Encyclopédie méthodique/Physique/ACIDE

ACIDE. Les acides ſont des ſubſtances dans leſquelles on remarque une ſaveur aigre, la propriété de changer en rouge les couleurs bleues & violettes des végétaux, & celle de faire efferveſcence avec les alkalis, voyez Alkali. Les acides font ſur la langue une impreſſion particulière qui excite une ſenſation, déſignée par le mot aigre, ou par celui d’acidité ; & cette acidité eſt ſuſceptible d’une intenſité plus ou moins grande, d’une intenſité qui puiſſe croître depuis le plus petit degré juſqu’à la cauſticité la plus forte, qui eſt ſon maximum. Les ſucs d’oſeille, d’orange, de citron, de verjus, de vinaigre, &c. ſont plus ou moins aigres, plus ou moins acides ; ſi on les étend dans de l’eau, on affoiblira d’autant plus leur acidité qu’on les mêlera avec une plus grande quantité de ce liquide : on augmentera, au contraire, cette aigreur ou acidité, ſi on les concentre plus ou moins. Il en ſera de même des acides minéraux qu’on peut ou affoiblir ſucceſſivement par l’eau, ou concentrer de plus en plus juſqu’au maximum. Dans ce dernier cas, on remarque la plus grande acidité, qu’on peut alors confondre avec la cauſticité qui, pour en donner une idée claire, eſt alors l’effet d’une puiſſante affinité, d’une forte tendance à la combinaiſon, effet de l’attraction, cette force qui, dans l’univers, eſt le principe de toute activité. Voyez Attraction, Adhérence, Cohérence, &c.

L’efferveſcence que font les acides avec les alkalis, qui eſt un caractère de l’acide, eſt encore un effet de l’attraction dont nous venons de parler ; car celle-ci eſt toujours le principe de l’union & de la combinaiſon. Lorſque les acides ſont foibles & que les alkalis ſont purs, l’efferveſcence eſt moins ſenſible, parce que la combinaiſon ſe fait paiſiblement, s’il eſt permis de s’exprimer ainſi ; le mouvement, la chaleur, le dégagement des fluides élaſtiques, ſont alors moins diſcernables, mais ils exiſtent toujours, comme je m’en ſuis convaincu par des expériences délicates, en plaçant des corps bien légers ſur la ſurface des liqueurs, en ſe ſervant de thermomètres extrêmement ſenſibles, & en recevant, dans des appareils particuliers, le produit des fluides élaſtiques. C’eſt, ſans doute, ce qui a fait diviſer par quelques-uns les acides en manifeſtes & en cachés.

Les acides peuvent exiſter ſous une forme concrète ou fluide : dans le premier cas, on les nomme concrets, & dans le ſecond fluors. Dans ces deux états les acides ſont eſſentiellement les mêmes, car cette diverſité n’eſt qu’accidentelle. L’état naturel d’un ſel acide eſt, ſans doute, d’être ſous forme concrète, c’eſt-à-dire, ſolide, comme l’eau eſt naturellement dans l’état de glace ; mais la grande affinité que les acides concrets ont avec l’eau, eſt cauſe qu’ils attirent, avec une grande énergie l’eau, qui eſt conſtamment répandue dans l’atmoſphère, & qu’ils deviennent alors fluides ou fluors. Ces effets dépendent ; ainſi que nous l’avons établi dans les articles attraction & cohérence, de la figure qui entre comme élément dans la diſtance.

Pluſieurs ſavans ont penſé qu’il n’y avoit qu’un acide dans la nature. Stahl, ſi long-temps ſuivi par le grand nombre des Chimiſtes, a prétendu que l’acide univerſellement répandu dans la nature, étoit l’acide vitriolique, & que les autres en tiroient leur origine. Mais les Pneumatiſtes ont tâché de prouver par pluſieurs expériences analytiques & ſynthétiques, que l’oxigène étoit la baſe de tous les acides, & que leurs différences ne réſultoient que de la nature des diverſes ſubſtances combinées avec cette baſe commune.

Les acides ſe diviſent en acides minéraux, végétaux & animaux, ſelon qu’ils ſont tirés des ſubſtances oryctologiques, ou de la terre, des plantes & des animaux.

Le règne minéral comprend dix ſortes d’acides bien diſtincts : l’acide carbonique, l’acide muriatique, l’acide fluorique, l’acide nitrique, l’acide ſulfurique, l’acide boracique, l’acide molybdique, l’acide tunſtique, l’acide arſénique, l’acide ſuccinique.

L’Acide Carbonique eſt le même que celui qui avoit été autrefois déſigné par les dénominations ſuivantes, air fixé ou fixe, d’acide aérien ou crayeux, d’acide ou gaz méphitique. Cet acide très-abondant eſt ſouvent dans l’état d’un fluide aériforme. L’acide carbonique à l’état de gaz a les caractères apparens de l’air, ſavoir, l’inviſibilité par lui-même, l’élaſticité, conſéquemment la compreſſibilité, la dilatabilité, &c. mais il a des caractères particuliers qui le diſtinguent de l’air ordinaire, & dont nous parlerons au mot Gaz fixe. Il ne forme qu’un centième de l’air atmoſphérique ; mais il exiſte en grande maſſe dans pluſieurs cavités, comme la grotte du chien dans pluſieurs eaux minérales. Il ſe dégage en grande abondance des ſubſtances ſoumiſes à la fermentation ſpiritueuſe. La reſpiration, & la combuſtion des charbons en produiſent ; les végétaux à l’ombre l’exhalent, &c. Ainſi on ne ſauroît douter de ſon exiſtence ; car l’expérience montre que, dans tous les cas dont on vient de faire l’énumération, il ne jouiſſe de ſes propriétés caractériſtiques.

