Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Qualité
Q
QUALITÉ (subst. fem.) Quoiqu’il y ait des qualités propres à l’exercice des beaux arts, il ne faut pas adopter le préjugé si rebattu, qu’il en existe de spéciales, pour chacun d’eux. On ne cesse cependant de repéter qu.1 faut être né poëte, & qu’il faut être né peintre. Cette assertion charmante en vers est, dans le sens rigoureux, une idée fort déraisonnable. La nature nous a tous faits laboureurs. Elle a donné, il est vrai, l’imagination & l’intelligence à quelques hommes qui, par-là, sont devenus propres à diriger leurs semblables, à 1es instruire, & à mettre leurs passions en mouvement. De ces dons particuliers à quelques individus, sont nés le, talens divers dont les espèces se sont modifiées selon les différentes circonstances des tems, des climats & des esprits qui s’en sont occupés. Ainsi, un homme né avec une imagination brillante, une ame sensible, une perception délicate & rapide, a pu être orateur comme poëte. Et si, à ces dons, il a joint une adresse de main propre à exprimer pour les yeux ce qu’il avoit conçu, au lieu d’être orateur ou poëte, cet homme a pu devenir statuaire ou peintre.
C’est la réunion de l’intelligence avec la disposition de la main, qui peut faire un artiste ; c’est ce qui le caractérise & le distingue de l’orateur & du poete. Aussi cette définition dolt-elic naturellement diviser tout ce que nous avons à dire sur les qualités que demandent les beaux-arts.
Avant que d’entrer dans les détails que nous méditons sur cette matiere intéressante, il est bon de prouver, en peu de mots, que cette phrase ([1]), il faut être né peintre, est démentie par la marche lente & pénible de l’art, & par la barbarie & le peu d’effet de ses premiers essais.
Cette expression hardie seroit encore plus applicable à la poésie & à l’éloquence : car malgré les incorrections que l’ignorance des premiers tems laissoit dans les discourt, & les poésies des hommes qui s’en sont d’abord occupes, ils ont dû jouir d’une supériorité marquée & produire des impressions victorieuses au sein des premières sociétés.
Quant à l’art, il n’est pas possible d’adopter
le fait avancé par Platon ([2]) : savoir, qu’il se voyoit en Égypte des ouvrages de peinture & de sculpture faits depuis dix mille ans, qui n’étoient ni plus, ni moins beaux que ceux du temps où il vivoit. Tant de vérités démentent cette assertion, sans parler des preuves non-récusables que nous en donnent les bronzes égyptiens que l’on possède encore, que nous ne nous arrêterons pas ([3]).
Le vrai, c’est que l’art n’a pu se montrer avanrageusement, & n’a pu plaire, qu’après les efforts rassemblés de l’industrie humaine ; efforts soutenus pendant une suite de siècles. La peinture & la sculpture, portées au genre sublime, sont plis loin de toutes les dispositions que l’homme peut apporter pour l’imitation, que les dons naturels pour la parole, ne sont éloignés des talens perfectionnés du poëte & de l’orateur.
Les nations les plus sauvages ont eu leurs chantres, leurs législateurs & leurs prophêtes ; & quelquefois sans avoir eu de communication les unes avoir les autres. Mais l’art, né en un lieu, & souvent du hasard, n’a pu se répandre & croître en force & en beauté, sans avoir été perfectionné par des générations successives & fort multipliées.
Faut-il s’en étonner ? Pour montrer des objets palpables, & les choisir avec une délicatesse qui les rende propres à charmer, nous devons rassembler tant de qualités ! O hommes, ô artistes vous-mêmes, ne perdra jamais de vue que leur réunion complette ne peut se rencontrer dans le même individu. Ainsi, ne blâmez pas si aigrement les défauts sans nombre des meilleures productions des arts ; & ne vous découragez pas, parce que vous sentez une impossibilité physique d’atteindre a la perfection.
Une imagination ardente, avec le jugement le plus exquis ; une mémoire sûre & presente, avec la crainte continuelle de se former d’après le sentiment particulier des autres artistes ; une grande adresse de main, avec la defiance d’opérer plus par elle que par ses yeux & par son ame : telles sont les premières qualités, pour ainsi dire incompatibles, que l’artiste, pour être parfait, devroit pourtant rassembler.
La plus heureuse facilité pour inventer, peut ne produire rien de vrai, rien de solide, si la plus saine raison ne dispose, n’arrange, n’exécute. D’un autre côté, la méthode & l’ordre les plus exacts, l’imitation la plus précise des individus, peuvent ne montrer que des ouvrages insipides, si le génie ne les a pas d’abord enfantés.
