Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/BOURGOGNE (théâtre de l'HÔTEL DE BOURGOGNE)

Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 3p. 1131-1133).

français, ont donné une fin touchante à ces trois excellents comédiens liés d’une inaltérable amitié : « Gros-Guillaume, qui jouait à visage découvert, eut la hardiesse de contrefaire un magistrat à qui une certaine grimace était familière, et il le contrefit trop bien, car il fut décrété, lui et ses compagnons. Ceux-ci prirent la fuite ; mais Gros-Guillaume fut arrêté et mis dans un cachot : le saisissement qu’il en eut lui causa la mort ; et la douleur que Gauthier-Garguille et Turlupin en ressentirent les emporta dans la même semaine. » Ceci remonterait à l’année 1634, mais il paraît qu’il ne faut pas ajouter une foi complète à cette histoire. Quoi qu’il en soit, il est à peu près prouvé que les trois amis se suivirent d’assez près dans la tombe. Gauthier-Garguille mourut le premier, à la fin de 1633, et, dès 1634, nous voyons Guillot-Gorju le remplacer à l’Hôtel de Bourgogne. Quant à ses deux confrères, il n’en est plus question sur ces planches, où ils avaient été si fort applaudis. Citons encore, parmi les acteurs de cette époque, Pierre Lemessier, dit Bellerose, mort en 1670 ; il entra à l’Hôtel de Bourgogne en 1629, et devint le chef de la troupe. Jusqu’en 1643, époque de sa retraite, il brilla dans les premiers rôles tragiques et comiques ; on lui doit les créations de Cinna et du Menteur. Jean Farine, dont on ignore le véritable nom, et qui jouait dans la farce ; Alison, qui jouait les servantes et les nourrices, les femmes ne paraissant pas encore sur la scène ; Julien Joffrin de l’Epy, dit Jodelet, qui jouait les valets avec le plus grand succès dès 1610 dans la troupe du Marais, et qui passa à l’Hôtel de Bourgogne en 1634, fameux dans les pièces de Scarron ; Lecomte, dit Valeran, qui joua longtemps les premiers rôles avec Marie Venier Delaporte, l’une des premières actrices qui aient paru sur la scène française ; la Beaupré, la première femme qui se soit montrée sur les planches, et qui créa la soubrette dans la Galerie du Palais, de Corneille, en 1634, N’oublions pas Deslauriers, dit Bruscambille. Ce dernier vécut et resta à l’Hôtel de Bourgogne jusque vers 1634. Son rôle consistait principalement à paraître sur la scène pour haranguer l’auditoire, à la façon du badin du vieux théâtre avec ses monologues ; à amuser les spectateurs en attendant que les jeux commençassent, ou à combler l’intervalle de deux pièces par un intermède de haute fantaisie. Plus d’une fois même il harangua la foule au dehors, car le théâtre sur lequel se produisait Corneille avait des parades à la porte, comme les saltimbanques de nos jours. Bruscambille était fertile en bons mots et traits bizarres. L’obscénité se mêle assez souvent à ses prologues, qui donnent aujourd’hui une singulière idée des spectateurs de ce temps-là. Nous citerons un morceau d’une de ses harangues au parterre : « Je vous dis donc que vous avez tort, et même grand tort, de venir, depuis vos maisons jusqu’ici, pour montrer l’impatience qui vous est naturellement habituelle… c’est-à-dire pour n’être entrés à peine dans ce lieu de divertissement que, dès la porte, vous criiez à gorge déployée : « Commencez ! commencez ! » Et que savez-vous, messieurs, si le seigneur Bruscambille aura bien étudié son rôle avant que de paraître devant l’excellence de Vos Seigneuries ?… Nous avons bien eu la patience de vous attendre de pied ferme, et de recevoir votre argent à la porte, de meilleur cœur pour le moins que vous nous l’avez présenté ; de vous préparer une jolie décoration de théâtre, une belle pièce toute neuve, qui, sortant de la forge, est encore toute chaude ; mais vous ne voulez pas nous donner le loisir de commencer méthodiquement une pièce qui doit divertir les individus de Vos Excellences ; mais c’est encore bien pis quand on a commencé ; l’un tousse, l’autre crache, l’autre pette, l’autre rit, l’autre au théâtre tourne le cul ; il n’est pas jusqu’aux laquais qui n’y veulent mettre leur nez, tantôt en faisant intervenir des gourmades réciproques, tantôt en lançant avec des sarbacanes des pois au nez de ceux qui ne peuvent mais de leurs folies… Vous répondrez que le jeu ne vous plaît pas ; c’est là où je vous attendais, pour vous prouver que vous êtes d’autant plus fous d’y venir nous apporter votre bel et bon argent. Ma foi, si tous les ânes mangeaient du chardon, je n’en voudrais pas fournir la compagnie qui est devant moi à cent écus par an… Je vous entends venir avec vos sabots neufs. Il faudrait, pour vous ragoûter, faire voler quatre diables en l’air, vous infecter d’une puante fumée de poudre, et faire plus de bruit que tous les armuriers de la heaumerie n’en font, etc. » Par ces derniers mots, Bruscambille veut parler de ces représentations infernales, appelées diable à quatre, qui plaisaient infiniment à la bonne compagnie de l’époque. On voit par la harangue de Bruscambille, la seule ou à peu près qui se puisse décemment citer, quelles ténèbres avaient à percer le génie des Molière et celui des Corneille. Sorel, dans son Histoire de la maison des jeux, nous apprend que les acteurs de l’Hôtel de Bourgogne ne dédaignaient pas d’aller appeler le monde au son du tambour jusqu’au carrefour Saint-Eustache. Quelques mots encore sur les comédiens de cette première période de l’art dramatique en France. Plus haut, nous avons vu Guillot-Gorju, qui de son vrai nom s’appelait Bertrand Harduin de Saint-Jacques, remplacer Gauthier-Garguille sur les planches de l’Hôtel de Bourgogne. Deux autres gais compères dont on ne connaît que les sobriquets typiques, Gringalet et Goguelu vinrent à ses côtés compléter un nouveau trio comique ; mais il faut bien l’avouer, sauf Guillot-Gorju, qui avait de la littérature, et mourut en 1648, après avoir exercé la médecine, les successeurs de Turlupin et de Gros-Guillaume n’atteignirent pas à l’éclat de ces maîtres du burlesque. La plupart des comédiens dont nous venons de rappeler les noms ont laissé des traces de leur verve gauloise, et nous avons de quelques-uns d’entre eux des facéties qui sont demeurées célèbres. Tous jouaient avec des masques, à l’exception de Gros-Guillaume, qui se couvrait le visage de farine, dont il savait lancer adroitement la plus grande partie à ses interlocuteurs en remuant les lèvres. Ceux qui ramassèrent le sceptre tombé de ses mains firent de même.

