2o La fixation du nœud ascendant de la comète, c’est-à-dire sa longitude sur l’écliptique, autrement dit encore le point où l’astre chevelu coupait l’orbite terrestre.

Ces deux premiers éléments obtenus, la position du plan de l’orbite cométaire dans l’espace était fixée.

3o La direction du grand axe de l’orbite. Elle fut obtenue en calculant quelle était la longitude du périhélie de la comète, et Palmyrin Rosette eut ainsi la situation de la courbe parabolique dans le plan déjà déterminé.

4o La distance périhélie de la comète, c’est-à-dire la distance qui la séparerait du soleil quand elle passerait au point le plus rapproché, — calcul qui, en fin de compte, donna exactement la forme de l’orbite parabolique, puisqu’elle avait nécessairement le soleil à son foyer.

5o Enfin, le sens du mouvement de la comète. Ce mouvement était rétrograde par rapport à celui des planètes, c’est-à-dire qu’elle se mouvait d’orient[1] en occident.

Ces cinq éléments étant connus, Palmyrin Rosette calcula la date à laquelle la comète passerait à son périhélie. Puis, à son extrême joie, ayant constaté que c’était une comète inconnue, il lui donna le nom de Gallia, non sans avoir hésité entre Palmyra et Rosetta, et il se mit à rédiger son rapport.

On se demandera si le professeur avait reconnu qu’une collision était possible entre la terre et Gallia.

Parfaitement, collision non-seulement possible, mais certaine.

Dire qu’il en fut enchanté, ce serait rester au-dessous du vrai. Ce fut du délire astronomique. Oui ! la terre serait heurtée dans la nuit du 31 décembre au ler janvier, et le choc serait d’autant plus terrible que les deux astres marchaient en sens inverse !

Un autre, effrayé, eût immédiatement quitté Formentera. Lui resta à son poste. Non-seulement il n’abandonna pas son île, mais il ne dit rien de sa découverte. Les journaux lui avaient appris que d’épaisses brumes rendaient toute observation impossible sur les deux continents, et, comme aucun, observatoire n’avait signalé cette nouvelle comète, il était fondé à croire que lui seul l’avait découverte dans l’espace.

Cela était, en effet, et cette circonstance épargna au reste de la terre l’immense panique dont ses habitants eussent été pris, s’ils avaient connu le danger qui les menaçait.

Ainsi, Palmyrin Rosette fut le seul à savoir qu’une rencontre aurait lieu entre la terre et cette comète que le ciel des Baléares lui avait laissé voir, tandis que, partout ailleurs, elle se dérobait aux regards des astronomes.

Le professeur demeura donc à Formentera, et avec d’autant plus d’obstination que, d’après ses calculs, l’astre chevelu devait frapper la terre dans le sud de l’Algérie. Or, il voulait être là, car, la comète étant une comète à noyau dur, « cela serait fort curieux ! »

Le choc se produisit avec tous les effets que l’on connaît. Mais il arriva ceci : c’est que Palmyrin Rosette fut instantanément séparé de son domestique Joseph ! Et, lorsqu’il revint d’un assez long évanouissement, il se trouva seul sur un îlot. C’était tout ce qui restait de l’archipel des Baléares.

Telle fut l’histoire racontée par le professeur, avec nombre d’interjections et de froncements de sourcils que ne justifiait aucunement l’attitude complaisante de ses auditeurs. Il finit en disant :

« Des modifications importantes s’étaient produites : déplacement des points cardinaux, diminution de l’intensité de la pesanteur. Mais je ne fus pas induit comme vous, messieurs, à croire que j’étais encore sur le sphéroïde terrestre ! Non ! La terre continuait à graviter dans l’espace, accompagnée de sa lune qui ne l’avait point abandonnée, et suivait son orbite normale que n’avait pas dérangée le choc. Elle n’avait été, d’ailleurs, qu’effleurée pour ainsi dire par la comète, et n’y avait perdu que ces quelques portions insignifiantes que vous avez retrouvées. Tout s’est donc passé pour le mieux, et nous n’avons pas à nous plaindre. En effet, ou nous pouvions être écrasés au heurt de la comète, ou celle-ci pouvait rester fixée à la terre, et, dans ces deux cas, nous n’aurions pas l’avantage de pérégriner maintenant à travers le monde solaire. »

