III. — Rivières et canaux.

hydrographie fluviale. — Le département du Nord se divise en plusieurs bassins ; en d’autres termes, ses eaux se versent dans des fleuves qui les mènent à la mer par des voies différentes : ainsi les eaux de la commune d’Anor vont passer devant les quais de Rouen et tomber dans la Manche ; celles de Fourmies, commune voisine, vont passer devant Liège, et s’engloutissent dans la mer du Nord.

Les bassins qui se partagent le Nord sont, par ordre d’importance : le bassin de l’Escaut, celui de la Meuse, celui de l’Yser, celui de l’Aa, celui de la Seine. Les quatre premiers portent leurs eaux à la mer du Nord, le dernier les porte à la Manche.

Le bassin de l’Escaut embrasse plus des deux tiers du département ; il s’étend sur les arrondissements entiers de Cambrai, de Valenciennes, de Douai, de Lille, et sur une grande partie de ceux d’Avesnes et d’Hazebrouck.

L’Escaut prenait autrefois sa source dans le cimetière du village de Beaurevoir. À la suite de transports de terrains qui gênèrent la marche des eaux dans le vallon de Beaurevoir, la fontaine d’où sort le fleuve se porta à 3 ou 4 kilomètres plus bas, à l’abbaye du Mont-Saint-Martin, tout près du Catelet, chef-lieu de canton du département de l’Aisne. Après 7 kilomètres de cours, l’Escaut entre, au-dessus de Honnecourt, sur le territoire du Nord, où il baigne un grand nombre de riches villages et plusieurs villes : Marcoing, Cambrai, Bouchain, Valenciennes, Condé. Au-dessous de Mortagne, il quitte la France pour la Belgique, arrose Tournay, Audenarde, Gand, Termonde, Anvers. Devant cette ville, c’est déjà un large cours d’eau portant les plus grands navires. En aval, il se transforme en un vaste estuaire, puis se divise en deux golfes, l’Escaut occidental et l’Escaut oriental, séparés par les deux îles de Beveland et l’île de Walcheren.

L’Escaut se dirige du sud au nord, abstraction faite de nombreux circuits qui portent son cours à 350 kilomètres environ, dont 100 en France. Sa pente est faible, car il prend sa source à une hauteur peu considérable au-dessus de la mer, à 90 mètres seulement ; et comme il parcourt un long trajet de son origine à l’Océan, sa vallée est peu inclinée de l’amont à l’aval. Aussi a-t-il été rendu aisément navigable. Il porte bateau à partir de Cambrai.

Les principaux tributaires de l’Escaut dans le Nord sont l’Eauette, l’Herclain, la Sensée, la Selle, l’Écaillon, la Rhonelle, la Hayne, la Scarpe. En Belgique, à Gand, il reçoit une rivière qui a traversé le département, la Lys.

L’Eauette prend sa source à la fontaine des Pierres et tombe dans l’Escaut (rive gauche) à Marcoing, après un cours de 3 kilomètres seulement.

L’Herclain sort de terre à Trois-Villes et se perd dans l’Escaut à Iwuy (rive droite). Son cours est de 50 kilomètres.

La Sensée vient du département du Pas-de-Calais, où elle naît à quelques kilomètres au nord de la ville de Bapaume, et où elle a plus des deux tiers de son cours, long de 60 kilomètres. Dans le département du Nord, elle prête sa vallée à un canal navigable, qui a pris le nom de canal de la Sensée et qui relie la Scarpe au canal de l’Escaut, qu’il rejoint au lieu dit le Bassin-Rond. Elle s’engloutit dans l’Escaut, sur la rive gauche, à l’entrée de Bouchain. — La Sensée a pour affluent la Gache, dont l’embouchure se trouve sur le territoire d’Aubencheul-au-Bac.

La Selle a son origine dans le vallon de Molain (département de l’Aisne) ; elle entre bientôt dans le département du Nord, y baigne deux villes, le Cateau et Solesmes, et gagne l’Escaut à Denain (rive droite). Cours, 45 kilomètres. — Elle a pour affluents le Bassuyau et le Bayart.

L’Écaillon sort d’un étang à l’entrée de la forêt de Mormal, passe à 2 kilomètres au sud des murs du Quesnoy et tombe dans l’Escaut (rive droite) en aval de Thiant, après un parcours de 50 kilomètres.

La Rhonelle a la même longueur que l’Écaillon ; elle sort comme lui de la forêt de Mormal et passe aussi au pied de la colline du Quesnoy, à 1 kilomètre environ au nord-est. Elle traverse Valenciennes et s’y perd dans l’Escaut (rive droite).

