Encyclopédie moderne/ou Bibliothèque, 2e éd., 1841/Académie (antiquités)

ACADÉMIE, άκαδημία. {Antiquités.) C’était un gymnase ayec un jardin ou verger, situé dans le Céramique, un des faubourgs d’Athènes, à six stades et au nord-ouest de la ville. Ce lieu est devenu célèbre par les assemblées que Platon, qui y était né, et ses sectateurs


y tenaient pour converser sur des matières philosophiques. Il était rempli d’eaux stagnantes et malsain. Cimon le dessécha, y planta des allées d’arbres et des bosquets, et il devint la promenade des Athéniens les plus distingués, et surtout des philosophes platoniciens, nommés de là académiques, comme le lycée, autre gymnase situé au sud-est d’Athènes, était la promenade des philosophes de la secte d’Aristote, appelés péripatéticiens (du grec περιπατέω, obambulo, je me promène à l’entour). On appelait l’académie, la promenade d’en bas, ou le gymnase inférieur ; le lycée, la promenade d’en haut, ou le gymnase supérieur. L’académie, faisant partie du Céramique, dont le nom vient de κέραμοζ, terre de potier, vase de terre, et qui était rempli en effet d’urnes cinéraires, était aussi consacrée aux sépultures : on enterrait dans son verger, comme dans un élysée, ceux qui avaient rendu des services signalés à la patrie.

Le nom d’académie vient d’Académus, qui découvrit à Castor et Pollux l’endroit où Hélène leur sœur s’était cachée avec Thésée son ravisseur : ils étaient venus, à main armée, la redemander aux Athéniens, qui ayant répondu qu’ils ne savaient où elle était, Académus, pour arrêter la guerre qui allait commencer, leur apprit qu’elle était cachée à Aphidna. Ces deux frères, allèrent attaquer cette ville, la prirent d’assaut et la rasèrent. Les Lacédémoniens, par reconnaissance de ce service, épargnèrent la maison et les jardins d’Athènes, appelés de son nom Académie, toutes les fois qu’ils ravagèrent les faubourgs de cette ville, et comme ils adoraient les Dioscures, ils honorèrent aussi la mémoire d’Académus ; mais le farouche Sylla détruisit ses bosquets délicieux, et fit construire, avec les arbres, des machines de guerre pour s’emparer d’Athènes.

Quant au nom d’Académus même, il vient du grec ἂχοζ δἤμοζ, le remède ou le sauveur du peuple : ce nom est en rapport avec la fable, qui lui attribue d’avoir sauvé sa patrie, avec les surnoms d’Acos et de Sauveur (Σωτἠρ), donnés à Bacchus. Académus était, par conséquent, un surnom de Bacchus, qui était aussi appelé Sauveur, et qui était honoré à Athènes d’un culte particulier. Ce passage d’Eupolis, entre bien d’autres, ἐν εύσκίοιζ δρυμοῖσιν Ακαδήμον θεοῠ, dans les bosquets ombragés du dieu Académus, achève de prouver qu’Académus était en effet un dieu et non pas seulement un héros.

C’est par conséquent à Bacchus Académus, ou le remède du peuple, c’est-à-dire au soleil bienfaisant des signes ascendants, que l’académie et ses jardins furent consacrés ; comme le lycée et son téménos ou lucus était consacré à Apollon Lycéen, dont le nom vient de λύκοç loup, c’est-à-dire au soleil ravisseur, ou destructeur des signes descendants. Ces deux maisons étaient donc deux thèmes célestes, ou les symboles des deux maisons des deux solstices, l’académie du solstice inférieur, le lycée du solstice supérieur : de là la position opposée de ces deux gymnases, et leurs noms de promenade inférieure et de promenade supérieure.

Cicéron voulut faire revivre le nom de l’académie ; il le donna à sa maison de campagne près de Pouzzole. C’est là qu’il se plaisait à converser avec ses amis sur divers sujets de philosophie,


et qu’il composa ses quœstiones academicœ, ses livres de la nature des dieux, et ses six livres de la république qui viennent d’être en grande partie retrouvés si heureusement par M. Angelo Majo, bibliothécaire du Vatican.

Éloy Johanneau