Palmyrin Rosette disait toutes ces choses avec une telle satisfaction, qu’il n’y avait pas à tenter de le contredire. Seul, le maladroit Ben-Zouf se hasarda à émettre cette opinion, « que si, au lieu de frapper un point de l’Afrique, la comète se fût heurtée à la butte Montmartre, très-certainement cette butte eût résisté, et alors…

« Montmartre ! s’écria Palmyrin Rosette ! mais la butte Montmartre eût été réduite en poussière, comme une vulgaire taupinière qu’elle est !

— Taupinière ! s’écria à son tour Ben-Zouf, blessé au vif. Mais ma butte eût accroché votre bribe de comète au vol et s’en fût coiffée comme d’un simple képi ! »

Hector Servadac, pour couper court à cette inopportune discussion, imposa silence à Ben-Zouf, en expliquant au professeur quelles singulières idées son soldat avait sur la solidité de la butte Montmartre.

L’incident fut donc vidé, « par ordre », mais l’ordonnance ne devait jamais pardonner à Palmyrin Rosette la façon méprisante dont celui-ci avait parlé de sa butte natale !

Cependant, si Palmyrin Rosette, après le choc, avait pu continuer ses observations astronomiques, et quels en étaient les résultats en ce qui concernait l’avenir de la comète ? voilà ce qu’il était important de connaître.

Le lieutenant Procope, avec tous les ménagements que comportait le tempérament rébarbatif du professeur, posa cette double question relative à la route que Gallia suivait maintenant dans l’espace et à la durée de sa révolution autour du soleil.

« Oui, monsieur, dit Palmyrin Rosette, j’avais déterminé la route de ma comète avant le choc, mais j’ai dû recommencer mes calculs.

— Et pourquoi, monsieur le professeur ? demanda le lieutenant Procope, assez étonné de la réponse.

— Parce que si l’orbite terrestre n’avait pas été modifiée par la rencontre, il n’en était pas ainsi de l’orbite gallienne.

— Cette orbite a été changée par le choc ?

— J’ose absolument l’affirmer, répondit Palmyrin Rosette, attendu que mes observations, postérieures à la collision, ont été faites avec une précision extrême.

— Et vous aviez obtenu les éléments de la nouvelle orbite ? demanda vivement le lieutenant Procope.

— Oui, répondit sans hésiter Palmyrin Rosette.

— Mais alors vous savez ?…

— Ce que je sais, monsieur, le voici : c’est que Gallia a choqué la terre en passant à son nœud ascendant, à deux heures quarante-sept minutes trente-cinq secondes six dixièmes du matin, dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier ; que le 10 janvier elle a coupé l’orbite de Vénus, qu’elle a passé à son périhélie au 15 janvier, qu’elle a recoupé l’orbite de Vénus, franchi son nœud descendant au 1er  février, croisé l’orbite de Mars au 13 février, pénétré dans la zone des planètes télescopiques le 10 mars, pris Nérina pour satellite…

— Circonstances que nous connaissons tous, cher professeur, dit Hector Servadac, puisque nous avons eu la chance de recueillir vos notices. Seulement, elles ne portaient ni signature ni lieu d’origine.

— Eh ! pouvait-on douter qu’elles ne fussent de moi ! s’écria superbement le professeur, de moi qui les avais jetées par centaines à la mer, de moi, Palmyrin Rosette !

— On ne le pouvait pas ! » répondit gravement le comte Timascheff.

