Fragments historiques sur l’Inde/Édition Garnier/Article 12

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ARTICLE XII.

CE QUI SE PASSAIT DANS L’INDE AVANT l’ARRIVÉE DU GÉNÉRAL LALLY. HISTOIRE D’ANGRIA ; ANGLAIS DÉTRUITS DANS LE BENGALE.

Ayant fait connaître, autant que nous l’avons pu dans ce précis, les côtes de l’Inde qui intéressent les nations commerçantes de l’Europe et de l’Asie, commençons par rendre compte d’un service que les Anglais leur rendirent à toutes.

Il y a cent ans qu’un Maratte nommé Conogé Angria, qui avait commandé quelques barques de sa nation contre les barques de l’empereur des Indes, se fit pirate ; et, s’étant retranché vers Bombay, il pilla indifféremment ses compatriotes, ses voisins, et tous les commerçants qui naviguaient dans cette mer. Il s’était aisément emparé sur cette côte de quelques petites îles qui ne sont que des rochers inabordables. Il en fortifia une en creusant des fossés dans le roc. Ses bastions étaient soutenus par des murs épais de dix à douze pieds, et garnis de canons. C’était là qu’il renfermait son butin. Son fils et son petit-fils continuèrent le même métier, et avec plus de succès. Une province entière, derrière Bombay, était soumise à ce dernier Angria. Mille vagabonds marattes, indiens, renégats chrétiens, nègres, étaient venus augmenter cette république de brigands, presque semblable à celle d’Alger. Les Angria faisaient bien voir que la terre et la mer appartiennent à qui sait s’en rendre maître. Nous voyons tour à tour deux voleurs se former de grandes dominations au nord et au sud de l’Inde : l’un est Abdala vers Caboul ; l’autre Angria vers Bombay. Et combien de grandes puissances n’ont pas eu d’autres commencements !

Il fallut que l’Angleterre armât consécutivement deux flottes contre ces nouveaux conquérants. L’amiral James, en 1755, commença cette guerre, qui en effet en méritait le nom, et l’amiral Watson l’acheva. Le capitaine Clive, depuis si célèbre, y signala ses talents militaires. Toutes les retraites de ces illustres voleurs furent prises l’une après l’autre. On trouva, dans le rocher qui leur servait de capitale, des amas immenses de marchandises ; deux cents canons, des arsenaux d’armes de toute espèce, la valeur de cent cinquante millions, monnaie de France, en or, en diamants, en perles, en aromates : ce qu’on rassemblerait à peine dans toute la côte de Coromandel et dans celle du Pérou était caché dans ce rocher. Angria échappa. L’amiral Watson prit sa mère, sa femme et ses enfants prisonniers. Il les traita avec humanité, comme on peut bien le croire. Le plus jeune des enfants, entendant dire qu’on n’avait pu trouver Angria, se jeta au cou de l’amiral et lui dit : « Ce sera donc vous qui me servirez de père. » M. Watson se fit expliquer ces paroles par un interprète ; elles l’attendrirent jusqu’aux larmes, et en effet il servit de père à toute la famille. Cette action et ce bonheur mémorable étaient compensés dans le chef-lieu des établissements anglais au Bengale par un désastre plus sensible.

Il s’éleva une querelle entre leur comptoir de Calcutta sur le Gange, et le souba du Bengale. Ce prince crut que les Anglais avaient à Calcutta une garnison considérable, puisqu’ils l’avaient bravé. Cette ville ne renfermait pourtant qu’un conseil de marchands et environ trois cents soldats. Le plus grand prince de l’Inde marcha contre eux avec soixante mille soldats, trois cents canons et trois cents éléphants.

Le gouverneur de Calcutta, nommé Drak, était bien différent du fameux amiral Drake. On a dit, on a écrit qu’il était de cette religion nazaréenne primitive, professée par ces respectables Pensylvaniens que nous connaissons sous le nom de quakers. Ces primitifs, dont la patrie est Philadelphie, dans le nouveau monde, et qui doivent faire rougir le nôtre, ont la même horreur du sang que les brames. Ils regardent la guerre comme un crime. Drak était un marchand très-habile et un honnête homme : il avait jusque-là caché sa religion ; il se déclara, et le conseil le fit embarquer sur le Gange pour le mettre à couvert.