L’acide carbonique contracte une union avec l’alumine, la baryte & la magnéſie : il forme avec ces ſubſtances différens ſels neutres. Cet acide ſe combine rapidement avec les trois alkalis. Voyez Alkali.

Pluſieurs chymiſtes, tels que Prieſtley, Cavendish, Bergman, Schéele ont penſé que l’acide carbonique étoit formé par la combinaiſon de l’air vital avec le phlogiſtique : d’autres ont cru qu’il étoit compoſé de gaz inflammable & d’air pur ; quelques-uns, &c. Enfin M. Lavoiſier & un grand nombre de ſavans regardent l’acide carbonique comme un compoſé de carbone & d’oxigène : ſavoir, de vingt-huit parties de carbone pur, & de ſoixante-douze parties d’oxigène pour cent d’acide carbonique. « Il penſe que dans la reſpiration des animaux, il ſe dégage du ſang une véritable matière charbonneuſe, qui, ſe combinant avec l’oxigène de l’atmoſphère, forme l’acide carbonique, toujours produit dans cette fonction ; & que c’eſt également à la combinaiſon du carbone du ſucre, avec l’oxigène de l’eau, qu’eſt due la formation de l’acide carbonique qui ſe dégage dans la fermentation ſpiritueuſe. »

L’Acide muriatique,  ou acide marin, ſe retire du ſel marin. Il a une odeur vive & pénétrante qui approche de celle du citron ; ſa ſaveur, lorſqu’il eſt concentré, eſt capable de corroder nos organes. Dans ſon état de concentration il exhale des vapeurs blanches qui ſont d’autant plus abondantes, qu’il y a plus d’humidité dans l’air. Un thermomètre, mis dans cette fumée blanche, monte ; & la main placée près du goulot du flacon, qui contient cet acide, éprouve une ſenſation de chaleur.

La liqueur qu’on nomme acide muriatique, n’eſt pas l’acide muriatique pur, mais elle eſt cet acide uni avec une grande quantité d’eau. Cet acide peut être réduit en gaz permanent, au-deſſus du mercure, à la preſſion & à la température de l’atmoſphère, & alors l’acide muriatique eſt dans toute ſa pureté ; il porte alors le nom de gaz acide muriatique. On l’obtient en chauffant l’acide muriatique liquide & fumant, dans une cornue dont le bec eſt adapté à une cloche pleine de mercure & placée ſur un appareil au mercure, voyez Appareil au mercure. Ce gaz acide muriatique, dont la cloche s’eſt remplie à meſure que le mercure eſt deſcendu dans l’appareil, a une odeur pénétrante ; il eſt ſi cauſtique, qu’il enflamme la peau & y excite de très-vives démangeaiſons : il éteint la flamme des bougies, mais il l’agrandit d’abord en lui donnant une couleur verdâtre. Les corps ſpongieux l’abſorbent ; l’eau ſe combine rapidement avec lui, ainſi que la glace qui s’y fond promptement.

Le gaz acide muriatique ſe comporte dans l’air comme l’acide muriatique, c’eſt-à-dire, que l’humidité de l’air ſe combine avec lui, ce qui eſt indiqué par des vapeurs blanches, mais ſur les hautes montagnes, ainſi que l’a éprouvé M. d’Arcet dans les Pyrénées, elles ne ſont pas ſenſibles. Si on reçoit dans l’eau le gaz acide muriatique ; à meſure qu’on l’obtient, & qu’on en ſature cette eau, on aura de l’acide muriatique très-concentré & très-pur.

Il n’eſt pas de notre reſſort d’examiner les combinaiſons de l’acide muriatique, ni du gaz de ce nom, avec différentes ſubſtances ; c’eſt l’objet de la chimie. Voyez le Dictionnaire de Chimie de l’Encyclopédie, & les Elémens de Chimie des Modernes. Nous ne répéterons plus cet avis dans l’énoncé des autres acides.

L’acide muriatique oxigéné a été découvert en 1774 par Schéele, qui diſtilla alors de l’acide muriatique ſur de l’oxide de Manganèſe. Il obtint cet acide ſous la forme d’un gaz jaunâtre, d’une odeur très-piquante, d’une grande expanſibilité, & diſſolvant tous les métaux, le mercure même & l’or. Il lui donna le nom d’acide marin déphlogiſtiqué. MM. Fourcroy & Berthollet ont prouvé que dans cette diſtillation, la baſe de l’air vital contenue dans la chaux de Manganèſe, s’uniſſoit à l’acide muriatique.