……………Invente, tu vivras ([4])
Il est une qualité distincte du jugement & de l’imagination : c’est la sensibilité de l’ame. Elle seule fait parler les figures ; elle seule décèle les passions que l’artiste a voulu exprimer, & en porte l’effet dans l’ame du spectateur. O le Sueur, Raphaël, Zampieri, Puget, vous étiez nés avec cette sensibilité précieuse : & n’eussiez-vous possédé ni raisonnement, ni invention, je crois, quand je vois vos ouvrages, que vous eussiez produit des chefs d’œuvre par cet art adorable de faire palier involontairement votre ame sur la toile ou sur le marbre !
Lorsqu’à une imagination fertile, il se joint un caractère nerveux, noble & fier ; lorsqu’avec un sentiment vif & perçant, qui pénétre l’ame des objets les plus sublimes, & de leurs aspects les plus éclatons, on posséde encore le courage propre au travail le plus persévérant ; alors, c’est un aigle qui voit, s’élance & atteint toutes les distances. Tels furent les dons qu’a rassemblés le divin Michel-Ange. Mais ce feu dévorant qui l’animoit & le portoit hors de lui, étoir rarement tempéré par la sage réflexion avec laquelle on calcule la précision des formes, des caractères, des couleurs, des effets, & par laquelle on peut jouir
à longs traits des passions qui se lisent sous les formes de tous les êtres qui respirent.
Cet esprit d’examen propre à détailler la force, la beauté, la grandeur, après avoir établi ce qui doit former un scrupuleux ensemble ; cet esprit, dis-je, est surtout de l’essence de la sculpture : parce que cette maitresse des beaux arts doit tout voir, tout cat. culer, tout montrer, & qu’elle n’a point d’Illusion à produire. La Flore, l’Hercule, l’Antinoüs ne sont pas des ouvrages de feu & d’imagination ; ce sont des chefs — d’œuvre de raison, de science, de goût & de sentiment. Le Gladiateur, le Laocoon, l’Apollon sont des productions du génie ; c’est à-dire de l’alliance du talent d’inventer, & de celui de rendre. La famille de Darius de le Brun, les meilleures productions du Poussin, & presque toutes celles de Raphael offrent cette réunion.
Quelqu’éloigné que l’art soit de la perfection, nous. avons dit qu’il n’étoit encore parvenu au degré qui est connu, que par l’assemblage des découvertes accumulées ; de siècle en siècle. Aussi les grands artistes qui ont paru à la renaissance des arts, n’ont pu obtenir aussi promptement le haut dégré qu’ils ont atteint après deux générations, que par les lumières rapides que leur ont données les statues des Grecs & des Romains.
Mais ces artistes les ont étudiées de telle sorte, que sans en être les copistes serviles, ils y ont puise les principes du beau, pour l’adapter ensuite au caractère de génie, & aux diverses qualités que la nature leur avoit départies. Et nous avons dit que c’étoit ainsi qu’un artiste devoit user de sa mémoire & des exemples de ses maîtres & de ses prédécesseurs, les oubliant en quelque sorte toutes les fois qu’il inventoit & qu’il copioit le naturel. Nous ne devons, en effet, rien attendre de neuf & de pénétrant de celui qui n’opére pas avec un sentiment qui lui est propre, & qui se traîne toujours sur les traces d’un guide pour marcher dans la route des beaux-arts.
En recommandant aux artistes de ne jamais contrarier leurs qualités personnelles, qu’on n’en infére pas qu’ils doivent s’éloigner toujours du goût des statues antiques, comme l’ont fait plusieurs artistes Flamans, Hollandois, François & Vénitiens. Nous pensons, au contraire, que le peintre d’histoire, & surtout le statuaire, ne peuvent mériter des couronnes, qu’autant qu’ils auront réuni tous leurs efforts pour ne rien faire qui s’éloigne des principes de ces maîtres de la régle ; récompense que s’attribue si fiérement, par rapport à l’étude d’-Homère, l’Ion de Platon. « Je me flatte, dit-il, que ceux qui ont bien étudié Homère, ne peuvent, sans ; injustice me refuser une couronne d’or. »
Quant à la qualité qui donne le talent d’exécuter tout ce que l’on a vu, tout ce que l’on a pensé, elle devient nuisible, lorsqu’elle domine exclusivement. (Voyez les mots Pinceau, Instruction, Fait.) L’adresse de la main doit bien servir à montrer nos idées, & à les rendre en proportion du goût, du savoir & de la sagacité avec lesquels nous saisissons les finesses & les ensembles, mais c’est une esclave qui ne doit qu’obéir ; c’est une meule qui triture le froment, & en fait une farine précieuse : mais si cette meule agit seule, si le grain s’échappe & manque à son mouvement, elle ne produit alors qu’un grès méprisable.
