Gérardmer à travers les âges/introduction

GÉRARDMER

À TRAVERS LES ÂGES


HISTOIRE COMPLÈTE DE GÉRARDMER

depuis ses origines jusqu’au commencement du xixe siècle d’après des documents inédits puisés aux archives communales et départementales

Introduction


§ I. − Description géographique sommaire

Bien que nous nous soyons imposé pour tâche de faire revivre le Gérardmer des temps écoulés, c’est un devoir pour nous de présenter au lecteur le pays dont nous allons lui raconter l’histoire.

La ville de Gérardmer est un chef-lieu de canton du département des Vosges, situé par 4°30′ de longitude Est et 4°86′ de latitude Nord, à une altitude moyenne de 660 à 700 mètres.

Sa superficie est de 8.864 hectares dont 5.622 en forêts. On se fera une idée de son étendue, si l’on pense que la superficie de Gérardmer est environ celle de Paris. De la forêt du Haut-Poirot à celle de Retournemer, il y a 19 kilomètres ; c’est la plus grande longueur de Gérardmer ; sa plus grande largeur, 13 kilomètres, s’étend du Kertoff à la ferme de Creuse-Goutte.

Le recensement de 1891[1] a donné, pour Gérardmer, une population de 7 197 habitants, répartis en 1 686 ménages, 1 223 maisons, 1 718 logements dont 171 servent d’ateliers, magasins et boutiques.

Cette population est très disséminée. La principale agglomération, — Gérardmer (centre), — ne comprend que 2 885 habitants. Elle est formée de 4 sections : Le Rain (729 habitants) — Le Marché (784 h.) — Le Lac (227 h.) — Forgotte (1 145 h.)

La population disséminée, 4 312 habitants, est distribuée en 9 sections, subdivisées elles-mêmes en un grand nombre de hameaux, d’écarts et de fermes (plus de 200).

Les 9 sections renfermant la population éparse, sont : Le Beillard (527 h.) — Le Phény (317 h.) — Les Bas-Rupts (495 h.) — La Rayée (410 h.) — Les Gouttridos (206 h.) — Xonrupt (516 h.) — Les Fies (427 h.) — La Haie Griselle (902 h.) — Liézey-Xettes (612 h.)

Nous donnons ci-après la nomenclature des principaux hameaux et écarts :

Les Bas-Rupts. — Le Bas-des-Bas-Rupts. — La Basse-de-la-Mine. — La Basse-Cheniquet. — La Basse-des-Rupts. — La Basse-du-Beillard. — Le Beillard. — Belbriette. — La Brande. — La Broche-du-Pont. — Le Blanc-Ruxel. — Le Bouxerand. — Aux Berleux. — Les Broches. — Le Beau-de-Pierre. — Les Bolles. — La Bruche. — Le Bas-des-Xettes.

Celley. — La Cercenée. — La Chennezelle. — La Chevrotte. — Le Cresson. — Creuse-Goutte. — Le Corsaire-du-Bas. — Le Corsaire-de-la-Maix. — Les Cuves. — Cheny.

Derrière-le-Lac. — Derrière-Longemer. — Derrière-le-Haut. — L’Envers-de-Longemer.

Les 4 Feignes de Xonrupt. — Les Fies.

La Goutte-de-la-Montée. — La Goutte-des-Sats. — La Goutte-du-Chat. — Les Granges-Bas. — La Grange-Idoux. — Les Gros-Prés. — Grosse-Pierre. — Les Gouttridos. — Le Grand-Étang. — La Goutte-du-Tour.

La Haleuche. — La Haie-Griselle. — Les Hautes-Vannes. — Les Hauts-Rupts. — Le Haut-du-Phény. — Le Haut-des-Xettes. — Haut-Rouen. — Les Hautes-Feignes.

Kichompré. — Le Kertoff.

Longemer. — Le Larron.

Neymont. — Noir-Rupt.

Le Phény. — Au Page. — Les Plombes. — Les Poncés. — La Poussière. — Le Pont-du-Lac. — Le Pont-Mansuy. — Le Pré-des-Clefs. — Le Pré-Beurson. — Le Pré-Canon. — Le Pré-Chaussotte (Beillard et Phény). — Le Pré-Patenotte. — Paris-Goutte. — Peut-Pré. — Le Poly-la-Chèvre.

La Rayée. — Ramberchamp. — Relles-Gouttes. — Retournemer. — Les Roches-Peîtres. — La Rochotte. — Les Rochottes. — Rouen. — Les Rochires. — Rein-des-Fouchés. — Rein-du-Beau. — Le Rond-Faing.

Les Schlaifs.

Les Trois-Maisons. — Les Trois-Maisons de Xonrupt. — La Trinité.

L’Urson.

Les Vieilles-Fouïes. — Les Vazenés. — La Voie-du-Valtin.

Les Xettes. — Le Xart-Pierrat. — Xonrupt. — Le Petit-Xonrupt.

Les métairies en chaumes servant de marcairies, sont : Balveurche. — Le Haut-Chitelet. — Fachepremont. — Saint-Jacques et Grouvelin.

Dans ces dernières années, un grand nombre de villas et de chalets ont été élevés sur les bords du lac et contribué à l’embellissement du pays.

Citons les Villas : Kattendyke. — Marie-Thérèse. — Montplaisir. — La Toquade. — Raymonde. — Les Hirondelles.

Les Chalets : d’Alsace. — Deguerre. — Hogard. — Jeanne. — Cahen. — De Warren. — Le Nid. — Beauséjour. — Des Pinsons. — Contal. — Herzog. — L’Ermitage. — Des Roches-Peîtres. — Kahn. — De Sacy. — Boll. — Laflize. — Bijou. — Perkès. — Noël. — Des Frênes. — Des Trois-Maisons. — Dubois. — Terrasses. — Cottage-des-Sorbiers. — Vélin.

Les principales fermes sont :

Le Biazot. — La Beuchotte. — La Broche-du-Lard. — La Brochotte. — Les Bassottes.

Le Cerceneux-Mougeon. — Le Cerceneux-Marion. — Le Costet.

La Fontaine-Gilet. — Fremont. — Le Faing-la-Grue. — Fachepremont. — Fony.

La Grange-Mauselaine. — La Grosse-Grange. — La Grange-de-Cheny. — La Goutte-Logelot. — La Grange-Claudon. — Giraud-Finance. — La Grande-Goutte. — La Grange-Colin. — La Grangeotte. — La Goutte-des-Ruaux. — Grouvelin.

Les Hautes-Royes. — Le Haut-Corsaire. — Le Hantz. — Le Haut-Poirot.

Launard.

Mizelle. — Mérelle.

Pré-Georges. — Pré-Falte. — Le Planot. — Peute-Goutte. — Les Petites Hautes-Vannes. — Le Pré-Jean-J’espère. — Le Pré-Pierrel. — Le Pré-Paris. — Les Petites-Royes.

Le Roulier. — Le Rond-Pré.

Saint-Jacques.

Vologne.

Xégoutté.

L’agglomération principale de Gérardmer est placée dans un bassin au pied du massif central du Hohneck. Les sommets voisins ont une altitude qui varie de 800m à 1366m ;

citons : Le Haut-de-la-Charme (984m). — Grosse-Pierre
(1 008m). — La Roche-des-Bioquets (1 093m). — Grouvelin (1 000m). — Saint-Jacques (1 111m). — Fachepremont (1 020m). — Le Hohneck (1 366m). — La Roche-du-Page (836m). — La Roche-du-Diable (950m). — La Beheuille (1 000m). — Balveurche (1 288m). — Le Grand-Kerné (894m). — Le Haut-de-Miselle (934m). — Le Barrau (1 008m). — La Tête-du-Costet (887m). — La Roche-du-Rain (745m).

