Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/atteinte s. f.

Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 3p. 886).

ATTEINTE s. f. (a-tain-te — rad. atteindre). Coup dont on est atteint, dont on est frappe : Une légère atteinte. Une rude atteinte.

Mais Dieu, du coup mortel, sut détourner l'atteinte.

Racine.

Cependant, Sarpédon, d’une atteinte mortelle A déjà vu frapper son écuyer Adèle. Aignan

Quand voyant l’âme même à son antre accourir : Ah ! c’est trop, dit-il, je voulais bien mourir : Mais c'est mourir deux fois que souffrir les atteintes.

La Fontaine.

— Par ext. Dommage matériel, altération physique : Les atteintes du feu. Les atteintes de l’hiver. Ma santé a éprouvé de cruelles atteintes. Nos vignobles se sont ressentis des atteintes de la gelée. [Acad.) Cette mesure de police porte atteinte aux droits des propriétaires. (Acad.) Les jeunes pousses doivent être à l’abri des atteintes du bétail. (Littré.)

Je cueille avec plaisir cent et cent fleurs nouvelles Qui braveront du temps les atteintes cruelles.

Mme Desmoulières.

|| Se dit particulièrement des effets nuisibles


produits sur la santé : Une atteinte de goutte, de paralysie. Il a déjà eu quelques atteintes. (Acad.) Il avait déjà ressenti les atteintes de la maladie dont il est mort. (Boss.) Ces fréquentes atteintes de mort qui ne l’approchaient, ce semble, des portes du tombeau que pour lui faire voir déplus près la fragilité du monde. (Mass.) Dans les premières atteintes de la peste, l’âme perdait ses forces. (Barthél.)

D’abord il a tenté les atteintes mortelles Des poisons que lui-même a crus les plus fidèles.

Racine.

|| Préjudice moral, coup porté à quelqu’un dans ce dont il jouit ou a quelque chose dans les qualités qui lui sont propres : Sa réputation a reçu une cruelle atteinte. Il est vrai que j’aurais pu lui donner de fortes atteintes. (Boss.) Ces avantages n’ont pu donner atteinte à sa modestie. (Boss.) Sa bonne foi ne reçut jamais la moindre atteinte. (Boss.) Dieu a réservé à son Écriture une marque de divinité une grande atteinte aux vices que de les exposer à la risée de tout le monde. (Mol.) Dès que la vérité est en concurrence avec quelques-unes de nos passions, et qu’il faut leur donner at* teinte en se déclarant pour elle, nous l’abandonnons. (Mass.) Nos délassements doivent avoir je ne sais quoi de décent, de réservé, de sérieuxj qui ne donne aucune atteinte à la modestie sacerdotale. (Mass.) Le dérèglement des mœurs et de l’imagination ne donne point atteinte à la franchise, à la bonté naturelle du Français. (Duclos.) Un crime sans châtiment serait une atteinte aux desseins de la Providence. (Foissac.) Une atteinte portée à la liberté en appelle d’autres. (B. Oonst.) Sa réputation n’a jamais souffert la moindre atteinte. (E. Sue.) L’envie,.la paresse, l’intempérance portent atteinte à la liberté, et altèrent ta dignité de la nature humaine. (V. Cousin.) if Impression vive, et particulièrement cruel déplaisir : J’en ai reçu une atteinte mortelle. Ces nouvelles m’ont.donné une cruelle atteinte. (Mol.) Le cœur en reçoit des atteints si fâcheuses, qu’il est presque impossible qu’il ne tombe dans la langueur. (Rancé.)

Enfin je vous vois libre, et je puis sans contrainte
De mes vives douleurs te faire voir l’atteinte.

Corneille.

De cet amas d’honneurs la douceur passagère
Fait sur mon cœur à peine une atteinte légère.

Racine.

Et portant à mon cœur des atteintes plus rudes,
Me fait un long récit de ses ingratitudes.

Racine.

Quoi ! toujours votre cœur, occupé de ses craintes,
Du moindre événement recevra des atteintes !

Ducis.

|| Tourment amoureux, mal d’amour ; état d’une personne éprise :

Alcandre, au silence des bois, Témoignait ses vives atteintes.

Malherbe.

Allons donc l’affranchir de ses frivoles craintes,
Lui montrer de mon cœur les sensibles atteintes.