Heureuse l’école où l’on aura détourné les élèves de l’adoration trop commune pour cette adresse exclusive, & où tout ce que la pratique manuelle a d’utile, ne servira qu’au savoir & à la pensée ! Heureux aussi sont ceux qui, sans être obligés de s’occuper de la pratique, la trouvent soumise à leur esprit ! C’est par cette qualité que le Corrége, Vélasquez, Ribera, Schidone, Salvator-Rose, la Hyre, Bon-Boullongne & Jouvenet obtiennent la plus constante admiration.
Telle est la première classe des qualités propres à l’art. Hélas ! elles deviendront presque nulles, si elles ne sont pas secondées par la santé. Nous savons que la force du corps est utile à tous ; mais l’orateur & le poëte en sentent moins le besoin que le statuaire & le peintre. J’écris sur la peinture, disoit Lairesse « devenu aveugle, parce que je me trouve réduit à chercher les moyens d’occuper utilement mon esprit. » ([5]) Scarron & beaucoup d’autres ont pu se livrer aux lettres malgré leur foiblesse ou leurs difformités. Milton & Homère devinrent aveugles, & dans leurs élans sublimes, ils n’en célébrèrent pas moins les héros & les dieux : c’est qu’il leur étoit inutile d’unir le méchanisme par lequel les artistes doivent parler aux yeux, aux qualités du génie dont l’utilite est commune à tous les hommes occupés de remuer les sens, & de flatter l’imagination.
Il y a des esprits qui, par une vigueur naturelle, & par le seul amour de l’art, peuvent s’élever à un grand dégré d’excellence. C’est ainsi que Michel-Ange & Léonard de Vinci ont brillé par la force de leurs génies, & par leur passion pour l’art. Il en est d’autres qui ont besoin du stimulant de l’émulation pour atteindre un but éminent. C’est alors une belle qualité que d’en être susceptible. Raphaël n’auroit peut-être jamais résisté à cet attrait puissant qui l’entraînoit vers la volupté, & n’auroit pas abandonné cette manière maigre qu’il avoit prise chez Pierre de Pérouse, si l’ambition d’égaler Michel-Ange ne Peût animé au point de se surpasser lui-même.
L’émulation soutient le courage dans les difficultés qui se rencontrent, pour acquérir le savoir utile dans l’exercice des beaux-arts. C’est au milieu de ces difficultés que l’amour de l’étude lui-même succomberoit, sans une noble ambition qui seule peut s’opposer au dégoût qu’inspireroit une marche toujours lente aux yeux de l’impatiente jeunesse.
Dans l’énumération des qualités de l’artiste, la patience vient ici se ranger. Un tableau offre tant d’objets, & une statue tant de faces, qu’il est difficile de les étudier, de les parcourir tous, sans que le feu nécessaire pour les détails & pour l’ensemble n’en soit quelquefois rallenti.
Ainsi, que les hommes qui seront foibles, indolens, dominés par l’amour des plaisirs, qui n’auront qu’une fougue excessive & continue, ou un jugement aride, de la maladresse, & le défaut de mémoire, n’entreprennent pas de courir la carrière des beaux-arts.
Cependant, telle est la marche de la nature, que les avantages naissent du soin même des imperfections, quand elles ne sont pas toutes réunies dans le même sujet. Si cette non-réunion de toutes les qualités s’oppose à la haute excellence de l’art, ce sont aussi les qualités isolées & fortement prononcées dans l’ame des artistes, qui ont produit les talens divers, les productions originales, & des exemples utiles pour tous les genres. Le mérite saillant s’est rencontré souvent dans les excès : au lieu que les grandes qualités modifiées, tempérées les unes par les autres, l’eussent exclu quelquefois. Et cependant, convenons que les exagérations ont aussi leurs charmes. Pour le prouver, promenons nos regards sur les productions de ce genre.
La galerie de Dusseldorff[6] présente, dans les trente tableaux du chevalier Vander Werst, ce que l’ame la plus tranquille, la plus froide raison, l’œil le plus subtil, & le méchanisme le plus soigné peuvent produire de vraiment enchanteur. Les ouvrages de Vanden Velden, peintre de marine, les jolis sujets familiers de Mieris, de Gérard Douw, de Netscher, &c. Enfin, les fleurs de Van Huysum offrent les talens des fidèles copistes de la nature, & une patience dont les peintres Hollandois ont presque seuls été capables.