Nous permettra-t-on quelques détails destinés à compléter la physionomie que présentait la salle de l’Hôtel de Bourgogne ? L’usage des violons à l’orchestre existe dès l’an 1616 ; un arrêt du Conseil du 30 avril 1673 fixera le nombre des voix de la comédie à deux, et celui des violons à six, au lieu de six voix et de douze violons que les comédiens avaient auparavant. Il n’y a dans la salle que très-peu de loges et un parterre où les spectateurs sont debout. Cependant la cour ne dédaigne pas de s’y rendre. On y indique ses places en y mettant, dans toute leur simplicité, des chaises. On ne paye ordinairement, comme nous l’avons dit plus haut, que dix sols aux galeries, et cinq sols au parterre ; mais le taux s’élève peu à peu. Dès 1652, on voit les galeries coûter cinq livres dix sous. On lit dans une affiche en vers du comédien de Villiers, pour la pièce d’Amaryllis, celle de Duryer, jouée en 1650 :


Venez, apportez votre trogne
    Dedans notre Hôtel de Bourgogne ;
    Venez en foule, apportez-nous
    Dans le parterre quinze sous,
    Cent dix sous dans les galeries.

Le mot de la Beaupré que tout le monde connaît prouve surabondamment que les auteurs admis à écrire pour MM. les comédiens recevaient d’assez maigres honoraires : « M. Corneille nous a fait un grand tort : nous avions ci-devant des pièces de théâtre pour trois écus, que l’on nous faisait en une nuit ; on y était accoutumé et nous y gagnions beaucoup. Présentement, les pièces de M. Corneille nous coûtent bien de l’argent, et nous gagnons peu de chose. » C’est surtout à Hardy que la comédienne faisait allusion. Hardy recevait trois écus pour chacun de ses ouvrages. Quant à Corneille, vers la fin de sa carrière, alors que sa haute renommée le faisait traiter beaucoup mieux que la plupart des autres poètes ses contemporains, il ne toucha jamais plus de deux mille livres pour cinq actes de tragédie. Le théâtre de l’hôtel du Bourgogne, comme celui du Marais, formait une sorte de république, ayant à sa tête un président choisi par les comédiens et parmi eux. Dans cette association, où chacun était égal en droits, les profits et les pertes étaient partagés en commun. La troupe avait un assez grand nombre d’officiers chargés d’emplois spéciaux et distincts. Il y avait d’abord les hauts officiers, faisant ordinairement partie du corps de la troupe, et non gagés ; puis les bas officiers, rétribués par la compagnie. Les hauts officiers étaient le trésorier, le secrétaire et le contrôleur ; les bas officiers ou gagistes, le concierge, le copiste, remplissant aussi les fonctions de souffleur, non pas en se tenant, comme aujourd’hui, dans un trou au milieu de la rampe, mais à l’une des ailes du théâtre ; les violons, le receveur au bureau, les contrôleurs des portes, l’un à l’entrée du parterre, et l’autre à celle des loges ; les portiers, en pareil nombre, et postés aux mêmes endroits que les contrôleurs : après les défenses rigoureuses du roi d’entrer sans payer, ce que MM. les mousquetaires prétendaient faire, la charge de portier, rendue surtout nécessaire par les scènes de désordre qui se produisirent aux époques de troubles civils, disparut peu à peu des théâtres. En 1674, l’hôtel de Bourgogne n’en avait plus qu’un à sa porte d’entrée, et, pour le reste, des soldats du régiment des gardes suffisaient. Ensuite venaient les décorateurs, les moucheurs de chandelles, charge souvent remplie par les décorateurs eux-mêmes. Les moucheurs de chandelles devaient s’acquitter rapidement de leur charge afin de ne pas faire languir l’auditoire entre les actes, et avec propreté, pour ne lui pas donner de mauvaise odeur. « L’un, dit Chappuzeau, mouche le devant du théâtre, et l’autre le fond, et surtout ils ont l’œil que le feu ne prenne aux toiles. Pour prévenir cet accident, on a soin de tenir toujours des muids pleins d’eau et nombre de seaux. Les restes des lumières font partie des petits profits des décorateurs. » Parmi les bas officiers, on comptait encore les assistants, que nous nommerions aujourd’hui comparses, les ouvreurs (et non les ouvreuses) de loges, de théâtre et d’amphithéâtre, l’imprimeur et l’afficheur, sans oublier le chandelier. Quand le roi venait voir les comédiens, l’éclairage était fourni par ses officiers. Les chandelles furent remplacées par des lampions à la rampe et de la cire aux lustres. Quinquet n’était pas encore né.