La Hayne a sa source et presque tout son cours dans la Belgique, où elle traverse l’importante ville de Mons ; sur une longueur de 80 kilomètres, 5 ou 6 seulement appartiennent à la France. Cette rivière se jette dans l’Escaut sur la rive droite, à Coude. — La Trouille, tributaire de la Hayne, qu’elle rejoint à Mons, commence à 5 kilomètres au nord de la station de Jeumont (canton de Maubeuge), et passe en Belgique après 8 kilomètres de cours. – L’Hogneau, qui se verse aussi dans la Hayne, à une petite distance de Condé, a également sa source en France, dans la forêt de Mormal, et son cours inférieur en Belgique : il reçoit l’Honnelle, qui se forme dans la forêt de Mormal et traverse Blanc-Misseron.

La Scarpe arrive du département du Pas-de-Calais, dont elle traverse le chef-lieu, Arras. Dans le département du Nord, elle baigne Douai, Marchiennes, Saint-Amand, et se réunit à l’Escaut à 1,200 mètres seulement en amont de l’entrée de ce fleuve en Belgique, après avoir côtoyé comme lui la belle forêt de Saint-Amand (3,400 hectares). Cette rivière, d’un cours total de 112 kilomètres, presque également partagé entre les deux départements, coule dans une vallée naturellement marécageuse, mais soigneusement desséchée. Elle est navigable et, comme les autres rivières et les canaux de ce pays, elle transporte beaucoup de houille.

La Lys, bien plus considérable que les autres affluents de l’Escaut, appartient au département du Pas-de-Calais par sa vallée supérieure, à la Belgique par sa vallée inférieure. Elle n’a dans le Nord que son cours moyen. Née à Lisbourg, à 5 kilomètres au nord-ouest d’Heuchin, au pied de collines de 150 à 185 mètres, elle est déjà navigable quand elle commence à toucher le département au-dessous d’Aire. Les villes du Nord qu’elle côtoie ou traverse sont Merville, Estaires, Armentières. En Belgique, elle passe à Menin, à Courtrai, et finit à Gand. Sur 205 kilomètres de cours, détours compris, elle n’en a pas tout à fait 100 en France. — La Clarence, la Lawe, venue de Béthune, sont deux rivières du département du Pas-de-Calais qui n’appartiennent au département du Nord que par l’extrémité inférieure de leur cours et par leur embouchure dans la Lys, la première près de Merville, la seconde près d’Estaires. — Un troisième affluent de la Lys, la Deule, partage à peu près son cours de 86 kilomètres entre les deux départements. Elle commence à 10 ou 13 kilomètres au nord d’Arras, dans le Pas-de-Calais, sous le nom de Souchez. Au-dessous de Lens, elle prend le nom de Deule. Dans le Nord, où elle est navigable, elle baigne Haubourdin, Loos, Lille, Quesnoy-sur-Deule, et s’achève à Deulémont. — La Deule reçoit, à Marquette (rive droite), la Marcq, qui prend sa source à Mons-en-Pévèle.


La Meuse est un fleuve long de 800 kilomètres qui naît en France, passe en Belgique et se termine en Hollande, au nord des embouchures de l’Escaut, après avoir mêlé ses eaux aux flots bien plus abondants du Rhin. En France, elle traverse Verdun, Sedan et Mézières ; en Belgique, Namur et Liège ; en Hollande, Maëstricht et Rotterdam.

Elle ne touche pas le département du Nord ; mais un de ses tributaires les plus considérables, la Sambre, coule un instant dans l’arrondissement de Cambrai, puis coupe en deux celui d’Avesnes, du sud-ouest au nord-est.

La Sambre, sur 180 kilomètres de parcours, en a 126 en France. Ses premières fontaines jaillissent dans le département de l’Aisne, dans le bois de Cartignies, qui fait suite à la grande forêt de Nouvion et que portent des collines de 200 à 220 mètres. Arrivée dans le département du Nord, elle devient navigable à Landrecies, passe à Berlaimont et sous les remparts de Maubeuge, et sort de la France pour entrer en Belgique à Jeumont. En Belgique, elle baigne Charleroi et se perd dans la Meuse à Namur. Les principaux tributaires de la Sambre, dans le Nord, sont la Petite-Helpe, la Grande-Helpe, la Solre.

La Petite-Helpe, dont le cours est de 42 kilomètres, vient des bois d’Anor, qui touchent à la Belgique. Elle a son embouchure sur la rive droite de la Sambre, à 5 kilomètres au-dessous de Landrecies.

La Grande-Helpe, longue de 54 kilomètres, prend sa source en Belgique. Elle coule au nord de la forêt de Trélon, passe à Avesnes et débouche dans la Sambre, sur la rive droite, à 3 ou 4 kilomètres au-dessus de Berlaimont.

La Solre se forme sur la frontière belge. Ce n’est encore qu’un ruisseau insignifiant quand elle arrose Solre-le-Château. Elle gagne la Sambre par la rive droite, à Asseyent (5 kilomètres en aval de Maubeuge).