La couleur ardente, & les effets piquans de Bassano, de Tintoret, de Jordaens, de Joseph Parrocel : la touche vive & résolue de Caravage, de Salvator-Rosa, sont, comme les bouillantes compositions de Rubens, de Paul Véronese, de Jules Romain, l’effet d’imaginations tellement enflammées, que ni les détails des formes, ni la sévérité des caractères, ni l’exactitude dans l’expression spéciale à chaque sujet, n’ont pu les arrêter un instant.
D’un autre côté, la grande recherche des traits d’esprit, & la scrupuleuse raison ont imprimé une sagesse, un intérêt & une vérité exprimables dans les ouvrages de le Sueur, du Poussin, & surtout dans ceux du Dominiquin, qui font peu regretter cc dont ils auroient pu être animés par des mouvemens plus hardis, & par les effets les plus pittoresques.
En variant ainsi les talens, les diverses qualités satisfont les goûts divers. Il n’y a donc pas de mérite exclusif. Par exemple, pour les esprits viss & les sens faciles a émouvoir, les sujets brillans, les mouvemens variés, & le coloris piquant dont Watteau & Lafosse ont animé leurs tableaux, paroîtront préférables aux vérités douces & au fini précieux des Hollandois ou des Allemands. De leur c8té, ces talens seront recherchés par des ames tranquilles & par des yeux observateurs. Les fantaisies, les idées presque bizarres des Tintoret & des Tiépolo, partent d’un mérite piquant & d’un goût distinctif, que dédaigne souvent, & mal à propos, le peintre raisonneur ; mais qu’il seroit incapable de produire.
Les progrès que les modernes ont faits dans les parties qu’on appelle pittoresques, la liberté heureuse par laquelle ils ont étendu la carrière des talens, ont aussi étendu les bornes & les jouissances de l’art. Et nous avons lieu de croire que, malgré les différens goûts des peintres dont parle Pline, les artistes antiques ont cru que, hors les beautés qui tenoient à l’exactitude des formes, & à l’expression des caractères, il n’en existoit plus dans l’art. Ainsi, Michel-Ange, Puget, Bernini ; le premier Porté à la vigueur des mouvemens & à la puissance excessive des formes ; le second, au sentiment & au plaisir de rendre toutes leurs inflexions, & le troisiéme à des idées piquantes & hardies, auroient eu tous trois des qualités perdues pour cette suite infinie de tous les plaisirs que l’art peut procurer.
Nous ne connoissons guère dans la sculpture & la peinture antiques qu’un genre de beautés. C’est le genre vraiment sublime ; mais tous les artistes qui n’étoient pas nés avec les qualités propres à la précision, au grand, & au sentiment qui seuls peuvent y conduire, étoient
des hommes absolument nuls pour l’art : d’où a dû résulter que les ouvrages des artistes inférieurs de l’antiquité ont été au dessous de ceux des modernes, qui ne se bornant pas au seul mérite de la correction, lorsqu’ils n’y sont pas portés par leurs dispositions, ont su se frayer une nouvelle route, & intéresser par un genre de talent dans lequel ils ont d’autant mieux réussi, qu’ils le tenoient de leurs qualités naturelles.
Malgré tout l’avantage de cette exactitude, de cette pureté que donne ie style antique, il existe cependant des beautés dans l’art qui en sont distinctes, d’autres qui sont même incompatibles avec elle. Telles sont, par exemple, les beautés individuelles de Rembrant, de Ribera, de Cano, & de Velasquez ; telles sont la souplesse, le moëlleux & cet heureux abandon de l’Allegardi, & du Puget ; telles sont enfin les graces de Murillo, du Parmesan & du Corrège. Qui donc oseroit conseiller une résistance aux qualités qui portent à cette force & à ces graces ? Qui seroit assez froid pour n’en pas sentir tout le prix, & n’en pas gouter tous les charmes ?
Il y a plus : l’art n’est plus animé, si oes dons inlpirés en sont tout à fait exclus. Ce n’est pas assez, dit Horace, d’être pur dans son style, il faut encore s’y rendre aimable.
Non satis est pulchra esse poëmata, dulcia sunto.
C’est pour donner cette leçon, sans doute, qu’un statuaire antique a placé les trois graces dans la main d’Apollon. Disc. sur les antiq. étrusques, par M. d’Hancarville.