Nous n’entrerons pas ici dans des détails sur les pièces représentées à l’Hôtel de Bourgogne, puisqu’il devra en être parlé quand nous aborderons l’étude de notre théâtre en général. Nous savons déjà par ce qui précède que les pères de la scène française s’y essayèrent, traçant la voie à Corneille et à Molière, et que Corneille lui-même y occupa le premier rang. Racine y fit jouer ses chefs-d œuvre. Citons Quinault, Boursault, Montfleury, Poisson, vers le même temps.

Cependant plusieurs théâtres rivaux s’étaient élevés dans Paris. Il est vrai qu’ils n’eurent qu’une durée éphémère, même celui du Marais, où furent joués les premiers ouvrages de Corneille, même celui qu’on appelait l’Illustre Théâtre, établi dans le jeu de paume de la Croix-Blanche, au faubourg Saint-Germain, dirigé par les Béjart (1645), et où débuta Molière. Molière, ayant parcouru la province, revint jouer à Paris en 1650, à l’hôtel du prince de Conti, essayant, sans réussir encore, de fixer sa troupe dans la capitale. Huit ans après, il obtint la faveur de représenter ses comédies devant Louis XIV, qui, charmé, lui concéda le Petit-Bourbon, où il devait alterner avec les Italiens. En 1660, les acteurs dirigés par lui passèrent au Palais-Royal et prirent le titre de Comédiens de Monsieur. Le théâtre du Palais-Royal allait rivaliser avec l’Hôtel de Bourgogne, mais seulement pour la comédie ; quant à la tragédie, c’est à l’Hôtel de Bourgogne qu’étaient les meilleurs acteurs et qu’on donnait les meilleurs ouvrages en ce genre. Cette différence de jeu fit naître de la jalousie entre les deux troupes. Les Grands Comédiens, ainsi s’appelaient les acteurs de la rue Mauconseil, désertant la comédie et abandonnant surtout la farce, accaparaient presque toutes les productions tragiques des auteurs en renom. Les chefs-d’œuvre de Corneille, depuis le Cid jusqu’à la Mort de Pompée, y virent pour la première fois le feu de la rampe. Là furent applaudis tous ceux de Racine, depuis Andromaque jusqu’à Phèdre, dans l’intervalle de 1667 à 1677. Un succès prodigieux saluait ces œuvres immortelles, interprétées par des acteurs de premier ordre. Aussi les deux théâtres se lançaient-ils des épigrammes que l’on retrouve dans quelques pièces de l’époque. On connaît les traits mordants qui égayèrent aux dépens des Grands Comédiens les spectateurs de l’Impromptu de Versailles.

La mort de Molière, en 1673, fut on ne peut plus favorable à la prospérité de l’Hôtel de Bourgogne. Baron fils, ce grand comédien, abandonna la troupe formée par son père adoptif, et entra dans celle de la rue Mauconseil, entraînant dans sa défection La Thorillière, Beauval et sa femme. Pour surcroît d’infortune, Lulli obtint la permission de faire représenter ses opéras dans la salle du Palais-Royal, et, en peu de jours, la veuve de Molière et ses infortunés camarades se trouvèrent sans protecteur, sans théâtre, et privés de leurs meilleurs artistes. Ce fut alors qu’en cette extrémité ils allèrent humblement demander asile à l’Hôtel de Bourgogne. Ils n’y trouvèrent que mépris et duretés, et un refus cruel leur fut signifié de la part de ceux qui étaient désormais à l’abri des atteintes du fin stylet de l’Impromptu de Versailles.

Dans cette situation, les acteurs, derniers débris de la troupe de Molière, entrèrent en arrangement avec le marquis de Sourdeac, propriétaire du théâtre abandonné par l’Opéra et situé rue des Fossés-de-Nesle (aujourd’hui Mazarine), vis-à-vis la rue Guénégaud. Ils l’achetèrent moyennant 30,000 livres. Le roi, songeant à la protection qu’il avait accordée à Molière, vint au secours de ses anciens camarades en ordonnant la suppression du théâtre du Marais et en faisant incorporer ses meilleurs sujets dans la troupe du Palais-Royal, que l’on appela depuis la troupe de Guénégaud, laquelle, d’après les registres, se trouva composée ainsi : les sieurs de Lagrange, de Brie, du Croisy, Hubert ; Mlles Molière, Lagrange, de Brie, Aubry, du Palais-Royal ; Rosimont et Angélique du Croisy, nouveaux engagés ; les sieurs Laroque, Dauvilliers, Dupin, Verneuil, Guérin d’Estriché, et Mlles Dauvilliers, Dupin, Auzillon, Guyot, du théâtre du Marais. On verra tout à l’heure que ces détails ont leur utilité. À ce tableau opposons l’état de la troupe de l’Hôtel de Bourgogne en 1673 : les sieurs Hauteroche, Lafleur, Poisson, Brécourt, Champmeslé, La Thuillerie, La Thorillière, Baron, Beauval ; Mlles Beauchâteau, Poisson, d’Ennebaut, Brécourt, Champmeslé, La Thuillerie et Beauval ; seize sujets. Floridor s’était retiré l’année précédente ; Beauchâteau et Montfleury étaient déjà morts à cette époque. Tels étaient les comédiens français d’un mérite reconnu que Paris possédait lorsque la troupe de Molière reconstituée vint s’établir rue Guénégaud. Le théâtre de l’Hôtel de Bourgogne souffrit de cette concurrence. Munis de leurs privilèges, les comédiens s’opposaient à toutes les entreprises théâtrales qui tentaient de s’établir ; mais la protection royale avait soustrait Molière et ses successeurs à leurs prétentions. D’ailleurs, leurs exigences ayant soulevé plusieurs démêlés fort désagréables, on supprima, en 1677, la confrérie de la Passion et ses privilèges. Les revenus de cette confrérie furent appliqués aux Enfants-Trouvés. L’anarchie régnait alors parmi les sociétaires de l’Hôtel de Bourgogne. Champmeslé et sa femme quittèrent la compagnie en 1679 pour passer à la salle Guénégaud, où devait s’opérer, l’année suivante, par ordre du roi, la réunion complète de tous les comédiens français. L’Hôtel de Bourgogne, avant cette fusion, avait rendu enfin hommage au génie de son rival en jouant l’Ombre de Molière, pièce due à l’acteur Brécourt, le transfuge du Palais-Royal. Nous n’avons pas à suivre ici la fortune des Grands Comédiens, dont l’histoire est désormais liée à celle de la Comédie française, la troupe du roi, comme s’intitulait la troupe de Guénégaud, en recevant dans son sein les acteurs de la rue Mauconseil, ayant pris le nom de Comédie française, qui lui est resté et auquel nous renvoyons le lecteur.

