Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/DUMAS (Marie, dame Pétel, dite Marie-Alexandre), artiste et femme de lettres française, fille de M. Alexandre Dumas père

Administration du grand dictionnaire universel (6, part. 4p. 1377).

DUMAS (Marie, dame Pétel, dite Marie-Alexandre), artiste et femme de lettres française, fille de M. Alexandre Dumas père. Elle est née à Paris dans les dernières années de la Restauration. Élevée en pleine bataille romantique, elle contracta de bonne heure, dans la fréquentation des ardents chevaliers de la nouvelle croisade littéraire et artistique, des habitudes masculines qui ont souvent paru quelque peu bizarres aux Philistins de la rue d’Amsterdam, qu’elle a longtemps habitée avec son père. Adonnée d’abord à la peinture, elle s’essaya dans de grandes marines, aborda ensuite les scènes d’intérieur et les tableaux de genre ; dans ces derniers temps, elle a exécuté divers sujets religieux et même exposé, au Salon de 1865, une frise de proportions importantes. La passion des voyages et les hasards de la vie interrompirent à plusieurs reprises ses travaux artistiques, qui se distinguent par la minutie et le soin des détails. Retirée au couvent des Oiseaux, puis à celui des dames de l’Assomption, à Passy, elle a peint dans ce dernier lieu, en 1863, M. Alexandre Dumas, son père, sous les traits d’un saint du calendrier, à demi voilé par le capuchon monastique.

En 1867, Mme Marie Dumas a débuté en littérature par un roman : Au lit de mort (in-8o), livre bien étrange, dans lequel on a prétendu voir une sorte d’autobiographie. Malgré une exposition démesurément longue, de grands défauts de composition, des caractères invraisemblables, malgré un mysticisme agaçant, il attache par la passion ; quelques touches heureuses, des traits hardis, plusieurs scènes pleines de feu sont à signaler ; mais le singulier catholicisme de l’auteur laisse une impression désagréable dans l’esprit du lecteur. Hors des capucins, point de salut, pas même de confession. Par contre, le vicaire portraituré offre des lignes qu’un écrivain libre penseur eût adoucies. Quant aux bavardages mystiques répandus çà et là, le mieux est d’en sourire. Quelques paradoxes originaux émaillent cette production, qui, par ses défauts et par ses qualités, rappelle que l’auteur de Au lit de mort est fille d’Antony et sœur de la Dame aux camélias : « La pudeur chez les femmes n’est peut-être que le sentiment de l’imperfection », dit-elle quelque part. Et ailleurs : « Entrer dans un couvent, c’était moralement se brûler la cervelle, et la consécration à Dieu était le suicide sanctifié, permis aux grandes douleurs. Voyez saint Augustin, Abélard, M. de Rancé. » Recommandée par le nom paternel, signalée par une bruyante publicité, cette œuvre mystique obtint un certain succès de curiosité. En regardant un peu moins le ciel, où elle voit le dernier souffle de ses héros « se transformer en colombes », il est possible que Mme Dumas montre, un jour ou l’autre, qu’elle est digne de sa race. Peut-être alors aurons-nous d’elle un vrai et beau livre.