Qui croirait que les Mogols, au premier assaut, perdirent douze mille hommes ? Les relations l’ont assuré. Si le fait est vrai, rien ne peut mieux confirmer ce que nous avons tant dit de la supériorité de l’Europe[1]. Mais on ne pouvait résister longtemps : la ville fut prise ; tout fut mis aux fers. Il y eut parmi les captifs cent quarante-six Anglais, officiers et facteurs, conduits dans une prison qu’on appelle le trou noir. Ils firent une funeste expérience des effets de l’air enfermé et échauffé, ou plutôt des vapeurs continuellement exhalées de tous les corps, et auxquelles on a donné le nom d’air et d’élément. Cent vingt-trois hommes en moururent en peu d’heures. Bourhave[2], dans sa chimie, rapporte un exemple plus singulier : c’est celui d’un homme qui tomba sur-le-champ en pourriture dans une raffinerie de sucre à l’instant qu’on en eut fermé la porte. Ce pouvoir des vapeurs fait voir la nécessité des ventilateurs, surtout dans les climats chauds, et les dangers mortels qui menacent les corps humains, non-seulement dans les prisons, mais dans les spectacles, où la foule est pressée, et surtout dans les églises, où l’on a l’infâme coutume d’enterrer les morts, et dont il s’exhale une odeur pestilentielle[3].

M. Holwell, gouverneur en second de Calcutta, fut un de ceux qui échappèrent à cette contagion subite. On le mena, lui et vingt-deux officiers de la factorerie mourants, à Maxadabad, capitale du Bengale. Le souba eut pitié d’eux, et leur fit ôter leurs fers. Holwell lui offrit une rançon : le prince la refusa, en lui disant qu’il avait trop souffert sans être encore obligé de payer sa liberté.

C’est ce même Holwell qui avait appris non-seulement la langue des brames modernes, mais encore celle des anciens brachmanes. C’est lui qui a écrit depuis des mémoires si précieux sur l’Inde[4], et qui a traduit des morceaux sublimes des premiers livres écrits dans la langue sacrée, plus anciens que ceux du Sanchoniathon de Phénicie, du Mercure de l’Égypte, et des premiers législateurs de la Chine. Les savants brames de Bénarès attribuent à ces livres environ cinq mille ans d’antiquité.

Nous saisissons avec reconnaissance cette occasion de rendre ce que nous devons à un homme qui n’a voyagé que pour s’instruire. Il nous a dévoilé ce qui était caché depuis tant de siècles ; il a fait plus que les Pythagore et les Apollonius de Tyane. Nous exhortons quiconque veut s’instruire comme lui à lire attentivement les anciennes fables allégoriques, sources primitives de toutes les fables qui ont depuis tenu lieu de vérités en Perse, en Chaldée, en Égypte, en Grèce, et chez les plus petites et les plus misérables hordes, comme chez les plus grandes et les plus florissantes nations. Ces objets sont plus dignes de l’étude du sage[5] que ces querelles de quelques commis pour de la mousseline et des toiles peintes, dont nous serons obligés, malgré nous, de dire un mot dans le cours de cet ouvrage.

Pour revenir à cette révolution dans l’Inde, le souba, qui s’appelait Suraia-Doula, était un Tartare d’origine. On disait qu’à

l’exemple d’Aurengzeb, son dessein était de s’emparer de l’Inde entière : on ne peut douter qu’il ne fût très-ambitieux, puisqu’il était à portée de l’être ; on ajoute qu’il méprisait son empereur, faible et dur, inappliqué et sans courage, et qu’il baissait également tous ces marchands étrangers qui venaient profiter des troubles de l’empire et les augmenter. Dès qu’il eut pris le fort des Anglais, il menaça ceux des Hollandais et des Français ; ils se rachetèrent pour des sommes d’argent très-modiques dans ce pays : les Français, pour environ six cent mille livres ; les Hollandais, pour douze cent mille francs, parce qu’ils sont plus riches. Ce prince ne s’occupa point alors à les détruire. Il avait dans ses armées un rival de son ambition, son parent et parent du Grand Mogol, plus à craindre pour lui qu’une société de marchands. Suraia-Doula pensait d’ailleurs comme plus d’un vizir turc et plus d’un sultan de Constantinople, qui ont voulu chasser quelquefois tous les ambassadeurs des princes d’Europe et toutes leurs factoreries, mais qui leur ont fait payer chèrement le droit de résider en Turquie.

À peine eut-on reçu à Madras la nouvelle du danger où les Anglais étaient sur le Gange qu’on envoya par mer à leur secours tout ce qu’on put ramasser d’hommes portant les armes.