L’acide muriatique oxigéné exerce ſur les parties colorantes une action ſi marquée qu’on ne ſauroit la révoquer en doute. M. Berthollet a donné pluſieurs mémoires qui ont rapport à ce ſujet : il a traité des changemens de couleurs qui ſont produits dans les oxides métalliques par l’oxigène, de ceux qui ont lieu dans pluſieurs ſubſtances animales & végétales. On ſait que l’acide muriatique oxigéné a la propriété de blanchir le lin. Voici comment M. Berthollet explique cet effet. « Lorſqu’on blanchit, dit-il, du lin ſous la forme de fil ou de toile, par le moyen de l’acide marin oxigéné, cet acide perd l’oxigène, & les parties qui lui ont enlevé ce principe, deviennent propres à ſe combiner avec les alkalis. En répétant l’action de l’acide muriatique oxigéné & celle des alkalis, toutes les parties colorantes ſont enlevées ſucceſſivement, & le lin devient blanc. Le blanchiment conſiſte donc à rendre, par le moyen de l’oxigène, les parties colorantes qui ſont fixées dans les filamens du lin, ſolubles par les alkalis de leſſives, & l’acide muriatique oxigéné fait avec promptitude ce qu’opère à la longue l’expoſition ſur les prés dans le blanchiment ordinaire.

M. Berthollet a formé de la poudre avec du muriate oxigéné, au lieu de ſalpètre. Ce ſel muriatique oxigéné, ou ſel marin de potaſſe, avec excès d’air pur, jeté ſur les charbons ardens, détonne avec beaucoup de force. Il n’eſt donc pas étonnant que ſubſtitué au nitre pour fabriquer de la poudre à canon, il donne à celle-ci une force conſidérable. Le procédé pour la faire eſt, à ce nouveau ſel même près, le même que celui qui eſt généralement uſité. Mais cette nouvelle poudre eſt très-dangereuſe, ainſi que le prouve le terrible accident arrivé, le 28 octobre 1788, à la fabrique des poudres royales, près d’Eſſonne. M. Berthollet ayant voulu en faire l’épreuve devant les régiſſeurs des poudres, Mrs. Lavoiſier & Letors, on prépara en plein air un moulin à bras à un ſeul piſton, avec une levée qui traverſoit une eſtacade ſolide, derrière laquelle les ouvriers & les régiſſeurs devoient être en ſûreté. L’épreuve commença à 6 heures du matin. Seize livres de matière, enſuite vingt, furent employées, & le charbon mouillé par précaution. À huit heures & demie la poudre ſe trouva aſſez avancée pour qu’on pût ſuſpendre le battage. Un quart d’heure après, l’exploſion eut lieu : la machine fut miſe en pièces, & M. Letors & une autre perſonne, fracaſſés, furent jetés à trente pieds de diſtance, & expirèrent bientôt. Les travailleurs ordinaires étoient alors éloignés.

Acide fluorique. On retire l’acide fluorique du ſpath fluor : c’eſt Schéele qui l’a découvert dans ſon état de pureté, il eſt ſous forme de gaz. Ce gaz acide fluorique uni avec l’eau, forme l’acide fluorique liquide, qui a une odeur très-pénétrante & une forte cauſticité. Il eſt inutile de dire que cet acide rougit le ſyrop de violettes & qu’il diſſout la terre ſiliceuſe qui conſtitue le verre. Le gaz acide fluorique, à force de corroder le verre, le perce même ; il ronge auſſi la peau qui eſt ſoumiſe pendant quelque temps à ſon action. Voyez le mot Gaz ; Gaz acide ſpathique ou fluorique.

Lorſque le gaz acide fluorique eſt produit, en diſtillant parties égales d’acide ſulfurique (vitriolique) & de ſpath fluor pur, ſans ſilice, dans une cornue de plomb, il eſt alors dans la plus grande pureté. Mais ſi on l’a obtenu par la diſtillation dans une cornue de verre, & qu’on le reçoive dans un vaſe où il y a de l’eau, on obſerve une précipitation ſingulière d’une terre blanche très-fine & qui eſt de la terre ſilicée du verre des vaiſſeaux, diſſoute par l’acide, ainſi que Meyer l’a prouvé.

Tout cela ſuppoſé, on ne ſera pas ſurpris que, en chauffant une cornue qui contient de l’acide fluorique liquide, & dont le bec eſt adapté à l’appareil au mercure, cet acide ſoit décompoſé, & qu’on obtienne du gaz acide fluorique dans le flacon renverſé & plein de mercure ſur la tablette de la cuve hydrorgiro-pneumatique ; & que l’eau reſte pure, dans la cornue.

La propriété qu’a l’Acide ſpathique (Acide fluorique) de corroder le verre, fit imaginer à M. le comte de G… de graver ſur le verre, avec cet acide, de la même manière que l’on grave ſur le cuivre avec l’acide nitreux (acide nitrique). Le moyen qu’il employe (ainſi qu’on le voit dans les annales de chimie de M. Crell, année 1786, page 294, ſelon le rapport de M. Klaproth) ſe réduit à enduire des lames de verre d’une couche de vernis des graveurs ; de découvrir avec une pointe les endroits de la lame qu’on veut graver ; de les border avec de la cire ; de verſer dans cette eſpèce de cadre de l’acide ſulfurique & du fluate calcaire en poudre : le fluate ſe décompoſe, l’acide ſulfurique forme du ſulfate calcaire avec la baſe, & l’acide fluorique dégagé ſe porte ſur les parties découvertes du verre, & les corrode.

On a objecté que dans ce procédé il étoit difficile de pouvoir graver, parce qu’alors on ne ſe ſervoit que d’un acide fluorique, altéré par le ſulfurique employé, & que la ſélénite formée, pendant l’opération, doit néceſſairement boucher les traits tracés par l’échoppe, & les rendre baveux & d’une profondeur inégale. Mais on a répondu que dans ce procédé on avoit ſoin d’empêcher l’évaporation en couvrant le plateau d’une aſſiette de porcelaine, ou de quelque choſe de ſemblable, après avoir auparavant verſé le mélange préparé à l’inſtant & très-promptement, & qu’on ne lève l’appareil qu’au bout d’un ou deux jours, temps ſuffiſant, après lequel on trouve le trait bien gravé.