Les comédiens italiens dont nous avons précédemment parlé, et qui s’étaient tour à tour montrés aux théâtres du Petit-Bourbon, du Palais-Royal et de la rue Guénégaud, furent forcés d’abandonner cette salle en 1680, après la réunion qui vient d’être rappelée ; ils allèrent exploiter seuls celle de l’Hôtel de Bourgogne. Leurs représentations durèrent jusqu’en 1697, époque où le roi fit fermer leur spectacle pour avoir joué la Fausse Prude et voulu, sous ce titre, peindre, disait-on, Mme de Maintenon. Dominique, leur fameux arlequin, était mort avant cette catastrophe. L’Hôtel de Bourgogne ne rouvrit ses portes qu’au bout de dix-neuf ans, le 1er juin 1716, et l’on vit une nouvelle troupe, venue d’Italie, s’y établir après avoir débuté le 18 mai précédent par l’Ingano fortunato au Palais-Royal, où ils continuèrent de jouer tous les samedis jusqu’à la mort de Madame. Les acteurs qui la composaient étaient Lelio Riccoboni, Mario Baletti, Vicentini, Thomassin (le fameux arlequin), Flaminia Baletti, Sylvia, etc. L’ouverture de l’Hôtel de Bourgogne se fit par la Folie supposée, en présence du régent, et ces acteurs étrangers s’intitulèrent comédiens italiens de S. A. R. le duc d’Orléans. Mais, après la mort de ce prince, ils firent graver sur l’Hôtel de Bourgogne les armes de France, avec cette inscription en lettres d’or sur un marbre noir : Hôtel des comédiens italiens ordinaires du roi, entretenus par Sa Majesté, rétablis à Paris en l’année 1716.

Outre les anciens canevas italiens qu’on attachait aux murs, derrière les coulisses, et que les acteurs consultaient au commencement de chaque scène, on joua bientôt des ouvrages en vers, tels que Mérope, tragédie de Maffei, qui avait pour but d’essayer le goût du public sur les ouvrages sérieux (11 mai 1717). Les billets délivrés pour la représentation de Mérope portaient ces mots : Per chi l’entende, « Pour ceux qui l’entendent. » Malgré leurs soins et leurs efforts, les Italiens ne parvenaient pas à fixer le public français, étranger à la langue employée par eux. Le succès d’une pièce d’Autreau, écrite en français, et intitulée le Port à l’Anglais, attira pendant deux mois de suite la foule chez eux (25 avril 1718). Cet essai fut suivi de plusieurs autres non moins heureux. Fuzelier et quelques autres auteurs vinrent renforcer Autreau. À la troupe s’étaient adjoints le fils de Dominique et {Mlle Lalande. Le 13 juillet 1721, les comédiens italiens, abandonnant l’Hôtel de Bourgogne, allèrent représenter, le 25 du même mois, à la foire Saint-Laurent, sur le théâtre construit par leurs soins, Danaé, comédie en trois actes et en vers français. Le prologue représentait la façade de l’Hôtel de Bourgogne, portant cette inscription : Hôtel à louer. La troupe italienne se faisait foraine pour vivre. Elle revint pourtant à la rue Mauconseil, où peu à peu les comédies françaises l’emportèrent sur les canevas italiens. Outre Fuzelier et Autreau, d’Allainval, Marivaux, Romagnesi, Riccoboni, Dominique fils, Boissy, Sainte-Foix, etc., écrivirent une foule de joyeux et spirituels ouvrages qui firent la vogue du théâtre. En 1762, on réunit à la troupe italienne celle de l’Opéra-Comique ; les deux troupes jouèrent ensemble, pour la première fois, dans les Trois Sultanes de Favart ; à dater de ce moment, le répertoire s’enrichit des ouvrages d’Anseaume, Favart, Sedaine, Monval, etc., mis en musique par Duni, Philidor, Monsigny, Grétry, Dulayrac, etc. En 1779, les pièces italiennes furent supprimées, et l’on congédia tous les comédiens italiens, à l’exception du célèbre Carlin et de Camerani, qui abandonna son emploi de Scapin pour les fonctions de régisseur. Ainsi l’ariette facile et enjouée de Duni, l’harmonie de Philidor et la mélodie expressive de Monsigny l’emportaient sur la batte d’Arlequin, les grimaces de Pierrot et les infidélités de Colombine. L’Opéra-Comique, longtemps persécuté, jusqu’à sa réunion, par la comédie italienne elle-même, absorbait maintenant sa persécutrice. Les derniers ouvrages représentés à l’Hôtel de Bourgogne, dont Mme Favart, morte beaucoup trop tôt, avait fait les délices, et que Favart continuait toujours d’alimenter de bonnes pièces et d’excellents acteurs, les derniers ouvrages représentés rue Mauconseil furent les drames de Mercier, dont un surtout, Jeuneval (1781), se vit accueilli par un orage épouvantable de bravos et de huées, les pantomimes et les petites comédies de Florian, les gais vaudevilles de Piis et de Barré, les opéras-comiques de Marsollier, de Desforges, de Sedaine, etc. Grétry, Monsigny, Dalayrac avaient travaillé en même temps à agrandir le cadre de l’Opéra-Comique. Leurs chefs-d’œuvre, interprétés par les Dugazon, les Clairval, les Trial, les Michu, les Dorsonville, les Laruette, etc., avaient décidément fait oublier le genre des Italiens.