Avouons cependant que le succès des hommes nouveaux dont nous venons de parler, a souvent été fatal pour leur siècle, parce que bien des artistes ont voulu suivre leur exemple avec des qualités qui n’y étoient pas propres. De-là le danger des écoles systhématiques & des adoptions exclusives qui ont détérioré le goût de l’art. Ensuite est survenu l’établissement des corps académiques, qui ont achevé d’écarter des routes où conduisoient les qualités naturelles qui sont différentes en chaque individu. Les académies sont ordinairement dominées par une puissance qui violente les goûts, contrarie les penchans, & empêche de rien produire qui ait la force que donne l’originalité. Quelques génies plus prononcés, sont parmi nous ([7]) assez courageux pour tenter de s’affranchir de cette servitude ; mais leurs efforts seront sans fruits, si les académies ne sont tellement réformées qu’il n’y existe plus de pouvoir concentré & permanent, & si tous les esprits vaguant à leur gré & suivant leurs qualités diverses, n’ont pas l’espérance de partager à leur tour & l’honneur des places & es bienfaits du gouvernement, sans crainte des cabales qui s’élèvent contre les styles originaux & contre les ames fières & naturellement indépendantes.
La patience dexécution dont nous avons parlé plus haut, est encore différente de ce courage persévérant, utile pour parcourir la carrière des études, Nous allons faire l’énumération de toutes les connoissances utiles aux arts, & on conviendra que la constance que demande leur recherche, sembleroit incompatible avec le feu d’imagination sans lequel il n’y a point de grands hommes, li les Virgile, les Bossuet, les Raphaël, & les grands statuaires antiques & modernes, n’en manitestoient l’abmirable réunion.
« Ce n’est pas assez, disoit Platon, de sçavoir seulement l’art qu’on exerce, il faut encore connoître tout ce qui y a rapport » ([8]). Quelques auteurs ont traité des connoissances qui tiennent aux arts de peindre & de sculpter ; mais on nous trouveroit surement ici distus & exagérés, si nous rapportions en entier leurs sentimens. Le Chevalier Marino ([9]) veut par exemple, que les artistes connoissent l’astronomie, la cosmographie, la théologie &c.
Il est bon en effet de ne pas être ignorant dans ces scienses & beaucoup d’autres encore ; mais bornons-nous à parler de celles dont la connoissance est d’une, nécessité absolue pour l’art.
La perspective, qui ne peut se bien apprendre sans quelques leçons préliminaires de géometrie & d’optique, doit être regardée comme une étude indispensable. Le peintre & le statuaire ne peuvent faire ni bas-reliefs, ni tableaux, sans faire juger de la diminution perspective, & des raccourcis des objets. Et cette diminution toujours relative entre toutes les parties des corps, doit être rendue avec la plus grande précision. Envain compteroit —on sur l’habitude de copier la nature, sur la justesse de l’œil ; il faut connoître parfaitement la science exacte de la perspective pour obtenir la saillie ou l’enfoncement de tout ce qui est représenté sur une superficie platte.
On sait que l’anatomie, en ce qui traite des os & des muscles, doit être l’objet d’un profond travail pour l’artiste occupé de rendre les mouvemens de la figure humaine. Sans cette connoissance, comment pourroit-on lire
ce que nous cache la peau, & comment exprimeroit-on les impressions que les actions diverses produisent sur toutes les parties du corps ? Ce ne seroit pas encore assez que de se borner à la connoissance de l’ostéologie, & de la myologie : il faut sçavoir la place des assemblages des glandes extérieures, des plus forts cordons de veines & d’arteres, & connoître les endroits où se logent les pelotons de graisse ; afin de ne pas laisser appercevoir mal-à-propos les impressions des muscles & des os. Ce seroit un contresens qui rendroit la science elle-même ridicule. C’est ainsi qu’il faut apprendre beaucoup pour ne montrer que ce qui est nécessàire.
Sans anatomie, on ignore les moyens les plus vrais & les plus certains de vatier à son gré les sexes, les âges, les divers caractères, ceux de l’homme qui travaille, de celui qui a reçu une éducation délicate &c. Ce n’est que par les légères ou les fortes impressions des os, par la fermeté, la mollesse, la sêcheresse,,’appauvrissement des muscles exprimés avec une justesse relative, que l’art peut rendre ces différences.
Il ne seroit pas suffisant pour l’artiste de connoître l’architecture des Etrusques, des Grecs, celle des Romains dans les différens âges de leur empire, ni celle que les Goths & les modernes ont adoptée depuis ; il doit faire une recherche des habitations des hommes dans tous les tems & dans tous les climats, il doit connoître la nature de leurs temples, de leurs tombeaux & de leurs constructions navales & militaires.