M. le profeſſeur Klaproth publia enſuite un ſecond procédé de cette méthode, qui conſiſtoit à expoſer une pièce de verre ou de porcelaine (ſur laquelle on a tracé préalablement un vernis & un deſſin), de manière qu’elle puiſſe recevoir la vapeur ou gaz ſpathique : alors les traits du deſſin deviennent plus fins & plus réguliers. Voici comment il faut opérer. On dreſſe debout trois ou quatre petits bâtons de bois, de manière qu’une ſoucoupe ou une aſſiette puiſſe y entrer ; au-deſſus de ces bâtons eſt placée horiſontalement, & à la diſtance d’un pouce de la ſoucoupe ou de l’aſſiette, la pièce de verre ou de porcelaine deſſinée comme il a été dit. Il faut verſer dans la ſoucoupe, ou aſſiette, le mélange compoſé de ſpath fuſible & d’huile de vitriol, & achever de bien mêler ces deux ſubſtances. Le côté deſſiné de la pièce peut être mis au-deſſous ou au-deſſus ; dans le dernier cas, les traits s’impriment moins fortement & deviennent plus fins. Lorſque cet appareil eſt fini, on a ſoin de le couvrir avec une écuelle ou un vaſe de terre creux, enduit de cire.

On peut employer ce procédé de graver ſur verre pour la confection des micromètres ſi utiles aux aſtronomes : on ſait que ces inſtrumens ſont très-difficiles à faire, car il arrive ſouvent que le diamant fait ſauter de petits éclats, & que le micromètre eſt manqué. Cet inconvénient ne peut jamais ſe rencontrer avec le procédé de graver au ſpath fuſible mêlé à l’huile de vitriol.

On pourroit encore employer ce mélange pour combiner enſemble & faire contraſter, dans une figure de porcelaine, l’éclat du vernis de la porcelaine, & le mât agréable du biſcuit.

Cette matière étant intéreſſante, nous croyons à propos d’ajouter, ici quelques détails tirés d’un mémoire de M. de Puymaurin, contenu dans le troiſième volume des Mémoires de l’Académie de Toulouſe. On y trouve un précis des expériences des divers ſavans qui ont pu mettre ſur la voie de cette découverte à laquelle M. de Puymaurin paroît être parvenu de ſon côté, ſans avoir eu connoiſſance de ce qui avoit été découvert en Allemagne. J’ai placé dans le cabinet de phyſique des états généraux de la province de Languedoc, dont la direction m’a été confiée, pluſieurs morceaux de verre & de glace, ſur leſquels diverſes gravures ſont parfaitement bien repréſentées d’après cette méthode.

L’acide ſpathique eſt celui qu’on retire d’un ſel pierre, connu ſous le nom de ſpath fuſible, fluor, fauſſe ametyſte. Les chimiſtes ignoroient la nature de ce minéral & le confondoient avec le ſpath ſéléniteux, tandis que les mineurs, d’après une pratique conſtante, l’en diſtinguoient par ſa précieuſe qualité de ſervir de flux aux mines les plus réfractaires.

Margraaf examina le premier, le ſpath fuſible & le ſpath ſéléniteux ; il détermina bientôt leurs différens caractères. Il remarqua auſſi que le mélange de ce ſpath avec l’acide ſulfurique, corrodoit le verre des cornues, & qu’une terre particulière ſe volatiliſoit avec l’acide employé. Il donna alors au ſpath fluor, pour caractère eſſentiel, la volatiliſation par les acides.

Prieſtley obſerva, le premier, dans la diſtillation du ſpath par l’acide vitriolique (ou ſulfurique), le dégagement d’un gaz acide qui communiquoit à l’eau, lors du contact, une forte acidité, en recouvrant ſa ſurface d’une croûte pierreuſe. Il attribua cette acidité de l’eau à ſa combinaiſon avec l’acide vitriolique, en partie volatiliſé par le phlogiſtique, & en partie ſaturé par une portion de la terre du ſpath qui ſe précipitoit à l’inſtant de ſon contact avec l’eau.

Il étoit réſervé à M. Schéele de découvrir un nouvel être, & de trouver, dans une ſubſtance terreuſe, inſipide, indiſſoluble, l’acide le plus pénétrant, le plus miſcible à l’eau, & le ſeul qui poſſédât à un degré éminent la propriété remarquable de diſſoudre la terre ſiliceuſe. Ce célèbre chimiſte préſenta à l’académie de Stokholm, en 1771, le réſultat de ſes travaux ſur le ſpath fuſible ; il reconnut l’acidité de ſa baſe, & lui donna, parmi les acides minéraux, la place qu’elle devoit y occuper ; il établit enſuite les différens degrés d’affinité de ſon nouvel acide avec pluſieurs ſubſtances, & donna les moyens d’obtenir cet acide pur & ſans mélange.