Depuis longtemps la salle Mauconseil ne suffisait plus à contenir la foule passionnée à l’excès pour un genre de musique éminemment français. À la clôture de 1783, les comédiens, alors fort improprement appelés italiens, quittèrent l’Hôtel de Bourgogne, qu’ils avaient occupé soixante-sept ans, et portèrent leur nom et leurs talents à la salle nouvellement bâtie sur un terrain dépendant des jardins de l’hôtel Choiseul, et qui prit le nom de Favart. Cette salle fut inaugurée le 23 avril 1783, et le 4 septembre suivant mourait le dernier arlequin de la Comédie italienne, le fameux Carlin. Quant à l’Hôtel de Bourgogne, qui avait été témoin des premiers tâtonnements de notre littérature dramatique, lui qui avait entendu les premiers éclats de rire de la Comédie et les premiers sanglots de la Tragédie, lui qui avait abrité dès sa naissance la muse souriante, gaie et tendre de la musique nationale, lui qui portait tant de gloire à son fronton et dont les échos répétaient encore les noms les plus illustres de l’art français, il vit un jour Thalie aux pieds légers, Melpomène en sa pourpre, Euterpe et Terpsichore, le quitter et fuir loin de lui en faisant tinter les grelots de la folie. On jugea que le dieu du commerce pouvait élire domicile dans le temple jusque-là réservé aux augustes filles de Jupiter. Approprié à sa nouvelle destination par l’architecte Dumas, l’Hôtel de Bourgogne devint… la halle aux cuirs. Ceci se passait en 1784. Mais ce n’était pas tout. Après avoir, durant quatre-vingt-deux ans bien comptés, prêté sa noble carcasse à MM. les corroyeurs, à MM. les peaussiers et à MM. les cordonniers, vu ses murs, ses escaliers et jusqu’à ses loges, encore imprégnés des plus délicats parfums, subir l’outrage quotidien d’un air empesté, on le dédaigne encore une fois, on le quitte de nouveau et, devenu gênant pour la circulation publique, sa chute définitive est décrétée (1866). Mais ses pierres pourront tomber, ses fondements pourront être arrachés du sol, et le lieu où il se dressait pourra devenir une place ou un boulevard, l’Hôtel de Bourgogne n’en sera pas moins toujours vivant dans la glorieuse histoire de l’art français. Corneille et Racine, Scarron et Marivaux, Favart et Sedaine, Grétry, Philidor et Monsigny sont des architectes qu’on n’exproprie point pour cause d’utilité publique, et le souvenir de leurs œuvres conservera à jamais celui du monument dont nous venons de rappeler l’histoire.


BOURGOGNE, bourg de France (Marne), ch.-l. de cant., arrond. et à 12 kiloin. N. de Reims ; pop. aggl. 904 h. — pop. tot. 1, 014 h. Filatures et tissus, tamis ; église du XIIIe siècle, classée au nombre des monuments historiques.


BOURGOIN (Bergusium), ville de France (Isère), ch. l. de cant., arrond. et à 15 kilom. de la Tour-du-Pin, sur la Boubre ; pop. aggl. 3, 752 hab. — pop. tot. 4, 851 hab. Tribunal de 1re instance. Filature de soie et de coton, taillanderie, tannerie ; commerce actif de toiles, chanvre, laine, et principalement de farines recherchées. On remarque à Bourgoin: l’église Saint-Antoine, les murs du château de Beauregard et deux jolies places ornées de fontaines. J.-J. Rousseau, exilé après la publication de l’Émile, se cacha pendant quelque temps au château de Montquin, situé à 2 kilom. de la ville.


BOURGOIN (Edmond), prieur des jacobins de Paris. Il se montra l’un des plus farouches ligueurs, et, dans ses sermons, il comparait le meurtrier d’Henri III, Jacques Clément, à Judith. En 1589, il prit les armes pour défendre Paris, assiégé par les soldats d’Henri IV, et fut fait prisonnier à l’assaut donné par eux à un des faubourgs. On le conduisit à Tours, et il fut condamné à mort ; quelques historiens disent qu’il mourut sur la roue, d’autres qu’il fut tiré à quatre chevaux (1590).


BOURGOIN (Marie-Thérèse-Étiennette), comédienne française, née à Parisien 1785, morte en 1833. Elle fut présentée, presque enfant, à Mlle Dumesnil, la célèbre tragédienne, qui l’accueillit avec bonté, devinant l’avenir réservé à la jeune fille. Celle-ci débuta, en 1790, à la Comédie-Française, par les rôles d’Amélie dans Fénelon, tragédie de Chénier, et d’Agnès de YEcole des femmes. Les charmes de sa figure et la grâce de sa personne lui valurent un succès prodigieux ; cependant elle ne fut admise comme sociétaire qu’en 1801, sur la recommandation expresse du ministre de l’intérieur Chaptal. Elle jouait à la fois les rôles de jeune première dans la tragédie et la comédie ; on pouvait lui reprocher un peu de froideur comme tragédienne, et son talent se prêtait mieux à représenter les jeunes filles qui cachent un peu de malice sous un petit air déHimidité que l’habitude du monde n’a pu encore leur faire perdre. Appelée en Russie en 1800, Mlle Bourgoin parut sur le théâtre de Saint-Pétersbourg, fut vivement applaudie et reçut de riches cadeaux de l’empereur Alexandre et de plusieurs hauts personnages de la cour. À son retour en France, elle eut le bon goût de suivre les conseils et les leçons de Talma; on s’en aperçut bientôt par les progrès qu’on remarqua dans la manière dont elle jouait les rôles tragiques, surtout ceux d’Electre, de Clytemnestre et d’Antlromaqufi. Peu de temps après la mort de Talmu, M’ie Bourgoin, cédant à l’ennui que lui causèrent quelques intrigues de coulisses, demanda sa retraite. La nostalgie du théâtre aida, dit-on, à abréger ses jours, M’e Bourgoin avait beaucoup d’es—’