Plusieurs cours d’eau prennent leur source sur le territoire de Gérardmer ; tels sont : La Meurthe, Le Bouchot, les ruisseaux de Chajoux et de Vologne qui forment La Moselotte, le ruisseau de Cleurie, La Jamagne qui écoule les eaux du lac de Gérardmer (alt. 660m). Ce lac a une superficie de 116 hectares ; il en existe deux autres à peu de distance : celui de Longemer (736m d’alt.), et celui de Retournemer (778m).

La ville de Gérardmer est située à égale distance de Saint-Dié et de Remiremont (29 kilomètres) ; les routes qui traversent Gérardmer sont les chemins de grande communication Nos 8 (1), 11 (1), 47 (2) et 72 (2), de Saales à Mélizey, de Lamarche à Munster, de Rambervillers à Gérardmer, de Remiremont à Gérardmer, et le chemin d’intérêt commun No 83 (1), de Gérardmer au Valtin[2]. Depuis 1878, une voie ferrée relie Gérardmer à la ligne d’Épinal à Lunéville par Saint-Dié.

Depuis le traité de Francfort, la ville de Gérardmer a une partie de son territoire qui sert de frontière, de la chaume du Haut-Chitelet aux Feignes-Charlemagne ; c’est la commune alsacienne de Stosswihr qui est limitrophe.

Les autres confins de Gérardmer sont : au Nord, les communes du Valtin, de Ban-sur-Meurthe, de Gerbépal, des Arrentès-de-Corcieux, de Barbey-Seroux, de Granges et de Champdray : à l’Ouest, les communes de Liézey et du Tholy ; au Sud, celles de Sapois, Rochesson et La Bresse.

Les dénominations des sections, hameaux et écarts, des noms de lieux, qui paraissent si bizarres au premier abord, ont en partie leurs origines dans des causes locales (patois, accidents de terrain, etc.)

Nous allons les expliquer sommairement d’après le plan d’un travail remarquable du savant docteur A. Fournier[3], président de la section des Hautes-Vosges du Club alpin français.

On peut ramener les influences locales qui ont contribué à la formation des noms de lieux, à 2 catégories :

La 1re, celle des Influences naturelles.

La 2e, celle des Influences politiques.

1o Influences naturelles

Sous ce titre, nous groupons divers paragraphes :

§ I. — L’Eau — Les Ruisseaux. — Les Rivières. — Les Lacs. — Les Étangs. — Les Marais.

Nous allons citer les mots racines, en plaçant à droite les dérivés existant au pays.

Fontaine. A donné :

Fontaine-Gillet, ferme.

Fontaine-Paxion.

Fontaine-de-la-Duchesse.

Les Fontenottes, lieu dit (Bas-Rupts).

La Goutte. À sa naissance, un petit ruisseau qui sort de la source, du marécage (feigne) qui l’alimente, devient une Goutte. Des villages, des lieux habités prennent parfois le nom de la goutte qui les avoisine.

Creuse-Goutte, vallée, écart et cascade.

Paris-Goutte, écart.

Goutte-du-Tour, écart et forêt communale.

Goutte-du-Chat, écart.

Goutte-des-Sats[4], écart.

Relles-Gouttes[5], hameau.

Gouttridos[6], section.

Forgotte[7], section.

Peute-Goutte[8], ferme.

Goutte-de-la-Montée, écart.

Goutte-Logelot, ferme.

Goutte-des-Ruaux, ferme.

Grande-Goutte, ferme.

Goutte-Choine, lieu dit.

La Goutte prend quelquefois naissance dans un lieu défriché, toujours essarté, appelé en patois un hchais, d’où l’on a fait :

Hchai-Gottêye, écart.

Hchai-Gley, lieu dit,

que l’on a francisés, en les dénaturant entièrement, en

Xégoutté.

Chaies-Gley.

Le Rupt. Mot germain désignant un ruisseau ; en grossissant, une goutte devient un ruisseau, un rupt (in ri en patois).

Les Bas-Rupts, section.

Les Hauts-Rupts, hameau.

La Basse-des-Rupts, hameau et vallée, nom aussi d’un ruisseau.

Le Noir-Rupt, écart et vallée, nom aussi d’un ruisseau.

Xonrupt, section. En patois, Hchonri ; or, un Hchon[9] est un pont primitif formé d’une simple planche, jetée sur un ruisseau ; comme il fallait beaucoup de ces hchons pour traverser la Vologne, dans ce hameau, on l’a baptisé Hchon ri, d’où Xonruit, Xonruy, Xonruz, en français Xonrupt.

Lacs. Le mot lac qui désigne dans les Vosges des nappes d’eau fort restreintes, a été remplacé dans le langage du pays par un nom bien autrement prétentieux : celui de mer ou mar, nom celtique signifiant lac ou mare.

À Gérardmer, la signification des mots lac et mer est identique, d’où lac de Gérardmer, de Longemer, de Retournemer.

Il est aisé de faire ressortir le pléonasme qui a lieu quand on écrit Lac de Gérardmer ; on dit lac du lac de Gérard, puisque mer et lac sont synonymes.

Donc Gérardmer signifie mer de Gérard.

Longemer signifie mer longue.

Retournemer signifie dernière mer, il faut retourner.

Feignes. La Feigne désigne un marécage de la montagne. Ce mot vient du français fange, dérivé du mot germain latinisé fania (fenne, fenna) ; feigne, feine, feing, faing, fény, fony sont des mots qui représentent tous des lieux humides.

Les 4 Feignes-de-Xonrupt, écart.

Les Hautes-Feignes, écart.

Les Feignes-sous-Vologne, lieu dit.

Les Feignes-du-Noir-Rupt, lieu dit.

Les Feignes-de-Foric, lieu dit.

Les Feignes-Charlemagne, lieu dit.

Le Faing-des-Meules, écho.

Le Faing-la-Grue, ferme.

Le Faing-Lové[10], lieu dit.

Le Rond-Faing, écart.

Le Phény[11], section.

Fonie ou Fony, lieu dit et ferme.

§ II. — Montagnes. — Vallées. — Configuration du lieu.

Roche. Nom très répandu à Gérardmer.

Roche-du-Rain.

Roche-du-Lac.

Roche-du-Page.

Roche-du-Soleil.

Roche-du-Renard ou du Coucou.

Roche-du-Diable.

Roche-des Artistes.

Roche des Vieux-Chevaux.

Roche de l’Homme-Noir ou du Noir-Homme.

Belle Roche.

Les Rochires, hameau.

La Rochotte, hameau.

Les Rochottes, écart.

Les Roches-Paîtres[12], écart.

Pierre.

Pierre-Charlemagne, lieu dit et pierre.

Grosse-Pierre, montagne et écart.

Mont. Nom donné à quelques montagnes.

Neyemont.

Frémont, ferme également.

Fachepremont[13], ferme également.

Rougimont[14], montagne, forêt, écart.

Housseramont.

Haut, même sens que mont et même emploi.

Haut-du-Phény, écart.

Haut-des-Xettes, écart.

Haut-de-Rouen, écart.

Haut-de-la-Poussière, lieu dit.

Hautes-Feignes, écart.

Hautes-Vannes, écart.

Tête. Point culminant de la région ; sommet de la montagne.

Tête-du-Costet (alt. 887m).