Mrs Viegleb & Buccholz ont fait auſſi pluſieurs expériences ſur la décompoſition du verre par l’acide ſpathique. M. de Puymaurin en a fait également ; & dans le mémoire dont nous préſentons ici le précis, il donne une note des pertes qu’ont eſſuyées les différentes petites cornues de verre dont il s’eſt ſervi. Cet habile chimiſte a retrouvé dans le récipient, ſous forme de gelée, ayant l’apparence, d’une calcedoine, la terre quartzeuſe qui avoit été détachée du verre des cornues. Elles contenoient toutes deux onces d’acide vitriolique & une once de ſpath fluor. De quatre cornues miſes en expérience, la première a perdu 1 gros 42 grains ; la ſeconde, 1 gros 36 grains ; la troiſième, 56 grains, & la quatrième, 1 gros 18 grains. Deux autres cornues ſemblables ayant été expoſées à un feu plus violent, non-ſeulement la ſurface interne de la partie ſupérieure a été corrodée, mais la partie inférieure a été entièrement criblée & percée.

L’acide ſpathique, obtenu par la diſtillation à feu nu, dans une cornue de verre, d’un mélange de ſpath & d’acide vitriolique, eſt doublement altérée. Il eſt ſaturé par la terre ſiliceuſe qu’il tient en diſſolution, & ſouillé par le mélange des acides vitrioliques & ſulfureux. Leur préſence y eſt bientôt reconnue par l’acétyte de Baryte. Pour l’obtenir pur, il faut, en ſuivant le procédé de Schéele, diſtiller le mélange dans une cornue de plomb & d’étain, & enduire le récipient d’une couche de cire. On obſervera ici que lorſqu’on ſe propoſe de conſerver l’acide ſpathique, on doit enduire intérieurement, d’un mélange de cire & d’huile, les flacons de criſtal.

La diſtillation d’un mélange de quatre onces de ſpath, & de douze onces d’acide vitriolique, ſuffit alors pour acidifier huit onces d’eau. L’acétite de Baryte n’y décèle point la préſence de l’acide vitriolique, quoique cet acide ſoit aſſez fort pour diſſoudre la terre calcaire avec efferveſcence. Il altère les couleurs végétales, mais ne les détruit pas. Cependant cet acide n’eſt pas abſolument pur ; il eſt mêlé avec un peu de chaux de plomb (oxide de plomb) ou d’étain, ſelon le métal de la cornue employée ; précipité par l’alkali volatil (l’ammoniaque), on l’a revivifié en plomb ou en étain.

Deux onces d’acide vitriolique, & demi-once de ſpath, étant diſtillés dans une petite cornue de plomb au bain-marie, qui peſoit onze onces ſix gros, on a obſervé qu’à la première diſtillation, la cornue perdit un gros & demi ; dans la ſeconde, un gros, & dans la troiſième, cinquante-huit grains, & que l’acide obtenu étoit blanchâtre & avoit une forte odeur de foie de ſoufre. L’acide ſpathique ſeul ne peut diſſoudre l’étain & le plomb. Mais pendant la diſtillation, l’acide vitriolique ſurabondant diſſout ces métaux ; dépouillé de ſon oxigène, il forme, avec la terre calcaire du ſpath, un hépar terreux, tandis que l’acide ſpathique diſſout & entraîne les chaux ou oxides métalliques.

Il ne faut jamais, pendant cette diſtillation, outrepaſſer le terme de l’eau bouillante, parce que les acides vitrioliques & ſulfureux paſſeroient alors dans le récipient avec l’acide ſpathique.

Parvenu, par ce procédé, à obtenir l’acide fluorique, exactement dépouillé des acides vitrioliques & ſulfureux, M. de Puymaurin a ſoumis à ſon action pluſieurs ſubſtances, tant métalliques que ſiliceuſes, & expoſé ſes réſultats. De ſes expériences, on doit conclure que l’acide ſpathique attaque plus facilement les pierres ſiliceuſes, & le verre plus que les cryſtaux de roche.

Macquer, obſervant la corroſion du verre des cornues, attribua cet effet à l’acide ſpathique, dans l’état de gaz ou fluide aériforme, & M. de Puymaurin ayant vu un carreau de verre dépoli & corrodé par le gaz qui s’exhaloit d’une cornue où il y avoit un réſidu de diſtillation d’acide ſpathique, eſſaya d’obtenir un pareil effet de cet acide combiné avec l’eau. Le ſuccès ayant confirmé la conjecture, il fut aſſuré que l’acide ſpathique avoit ſur le verre une action preſqu’égale à celle de l’eau forte & des autres acides ſur le cuivre & les autres minéraux.

Il n’y avoit plus qu’un pas à faire pour profiter de cette propriété de l’acide ſpathique, & le rendre utile aux arts. Imitant le procédé des graveurs ſur cuivre à l’eau forte, M. de Puymaurin couvrit une glace d’un enduit de cire, y deſſina quelques figures, recouvrit le tout d’acide ſpathique, & l’expoſa au ſoleil. Bientôt les traits gravés furent recouverts d’une poudre blanche due à la diſſolution du verre. Au bout de quatre ou cinq heures, l’enduit fut détaché ; & après avoir lavé la glace on vit l’effet, tel qu’on s’y étoit attendu : mais cependant les traits gravés étoient inégaux & pleins de bavures. Ces défauts venoient de la trop grande épaiſſeur de l’enduit de cire qui avoit empêché de donner aux traits deſſinés la délicateſſe qu’ils auroient dû avoir ; ce qui indiquoit qu’il falloit employer un vernis qui offrît une ſurface aſſez mince pour ſupporter aiſément les hachures & les autres opérations délicates de la gravure ; & en même-temps aſſez ſolide pour, qu’en s’appliquant exactement ſur la glace, il ne fût point ſoulevé ou détruit par l’action dévorante de l’acide.