M. de Bussy, qui était dans ces quartiers avec quelques troupes, profita de cette conjoncture ; lui et M. Lass s’emparèrent de tous les comptoirs anglais par delà Masulipatan, sur la côte de la grande province d’Orixa, entre celles de Golconde et de Bengale. Ce succès rendit quelques forces à la compagnie affaiblie, qui devait bientôt succomber.

Cependant l’amiral Watson et le colonel Clive, vainqueurs d’Angria et libérateurs de toute la côte du Malabar, venaient aussi au Bengale par la mer de Coromandel. Ils apprirent dans leur route qu’il n’y avait plus de retour pour eux dans la ville de Calcutta qu’en combattant ; et ils firent force de voiles. Ainsi la guerre fut partout, en peu de temps, depuis Surate jusqu’aux bouches du Gange, dans un contour d’environ mille lieues, comme elle l’est si souvent en Europe entre tant de princes chrétiens dont les intérêts se croisent et changent continuellement pour le malheur des hommes.

Quand l’amiral Watson et le colonel Clive arrivèrent à la rade de Calcutta, ils trouvèrent ce bon quaker, gouverneur de la ville, et ceux qui s’étaient sauvés avec lui, retirés dans des barques délabrées sur le Gange : on ne les avait point poursuivis. Le souba avait cent mille soldats, des canons, des éléphants, mais point de bateaux. Les Anglais chassés de Calcutta attendaient patiemment sur le Gange qu’on vînt de Madras à leur secours ; l’amiral leur donna des vivres dont ils manquaient. Le colonel, aidé des officiers de la flotte et des matelots qui grossissaient sa petite armée, courut affronter toutes les forces du souba ; mais il ne rencontra qu’un raïa, gouverneur de la ville, qui venait à lui à la tête d’un corps considérable : il le mit en fuite. Cet étrange gouverneur, au lieu de se retirer dans sa place, s’en alla porter l’alarme au camp de son prince en lui disant que les Anglais qu’il avait rencontrés étaient d’une espèce bien différente de ceux qui avaient été pris dans Calcutta.

Le colonel Clive confirma le prince dans cette idée en lui écrivant ces propres mots, si nous en croyons les mémoires du temps et les papiers publics : « Un amiral anglais qui commande une flotte invincible, et un soldat dont le nom est assez connu de vous, sont venus vous punir de vos cruautés. Il vaut mieux pour vous nous faire satisfaction que d’attendre notre vengeance. » Il pouvait hasarder ce style audacieux et oriental. Le souba savait bien que son compétiteur, dont nous avons parlé, raïa très-puissant dans son armée, et qu’il n’osait faire arrêter, négociait secrètement avec les Anglais. Il ne répondit à cette lettre qu’en livrant une bataille : elle fut indécise entre une armée d’environ quatre-vingt mille combattants et une d’environ quatre mille, moitié Anglais, moitié cipayes[6]. Alors on négocia, et ce fut à qui serait le plus adroit. Le souba rendit Calcutta et les prisonniers ; mais il traitait sous main avec M. de Bussy, et le colonel ou plutôt le général Clive traitait sourdement de son côté avec le rival du souba. Ce rival s’appelait Jaffer : il voulait perdre le souba son parent, et le détrôner. Le souba voulait perdre les Anglais par les Français, ses nouveaux amis, pour exterminer ensuite ses amis mêmes. Voici les articles du traité singulier que le prince mogol Jaffer signa dans sa tente :

« En présence de Dieu et de son prophète, je jure d’observer cette convention tant que je vivrai, moi, Jaffer, etc.

« Les ennemis des Anglais seront les miens, etc.

« Pour les indemniser de la perte que Levia-Oda[7] leur a fait souffrir, je donnerai cent laks (c’est vingt-quatre millions de nos livres).

« Pour les simples habitants, cinquante autres laks (douze millions).

« Pour les Maures et les Gentous au service des Anglais, vingt laks (quatre millions huit cent mille livres).

« Pour les Arméniens qui trafiquent à Calcutta, sept laks (seize cent quatre-vingt mille livres ; le tout faisant environ quarante-deux millions quatre cent quatre-vingt mille livres).

« Je payerai comptant, sans délai, toutes ces sommes, dès qu’on m’aura fait souba de ces provinces.

« L’amiral, le colonel et quatre autres officiers (qu’il nomme) pourront disposer de cet argent comme il leur plaira. »

Cet article était stipulé pour les mettre à couvert de tout reproche.