Pour se mettre en état de choisir des sujets pour leurs ouvrages, lie expliquer ceux qui ont été choisis pour d’autres, les artistes doivent parcourir les histoires sacrées & profanes ; il faut les approfondir, en faire des extraits pour y pusier la connoissance des mœurs, des corpulences, des vêtemens, des armes, des instrumens propres aux autels, de ceux qui servent à l’art de bâtir, à la navigation, à Part militaire & à l’agriculture chez tous les peuples anciens & modernes. Sans ce travail pourroient ils présenter aux hommes érudits & l’image des pays dont la description nous a été transmise, & celle des usages des nations qui les ont habités ?
Ce n’est pas seulement dans les livres que le peintre doit étudier l’histoire, e’est aussi sur les monumens de l’antiquité : bas-reliefs, meubles, vases, médailles, enfin tout ce qui a été découvert, doit servir à l’artiste non seulement pour acquérir les connoissances des détails obmis par les écrivains ; mais encore pour les vérifier & pour faire la critique de ce que les antiquaires & les historiens auront dit, d’après l’inspection des fragmens antiques. Car qui pourroit mieux qu’un artiste éclairé juger sans inscription, des styles des aristes de l’antiquité & par conséquent du pays & des tems où ils ont fleuri ?
Les bibliothéques d’estampes seront un objet de recherche pour les statuaires & les peintres, & là il feront leur choix entre les mensonges & les vérités gravées.
Ce sera dans ces diverses sources antiques & modernes qu’ils trouveront des lumières sur les hieroglyphes, l’iconologie, & par conséquent sur les moyens de traiter les emblêmes & l’allégorie.
Ils ne pourroient représenter les arbres, les plantes, les fleurs, les fruits, les minéraux, les animaux de toutes les sortes qui existent dans les différents climats, s’ils n’avoient une connoissance profonde des preportions, des situations, des formes, des couleurs, des substances de ces productions innombrables de la nature.
La manœuvre des vaisseaux sera une étude particulière pour ceux qui seront chargés de peindre des combats de mer, ou même de simples marines ; comme celle de la tactique sera utile à ceux qui veulent peindre nos batailles.
Le peintre doit faire au moins la lecture de ceux des livres de chymie qui traitent de la composition des couleurs, autrement il en seroit un emploi inconsidéré qui les rendroit destructibles. Je crois devoir indiquer ici un livre nouveau où il est traité de cette matière. Il est intitulé : traité de la peinture au pastel, &c. par M. P. R. de C. C. à P. de L. Paris, chez Defer de Maisonneuve. 1788.
Le peintre connoitra aussi les branches de la physique qui traitent de la lumière, de ses effets & de la nature des couleurs naturelles qui lui servent de modèles.
La partie de la philosophie qui nous éclaire sur les dons de l’homme & sur l’abus qu’il en fait, doit être du ressort de tout artiste occupé d’exprimer les passions. Alors reportant sans cesse sur le spectacle de la nature, la théorie qu’il aura acquise dans cette importante matière, il épiera toutes les occasions de découvrir les moyens par lesquels les agitations de l’ame se lisent sur les traits du visage, & sur les mouvement du corps.
Heureux l’artiste, qui muni d’un savoir indépendant de celui qui le constitue statuaire ou peintre, sait l’appliquer à toutes les parties de sa profession, & qui bien nourri des manières diverses de ses prédécesseurs, choisit entr’elles celles qui conviennent aux sujets qu’il se propose de traiter. Cette méthode d’approprier ainsi à son sentiment naturel les connoissances des autres, ne pourra être adoptée que par un homme d’une grande fléxibilité d’esprit & d’après une méditation bien profonde de tous les genres de mérites connus. Mais en pliant ainsi son talent aux differents genres, qu’il se garde bien d’imiter en esclave. Il lui suffira de se rappeler par quelle chaleur, quelle abondance, & quelle intelligence, Lebrun, Rubens, P. Véronese ont traité les sujets d’apparat & de magnificence : leurs génies étoient propres aux banquets, aux triomphes, aux combats, & ils avoient Part d’y introduire une rareté d’effet à laquelle ils subordonnoient la multitude des objets de leur savante composition : ce que nous disons ici d’un seul genre de composition est applicable à toutes les grandes parties de la peinture & de la sculpture sur lesquelles les statues & les autres productions célèbres peuvent être consultées.
Mais c’est par la pénétration & la docilité aux principes & non par l’appropria ion des pensées d’autrui que le peintre doit profiter des talens du peintre. Etre copiste & servile imitateur est un défaut dans des professions qui doivent se distinguer pas les productions d génie, Mais la sagacite à saisir les exemples du bien, & la complaisance à recevoir des conseils sont des qualités exquises.