BOUR

prit naturel, et, dans l’intimité, elle savait trouver des mots très-piquants et quelquefois un peu libres, ce qui la fit comparer à la célèbre Sophie Arnould. Une grande dame de la cour, impériale, qui avait perdu un perroquet auquel elle tenait beaucoup, s’étant imaginé que M’ic Bourgoin avait cet oiseau chez elle, lui écrivit une lettre prétentieuse au bas de laquelle elle étala tous ses titres. Mlle Bourgoin prit sur-le-champ une feuille de papier et répondit : " Ni vu ni connu, » puis elle signa Tphigénie en Aulide. La chronique scandaleuse du temps a donné beaucoup d’amants à M" » Bourgoin. Napoléon lui-même passa pour avoir eu ses faveurs.

BOURGOING (NoSl), ecclésiastique et jurisconsulte français du xvie siècle. Il fut abbé de Bouries, trésorier du chapitre de Nevers, président de la chambre des comptes de la même ville, puis conseiller au parlement de Paris. Il fut l’un des principaux rédacteurs de la Coutume de Nevers, et eut pour neveu Gui Coquille.

IIOURGOING (François), dit d’Agnon, historien français du xvie siècle, de la famille du précédent. Il était chanoine de Nevers lorsque, ayant, embrassé la Réforme, il se rendit en 1556 à Genève, où il habita quelque temps. Il revint plus tard en France et fut pasteur des réformés à Troyes. On lui doit la traduction des œuvres complètes de Flavius Josèphe. (Paris, 1570), et une Histoire ecclé-' siastique, extraite en partie des Centuries de Magdebourg (Genève, 1560-1565, 2 vol. in-fol.).

BOURGOING (François), un des fondateurs de l’Oratoire et le troisième général de cette congrégation, né à Paris en 1585, mort en 1G62. Docteur en Sorbonne, puis curé de Clichy, il fut un des six prêtres que le cardinal de Bérulle s’associa pour établir la congrégation de l’Oratoire, et il en fut nommé général après la mort du P. Condren.(lfi4l). il vit son administration troublée par des luttes avec les pères de son ordre, luttes provoquées par l’abus qu’il était accusé de faire de son autorité. Il a composé des règlements et des statuts qui ont semblé, en certaines de leurs parties, minutieux et oppressifs. On a de lui quelques ouvrages de piété et de discipline ecclésiastique, plus estimables pour le fond que remarquables dans la forme. Les principaux sont : Verilales et sublimes excelleittiœ Verbi incarnati (Anvers, 1C30, 2 vol. in-S"), ouvrage qui a. été traduit en français sous le titre de:Vérités et excellences de Jésus-Christ, et qui a eu un nombre considérables d’éditions ; Homélies sur les évangiles des dimanches et fêtes (16-12); Homélies des saints sur le martyrologe romain (1651, 3 vol.).

BOURGOING (Jean-François, baron de), diplomate et publiciste, né à Nevers en 1748, mort en 1811, était de la famille des trois précédents. Attaché de bonne heure aux légations et ambassades, il devint, en 1791, ministre plénipotentiaire près la cour de Madrid, entama à Figuières les premières négociations de la paix avec l’Espagne, fut chargé par Napoléon de la légation de Saxe, et assista en cette qualité au congrès d’Erfurth. On a de lui quelques ouvrages estimés:Tableau de l’Espagne moderne (1789) ; Mémoires historiques et philosophiques sur Pie VI (179S) ; une traduction de Y Histoire des flibustiers, de d’Archenholtz, etc. ; Histoire de l’empereur Charlemagne, traduite de l’Allemand Hegewiseh (1805); un roman intitulé:Correspondance d’un jeune militaire ou Mémoires du marquis de Lusigny et d’Hortense de Saint-Just (1778, 2 vol.) ; enfin Voyage du duc du Châtelet en Portugal (1S08, 2 vol.).

BOURGOING (Armand-Marc-Joseph de), fils aîné du précédent, né à Nevers en 1786. Après avoir suivi l’École militaire de Fontainebleau, il entra comme officier dans les dragons et se trouva à la bataille d’Austerlitz. lise distingua ensuite en Prusse, en Pologne, et sa bravoure attira l’attention de Napoléon, qui, pour la récompenser, donna la croix au jeune officier, et le nomma son ministre en Saxe. Devenu aide de camp du maréchal Ney, de Bourgoing fut fait prisonnier et ne put rentrer en France qu’après la Restauration.