La difficulté d’appliquer un corps gras ſur la ſurface du verre, rend très-difficile le ſuccès de cette opération. Le vernis ſolide des graveurs réuſſit aſſez bien ; mais la moindre négligence le rend ſujet à s’écailler & à être pénétré par l’acide. Le verre eſt alors terni ; les traits ſont baveux, & la gravure imparfaite. C’eſt pourquoi on a eu recours au vernis fort des graveurs, décrit dans l’encyclopédie. Il eſt fait avec égale quantité d’huile ſiccative & de maſtic en larmes ; mais il eſt difficile à appliquer également, eſt long à ſécher pendant l’hiver, ayant beſoin d’être expoſé à une forte chaleur, pour lui ôter ſa qualité poiſſeuſe.

Ceci préſuppoſé, avant d’appliquer le vernis ſur la glace, on la nettoie bien, & on la chauffe au point de ne pouvoir y tenir la main. On applique légèrement le vernis. On l’unit en le tamponnant avec des petites balles de taffetas, garnies de coton. On l’expoſe enſuite à la fumée des petites chandelles de réſines, comme en uſent les graveurs à l’eau forte pour les planches de cuivre.

Le vernis bien ſéché, & ſa ſurface bien unie, on y calque, ou l’on y deſſine ce qu’on veut graver ; mais la couleur obſcure de la glace ne faiſant pas reſſortir les traits comme ceux qui ſont deſſinés ſur le cuivre, le graveur travailleroit en aveugle, s’il ne ſoulevoit la glace, en l’expoſant à la lumière. Pour rendre ce travail plus aiſé, on peut ſe ſervir d’une table dont le deſſus s’élève à volonté en forme de pupitre. Au milieu de cette table eſt enchâſſée une glace, ſur laquelle le graveur poſe celle qui eſt verniſſée & qu’il veut graver. Cette glace étant éclairée par deſſous, les traits que burine le graveur, paroiſſent, & il peut aiſément juger de l’effet qu’ils doivent produire.

Il ne ſera pas inutile d’avertir ici les artiſtes des précautions qu’ils doivent prendre. Il faut, 1o. connoître la qualité du verre ou de la glace que l’on emploie ; 2o. la force & la pûreté de l’acide ſpathique ; 3o. le degré de température de l’atmoſphère.

Le verre de bohême n’eſt pas d’une qualité égale, les matières dont il eſt compoſé n’ayant pas ſubi une fuſion aſſez parfaite pour être exactement mêlées : auſſi l’acide ſpathique agit-il ſur lui inégalement.

Le verre anglois, où il entre beaucoup de chaux de plomb, eſt aiſément attaqué par l’acide ; mais la moindre ſoufflure du vernis laiſſe pénétrer l’acide ; la chaux de plomb eſt attaquée la première, & ſa diſſolution donne une teinte déſagréable au verre.

Les glaces ſont les ſubſtances vitreuſes que l’acide ſpathique attaque le plus aiſément. La terre ſiliceuſe y a été parfaitement élaborée par la cuiſſon, & l’acide la trouve dans l’état le plus propre à ſon éroſion. Il faut choiſir les glaces dont le reflet ſoit blanc & non verdâtre. Les glaces des petits miroirs paroiſſent mériter la préférence ; les traits qu’y creuſe l’acide ſont d’une égale profondeur, & n’ont point de bavures.

Il eſt néceſſaire de connoître le degré de pureté de l’acide qu’on emploie. Il faut employer l’acide ſpathique, diſtillé dans une cornue de plomb, ſelon la méthode décrite ci-deſſus, marquant cinq degrés à l’aréomètre de Baumé. Celui qui eſt diſtillé dans une cornue de verre, étant altéré par l’acide vitriolique, & ſaturé par la terre ſiliceuſe de la cornue, ſon action eſt moins forte & moins égale.

Quand le thermomètre de Réaumur marque ſeize degrés à l’ombre, dans un temps clair & ſerein ; ſi on expoſe au ſoleil la glace vernie, recouverte par l’acide, elle eſt gravée au bout de 5 ou 6 heures : on le reconnoit bientôt à la pouſſière blanche qui recouvre les traits que l’on avoit gravés ſur le vernis. En hiver la glace n’eſt que légèrement attaquée au bout de quatre jours, & l’opération ne s’achèveroit pas, ſi on n’aidoit l’action de l’acide par une chaleur douce & modérée, telle que celle d’une étuve ou d’un four. Il ne faut point chauffer la glace par deſſous, parce que le vernis ſe ramollit & s’écaille ; l’acide pénètre par-tout, & on ne fait que dépolir la glace, ſans obtenir aucun deſſin régulier.

On peut graver ſur verre, & en demi-relief & en creux. Quand on veut graver en demi-relief, on enlève avec un gratoir le vernis qui recouvre le fond où ſont tracées les figures ; on l’arroſe d’acide ſpathique qu’on étend également avec un pinceau. La chaleur du ſoleil aidant l’acide, le verre eſt bientôt recouvert d’une pellicule blanche qu’on enlève, en refourniſſant du nouvel acide, juſqu’à ce qu’on juge le fond aſſez creuſé, pour que les figures tracées aient un demi-relief. Quand on veut dépolir des glaces, on peut ſe ſervir du même procédé.