Cependant, aucune réponse n’avait été faite touchant l’avenir de Gallia. Il semblait même que Palmyrin Rosette voulût éviter de répondre directement. Le lieutenant Procope allait donc réitérer sa demande, et plus catégoriquement ; mais Hector Servadac, pensant qu’il valait mieux ne pas presser cet original, lui dit :

« Ah çà ! cher professeur, nous expliquerez-vous comment il se fait que, dans une rencontre aussi formidable, nous n’ayons pas été plus maltraités ?

— Cela est très-explicable.

— Et pensez-vous que, sauf l’enlèvement de quelques lieues carrées de territoire, la terre n’ait pas plus souffert, et, entre autres choses, que son axe de rotation n’ait pas été changé subitement ?

— Je le pense, capitaine Servadac, répondit Palmyrin Rosette, et voici mes raisons. La terre marchait alors avec une vitesse de vingt-huit mille huit cent lieues à l’heure, Gallia avec une vitesse de cinquante-sept mille lieues à l’heure. C’est comme si un train, faisant environ quatre-vingt-six mille lieues à l’heure, se précipitait sur un obstacle. Ce qu’a dû être le choc, messieurs, vous pouvez en juger. La comète, dont le noyau est d’une substance extrêmement dure, a fait ce que fait une balle, tirée de près, à travers un carreau de vitre : elle a traversé la terre sans rien briser.

— En effet, répondit Hector Servadac, les choses ont pu certainement se passer ainsi…

— Ont dû… reprit le professeur, toujours affirmatif, et d’autant mieux que le globe terrestre n’a été que très-obliquement touché. Mais si Gallia y fût tombée normalement, elle y aurait profondément pénétré, en causant les plus graves désastres, et elle eût même écrasé la butte Montmartre, si cette butte se fût trouvée sur son passage !

— Monsieur !… s’écria Ben-Zouf, directement attaqué et sans provocation, cette fois.

— Silence, Ben-Zouf, » dit le capitaine Servadac.

En ce moment, Isac Hakhabut, convaincu peut-être de la réalité des faits, s’approcha de Palmyrin Rosette, et d’un ton qui dénotait une extrême inquiétude.

« Monsieur le professeur, demanda-t-il, reviendra-t-on à la terre, et quand y reviendra-t-on ?

— Vous êtes donc bien pressé ? répondit Palmyrin Rosette.

— Ce qu’Isac vous demande, monsieur, dit alors le lieutenant Procope, je désirerais le formuler plus scientifiquement.

— Faites.

— Vous dites que l’ancienne orbite de Gallia a été modifiée ?

— Incontestablement.

— La nouvelle orbite, la nouvelle courbe que suit la comète est-elle hyperbolique, ce qui l’entraînerait à des distances infinies dans le monde sidéral et sans aucun espoir de retour ?

— Non ! répondit Palmyrin Rosette.

— Cette orbite serait donc devenue elliptique ?

— Elliptique.

— Et son plan coïnciderait toujours avec celui de l’orbite terrestre ?

— Absolument.

— Gallia serait donc une comète périodique ?

— Oui, et à courte période, puisque sa révolution autour du soleil, en tenant compte des perturbations que lui feront subir Jupiter, Saturne et Mars, s’accomplira exactement en deux ans.

— Mais alors, s’écria le lieutenant Procope, toutes les chances seraient pour que, deux ans après le choc, elle retrouvât la terre au point même où elle l’a déjà rencontrée ?

— En effet, monsieur, cela est à craindre !

— À craindre s’écria le capitaine Servadac.

— Oui, messieurs, répondit Palmyrin Rosette en frappant du pied. Nous sommes bien où nous sommes, et, si cela ne dépendait que de moi, Gallia ne reviendrait jamais à la terre ! »




  1. Sur 252 comètes, on en compte 123 ayant un mouvement direct et 129 ayant un mouvement rétrograde.