Après avoir acquis une profonde théorie, & une grande pratique, fruits d’un continuel travail, les artistes en useront avec une modération d’esprit qu’un jugement sain accompagne toujours. Par la qualité de savoir se modérer même dans l’ambition du succès, l’ouvrage de l’homme savant acquert plus de perfection. Le premier avantage de cette qualité est de savoir s’arrêter à temps. Le mérite dont se vantoit Appelles[10], & qui eût été désirable dans Protogêne, que le premier avouoit être d’ailleurs son égal, étoit de ne pas s’épuiser dans son ouvrage Sc de ne le pas fatiguer par des efforts trop prolongés.
Mais où la modération est importante, c’est deus le sage emploi de tout ce qu’on sait. De l’abondance excessive des figures, il ne résulte que des tableaux stériles, & une richesse déplacée est le fruit d’une grande pauvreté de jugement Nous sommes fâchés de pouvoir reprocher à Gérard Lairesse, d’avoir placé un fastueux buffet, garni de vaisselle d’or & d’argent dans la chambre habitée par la Sainte Famille.
C’est par le même défaut que beaucoup de peintres de portraits, habiles dans l’art peu difficile d’imiter les étoffes jusqu’à l’illusion, rendent encore plus choquante la médiocrité des têtes qui sont l’objet principal de leurs tableaux ; cet objet y est traité comme un accessoire, envain on vante la vérité des velours & des satins, si le sujet qui en est habillé ne me représente qu’une figure de carton enluminée. C’est alors que l’admiration des ignorants mortifieroit une article qui aroit un peu refléchi sur le but de l’art de faire un portrait : dans les ouvrages de Lefevre, de Rembrant, de Van-Dyck & de Titien, on peut prendre de grandes leçons de l’économie que ce genre exige. Ils sentoient ces hommes de goût, que ne pouvant parvenir à tromper les yeux par l’imitation complettement illusoire d’une tête animée, ils ne devoiens pas l’accompagner d’étoffes capables de produire l’illusion de la nature même, ainsi qu’il leur eût été facile de le faire ; puisque c’eût été faire paroître les têtes de leurs tableaux encore plus inférieures à leur original qu’elles ne l’étoient en effet.
Dans une infinité de points de l’art que nous venons de parcourir, nous reconnoissons presque par tout la nécessité d’une grande logique, & nous apprenons ce principe d’un mot prononcé souvent par un homme de notre dernière école a qui il en échappoit quelquefois de bons : c’était M. Dumont, le Romain. La peinture, disoit-il, est un continuel raisonnement.
Il n’est pas moins important aux artistes, qu’à tous ceux qui tiennent un rang distingué dans la société, d’être instruits de la morale. Cette science est sur-tout nécessaire à ceux qui le chargent de diriger les études des jeunes gens destinés à leur succéder. Pour transmettre aux autres le goût des belles qualitds, il faut les posséder soi-même. Eh ! quel sera le mérite d’un maître, si d’abord il ne fait pas donner des idées fort élevées de sa profession en inspirant une noble fièrté à ses élèves ? il faut qu’il les prémunisse contre les effets d’une basse jalousie, & d’un esprit d’intérêt, & il les rendra alors capables des plus grands talens. Quiconque s’afflige d’un succès qui tourne toujours à l’avantage public, est peu fait pour en mériter ; celui qui n’a que le but de le procurer de l’argent, travaille sans soin, sans faire les dépenses indispensables pour la réussite & avec une précipitation rarement heureuse : avec des passions basses, on ne peut guères enfanter que des productions triviales.
C’est en perfectionnant les qualités de l’ame, c’est en traitant l’art avec la plus noble distinction, que les Grecs ont donné tant de lustre, & une si grande renommée au petit espace qu’ils occupèrent sur le globe.
Les préceptes de pureté & de noblesse de sentimens, si utiles aux opérations du génie, doivent être inculqués dans l’âge le plus tendre. Ainsi craignons de confier l’instruction de nos enfans à des artistes cupides, à des mercenaire, à des fats orgueilleux, tellement pauvres de connoissances, qu’il ne voyent rien au-delà d’un adroit méchanisme auquel se borne tout leur savoir, & qu’ils vantent tellement qu’ils forment autour d’eux un troupeau d’admirateurs aveugles. Apelles regardoit la théorie sans pratique, comme un savoir inutile dans un artiste : Piétro Testa a peint la théorie comme une beauté céleste dont les bras sont liés ; mais aussi ce peintre ingénieux a representé la pratique sans théorie, comme une vieille femme aveugle & toujours empressee de courir au hasard. Il faut donc craindre de confier l’éducation des élèves à des hommes privés des lumières de la morale & de la science, qui seules peuvent faire marcher avec certitude dans les sentiers de l’art.