Pour graver en creux, on entoure la glace vernie d’une bordure de cire à graveur, & on ſuit exactement les procédés du graveur à l’eau forte.

On découvre un coin de la gravure pour juger de ſon état. Si on croit l’opération finie, on enlève l’acide, qui peut ſervir plus d’une fois, & on fait ſécher & égouter la glace, après l’avoir lavée deux ou trois fois avec de l’eau claire, pour enlever l’acide ſurabondant. On détache enſuite le vernis avec un linge rude, imbibé d’eſprit de vin, & on nettoie la glace avec de la craie réduite en poudre très-fine.

On peut aiſément rendre le gaz ſpathique utile à la phyſique, en s’en ſervant pour dépolir les glaces & les inſtrumens d’eudiométrie, & pour graduer les inſtrumens auxquels on a juſqu’à préſent adapté des graduations de bois & de cuivre, dont l’effet eſt toujours infidèle.

Acide nitrique, ou acide nitreux, eau forte, eſt un acide liquide, blanc ou plutôt limpide dans ſon état de pureté ; jaune ou rougeâtre dans celui d’altération : les vapeurs qu’il exhale ſont plus ou moins rutilantes, ſelon ſon degré de concentration ; ſon odeur eſt vive & forte. Cet acide eſt fort corroſif ; il fait ſur la peau des taches jaunes, qui ne s’en vont qu’avec l’épiderme ; il rougit le ſirop de violette, &c.

L’acide nitrique s’unit avec l’acide carbonique, qu’il abſorbe en grande partie ; il ſe combine rapidement avec l’acide muriatique ; ce compoſé eſt connu depuis long-temps ſous le nom d’eau régale, capable de diſſoudre l’or : l’eau régale eſt appelée à préſent, avec plus de raiſon, par les modernes, acide nitro-muriatique. Cet acide mixte pèſe moins ſpécifiquement que les deux acides dont il eſt formé ; ſa couleur tire ſur le citron, &c.

On obtient du gaz nitreux par divers procédés, principalement en verſant de l’acide nitrique ſur le fer. Voyez gaz nitreux, à l’article Gaz. Ce gaz, comme tous les autres, a les caractères apparens de l’air ; mais il en diffère par pluſieurs propriétés. Il a une peſanteur moindre que celle de l’air ; il eſt impropre à la reſpiration & à la combuſtion ; il eſt anti-ſeptique. Il ſe combine rapidement, avec le gaz vital, & devient acide nitreux : le phénomène eſt le même avec l’air de l’atmoſphère, mais plus foible. Dans l’une & l’autre de ces circonſtances, on aperçoit des vapeurs rutilantes, comme celles qu’exhale l’acide nitreux fumant qui ſe mêle à l’air ; on peut dire qu’il y a alors combuſtion & flamme, conſéquemment chaleur, auſſi le thermomètre placé dans ce mélange monte-t-il de pluſieurs degrés.

Acide ſulfurique, ou acide vitriolique ; il n’a ni couleur, ni odeur ; il eſt le plus fort des acides, c’eſt-à-dire, qu’il peut ſéparer les autres des baſes auxquelles ils ſont unis : l’acide nitrique, le muriatique, viennent enſuite. Sa conſiſtance, qui approche de l’huile, lui a fait donner vulgairement le nom d’huile de vitriol. La peſanteur eſt un peu plus que double de celle de l’eau. Sa ſaveur eſt ſi forte, qu’il cautériſe tout ce qui eſt expoſé à ſon contact. Il attire puiſſamment l’humidité de l’air, & s’en charge d’environ deux fois ſon poids ; lorſqu’on en verſe dans l’eau, on entend un ſiflement pareil à celui que produit un fer rouge, lorſqu’on l’y plonge, & le bouillonnement excité eſt d’autant plus fort, que les quantités qui forment le mélange, ſont plus grandes. Cette ſubſtance ſaline change en rouge la couleur bleue du ſyrop de violette ; mais il n’en détruit pas le principe colorant, puiſqu’on peut, en ajoutant un alkali, rendre au ſyrop ſa première couleur.

L’acide ſulfurique ne ſe rencontre pur en aucun endroit : on avoit cru qu’il exiſtoit dans l’atmoſphère, & on croyoit en démontrer l’exiſtence, en expoſant à l’air des linges imbibés d’une leſſive de potaſſe (alkali fixe) qui, au bout d’un certain temps, ſe trouvoient couverts de ſulfate de potaſſe, c’eſt-à-dire, d’une eſpèce de ſel neutre formé par l’union de cet alkali avec l’acide ſulfurique de l’air ; mais cette expérience ne réuſſit pas ; lorſqu’on emploie de la potaſſe bien pure, on n’obtient que du carbonate de potaſſe, ou la combinaiſon de cet alkali avec l’acide carbonique.

Sthal, & pluſieurs autres après lui, avoient regardé l’acide ſulfurique comme le principe de tous les autres acides ; mais les modernes penſent que chaque acide a des principes caractériſtiques, excepté l’oxigène ou baſe de l’air vital qui entre dans leur compoſition.

L’acide ſulfurique, chauffé dans une cornue, ſe concentre à meſure qu’il perd de ſon eau, & laiſſe dégager un gaz très-odorant & très-pénétrant, qu’on nomme gaz acide ſulfureux ; c’eſt celui-ci qui donne la couleur qu’acquiert quelquefois l’acide ſulfurique.