Tête-du-Barrau[15] (alt. 1.008m).

Côte. Nom donné à quelques montagnes ou lieux élevés.

Le Costet[16].

Le Haut-de-la-Côte.

Rain. Pente rapide ; terme très employé en montagne.

Le Rain (section du centre).

La Roche-du-Rain.

Le Rain-de-la-Bruche, lieu dit.

Le Rein-des-Fouchés, écart.

Le Rein-du-Beau, écart.

Les Reins-de-Vologne, forêt domaniale.

Le Rein-des-Genièves, lieu dit.

Les Reins-Derrière-le-Lac, lieu dit.

Charme. La chaume devient une charme quand le plateau est marécageux ou couvert de bruyères. Une charme est à une moindre altitude qu’une chaume.

Le Haut-de-la-Charme, point de vue très joli.

Basse. Fond supérieur d’une vallée profonde, souvent boisée.

La Basse-de-la-Mine (Longemer et Bas-des-Xettes).

La Basse-de-l’Ours, lieu sauvage.

La Basse-du-Beillard, écart.

La Basse-du-Cheniquet, écart.

Les Bassottes, ferme.

Creuse. Lieu profond, désert, sorte de trou.

La Creuse, vallée et hameau.

Creuse-Goutte.

Vierge-de-la-Creuse.

Col. Passage. Le plus connu est celui de la Schlucht.

Mais ce mot allemand signifie passage ; en sorte qu’en disant Col de la Schlucht, on dit col du col (comme lac du lac de Gérard pour lac de Gérardmer)[17].

Citons encore :

Le Col de Grosse-Pierre (1.008m d’alt.)

Le Col de Sapois (832m d’alt.)

Le Col de Martimprey (800m d’alt.)

Le Col du Surceneux (826m d’alt.)

Collet Petit col.

Le Collet, à 2 kilomètres de la Schlucht.

Parfois, la configuration du lieu a contribué à l’appellation.

Ainsi :

Haut. Haut-du-Phény. — Haut-des-Xettes.

Bas. Bas-des-Xettes. — Bas-des-Bas-Rupts. — Granges-Bas, hameau.

Fond. Le Fond-du-Beillard. — Le Fond-de-Celley.

Brèches. Lieu défriché, essarté. D’où l’on a fait :

Les Bruches, lieu dit.

La Grande-Breuche.

La Breuchotte (autrefois La Brochatte).

La Broche-du-Lard, corruption de La Broche de l’air, lieu défriché où l’air se faisait sentir.

La Broche-du-Pont (autrefois La Breuche).

Cercenée. De l’ancien patois cercer, écorcer ; autrefois, pour faire périr les arbres, comme le bois avait peu de valeur, on ne se donnait pas la peine de les abattre ; on les écorçait sur place et ils séchaient ; ils étaient cercés, c’est-à-dire arrachés.

Les lieux cercés, défrichés, sont devenus des cercées, des cercenées, des cerceneux, des surceneux. À la suite de ce mot, le montagnard ajoutait d’habitude son nom. C’est ce qui explique l’origine des mots suivants :

La Cercenée, hameau.

Le Cerceneux, lieu dit.

Le Cerceneux-Mougeon, ferme.

Le Cerceneux-Marion, ferme.

Le Surceneux, forêt.

C’est ainsi que se sont peuplées les sections de Gérardmer ; partout où il y avait dans la forêt un bout de pré, un pâturage, les montagnards agrandissaient leur patrimoine aux dépens de la forêt environnante, en cerçant les sapins.

Aussi, trouve-t-on, vers 1727, de nombreuses dénominations de Cerceneux, telles que : Surceneux-Hans. — Surceneux-Jacot. — Surceneux-du-Bas. — Surceneux-Blaison. – Haut-Surceneulx, etc.

Chêne. Comme cet arbre ne pousse guère bien dans la montagne, il a été remarqué ; nous avons, à Gérardmer :

La Chennezelle, écart.

Le Chenelet, lieu dit (Phény).

Cheny, lieu dit.

Grange-de-Cheny, ferme[18].

Derrière. Derrière-Longemer, lieu dit et écarts.

Derrière-le-Lac, lieu dit et écarts.

Derrière-le-Haut, lieu dit et écarts.

Droit. La Droite-de-Vologne, forêt.

La Droite-du-Lac, lieu dit.

Il est à remarquer que La Droite-du-Lac est sur la rive gauche de La Jamagne.

Envers. Ce qui est de l’autre côté, plus loin ; à Gérardmer le plus souvent l’Envers désigne la rive gauche d’un cours d’eau.

L’Envers-de-Vologne.

L’Envers-des-Fies.

L’Envers-de-Longemer.

L’Envers-du-Lac.

§ III. — Végétation. — Arbres. — Arbustes. — Plantes

Haie. Haie-Griselle[19], section.

Broussailles. Le vieux mot de la langue celtique qui est synonyme, Brande, Branda[20], a donné La Brande, montagne et forêt.

Xart. Ancien mot patois très répandu dans Gérardmer et qui signifie sart, essart, lieu défriché, d’où l’on a enlevé les arbres, que l’on a essarté.

Xard[21] Pierrat, lieu dit.

Xettes, section.

Corsaire[22], le Bas, le Haut, de La Maix, écarts et fermes.

Xettis[23], pâturages (sur La Bresse).

Xetté[24], hameau et coteau.

La Rayée. Section ainsi nommée d’un mot patois qui signifie arrachée (rauyiè), parce que la Section fut mise à nu par un ouragan.

Sapins-épicéas. En patois, l’épicéa s’appelle fie, d’où

Les Fies, section.

Le Pont-des-Fées (fies).

Cresson. Le Cresson.

§ IV. — La Terre. — Les Champs. — Les Prés.

Les lieux cultivés étant moins importants à Gérardmer que dans une commune rurale de la plaine, les noms venus de l’influence de la nature du sol, se rapportent spécialement aux prés.

La Prairie-du-Champ.

Le Pré-Georges, ferme au milieu du pré.

Le Pré-Falte, ferme au milieu du pré.

Le Pré-Jean-J’espère, ferme au milieu du pré.

Le Pré-Pierrel, ferme au milieu du pré.

Le Pré-Paris, ferme au milieu du pré.

Le Pré-Beurson, écart.

Le Pré-Canon, écart.

Le Pré-Chaussotte, écart.

Le Pré-Patenotte, écart.

Peut-Pré, écart.

Le Pré-des-Clefs[25], écart.


2° INFLUENCES POLITIQUES & RELIGIEUSES


§ I. — Noms de Saints. — Abbayes. Basiliques, etc.

Saint. Saint-Jacques, chaume.

Saint-Nicolas-de-la-Poussière, écart.

Croix. Le Calvaire, cimetière.

Le Crucifix, lieu dit.

Le Pré-de-la-Croix, lieu dit.

Chapelle. La Chapelle de la Trinité.

La Chapelle de Longemer.

§ II. — Agglomérations. — Domaines. — Fermes

Ker. Mot celtique qui signifie grand mur.

Le Kertoff, gorge sauvage.

Le Grand-Kerné, précipice.

Dans le patois du pays, un kerné est un mur abrupt, une roche à pic.

Cella. Nom de l’habitation dépendant de la manse tributaire, d’où Celley.

§ III. — Habitations. — Constructions pour les animaux.

Maison.

Les Trois-Maisons (Xettes).

Les Trois-Maisons de Xonrupt.

Granges. Hangars isolés dans une prairie, destinés, à l’origine, à remiser le fourrage. Plus tard, elles furent habitées.

