Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/Le Loup et le Berger (bilingue)

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LE LOUP ET LE BERGER


Un loup suivait un troupeau de moutons sans lui faire de mal. Le berger tout d’abord se gardait de lui comme d’un ennemi et le surveillait peureusement. Mais comme le loup le suivait toujours sans faire la moindre tentative d’enlèvement, il pensa dès lors qu’il avait là un gardien plutôt qu’un ennemi aux aguets ; et comme il avait besoin de se rendre à la ville, il laissa ses moutons près du loup et partit. Le loup, pensant tenir l’occasion, se jeta sur le troupeau et en mit en pièces la plus grande partie. Quand le berger revint et vit son troupeau perdu, il s’écria : « C’est bien fait pour moi ; pourquoi confiais-je des moutons à un loup ? »

Il en est de même chez les hommes : quand on confie un dépôt à des gens cupides, il est naturel qu’on le perde.

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Λύκος καὶ ποιμήν.

Λύκος ἀκολουθῶν ποίμνῃ προβάτων οὐδὲν ἠδίκει. Ὁ δὲ ποιμὴν κατὰ μὲν ἀρχὰς ἐφυλάττετο αὐτὸν ὡς πολέμιον καὶ δεδοικὼς παρετηρεῖτο. Ἐπεὶ δὲ συνεχῶς ἐκεῖνος παρεπόμενος οὐδ᾿ ἀρχὴ ἁρπάζειν ἐπεχείρει, τὸ τηνικαῦτα νοήσας φύλακα μᾶλλον αὐτὸν εἶναι ἢ ἐπίβουλον, ἐπειδὴ χρεία τις αὐτὸν κατέλαβεν εἰς ἄστυ παραγενέσθαι, καταλιπὼν παρ᾿ αὐτῷ τὰ πρόβατα ἀπηλλάγη. Καὶ ὃς καιρὸν ἔχειν ὑπολαβὼν τὰ πλεῖστα εἰσπεσὼν διεφόρησεν. Ὁ δὲ ποιμὴν ἐπανελθὼν καὶ θεασάμενος τὴν ποίμνην διεφθαρμένην ἔφη· « Ἀλλ᾿ ἔγωγε δίκαια πέπονθα· τί γὰρ λύκῳ πρόβατα ἐπίστευον; »

Οὕτω καὶ τῶν ἀνθρώπων οἱ τοῖς φιλαργύροις τὴν παρακαταθήκην ἐγχειρίζοντες εἰκότως ἀποστεροῦνται.