Corneille.

|| Ce sens a vieilli.

— Art vétér. Coup, plaie, au paturon, à la couronne ou au boulet, qu’un cheval se donne lui-même avec ses fers, ou qu’il reçoit des chevaux qui marchent près de lui ou de toute autre manière : Ce cheval se donne des atteintes. Prenez garde que votre cheval ne donne des atteintes au mien. (Acad.)

— Jeu. Au jeu de bague, action de toucher la bague sans l’emporter : En trois courses qu’il a faites, il a eu deux atteintes. (Acad.)

Hors d’atteinte, lac. adv. Dans l’impossibilité d’être atteint : Sa personne est maintenant hors d’atteinte. Ma probité a toujours été hors d’atteinte. Le fugitif est maintenant hors d’atteinte. (Acad.)

… Le captif est hors de votre atteinte :
Lorsque ses chevaliers ont quitté cette enceinte,
Il était dans leurs rangs

C. Delavigne

|| Inattaquable, à l’abri de tout préjudice ou de toute action nuisible : Je soutiens que ce décret, devant les gens modérés, est hors d’atteinte. (Boss.) C’est tout ce qu’il y a de mieux établi et de plus hors d’atteinte à l’incrédulité sur la terre. (Mass.)// faut que, retranché dans le droit sacré du sacerdoce, l’évêque soit hors d’atteinte aux traits de l’ambition, (Mass.)

Aminte,
En femme sage, honnête et hors d’atteinte.

La Fontaine

Epithètes. Soudaine, imprévue, subite, inattendue, sûre, certaine, inévitable, rude, cruelle, meurtrière, mortelle, faible, légère, adroite, habile, fine, déguisée, fausse, détournée, perfide. —

Encycl. Art vét. On désigne sous le nom d’atteinte, en médecine vétérinaire, les contusions, avec ou sans plaie, qui existent, chez le cheval, aux régions du paturon et de la couronne. Les atteintes sont la conséquence ordinaire des coups que l’animal se donne en marchant, de ceux qu’il reçoit, des autres, enfin, du heurt et des pressions produites par les corps résistants qui peuvent se rencontrer à la surface du sol.

D’après leur gravité, on divise les atteintes en légères et en graves ; et, d’après leur siège, on distingue les atteintes encornées, parce que la partie de la peau contusionnée est recouverte par le bord supérieur du sabot, et les atteintes situées sur la couronne et le paturo-Les atteintes légères ne sont qu’une inflamma-


tion superficielle et circonscrite de la peau les atteintes graves peuvent revêtir trois formes, qui les font distinguer sous les noms d’atteinte furonculeuse, d’atteinte gangreneuse et d’atteinte phlegmoneuse. Les atteintes graves peuvent se compliquer, suivant leur siège, de nécrose des tendons, des ligaments, des fibro-cartilages des phalanges, de la carie des os, et de l’ulcération de leurs articulations ; enfin, les atteintes encornées peuvent produire la déformation de la boite cornée. Les atteintes furonculeuses sont moins graves que les atteintes gangreneuses, mais les atteintes phlegmoneuses sont beaucoup plus dangereuses, parce qu’elles entraînent fatalement les plus grands désordres, non-seulement de la peau, mais encore de l’appareil fibreux annexé aux phalanges. Le traitement consiste, immédiatement après l’action de la cause contondante, a recourir aux réfrigérants d’une manière continue, pour prévenir l’inflammation ou en atténuer les effets. Lorsque l’inflammation est déclarée, on met en usage les topiques émollients sous forme de bains et de cataplasmes. L’usage de ces topiques peut ne pas suffire lorsque l’atteinte est encornéé ; on est souvent obligé, dans ce cas, pour empêcher la compression de la corne sur le bourrelet, d’amincir la paroi dans une étendue proportionnelle à la tumescence des parties. Lorsque les plaies sont étendues, oh active la cicatrisation, soit en.nivelant les bourgeons charnus à l’aide du bistouri, soit en cautérisant avec le feu ou les autres caustiques. Quant aux atteintes phlegmoneuses, il est à propos d’ouvrir au pus une voie qui lui permette de s’écouler à mesure qu’il se forme ; on prévient ainsi les décollements de l’ongle, que la fusion du pus autour des phalanges tend à produire.