Les Granges-Bas, hameau.

La Grange-Idoux, hameau.

La Grange-Mauselaine, ferme.

La Grange-de-Cheny, ferme.

La Grange-Colin, ferme.

La Grosse-Grange, ferme.

La Grangeotte, ferme.

Roitelets. Gorge-des-Roitelets.

Ours. Basse-de-l’Ours.

Hérisson. L’Urson (forêt) du nom patois de cet animal.

Chèvre. Les Chevrottes, forêt.

La Chevrotte, écart.

Cochon. Kichompré, hameau ; par les transformations suivantes : Cochon Prey (1631), un pré où l’on avait lâché un cochon ; Queschomprey (1731) ; Quichonprey (1791) ; Kichompré (moderne).

Enfin un grand nombre de lieux dits, d’accidents de terrain, doivent leur nom à des animaux ; citons en quelques-uns pour terminer :

Le Pont-des-Singes.

Le Saut-de-la-Bourrique.

La Roche-du-Coucou ou du Renard.

La Roche-des-Vieux-Chevaux.

La Roche-des-Fourmis.

Le Chemin-des-Fourmis, etc.

§ IV. — Ponts. — Chemins. — Industrie.

Ponts

Pont-du-Lac.

Pont-Mansuy.

Pont-des-Morts (Calvaire).

Pont-de-Vologne.

Pont-des-Fées.

Etc.

Croisette. Croisement de routes.

La Croisette, hameau.

Mines. La Basse-la-Mine (Longemer et Bas-des-Xettes) ; voir article Mines.

Cet aperçu que le lecteur peut étendre aisément, montre tout l’intérêt qui s’attache à la recherche des noms de lieux. De cette façon, la géographie est intimement liée à l’histoire locale ; c’est pourquoi nous avons donné les détails qui précèdent.


§ II. — LES ORIGINES DE GÉRARDMER


Sources de l’Histoire


L’histoire, comme l’a dit Michelet, est la résurrection du passé ; or, pour faire revivre les temps anciens, il est de toute nécessité de recourir aux vieux manuscrits, aux vieux parchemins, ces témoins d’un autre âge. C’est pourquoi nous n’avons pas hésité à parcourir entièrement les archives communales antérieures à 1789, source précieuse de documents aussi curieux qu’inédits. Elles renferment plus d’une centaine de parchemins, de nombreuses liasses contenant 1.830 pièces papier et quantité de registres, dont le nombre de feuillets dépasse 12.000[26].

Chose bien étrange, à part le résumé analytique dressé avec soin par l’administration des archives départementales et publié en 1867, les archives communales de Gérardmer étaient à peu près vierges de toute compulsation ; c’est ce qui explique pourquoi les historiens de Gérardmer ont écrit en suivant leurs inspirations, leurs souvenirs, les traditions locales. Il faut toutefois en excepter Henri Lepage, le défunt archiviste départemental de Meurthe-et-Moselle qui a donné, en 1877[27], une remarquable notice sur Gérardmer, d’après les documents déposés au Trésor des Chartes, notice que nous avons consultée avec fruit.

Nous avons donc eu la satisfaction de ne pas suivre des chemins battus en passant cinq années de nos loisirs à fouiller les vieilles archives de Gérardmer ; nous avons été largement récompensé de nos efforts par l’intérêt des renseignements recueillis et par la satisfaction de pouvoir écrire l’histoire du pays par le pays lui-même.

Cependant nous n’avons pas négligé la lecture des ouvrages qui pouvaient nous fournir des données sur le passé de Gérardmer, et nous en dressons la liste après la table analytique des archives communales. Cela nous permettra d’être plus succinct dans les renvois que nous ferons, au cours de l’ouvrage, à ces différentes sources de l’histoire locale.

1° Table analytique des archives de Gérardmer antérieures à 1789
[28].
A. A. I. — Franchises diverses (1573-1790).
A. A. II. — Arrêtés et ordonnances du duc de Lorraine et de l’administration.
B. B. I, II, III. — Registres des délibérations de l’assemblée communale (1693-1790).
C. C. I. — Droits divers des seigneurs (1618-1766).
C. C. II à IX. — Comptes rendus des syndics et pièces justificatives (1673-1790).
C. C. IX à XIII. — Rôles de répartition des impôts par les asseyeurs (1657-1790).
C. C. XIII à XVII. — Impositions diverses (état de répartition) (1685-1767).
C. C. XVII à XIX. — Impôts directs : abonnements (1756-1786).
C. C. XX. — Main-morte (1554-1715).
C. C. XXI. — Cabaretiers. Tavernes (1689-1750).
C. C. XXII. — Répartition d’impôts pour ponts et chaussées (1722- 1789).
D. D. I. — Acensements (1580-1780).
D. D. II. — Chaumes (1564-1756).
D. D. III. — Droits d’usage dans les forêts (1567-1770).
D. D. IV. — Forêts (1626-1778).
D. D. V. — Délivrance de bois (1730-1790).
D. D. VI. — Vente et échange de terrains (1732-1751).
D. D. — VII. Registres et livres terriers d’acensement (1612-1756).
D. D. VIII. — Pêche (1665-1786).
D. D. IX. — Routes (1699-1787).
D. D. X. — Chemins (1725-1788).
D. D. XI. — Ponts et aqueducs (1618-1787).
D. D. XII à XIV. — Église. — Cloches. — Maison curiale (1718-1765).
D. D. XV. — École (1751-1752).
D. D. XVI à XVIII. — Scieries. — Moulins. — Moulins banaux (1618- 1789).
E. E. I à III. — Milices. — Fournitures militaires. — Pionniers (1658-1788).
F. F. I et V. — Contentieux. — Administration communale (1688- 1789).
F. F. II. — Délits forestiers (1702-1789).
F. F. III. — Police. — Injures (1710-1789).
F. F. IV. — Justice (1660-1773).
F. F. VI à X. — Procès entre la commune et les particuliers et pour affaires communales (1706-1786).
G. G. I, IV, V. — Bureau des pauvres. — Comptes rendus (1719- 1792).

G. G. II, III. — Comptes de fabrique (1678-1685).
G. G. VI, VIII. — Églises de Corcieux et de Gérardmer. — Droits ecclésiastiques. — Surveillance de l’Église (1542-1790).
G. G. VII. — Translation d’un fou à Maréville (1733).
G. G. IX. — Actes de l’état civil (1609-1789).
H. H. I. — Épizootie (1714-1783).
H. H. II. — Foires et marchés (1654-1786).
H. H. III. — Oies (1769).
J. J. I. — Actes conservatoires contre le sieur de Martimprey (1615). — Notices de Léopold Bexon (1778) et Didelot (1832), sur Gérardmer.
2° Archives départementales.

Dignité abbatiale. — Chapitre de Remiremont (1077-1140).
Seigneurie dépendant de la Crosse, art. 1508-1548 (1721-1736).
Grande prévôté, art. 1510 à 1542 (1547-1559).
Chaumes. — Grande sonrerie, art. 1543 à 1563 (1596-1785).
C. 46. – Construction de l’église, du presbytère et de la maison d’école (1751).
3° Publications diverses que nous avons consultées.

