Examen critique de la soi-disant réfutation/02

II


Pour me conformer à la défense de Monseigneur de Montréal, je n’ai point lu l’ouvrage de M. Dessaulles, « La Grande Guerre Ecclésiastique, » mais j’ai lu sa « Réponse Honnête » qui n’a point été défendue, et votre soi-disant Réfutation, comme aussi la Minerve du 7 Juin dernier ; ces trois lectures m’ont donné de l’écrit de M. Dessaulles, une connaissance très-incomplète sans doute, mais peut-être suffisante pour apprécier, en partie au moins, la portée de votre prétendue réfutation.

Je vois dans sa « Réponse Honnête, » que M. Dessaulles ne cesse de demander d’être réfuté, et les objets sur lesquels il demande de l’être ; et je vois par votre opuscule que la plupart de ces objets ne sont pas même touchés. Comment donc ceci pourrait-il être pris, pour une Réfutation complète ? Je compte scrupuleusement dans votre production, les pages indiquées du pamphlet Dessaulles, que vous vous efforcez de réfuter ; les citations que vous en faites : tout cela additionné très-exactement, ne donne évidemment qu’une très faible partie de l’ouvrage que vous poursuivez : — cinq à six pages peut être, sur, à ce qu’il paraît, cent trente ! — comment appeler cela une réfutation ?

Il est vrai que vous avez étendu votre propre ouvrage à peu près à la même mesure, mais c’est la plupart du temps par des allonges, roulant hors de propos et sans nécessité (je viens de le dire), sur des points de théologie qui ne doivent pas faire la partie principale de l’ouvrage de M. Dessaulles, et d’ailleurs assez peu utiles à la plus grande partie des lecteurs.

Faut-il enfin mentionner une fois pour toutes, ce qui me répugne souverainement, ce flot dégoûtant de personnalités outrageantes, de qualificatifs du plus bas étage — ce n’est pas assez dire, — d’odieuses et impardonnables injures, dont vous avez chargé à plaisir presque chacune de vos phrases ? Vous reprochez à M. Dessaulles, d’en avoir trop mis en ce genre, et vous vous servez deux fois, pour faire entendre cela, d’une figure tellement ignoble, qu’on ne saurait se permettre de la répéter. Mais vous avez dépassé infiniment cette mesure, tant dans le nombre que dans la qualité plus qu’indigne des grossièretés qui salissent votre pamphlet ; et, comme il est censé écrit au nom de la Religion, il fait doublement ou plutôt cent fois mal au cœur.

Comment avez vous pu penser servir en cela la Religion ? Où avez-vous pu rencontrer un modèle de rien de semblable ? C’est outrageant pour les personnes qu’on insulte, mais c’est dégradant pour celui qui se le permet. Et comme d’ailleurs c’est invariablement et perpétuellement rivé chez-vous à un ton de morgue, d’impertinence, d’outrecuidance, de fatuité plus qu’insupportable, — enfin il faudrait avoir votre propre dictionnaire pour vous habiller comme vous le méritez, et tout le monde n’a pas ce vocabulaire à sa main ; — que pouvez-vous pensez de vous-même ?

Ôtez-donc de votre écrit les inutilités et cet inqualifiable fatras d’indignités ; voyez ce qu’il en reste. Vous avez précisément fait la même invitation à celui que vous poursuivez ; c’est vous qui avez suggéré cette opération ; faites-là donc sur vous-même, medice cura te ipsum ; et voyez aussi ce qui vous restera.