Outre ces présents, le souba, désigné par le colonel Clive, étendait prodigieusement les terres de la compagnie. M. Dupleix n’avait pas, à beaucoup près, obtenu les mêmes avantages quand il créait des nababs.

On ne voit pas que les officiers anglais aient juré ce traité sur l’Évangile ; peut-être ne s’en trouva-t-il point, et d’ailleurs c’était plutôt un billet au porteur qu’un traité.

Le souba Suraia-Doula, de son côté, envoyait des secours réels d’argent à MM. de Bussy et Lass, tandis que son rival ne donnait que des promesses. Il voulut faire tuer Jaffer, mais ce prince se faisait trop bien garder. L’un et l’autre, dans l’excès de leurs haines et de leurs défiances, se jurèrent sur l’Alcoran une amitié inviolable.

Le souba, trompé et voulant tromper, mena Jaffer contre la troupe anglaise, que nous n’osons appeler une armée. Enfin, le 30 juin 1756, la bataille décisive se donna entre lui et le colonel Clive[8]. Le souba la perdit : on lui prit son canon, ses éléphants, son bagage, son artillerie. Jaffer était à la tête d’un camp séparé. Il ne combattit point ; c’est la prudence des perfides. Si le souba était vainqueur, il s’unissait à lui ; si les Anglais l’emportaient, il marchait avec eux. Les vainqueurs poursuivirent le souba ; ils entrèrent après lui dans Maxadabad, sa capitale. Le souba s’enfuit, et fut errant misérablement pendant quelques jours. Le colonel Clive salua Jaffer souba des trois provinces, Bengale. Golconde et Orixa, qui composaient un des plus beaux royaumes de la terre.

Suraia-Doula, ce prince détrôné, fuyait seul, sans secours, sans espérance. Il apprit qu’il y avait une grotte où vivait un saint faquir (ce sont des moines, des ermites mahométans). Doula se réfugia dans la grotte de ce saint. Sa surprise fut extrême quand il reconnut dans le faquir un fripon auquel il avait fait autrefois couper le nez et les deux oreilles. Le prince et le saint se réconcilièrent au moyen de quelque argent ; mais, pour en avoir davantage, le faquir dénonça le fugitif à son vainqueur. Doula fut pris, et condamné à la mort par Jaffer : ses prières et ses larmes ne le sauvèrent pas ; il fut exécuté impitoyablement, après qu’on lui eut jeté de l’eau sur la tête par une cérémonie bizarre établie de temps immémorial sur les bords du Gange, à l’eau duquel les peuples ont attribué de singulières propriétés. C’est une espèce de purification imitée depuis par les Égyptiens ; c’est l’origine de l’eau lustrale chez les Grecs et chez les Romains, et d’une cérémonie pareille chez des peuples plus nouveaux. On trouva dans les papiers de ce malheureux prince toute sa correspondance avec MM. de Bussy et Lass.

C’est pendant le cours de cette expédition que le général Clive courut à la conquête de Chandernagor, le poste alors le plus important que les Français eussent dans l’Inde, rempli d’une quantité prodigieuse de marchandises, et défendu par cent soixante pièces de canon, cinq cents soldats français et sept cents noirs.

Clive et Watson n’avaient que quatre cents hommes de plus : cependant au bout de cinq jours il fallut se rendre. La capitulation fut signée d’un côté par le général et l’amiral, et de l’autre par les préposés Fournier, Nicolas, La Potière, et Caillot, le 23 mars 1757. Ces commissaires demandèrent que le vainqueur laissât les jésuites dans la ville ; Clive répondit : « Les jésuites peuvent aller partout où ils voudront, hors chez nous. »

Les marchandises qu’on trouva dans les magasins furent vendues cent vingt-cinq mille livres sterling (environ deux millions huit cent soixante mille francs). Tous les succès des Anglais dans cette partie de l’Inde furent dus principalement aux soins de ce célèbre Clive. Son nom fut respecté à la cour du Grand Mogol, qui lui envoya un éléphant chargé de présents magnifiques, et une patente de raïa. Le roi d’Angleterre le créa pair en Irlande. C’est lui qui, dans les derniers débats qui s’élevèrent au sujet de la compagnie des Indes, répondit à ceux qui lui demandaient compte des millions qu’il avait ajoutés à sa gloire : « J’en ai donné un à mon secrétaire, deux à mes amis, et j’ai gardé le reste pour moi. » Dans une autre séance il dit : « Nul n’attaquera mon honneur impunément ; mes juges doivent songer à garder le leur. »

Presque tous les principaux agents de la compagnie anglaise en ont usé de même. Leurs profusions ont égalé leurs richesses. Les actionnaires y perdent, l’Angleterre y gagne, puisqu’au bout de quelques années chacun vient répandre dans sa patrie ce qu’il a pu amasser sur les bords du Gange et sur les côtes de Coromandel et de Malabar ; c’est ainsi que les trésors immenses conquis par l’amiral Anson, en faisant le tour du monde, et ceux que tant d’autres amiraux acquirent par tant de prises, augmentèrent l’opulence de la nation.