A) Documents rares et inédits de l’Histoire vosgienne, publiés par le Comité d’Histoire vosgienne (collection).
B) Essai de topographie physique et médicale du canton de Gérardmer, par J.-B. Jacquot (1826).
C) Précis historique et topographique sur le canton de Gérardmer, par l’abbé Jacquel, curé de Liézey (1852).
D) Notice historique et descriptive de Gérardmer, par Henri Lepage (1877).
E.) Gérardmer et ses environs, par X. Thiriat (1882).
F.) Histoire de la Lorraine, par A. Digot (6 volumes) (1856).
G) Mémoires pour servir à l’Histoire de la Lorraine, par A. Noel (2 vol.)
H) Mémoires de la Société d’Archéologie lorraine (collection).
I) Les Vosges pendant la Révolution, par M. Félix Bouvier (1885).
J) Les Vosges avant l’Histoire, par M. Voulot (1876).
K.) Annuaire de l’Instruction publique du département des Vosges, par M. Ch. Merlin (1892).
L.) Des Influences locales sur l’Origine et la formation des noms de lieux dans le département des Vosges, par M. le docteur A. Fournier (1884. — Extrait des Annales de la Société de Géographie de l’Est).
M.) Vieilles coutumes, usages et traditions populaires des Vosges, provenant des cultes antiques et particulièrement de celui du soleil, par M. le docteur A. Fournier (1891. — Extrait du Bulletin de la Société philomatique vosgienne).
O) Topographie ancienne du département des Vosges, par le même. (Société d’Émulation, 1892).
P.) Situation financière de la commune de Gérardmer, par M. Félix Martin, maire (1889).


Les Origines de Gérardmer


La topographie de Gérardmer explique en partie son histoire. Quoique la communauté ait fourni son contingent d’hommes d’armes pendant les guerres soutenues aux XVIe et XVIIe siècles par les ducs de Lorraine, elle ne fut pas bouleversée par ces expéditions guerrières ; à l’abri des montagnes qui la protègent, elle continua à se développer librement.

Son histoire, à la fois locale et nationale, ne manque ni de légendes merveilleuses, ni de renseignements précieux sur l’état du peuple français avant 1789. Elle offre, en outre, au lecteur le puissant attrait qui s’attache au développement spontané d’une population énergique, laborieuse, amie de la liberté et très originale.

Si l’on en croit M. Voulot[29], les environs de Gérardmer, déserts au Moyen âge, étaient néanmoins fréquentés, dès les temps les plus reculés, par des tribus celtiques d’origine aryenne, et bien antérieures aux Leuci. L’origine celtique du montagnard est du reste confirmée par les historiens modernes[30].

D’après la légende, Gérardmer aurait été habité au temps de Charlemagne ; le grand empereur serait venu chasser l’ours, le loup, l’aurochs, dans la forêt des Vosges, il aurait même traversé la chaîne par le Montabey dans ses expéditions guerrières.

Étant donnée la proximité de la résidence d’été du grand guerrier, Champ-le-Duc, il n’y a rien d’impossible qu’il soit venu à Gérardmer ; c’est ce que tendrait à confirmer la dénomination de quelques-unes des curiosités du pays, comme la Cascade et la Fontaine-Charlemagne, la Pierre-Charlemagne.

De là à l’affirmer, il y a loin ; d’autant plus qu’aucun texte formel d’histoire ne certifie le fait, Henri Martin, lui-même, que l’on a invoqué souvent en témoignage, cite simplement un voyage de Karl, fils de Charlemagne, « qui vint retrouver son père dans la forêt des Vosges[31]. »

Quant à la fameuse Pierre-Charlemagne, elle aurait servi à l’empereur et à sa suite pour faire un repas champêtre. Beaucoup de montagnards croient même voir sur cette pierre, dans une excavation, l’empreinte du pas du cheval de ce monarque.

« Cette excavation, dit M. Fournier, a, en effet, une forme aux trois quarts circulaire ; elle peut être prise pour une empreinte de fer à cheval.

« La vénération de cette pierre n’est qu’une forme du culte des pierres, à cause de l’empreinte qu’elle porte et qui était le symbole du soleil (la forme circulaire ronde). »

Charlemagne a laissé, dans le pays de Gérardmer, des souvenirs que l’on retrouve à l’état de légende. « Quoi donc d’étonnant, continue le même narrateur, le souvenir de l’adoration du soleil étant disparu, que pour le montagnard, ce soit le cheval de ce souverain, devenu légendaire, qui ait laissé l’empreinte de son pied sur cette roche ?

« Plusieurs coutumes des Vosges rappellent cette forme du culte du soleil.

« À Noël, les parrains et marraines donnaient à leurs filleuls et filleules un gâteau connu sous le nom de cugneu ou quénieux. Au commencement du Carême, on vendait d’autres gâteaux ayant la forme de croissants. On les appelait des cornottes, ou counottes, ou conattes.

« Les pauvres allaient de maison en maison quêter des beignets en chantant :

« Cercles, cercles de roses,
Les beignets sont levés.
Poëles, poëles pétillent,
Les beignets sont rôtis.
Beignets hors ! Beignets !
Ou je fracasse la baraque[32]. »

M. Fournier fait remarquer le caractère religieux de ces mots : cercles, cercles qui figurent dans ce chant ; cercle rappelle l’image ronde du soleil : « Phébus, tu faisais paître les bœufs qui courbent en marchant leurs pieds à forme de croissants… Ô soleil ! dont les rapides coursiers répandent circulairement la lumière ! »

L’auteur termine en ajoutant : « C’est toujours par une forme ronde que l’on rappelle la forme du soleil ; si on le fête, c’est en rond que l’on danse ; si on le chante, c’est sa forme circulaire que l’on évoque. »

Une autre tradition, plus vivace que celle de Charlemagne, attribue à Gérard d’Alsace la fondation de Gérardmer. Il aurait établi sur les bords de La Jamagne une tour destinée à perpétuer le souvenir de son passage, et les restes de cette prétendue tour auraient été trouvés en rebâtissant la chapelle du Calvaire.

L’existence de cette tour est si peu authentique qu’on peut en faire une légende comme celle de la Pierre-Charlemagne, d’autant plus que les chroniqueurs de l’époque ne parlent pas de Gérardmer dans leurs récits.

Richer, moine de Senones, auteur du XIIIe siècle, raconte que : « L’an du Seigneur 1056, un certain personnage du nom de Bilon, serviteur du duc Gérard, construisit une chapelle en l’honneur de saint Barthélémy, dans une forêt de la Vosges, qu’on appelle Longe-mer[33]. »

Ce récit fut développé par d’autres chroniqueurs, notamment Jean Herquel ou Herculanus, et Jean Ruyr, chanoines de Saint-Dié.

Jean Herquel, dans son Histoire de Saint-Dié reproduite par Dom Calmet[34], dit, à la date 1057 : « Par le même temps, Bilon, serviteur de Gérard, duc de Lorraine, dégoûté de la vie de la cour, et se reprochant à lui-même la vie absurde qu’il avait menée, se retira dans la solitude et dans la forêt qui est appelée Longe-mer. Il éleva une chapelle au divin Barthélémy (au saint), et pour lui, une cellule. Là, par une persévérance admirable, cet homme qui avait été nourri dans les délices d’une cour, persévéra comme on le rapporte. Il y a là aussi un lac, d’où la rivière Vologne tire son origine, laquelle, coulant à travers la vallée des champs, se jette dans la Moselle un peu au-dessous de Docelles. Ce fleuve charrie des pierres précieuses ou moules[35], non inférieures, pour la grandeur et la couleur purpurines, à celle de l’Orient[36]. »

Si l’on n’admet pas, — et rien n’autorise à le croire, — que Gérard d’Alsace ait fait de Gérardmer un rendez-vous de chasse et de pêche, cette dernière localité ne lui devrait donc pas son nom.