L’Yser, affluent direct de la mer du Nord, naît dans la commune de Buysscheure, à une dizaine de kilomètres au nord-est de Saint-Omer. Son cours en France est de 52 kilomètres, son cours en Belgique de 50. Il a son embouchure au-dessous de Nieuport, entre Dunkerque et Ostende. Un de ses tributaires français, le Peene Beck, contourne au sud le pied de la colline de Cassel et passe à Wormhoudt.


L’Aa, français dans tout son cours, gagne aussi directement la mer du Nord ; long de 80 kilomètres (dont 25 dans le Nord), il appartient surtout au département du Pas-de-Calais ; il y a sa source au sein de collines de 200 mètres d’altitude, un peu au-dessus du village de Fauquembergues ; il y baigne Saint-Omer, où il devient navigable ; enfin sa rive gauche n’abandonne pas ce département, car, pendant les 24 kilomètres que l’Aa parcourt dans le Nord, il n’en dépend qu’à moitié ; il lui sert seulement de limite contre le Pas-de-Calais, depuis Saint-Momelin jusqu’à la mer. Au-dessous de Saint-Omer, l’Aa canalisé arrose un ancien marais qu’un échiquier de digues a transformé en une vallée toujours humide, mais très-fertile. C’est en aval de Gravelines que ce petit fleuve atteint l’Océan.

La Colme, branche de l’Aa, s’en sépare au-dessous de Watten et sous le nom de Haute-Colme va rejoindre à Bergues le canal de Dunkerque, puis, sous celui de Basse-Colme, forme le canal de Bergues à Furnes (Belgique), continué jusqu’à la mer par celui de Furnes à Nieuport.

La Seine, le fleuve de Paris et de Rouen, coule bien loin du Nord ; mais un de ses plus grands affluents, l’Oise, arrivant de Belgique, sépare pendant 5 kilomètres le territoire départemental de la grande forêt de Saint-Michel, qui dépend du département de l’Aisne. Dans cette portion de son cours, l’Oise, voisine de sa source, n’est encore qu’un ruisseau.


Hydrographie côtière. — Les côtes du département ont, de la Belgique au Pas-de-Calais, un développement d’environ 35 kilomètres. Le rivage, presque rectiligne et courant de l’est à l’ouest, n’a ni baies ni caps bien dessinés, mais seulement des grèves sablonneuses et des dunes au pied desquelles se brise une mer presque toujours orageuse. Dunkerque, port important, bien que peu favorisé par la nature, et d’une entrée difficile (en 1875, la ville a avancé à l’État une somme de 12,400,000 francs pour l’exécution de travaux considérables, en cours d’exécution), a précisément dû son nom (en flamand, église des dunes) aux dunes sur lesquelles elle est bâtie. À l’ouest de cette ville, on ne remarque sur la côte que la Pointe de Gravelines, voisine de


Quai de Dunkerque.

l’ancienne embouchure de l’Aa, et la nouvelle embouchure de ce petit fleuve, où se trouve le port de Gravelines.

Canaux. — Le département du Nord est le mieux doté en canaux de navigation ; ils forment un système à peu près complet de communications à bon marché, nécessaires dans une contrée dont les produits — houille, grains, pommes de terre, betteraves — sont de nature encombrante. Ils font, dans l’intérêt des transports à bas prix, une utile concurrence aux chemins de fer qui sillonnent en tous sens le département. Les principaux canaux sont les canaux de la Haute et de la Basse-Colme et de Bourbourg, qui sont des dérivations de l’Aa ; ceux de Dunkerque à Fumes et de Bergues à Dunkerque ; le canal des Moëres, divisé en deux branches qui communiquent avec le canal de Bergues ; le canal de la Cunette, qui reçoit les eaux du canal des Moëres et débouche dans le chenal du port de Dunkerque ; le canal de Mardyck, qui n’est plus navigable, mais qui reçoit les canaux de Bourbourg et de Bergues à Dunkerque ; le canal de Saint-Omer-et-Neuffossé ; le canal de la Nieppe ou d’Hazebrouck à Merville, qui est une dérivation de la Lys ; les canaux d’Hazebrouck et de Préavin ; le canal d’Hazebrouck à Thiennes ou canal de la Bourre ; ceux de la Basse et de la Haute-Deule, entre Douai (sur la Scarpe), Lille et la Lys ; les canaux de la Bassée et d’Aire à la Bassée ; le canal de Roubaix, qui relie directement la Basse-Deule à l’Escaut ; ceux de Saint-Quentin, ou de l’Escaut à la Somme ; de la Sensée (faisant communiquer l’Escaut avec la Scarpe), de Mons à Condé et le canal de jonction de la Sambre à l’Oise. Il existe, en outre, dans le département, un nombre infini de canaux de dessèchement et de petites rivières canalisées.