Depuis les victoires du lord Clive, les Anglais ont régné dans le Bengale ; les nababs qui ont voulu les attaquer ont été repoussés. Mais enfin on a craint à Londres que la compagnie ne pérît par l’excès de son bonheur, comme la compagnie française a été détruite par la discorde, la disette, la modicité des secours venus trop tard, les changements continuels de ministres, qui, ne pouvant avoir sur l’Inde que des idées confuses et fausses, changeaient au hasard des ordres donnés aveuglément par leurs prédécesseurs.

Tous les malheurs de la France retombaient nécessairement sur la compagnie. On ne pouvait la secourir efficacement quand on était battu en Allemagne, qu’on perdait le Canada, la Martinique, la Guadeloupe en Amérique, l’île de Corée en Afrique, tous les établissements sur le Sénégal, que tous les vaisseaux étaient pris, et qu’enfin le roi et les citoyens vendaient leur vaisselle[9] pour payer des soldats : faible ressource dans de si grandes calamités.


  1. Voyez ci-dessus, pages 89, 92, 114 ; et tome XII, page 373.
  2. Les Hollandais écrivent et impriment Boerhave ; oe chez eux se prononce ou, mais nous devons écrire suivant notre prononciation. On imprime tous les jours Westphalie, Wirtemberg, Wirsbourg : on ne sait pas que ce caractère W est l’u consonne des Allemands. Les Allemands prononcent Vestphalie, Virtemberg, Virsbourg. (Note de Voltaire.) — Voyez aussi tome XIV, pages 254, 558 ; XX, 156.
  3. À Saulieu, en Bourgogne, au mois de juin 1773, les enfants étant assemblés dans l’église au nombre de soixante pour faire leur première communion, on s’avisa de creuser une fosse dans cette église pour y enterrer le soir même un cadavre : il s’éleva de la fosse, où étaient entassés d’anciens cadavres, une exhalaison si maligne que le curé, le vicaire, quarante enfants, et plusieurs paroissiens qui entraient alors, en moururent, si l’on en croit les papiers publics. Ce terrible avertissement de ne plus souiller les temples de corps morts sera-t-il encore inutile en France ? C’était autrefois un sacrilége : jusqu’à quand cette horreur sera-t-elle un acte de piété ? (Note de Voltaire.)
  4. Événements historiques intéressants, relatifs aux provinces de Bengale et à l’empire de l’Indostan : on y a joint la mythologie, la cosmogonie, etc., traduits en français, 1768, 2 vol. in-8o.
  5. Ce n’est pas que nous ayons une foi aveugle pour tout ce que nous débite M. Holwell : il ne faut l’avoir pour personne : mais enfin il nous a démontré que les Gangaridos avaient écrit une mythologie, bonne ou mauvaise, il y a cinq mille ans, comme le savant et judicieux jésuite Parennin nous a démontré que les Chinois étaient réunis en corps de peuple vers ces temps-là. Et s’ils l’étaient alors, il fallait bien qu’ils le fussent auparavant : de grandes peuplades ne se forment pas en un jour. Ce n’est donc pas à nous, qui n’étions que des sauvages barbares quand ces peuples étaient policés et savants, à leur contester leur antiquité. Il se peut que, dans la foule des révolutions qui ont dû tout changer sur la terre, l’Europe ait cultivé des arts et connu des sciences avant l’Asie ; mais il n’en reste aucun vestige, et l’Asie est pleine d’anciens monuments. (Note de Voltaire.)
  6. De sipahi, mot qui signifie un cavalier turc, et qui dérive lui-même du persan. C’est de sipahi que nous avons fait spahi ; et par cipaye nous entendons un soldat indien. (Cl.)
  7. C’est le nom du général qui prit Calcutta. (Note de Voltaire.)
  8. Dans les plaines de Plassaje.
  9. Voyez les lettres du 24 novembre 1759.