L’acide ſulfurique, même bien concentré, ſe gèle à un froid d’environ 14 dégrés, au thermomètre de Réaumur ; mais s’il eſt mêlé avec trois ou quatre parties d’eau ; il ne ſe gèle plus. L’expérience a encore prouvé que l’acide concentré qui s’eſt gelé, devient fluide, lorſqu’il eſt expoſé à l’air, quoique l’intenſité du froid ait augmenté. Ce dernier phénomène qui a l’air d’être un paradoxe, dépend de l’eau que l’acide abſorbe de l’atmoſphère, & avec laquelle il ſe combine, en produiſant une chaleur qui s’oppoſe à ſa congélation.

Cet acide n’agit point ſur la terre ſiliceuſe & ſur les pierres quartzeuſes. Il ſe combine avec l’alumine, la baryte ou ſpath peſant, &c., &c.

Si on chauffe un mélange d’acide ſulfurique concentré & de mercure, par exemple, dans une cornue de verre dont le bout du tube recourbé ſoit adapté à un récipient plein de mercure, on obtiendra, dès que l’ébullition aura lieu, un gaz permanent d’une odeur très-pénétrante, ſemblable à celle du ſoufre en combuſtion. On a donné à ce gaz le nom de Gaz acide sulfureux. Voyez l’article Gaz, où il eſt parlé de cette eſpèce. On lui a donné encore le nom de gaz ou d’air acide ſulfureux-volatil. Il eſt plus peſant que l’air ; il éteint les bougies, fait périr les animaux, rougit le ſyrop de violette, s’unit à l’eau, diſſout la craie, le camphre, le fer, eſt abſorbé par les charbons & par tous les corps poreux.

L’acide ſulfurique paroit aux modernes être un compoſé de ſoufre & d’oxigène.

Acide boracique. Le borax étant un ſel neutre, qui réſulte de la combinaiſon d’un acide particulier avec la ſoude, on a donné à cet acide le nom de boracique. On le trouve tout formé dans pluſieurs endroits, par exemple, dans les eaux de pluſieurs lacs de la Toſcane. Cet acide qui eſt le plus foible des acides, a une ſaveur fraîche & ſalée ; il teint en rouge les couleurs bleues végétales ; il ne reçoit aucune altération ſenſible, de la part de l’air ſec ou humide, chaud ou froid. Il ſe diſſout difficilement dans l’eau, &c.

Les quatre derniers acides minéraux étant moins utiles à connoître pour les phyſiciens ; nous renvoyons au dictionnaire de chimie de l’encyclopédie ceux qui ſeroient curieux d’en avoir une notice.

Les acides végétaux ſont ceux qu’on retire de diverſes manières des plantes ; ils ſont en grand nombre : tels ſont l’acide citrique, celui que l’on retire du citron ; l’acide gallique, qu’on extrait de la noix de galle ; l’acide malique, qu’on obtient principalement des pommes ; l’acide benzoïque, l’acide tartareux, l’acide oxalique, ſaccharin, l’acide acéteux, l’acide acétique, &c. Nous dirons un mot ſeulement des deux derniers.

L’acide acéteux, vulgairement appelé vinaigre, eſt compoſé d’une proportion non encore déterminée d’hydrogène & de carbone combinés enſemble, & portés à l’état d’acide par l’oxigène. On a conclu que le vinaigre contenoit de l’oxigène, d’après les raiſons ſuivantes. 1o. Le vin ne peut jamais ſe convertir en vinaigre, qu’autant qu’il a le contact de l’air, & qu’autant que cet air contient du gaz oxigène. 2o. Dans cette opération, le volume d’air qui eſt ſur le vin qui ſe convertit en vinaigre, diminue à meſure que le gaz oxygène eſt abſorbé. 3o. De quelque manière qu’on oxygène le vin, on le transformera en vinaigre.

L’acide acétique, ou vinaigre radical, a été ainſi nommé dans la nouvelle nomenclature, parce qu’on l’a ſuppoſé plus chargé d’oxygène que le vinaigre ou acide acéteux, & qu’on l’a regardé comme le dernier dégré d’oxygénation que puiſſe prendre le radical hydro-carboneux ; on attend que des expériences déciſives confirment cette ſuppoſition.

Les acides du règne animal ſont ceux qu’on obtient de diverſes parties animales. Les acides animaux ſont au nombre de ſix, ſavoir : l’acide lactique, l’acide ſaccho-lactique, l’acide bombique, l’acide formique, l’acide ſébacique, l’acide pruſſique. Le premier ſe tire du petit lait ; le ſecond, du ſucre du petit lait ; le troiſième, de la chryſalide du ver à ſoie ; le quatrième, d’une groſſe eſpèce de fourmi rouſſe qui habite les bois, &c. Nous ne nous étendrons pas davantage ſur ces objets qui ſont étrangers à la phyſique, lorſqu’on les conſidère ſous certains rapports. Il nous a ſuffi de préſenter les pierres d’attente, ou les points de contact qui réuniſſent entr’elles la phyſique & la chimie.

On remarquera que le nombre des acides ne peut point être actuellement borné ; car, depuis peu d’années, on en a découvert beaucoup ; & les recherches continuelles des chimiſtes font eſpérer que le nombre s’en accroîtra encore conſidérablement.