Mercure de France (p. 281-282).

CLXXV

Il faut se faire un nom.


C’est moins facile et moins propre que de faire des enfants, mais il y a tant de manières ! Il y a le nom de Napoléon et il y a le nom de Félix Potin. Ces deux exemples me dispensent de mille autres. Il serait puéril d’expliquer la différence de ces deux noms et l’énorme supériorité d’un homme qui n’a vécu que pour gagner de l’argent, sur un misérable empereur mort en exil. Il n’y a de grand que ce qui ne bouge pas : la Stupidité, la Cupidité, l’Abjection.

Quand Victor Hugo parle de ces « Renommées qui volaient, gorge au vent, pieds nus, clairons en mains, devant le maître des armées », ces belles images font pitié si on se souvient de ce que la radieuse et non sanglante Publicité a su faire des noms de Ménier et de Géraudel. Les murs d’affichage, les clôtures de chantiers ou de terrains vagues, les plafonds des omnibus ou les parois intérieures des pissotières, dans tous les pays du monde, le voilà le Livre de Vie des salauds qui ont su se faire un nom !