BOURGOING (Charles-Paul-Amable, baron de), diplomate français, frère du précédent,. né k Hambourg en 1791, mort en 1864. Il servit dans la jeune garde pendant les dernières guerres de l’empire, entra dans la diplomatie sous la Restauration; fut attaché à diverses ambassades, et représenta la Fiance à Saint-Pétersbourg (1828-1832), en Saxe (1832-1835), enfin en Bavière (1S35-1S41). Nommé à cette époque pair de France, il siégea jusqu’à la révolution de Février, qui l’écarta momentanément des affaires. Le président Louis-Napoléon l’appela à l’ambassade d’Espagne en 1849, et au sénat en 1852. Il a publié quelques écrits, entre autres : Tableau des chemins de fer en Allemagne (1842), et les Guerres d’idiomes et de nationalités (1849), où il proscrit les guerres d’indépendance comme pouvant compromettre l’équilibre européen. On lui doit également des Souvenirs d’histoire contemporaine (1854), et des Souvenirs intimes., : <ecueil de faits relatifs pour la plupart à la vie de l’auteur, racontés avec bonhomie, et qui parurent seulement quelques mois avant la mort du baron de Bourgoing.

BOUR

BOURGOING DB VILLEFORE. V. Villb-

FORB.

BOURGOISAGE s. m. (bour-goi-za-je). Bourgeoisie, il Vieux mot.

BOURGON (Jean-Ignace-Joseph), historien français, né à i’ontarlier en 1799. Il obtint la chaire d’histoire à la Faculté de Besançon, et il a publié : Polybe considéré comme historien romain ; Histoire ancienne (1834) ; Histoire des Romains (1836) ; Abrégé de l’histoire de l’empire romain jusqu’à la prise de Constantinople ; Recherches historiques sur la ville et l’arrondissement de Pontarlier (1840).

BOURGONNIÈRE (château de la). Ce château est, assure M. Blancheton, un des plus anciens de l’Anjou, L’époque de sa fondation est incertaine. Presque détruit pendant la guerre de la Vendée, le bâtiment principal fut reconstruit dans le style moderne. Deux édifices qu’on aperçoit à chacun de ses côtés ont seuls échappé aux ravages du temps et des hommes. L’un est une tour dont les murs épais, les créneaux, le donjon qui la, surmonte, rappellent le génie guerrier dé nos pères ; l’autre est une chapelle qui jadis fut fortifiée. À l’extérieur, ses tours, ses ogives, ses murs couverts de croix de templiers ; au dedans, ses vitraux où se retrouve le même signe, avec la coquille du pèlerin et le cimeterre arabe, tout lui donne un aspect religieux et guerrier Une statue de proportions colossales attire les regards ; on ne sait si c’est celle de Jésus-Christ ou d’un templier. Les plus importantes familles de France ont possédé ce château, qui, du reste, offre peu de souvenirs historiques.

BOURGRAVE s. m. (bour-gra-ve). S’est dit quelquefois pour burgravl ;. V. ce mot.

BOURGTHÉttOULDE, bourg de France (Eure), ch.-l. de cant., arrond. et à 35 kilom. S.-E. de Pont-Audemer ; pop. aggl. 508 hab.

— pop. tôt. 715 hab. Commerce de bestiaux et de toiles. Magnifique château dont il ne subsiste plus que le pavillon d’entrée et le colombier. L’église a conservé une tour carrée du xve siècle et quelques beaux vitraux de la Renaissance.

BOURGUÛBUS, village de France (Calvados), ch.-l. de cant., arrond. et à 10 kilom. S.-É. de Caen ; pop. aggl. 185 hab. — pop. tôt. 278 hab. Belle église du xin » siècle ; le chœur appartient au premier style gothique, tandis que la porte ogivale du sud est du xv « siècle. La corniche extérieure du chœur est ornée de feuillages, au milieu desquels se montrent des figures en relief d’hommes et d’animaux.

BOURGUËIL (Burgalium), ville de France (Indre-et-Loire), ch.-l. de cant., arrond. et à 17 kilom. N.-O. de Chinon, sur la rive droite duChangeau ; pop. aggl. 1, 553 hab. — pop. tôt. 3, 416 hab. Commerce de porcs, chanvre, vins et bestiaux. Restes d’une ancienne abbaye de bénédictins, fondée en 990 ; église du xne siècle, dont l’abside surtout est fort remarquable.

BOUHGUEIL (N.), vaudevilliste français, né à Paris en 1763, mort en 1802. Il a fait représenter un assez grand nombre de pièces, dont celles qui eurent le plus de succès sont : le Pour et le contre, en un acte (isoi) ; Gesner, en collaboration avec Barré, Radet et Desfontaines, deux actes (1800) ; Monsieur Guillaume ou le Voyageur inconnu, deux actes (1800), avec les mêmes collaborateurs ; le Mur mitoyen ou le Divorce manqué (1802), avec Barré. On trouve aussi des chansons de Bourgueil dans les Dîners du Vaudeville.

BOURGUEMESTRE s. m. (bour-ghe-mèstre

— rad. bourgmestre). Ornith. Espèce de goéland des mers du Nord.

BOUHGUET (Louis), naturaliste et archéologue, né à Nîmes en 1678, mort à Ncufchàtel en 1742. Sa famille avait été exilée de France par la révocation de l’édit de "Nantes. Il fit de nombreux voyages en Italie, et en rapporta de riches collections d’antiquités. L’archéologie et l’histoire naturelle lui doivent quelques progrès. Ses principaux ouvrages sont:Dissertation sur les pierres figurées (1715) ; Traité des pétrifications (1762) ; Lettres philosophiques sur la formation des sels et des cristaux (1729), écrits dans lesquels il émit quelques idées judicieuses et neuves sur les fossiles, la formation des cristaux, les révolutions géologiques, etc. Comme archéologue, il a rendu des services réels à la paléographie étrusque. On lui doit notamment la découverte de l’alphabet étrusque. Membre des Académies de Berlin et de Ûortone, Bourguet entretenait une correspondance avec Leibniz, qui l’estimait fort pour ses connaissances en philosophie; car il avait étudié à fond tous les systèmes. Il termina ses jours dans la ville de NeiiRhâtel, où il s’était marié et où l’on avait créé pour lui une chaire de philosophie et de mathématiques. Outre les ouvrages déjà cités, Buuiguet a laissé des Opuscules mathématiques (Leyde, 1794) et un grand nombre de mémoires et d’articles insérés dans le recueil de l’Académie des sciences, le Journal helvétique, etc.