C’est du reste l’opinion du P. Benoît Picard, « d’un écrivain dur, mais exact ; il est fait pour instruire et il n’a que cet avantage. Sec, et toujours éloigné du ton qu’il faut prendre pour plaire, cet historien ne peut être lu avec plaisir que par ceux qui ont besoin de lui[37] ». Le Capucin toulois critique, en ces termes, le « Traité historique et critique de l’origine de la maison de Lorraine », par le P. Hugo, abbé d’Étival : « J’ai cru autrefois que le village de Gérardmer empruntait son nom au duc Gérard, mais après plusieurs recherches que j’ai faites, pour l’éclaircissement de l’histoire de Toul et de Metz, à laquelle je m’applique actuellement, je dis à présent que le duc Gérard, suivi de Bilon, l’un de ses officiers, assista à la translation de l’évêque St Gérard, faite à Toul le 22 Octobre 1051. Cet officier, touché de la sainteté de nos cérémonies et des miracles que le bon Dieu fit paraître sur le tombeau de ce saint, et qui ont été écrits par un auteur contemporain, se retira dans les Vosges et fit bâtir une chapelle en l’honneur de St Gérard et de St Barthélemi, laquelle, à cause des biens qu’il y annexa, fut érigée en bénéfice dans l’église paroissiale, dont ces deux saints devinrent les patrons et donnèrent lieu d’appeler les habitations proches du lac, Gérardmer, Sancti Gerardi mare. »

À l’appui de sa conjecture, le P. Benoît cite deux titres : l’un de 1449, établissant qu’à cette date, un siècle et demi après la première charte qui fasse mention de Gérardmer, une chapelle sous le vocable de saint Gérard et de saint Barthélemi, existait près du lac de Longemer, et que les dames de Remiremont avaient le patronat de la chapelle ; l’autre, qu’en 1455, la chapelle n’était plus désignée que sous le nom de saint Barthélemi[38].

Il y aurait longtemps au reste, que la légende de Gérard d’Alsace serait oubliée, si une circonstance toute fortuite ne lui avait donné un regain d’actualité. En 1866, aux fêtes du centenaire de la réunion de la Lorraine à la France, les organisateurs des décorations créèrent, pour Gérardmer, des armoiries purement imaginaires, où figurait Gérard d’Alsace. Nous démontrons plus loin combien on était loin de la vérité.

C’est ici le lieu de placer une petite digression concernant la prononciation du mot Gérardmer.

Faut-il dire Gérardmé ou Gérardmère ?

Les habitants du pays prononcent Gérardmé, mais ils disent Retournemère, Longemère. Cette anomalie étonne les étrangers qui prononcent tous Gérardmère.

Il nous semble que la question est toute tranchée ; ce sont les habitants du pays qui baptisent eux-mêmes leur localité ; s’ils l’appellent Gérardmé, il faut dire comme eux. Il y a peut-être à cela une raison d’étymologie. Autrefois on désignait Gérardmer par les noms de Géramer, Gyraulmeix, Giralmeix, Giraulmer, Giralmer, Giraumeix, Gérameix, Géraumeix, Giraulmeix, Girardmer, Giramer ; en patois du pays Giraudmouè, de Giraud, patois de Gérard et mouè, patois de lac. Comme la prononciation patoise a longtemps prévalu, la terminaison en eix aura prévalu d’où Gérardmeix, Gérardmé.

Mais alors pourquoi ne dit-on pas de même Retournemé, Longemé, puisqu’il y a une raison étymologique analogue, et que, dans le patois du pays, on dit de même Longemô, Retounmô ?

Il y a bien longtemps que le poète Horace a répondu à la question ; en reconnaissant l’autorité de l’usage, il dit :

Si volet usus
Quem Penes arbitrium est, et jus et norma loquendi.


Origine certaine de Gérardmer


Jusqu’alors on n’a pas trouvé de titre plus ancien que la fin du XIIIe siècle, pour mentionner le nom de Gérardmer la première fois.

Le titre dont il s’agit est un acte de Mai 1285, par lequel le duc Ferry III concéda à Conrad Wernher, sire de Hadstatt, à son fils et à leurs héritiers, en fief et augmentation de fiefs, que le dit Hadstatt tenait déjà de lui, la moitié de la ville de La Bresse, qu’il les a associés dans les lieux appelés Géramer et Longemer en telle manière que lui et eux doivent faire une ville neuve dans ces lieux, où ils auront chacun moitié.

Le texte même de ce titre, si important pour Gérardmer, se trouve dans la copie faite à la fin du XVIe siècle[39], d’un Vidimus original écrit en français, mais que le transcripteur a mis en latin.

Nous le donnons in extenso, avec une traduction française à peu près littérale ; en dessous nous donnons le texte latin[40].

…Nous, Ferry, duc et marquis de Lorraine, faisons savoir à tous nos sujets que nous avons donné et concédé à nos fidèles amis Conrad Wernher, sire de Hadstatt, à Conrad Wernher, son fils cadet, en fief et en augmentation des autres fiefs qu’ils tiennent déjà de nous ou qu’ils tiendront encore de nous, ou de nos héritiers, la moitié de la ville et du ban dits de La Bresse, situés de l’autre côté de Cornemont (Cornimont). Nous leur accordons aussi la ville que le sire Lieffroi de Ste Honorine avait reçue de nous en fief et qui nous est revenue par suite de la mort de Lieffroi ; cette ville comprend hommes, femmes, terres, prairies, forêts, eaux, revenus, cens, juridictions, bans, jugements, domaines, etc. ; quant à l’autre moitié de la ville de La Bresse et du ban, elle restera en notre possession et en celle de nos héritiers. Et ceux à qui nous faisons cette concession devront fidèlement défendre la dite ville de La Bresse contre les ennemis qui sont de l’autre côté des montagnes de l’Allemagne ; pour nous, nous la défendrons fidèlement contre les ennemis qui pourraient venir du côté des montagnes de la France. Et nous faisons savoir que nous avons associé les dits sieurs de Hadstatt, dans les lieux dits Géramer et Longemer ; nous devons faire ensemble une ville neuve dans ces lieux, dont une moitié nous appartiendra à nous et à nos héritiers ; que si l’on vient à établir un marché ou un péage, la moitié des revenus sera pour nous et nos héritiers, l’autre moitié reviendra aux sires de Hadstatt et à leurs héritiers ; ils auront la charge de conduire les marchands qui passerontdans ce pays, vers l’Allemagne ; pour nous, nous conduirons ceux qui se dirigent vers la France.

Nous faisons aussi savoir que nous et la duchesse, notre femme, nous pourrons pêcher dans ces lieux pour nous ; les sires de Hadstatt le pourront faire également pour eux, et si l’on vend les poissons pêchés dans ce domaine, nous partagerons encore avec eux le produit de la vente. Nous nous réservons spécialement à nous et à nos héritiers les forêts qui sont contiguës à Géramer et Longe-mer ; toutefois nous accordons aux habitants de cette Ville neuve l’autorisation d’y toucher du bois pour bâtir leurs demeures et d’y ramasser le bois mort pour leur chauffage…

Pour confirmer ce pacte, j’ai donné ces lettres marquées de notre Seing, en témoignage de vérité.

Donné en l’an de l’Incarnation de N. Seigneur, mil deux cent quatre-vingt-cinq, le samedi avant la fête de la Ste Vierge Marie, au mois de Mai.

