Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/France (Abrégé chronologique de l’histoire de)


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France (Abrégé chronologique de l’histoire de), du président Hénault. La première édition de cet excellent ouvrage est de 1744 (2 vol. in-8º et in-4º) ; de son vivant même, le président Hénault en imprima sept autres, corrigeant et complétant sans cesse son premier travail. La dernière qu’il ait revue (1768, 3 vol. in-4º) a été remaniée dans presque toutes ses parties.

L’auteur ne s’abusait pas sur les difficultés d’un pareil travail, destiné à resserrer dans de courtes notices et dans des tableaux chronologiques, avec la sécheresse d’une nomenclature, toute la suite des événements importants de l’histoire de France. Dans un Mémoire lu par lui à l’Académie des inscriptions et belles-lettres, il fit l’historique et quelque peu l’apologie des abrégés, qu’il appelle « ce genre d’écrire où l’espace est si court, où la moindre négligence est un crime, où rien d’essentiel ne doit échapper, où ce qui n’est pas nécessaire est un vice, et où il faut encore essayer de plaire au milieu de la sévérité du laconisme et des entraves de la précision. » L’Abrégé du président Hénault a presque toutes ces qualités, et, s’il est un peu négligé aujourd’hui, malgré la grande vogue dont il a joui à la fin du xviiie siècle, il faut s’en prendre non à une absence inadmissible de mérite intrinsèque, mais bien à la désuétude dans laquelle est aujourd’hui tombé ce genre de composition. Notre époque est à la fois trop érudite et trop curieuse pour se contenter de simples sommaires, si bons qu’ils soient.

L’ouvrage du président Hénault part de Clovis, considéré comme le premier roi certain de la première race, et finit à la mort de Louis XIV. Le plan est à peu près celui qu’avait trouvé Guillaume Marcel pour ses Tablettes chronologiques, avec plus de développements et d’étendue. A partir de la troisième race, la notice concernant chaque règne est une véritable histoire, année par année, présentant des résumés très substantiels. De courtes dissertations exposent à la fin de chaque race, avec brièveté, mais en même temps avec élégance, les points les plus saillants des mœurs et de la législation ; des portraits courts et finement esquissés font revivre en quelques touches les principaux personnages, et, pour chaque règne, un tableau chronologique présente la descendance des rois, avec des remarques précieuses sur la situation et les mariages des lignées royales ; les noms des princes étrangers contemporains, des ministres français, des généraux, des magistrats et des savants illustres. Ce plan est remarquable par sa lucidité ; les faits, les hommes, les dates se groupent sans confusion et s’éclairent par leur rapprochement. Voltaire, que la clarté séduisait avant tout, donna les plus grands éloges à l’Abrégé chronologique et à son auteur. « Nous lui devons, a-t-il écrit, la plus courte et la meilleure histoirede France, et peut-être la seule manière dont il faudra désormais écrire toutes les grandes histoires. Mais il sera difficile d’imiter l’auteur de l’Abrégé chronologique, d’approfondir tant de choses en paraissant les effleurer. » S’il est, en effet, un travail ingrat, c’est de consigner en une ligne le résultat de laborieuses recherches, d’examens réitérés, de doutes historiques éclaircis avec peine. On voit aussi Voltaire, dans sa Correspondance générale, donner au président Hénault des conseils sur divers points de son ouvrage, notamment en ce qui concerne les faits religieux, auxquels il aurait voulu que l’on donnât un caractère plus accentué. Un compilateur du xviiie siècle, l’abbé Boudot, passe pour avoir rédigé une grande partie de l’Abrégé chronologique. C’est ce même abbé Boudot, dont Grimin parle comme étant devenu paralytique à force d’indigestions gagnées à la table du président ; il est certain, en effet, que le président Hénault l’employait à faire des recherches historiques et littéraires ; mais sa tâche se bornait là. Les véritables collaborateurs du président Hénault sont d’Aguesseau, Foncemagne, Secousse, dom Bouquet et quelques autres illustres esprits, réunis souvent chez lui en conférence, et qu’il consultait avec le plus grand fruit sur toutes les questions spéciales.

L’Abrégé chronologique a été continué d’abord par Fantin des Odoarts, qui le poussa de 1715 à 1783, puis jusqu’au traité de Campo-Formio (1797), 2 vol. in-8º, formant les volumes IV et V de l’ouvrage complet. Cette suite, poursuivie plus tard jusqu’à la Restauration, a été aussi imprimée à part sous le titre d’Histoire de France depuis la mort de Louis XIV (1820, 4 vol. in-8º). La continuation de Fantin des Odoarts s’écarte notablement du plan suivi dans l’œuvre originale et pèche par la diffusion, surtout dès qu’elle traite des faits contemporains. Une autre continuation lui est supérieure ; c’est celle faite par Auguis, dans l’édition Walckenaer ; elle forme les volumes IV, V et VI de cette édition et s’arrête en 1821. Walckenaer a revu lui-même les trois premiers volumes, c’est-à-dire l’Abrégé chronologique du président, et l’a augmenté de notes. Enfin, M. Michaud a entrepris une troisième continuation et rédigé sur le même plan le résumé de la période de cent quinze ans qui s’étend de la mort de Louis XIV à la Révolution de 1830. Cet ouvrage est imprimé à la suite de l’Abrégé chronologique dans l’édition du Panthéon littéraire (1836, 1 vol. in-8º).


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