BOCRGCEVILLE (Charles de), sieur de Bras, antiquaire et écrivain français, né à Caen en 1504, mort en 1593. II fut attaché a la cour de François Ier et suivit ce monarque dans un voyage où il parcourut toutes les parties de la France. Il obtint ensuite la

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charge de lieutenant général do Caen. Son ouvrage le plus important est intitulé : les Recherches et antiquités de ta province de Neustrie, à présent duché de Normandie, comme des villes remarquables d’icelle et spécialement de la mile et université de Caen (158S). On lui doit en outre : Version française de Darès en Phrygie ; Discours de l’Église, de la religion et de la justice ; l’Athéomachie et discours sur l’immortalité de l’âme et la résurrection des corps.

BOURGUIÈRE s. f. (bour-ghi-è-rc). Pêch. Nasse à petites mailles.

BOURGUIGNON, onne adj. et s. (bourghi-gnon ; gn mil.) Géogr. Qui est de la Bourgogne, qui a rapport à la Bourgogne ou à ses habitants : Type bourguignon. Mœurs bourguignonnes. Le pays BOURGUIGNON. Si on veut retrouver encore quelque chose du type gaulois, il faut le chercher chez le Bourguignon.

— Art culin. Qualification donnée à plusieurs mets préparés au vin : Bœuf bourguignon.

— Hortic. Variété de raisin. Syn. de bou-

CARÈS OU DAMAS.

— S. m. Mar. Glaçon isolé, dans la mer du Nord. • « »

Bourguignon salé, Expression populaire que l’on retrouve dant le quatrain suivant :

Bourguignon salé,

L’epiîe au côté,

La barbe au menton.

Saute, Bourguignon.

C’est un trait satirique à l’adresse des Bourguignons, qui furent presque constamment les alliés de l’Angleterre pendant, les guerres séculaires que la France eut à soutenir avec ses redoutables voisins. La plupart des origines que l’on a données de co dicton proverbial sont contradictoires. Nous n’avons pas la prétention d’indiquer celle qui présente le plus d’authenticité ; nous nous bornerons à les faire connaître à nos lecteurs.. Quelques auteurs, parmi lesquels Olivier de Serres, prétendent que, en 1422, Jean de Châlons, prince d’Orange, s’empara d’Aigues-Mortes et y laissa, pour le compte de Philippe, duc de Bourgogne, trois compagnies de Bourguignons. Les bourgeois, qui supportaient difficilement leur joug, firent un jour main basse sur la garnison, et la passèrent tout entière au fil de l’épée. Soit que, en ce temps de terribles représailles, ils aient voulu conserver les cadavres pour les présenter à leur roi légitime comme un trophée de leur fidélité, soit qu’ils aient craint que de cet amas de corps en putréfaction il résultât une de ces épidémies pestilentielles si fréquentes à cette époque, ils les coupèrent en morceaux, les salèrent et conservèrent dans une cuve ces atroces débris.

Le Glossaire alphabétique, placé à la suite des Noëls bourguignons, publiés à Dijon en 1720, attribue l’expression de Bourguignon salé à ce que ce peuple fut le premier de tous les peuples de la Germanie qui embrassa le christianisme, d’où ses voisins, restés païens, leur donnèrent la qualification de salés, à cause du sel que l’on met, de nos jours encore, dans la bouche de ceux que l’on baptise.

Le Duchat pense que l’appellation qui nous occupe vient de la salade ou bourguignotte, espèce de casque particulier à la milice bourguignonne, ou, peut-être, do la rivière la Saale, sur les bords de laquelle ce peuple a pris naissance.

Enfin M. Lepère, qui ; en 1857, a fondé à Auxerre l’almanach le Bourguignon salé, faisant du mot sel le synonyme du mot esprit ; prétend que les Bourguignons ont mérito cette épithète par la finesse et. la vivacité de leurs reparties.

Quoi qu’il en soit de toutes ces versions, nous les préférons à colle qui est adoptée dans quelques régions de la France, qui, jalouses de la Bourgogne et de ses vins, font de ses habitants des disciples d’Épicure, et, donnant au mot une extension que rien ne justifie, appellent Bourguignon salé'l’animal tpropter convivia natum •.

Bourguignonne* (les), opéra-comique en un acte et en prose, paroles de M. Henri Meilhac, musique de M. Louis Deffes, représenté pour la première fois à Bade, puis à l’Opéra-Comique, le 16 juillet 1S63. Manette est venue passer quelques jours à la ferme de son cousin par alliance, Landry, dont la femme Thérèse a le tort de faire la besogno de son homme, ce qui permet à celui-ci de se livrer k une oisiveté dangereuse pour la paix du ménage. Heureusement, Manette est une fine mouche. Elle éconduit Landry, qui cherche a lui conter fleurette, et, grâce à ses coiv seils, Thérèse écarte à temps le danger qui menace son bonheur conjugal. Manette apprend à la jeune femme le secret du ménage, c’est-à-dire l’art de tenir un époux en haleine, en inquiétant son orgueil et son cœur. Ce petit poème ne manque ni d’esprit ni d’habileté. C’est un agréable marivaudage en sabots. Le sujet est usé jusqu’à la corde, mais les variations ont presque le mérite de la nouveauté. Cette agréable saynète eut d’ailleurs l’avantage de servir de début, à l’Opéra-Comique, h MU » Girard, la seule Dugazon de notre époque, qui chantait avec un brio incomparable -■—. Tends ton verre, la Bourguignonne.-On

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