On peut conclure, avec certitude, que Gérardmer, deux fois désigné dans ces lettres sous le nom de Ville neuve, date de la deuxième moitié du XIIIe siècle.

Premiers Habitants de Gérardmer


« La tradition rapporte, dit Jean-Baptiste Jacquot[41], que les premiers habitants trouvèrent toute la surface de Gérardmer couverte de bois de haute futaie et d’arbrisseaux sauvages, à l’exception du beau pâquis, dit le Trexau[42], sur la rive orientale du lac et à l’extrémité occidentale du bourg.

« Ces premiers habitants, pêcheurs et chasseurs, ne tardèrent pas à être convaincus des inconvénients et de l’insuffisance de ce genre de vie, de son incompatibilité, soit avec les agréments de la vie, soit avec l’entretien de la santé qui réclame un régime plus varié, et sentirent promptement la nécessité de cultiver la terre. Dans ce dessein, et pour hâter le défrichement de leurs forêts, ils commencèrent à former des clairières, soit en coupant les arbres, soit en les ébranchant, ou même en les écorçant sur pied, pour les faire sécher plus rapidement. » Ils pratiquèrent ces opérations qu’ils appelaient tantôt brèches, tantôt cercenées, surceneux, vieux mots patois qui signifient écorcer, défricher, essarter.

Les premières habitations de Gérardmer furent situées sur la rive orientale du lac, et sur le bord de La Jamagne, en suivant l’ancien chemin du Vinot aux Bruches. Avant la construction du Chalet d’Alsace par M. Momy, l’allée plantée de marronniers qui longe le lac, était remplie par les baraques des anciens pêcheurs du lac ; ces habitations, ordinairement en planches, misérables, malpropres, enlevaient au paysage du lac une grande partie de son pittoresque ; M. Momy fit œuvre d’utilité publique en les rasant et en nivelant ensuite leur emplacement ; cependant tout le vieux Gérardmer n’a pas disparu ; on peut voir encore plusieurs maisons portant le millésime de 1500, notamment celle qui se trouve en face du chemin de Liézey, sur le chemin qui va de la rue de la Gare à l’avenue du Vinot[43].

Des raisons autres que celle de l’alimentation devaient engager les premiers habitants de Gérardmer à ne pas former d’agglomération auprès du lac ; l’hiver y était long et humide ; le vent d’ouest, qui est le vent dominant du pays, y souffle avec force ; pour se mettre à l’abri des intempéries, ils vinrent s’installer dans les vallées abritées (Basse-des-Rupts, Creuse, Ramberchamp), ou sur le versant des coteaux (Rain, Bas-des-Xettes, Rochires, Forgotte) ; il est à remarquer, du reste, que la population de la section du Lac a toujours été la plus faible de celle des 4 sections du centre.

Ce mouvement de rétrogradation dans la vallée avait une autre cause ; il rapprochait les fidèles de l’église d’alors, la chapelle du Calvaire ; on se demande, au premier abord, pourquoi l’agglomération ne s’est pas formée autour de l’église, comme cela s’est produit partout ; c’est que la prairie du Champ, à l’époque, était marécageuse, tourbeuse, inabordable par les temps de pluie ou de fonte de neige ; les maisons ont été édifiées sur la hauteur, au flanc du coteau, et l’église a été construite au milieu des habitations, dès 1731.

Un document du XIVe siècle, qui existe au Trésor des Chartes[44], constate que le duc Raoul a donné à Conrad Hack de Tannes (Tann) « dix livrées de terre de forts, à rachat, à prendre et avoir sur la pâture, les haisches et les yssues des bois que le dit duc a entre Longemer et le pertux d’Estaye (col de Taye) ; lesquelles dix livrées de terre lui et ses hoirs doivent tenir en fief et hommage jusqu’à ce qu’ils les puissent racheter pour la somme de cent livres de forts[45]. »

« Le Trésor des Chartes, dit Henri Lepage, possède des actes de reprises faites aux ducs Charles II, René II, Antoine et Charles III, en 1404, 1507, 1509, 1524 et 1553, par Eppe, Cune, Frédéric et Claus de Hadstatt, pour ce qu’ils tenaient en fief masculin de ces princes au Val de Liepvre, à La Bresse, à Gérardmer, etc. » D’après le même auteur, Claus de Hadstatt eut des difficultés avec le sieur de Savigny, touchant leurs droits respectifs au village de La Bresse. Le 24 Décembre 1570, Claus en écrivit au comte de Vaudémont, lieutenant-général pour le duc Charles III, son neveu ; le 5 Mars 1584, l’officier de la seigneurie de Hadstatt réitéra les plaintes que son maître avait précédemment faites, et les consigna dans une lettre, adressée au procureur général de Vosges, où l’on remarque le passage suivant : « Touchant les prééminences et souveraineté qu’au nom de la très-louable Maison de Lorraine, la famille et Maison masculine de Hatstatt a eu seule jusques à présent, et en quelle manière cela se peult prouver et monstrer,… de ce en ay je donné suffisant advertissement… Et quant aux lettres et tiltres servans a cest affaires, je les ay envoyé en court… J’ay néantmoins, depuis vos dernières lettres à moy escriptes, cherché diligemment la première lettre de reprise,… mais je n’ay trouvé aultre chose qu’une saulvegarde ou protection du Saint Empire, afin que ceulx de La Bresse, Géramer et Longemer puissent librement hanter et demeurer en Allemaigne, par où (à mon opinion), s’ensuyt qu’à la première réception du fief, il a esté dit et conclu expressément que la très louable Maison de Lorraine donneroit aux subjectz en entrant, et ceulx de Hatstatt en sortant, saulve conduit… »

Clauss mourut vers cette époque, sans héritier mâle, et le fief retourna à la couronne de Lorraine.






  1. Archives communales postérieures à 1789, case population.
  2. Le Département des Vosges, par M. Léon Louis, t. VI, p. 309.
  3. Des influences locales sur l’origine et la formation des noms de lieux dans le département des Vosges.
  4. Mieux Goutte-des-Saps, ancienne orthographe du verbe saper ; car on a défriché des sapins dans la vallée, ou de Sap, sapin, comme Ban-de-Sapt.
  5. Relles, rapides, vallée très abrupte où coulent les gouttes.
  6. Gouttes-Ridos, puis Gouttesridos et Gouttridos.
  7. For et gotte, patois de goutte ; autrefois Four goutte, Fourgotte puis Forgotte.
  8. Peute, laide en patois.
  9. Le Hchon est la première planche débitée dans un sapin, la contre-dosse.
  10. Autrefois Faing-Levey, feignes dont on avait levé la terre, que l’on avait desséchée.
  11. Autrefois Fény, Fany, Fenil, Phenil, Feny, puis Phény.
  12. Ou Roches-Peitres. L’orthographe n’est pas fixée ; on écrivait autrefois Roches-Peltres ou Roches-Peltes ; dans le langage du pays, on prononce Roches-Paîtes.
  13. Voir Chaumes.
  14. De Rouge, Rougi, car ce coteau a le soleil levant de bonne heure ; il est aussi formé d’un granit rougeâtre.
  15. En patois lo Boro, nom d’un grand fourneau arrondi, à coffre énorme, répandu dans la montagne. Probablement à cause de la forme arrondie de la montagne.
  16. En 1626, on écrivait le Chostel, puis le Costel, le Costet.
  17. Il est vrai que ce mot, si répandu, s’est francisé en dehors de sa signification allemande.
  18. Une tradition veut aussi que cette ferme soit l’ancien chenil des seigneurs de Martimprey, d’où son nom.
  19. À cause de la couleur.
  20. Qui a fourni le mot Brandon.
  21. Ancienne orthographe : Xart.
  22. Autrefois Corxard, Corxelard, Corxelaire, Corxaire, puis Corsaire.
  23. Anciennement Xatty.
  24. Autrefois Xaté. Il existait, au Bas-des-Xettes, un lieu qu’on appelait Les Xtés ; il y avait un pont appelé le Pont-des-Xtés, autre forme de Xettes. Nous avons aussi trouvé Xatel, Xtel.
  25. Ainsi nommé d’un pré communal, situé à cet endroit, qui fut vendu en 1732 pour acheter les ferrements de l’église en construction.
  26. Nous adressons ici nos sincères remerciements à M. Félix Martin, maire, qui nous a donné toute latitude pour nous servir des archives communales, et à M. Brégeot, secrétaire de Mairie, qui nous a obligeamment facilité nos recherches. L. G.
  27. Annales de la Société d’Émulation du Département des Vosges, 1877.
  28. Ces documents sont en simples liasses. Les archives postérieures à 1789 sont classées dans des casiers en fer-blanc avec indications apparentes au dos du casier. Elles sont bien plus faciles à consulter que les anciennes, se conservent mieux et sont plus à l’abri d’un incendie. D’après l’Inventaire sommaire des archives départementales, tome II, 1867.
  29. Les Vosges avant l’histoire.
  30. Docteur A. Fournier, Topographie ancienne du département des Vosges, p. 51.
  31. Voici le texte de cet historien : « Karle revint triomphant présenter les dépouilles des vaincus (les Bohémiens) à son père, dans la forêt des Vosges, où l’empereur passait la saison de la chasse. » t. II, p. 348.
  32. Voici le texte en patois alsacien, que chantaient les montagnards du Val de Munster, en allant quêter ces beignets :

    Reihe, Reihe Rose !
    D’Kehchle sen geblose.
    Pfanne, Pfanne krache,
    D’Kehchle sen gebrache.
    Kehchle rus ! Kehchle rus !
    Od’ri schlag è loch en’s Hus (mot à mot : ou je fais un trou à la maison).

  33. Chronique de Richer, manuscrit de la bibliothèque publique de Nancy, fo X-Vo. Voici le texte latin : Anno Domini mo lvjo quidam Bilonus, Gerardi ducis servus, in saltu Vosagi qui Longum mare dicitur, locuns et capellam in honore beati Bartholomei privus edificavit.
  34. T. VII, pr. col., clxxv.
  35. Il s’agit de la moule à perle (Unio elongata). On ne la trouve dans la Vologne qu’au-dessous du confluent du Neuné.
  36. Cette traduction est aussi littérale que possible ; voici le texte latin : Per idem tempus, Bilonus, servus Gerardi, ducis Lotharingie, vite pertesus aulice, et semetipsum corripiens ob vitam absurde actam, in solitudinem secessit, atque in saltu qui Longummare vocatur, sacellum divo Bartholomeo et sibi cellulam erexit, ubi, mirabilii constantia, vir in aule delitiis enutritus, perseverasse fertur. Est ibi lacus, unde Volumna fluvius originem fluit, qui preterfluens vallem Camporum, in Mosellam paululum infra Docellas labitur. Hic fluvius baccas sive uniones fert, magnitudine et colore subrubeo orientalibus non inferiores.
  37. Chevrier, cependant peu louangeur de sa nature.
  38. D’après M. Arthur Benoît, Annales de la Société d’Émulation du département des Vosges pour 1878. ― Voici le texte des deux extraits d’après le Capucin toulois : Religiosa Domina Hervieta de Vienna et Capitulum Ecclesiæ Monasterii Sancti Petri de Romaricomonte Ordinis S. Benedicti, ad quas presentatio dictæ cappellaniæ S. Gerardi et S. Bartolomei de longo mari assertitur pertinere. 10 Martii 1449. Dilectum nostrum Joannem Freminet de Castrio supra Mosellam Tullensis Diocesis subdiacononum ad capellianum perpetuam ad altare S. Bartolomœi in longo mari fundatam et vacatem per diu turnam rectoris sive possessoris dictæ capellaniæ orbationem per venerabilem et religiosam dominam Alexiam de Parroya Dei patientia, Abbatissam ecclesiæ sive Monasterii S. Petri de Romaricomonte, dictæ diocœsis, Ordinis S. Benedicti.
  39. Trésor des Chartes. Cartulaire Bailliage de Vosges pour le domaine, t. I (B. 380), fo170.
  40. Ego Fridericus, dux Lotharingiæ et marchio, notum facio universis quod ego dedi et concessi amicis meis fidelibus domino Conrado Wernhhero, dicto de Hadestatt, et domino Conrado Wernhero, filio suo juniori, militibus et corum heredibus, in feodem et in augmentationem aliorum feodorum que jam tenet seu tenere debet a me vel meis heredibus, mediætatem ville dicte de La Bresce, que sita est ex altera parte Cornemont et de banno, sicut eam quondam dominus Liefridus deo Sancta Heumerina tenebat a me, que ex morte dicti Leifridi, qui eam in feodo tenetat a me, mihi rehabita, videlicet in hominibus, uxoribus, terris, pratis, nemoribus, aquis, redditibus, censibus, jurisdictionibus, bannis, judiciis, dominiis et in omnibus aliis quecumque sint, et alia medietas dicte ville de La Bresce, et de banno remanet mihi et meis heredibus ; et ipsi debent fideliter defendere dictam villam de la Bresce et dictum bannum ab illis qui sunt ultra montes ex parte Alemannie ; et ego debeo illos fideliter defendere ex illis qui sunt ab ista parte montium terre gallice. Et sciendum est quod ego associavi eos illis locis que dicuntur Geramer et Longe mer tali modo quod ego et ipsi debemus facere unam villam novam in illis locis, in quibus ego et mei heredes habebimus et habere debemus medietatem, et ipsi et heredes eorum aliam medietatem ; et si ibi accipitur teloneum seu pedagium, ego et mei heredes debemus habere medietatem et ipsi et heredes eorum alteram medietatem ; et ipsi debent conducere mercatores transeuntes per illa loca ab altera parte montium ex parte Alemannie, et ego debo eos conducere ex ista parte montium terre gallice. Hoc etiam sciendum est quod ego et ducissa uxor mea possumus ibi piscari pro nobis, et ipsi similiter possunt piscari pro se ; et si fieret aliqua venditio piscationis illorum locorum, ego et mei heredes debemus habere medietatem, et ipsi, et heredes eorum aliam medietatem. Item notandum est quod silve que sunt contigue ad Geramer et Longemer remanent mihi et meis heredibus sine participatione dictorum Conradi Wernheri et heredum eorum, hoc excepto quod incole de dicta nova villa debent pro edificatione domorum suorum lignis illis usufrui et pro igne lignis dejectis que putrescerent…
    In cujus rei firmitatem ego dedi eis litteras sigillo meo sigillatas, testimonium veritatis. Datum anno ab Incarnatione Domini millesimo CC. octuagesimo quinto, sabbato ante festum beate Marie Virginis mensis Maii.
  41. Essai de Topographie, ouvrage cité.
  42. D’un vieux mot patois qui signifie lieu dépouillé, défriché.
  43. Elle appartient à Mme veuve Jacquot. Il en existe encore quelques-unes sur le Trexau.
  44. Layette Val de Liepvre II, n°4.
  45. H. Lepage, Notice sur Gérardmer.