Après avoir parlé des qualités propres aux articles en général, nous allons dire un mot de celles qui sont spécialement utiles aux graveurs ; si nous avons interrompu l’ensemble de cet article, e’est qu’il nous a semblé que nous devions placer quelques traits sur l’instruction : car on conviendra que c’est manquer à une tâche essentielle dans le cours rapide de la vie, que de ne s’être pas mis en état de communiquer de belles qualités à ceux qui doivent remplacer.
La qualité qui nous fait saisir avec justesse & qui nous rend propres ; les productions dont nous ne sommes pas les inventeurs, doit être l’apanage du graveur, comme celui du traducteur ; mais lor-sque nous comparons ici l’artiste qui sait pallier sur le cuivre les ouvrages des peintres, avec l’écrivain qui traduit dans sa langue les antiquités des nations étrangèrés, nous ne les considérons comme égaux en qualités que par celle de s’approprier le génie d’autrui. Le graveur est infiniment plus original que le traducteur, en ce que celui-ci use, dans un idiôme différent, du même art de la parole par lequel son original s’est fait entendre. Ainsi la grammaire, l’eloquence, la dialectique qu’ils employent tous deux sont des moyens qui leur sont communs ; au lieu que le graveur n’exprime l’art d’autrui que par un art qui lui est tout-à— fait propre. Ses moyens ont été absolument inconnus aux auteurs qu’il copie ; l’art du graveur, pour rendre la nature, connoît des moyens qui diffèrent autant de celui du peintre, que ceux du statuaire pour le même objet. Comme la couleur, le travail du pinceau, celui du crayon sont, des opérations absolument particulières au peintre ou au dessinateur, de même l’art de couper le cuivre avec la pointe ou le burin est un mécanisme propre au graveur & absolument étranger aux autres artistes : ainsi dans la définition que l’on fait de l’art en general, & dans laquelle on le considère gemme un resultat, des operations de l’es[rot, de concert avec celles de la main, on peut trouver la différence de la gravure, de la sculpture & de la peinture, en n’en supposant de réelle que pour la partie du mécanisme, qui en effet n’a rien de commun entre ces arts.
Dans la gravure, l’affoiblissement ou la force des teintes propres à exprimer les lumières & les ombres sont produits par la finette ou par la grosseur des tailles, par leur éloignement ou leur rapprochement, enfin par le plus ou moins de profondeur du travail sur le cuivre. Au lieu que l’emploi seul du brun ou de clair, remplissent ce but dans les dessins & les tableaux : le peintre trouve la nature des couleurs locales dans celles dont la palette es chargée ; le graveur ne peut les exprimer d’une manière speciale ; mais il parvient à donner une idée de la différence des tons de couleurs, par une combinaison bien réfléchie des diverses natures de son travail. C’est par une suite de teilles disposées, en lignes courbes ou droites, ou par la manière d’en former des lozanges ou desquarrés plus ou moins parfaits, qu’il varie les caractères des substances dans les estampes que produit son art Le talent d’exprimer la nature des différens corps avec le pinceau ou le crayon est le résultat d’un mécanisme fort simple & fort rapide ; le graveur au contraire ne parvient à caractériser la surface des corps, ou poreux ou compactes, que par des moyens : fort longs & sort compliqués : tels sont les points de différentes formes & placés de différentes manières, la disposition variée des traits que forment son burin, la largeur, la finette & la fermeté de ces mêmes traits, le mêlange raisonné de tous ces travaux, ou quelquefois enfin l’association des diverses manières de graver soit à burin, soit à l’eau-forte, soit à la pointe sèche, &c.
Le graveur doit avoir toutes les qualités par lesquelles on parvient à l’art de bien dessiner, justesse d’organe, justesse de raison & le plus vis sentiment pour en exprimer le résultat dans son ouvrage & le rendre intéressant à ceux qui le considerent. Mais le dessin du graveur doit être porté à ce point de précision qu’il n’y entre aucun goût adoptif, afin qu’il soit capable de se soumettre à celui des peintres différents dont il multiplie les productions. Ainsi le graveur doit montrer en raison, en justesse & en constance, tout ce qu’on est en droit d’exiger du peintre, en chaleur & en fécondité.
Dans ce que nous venons de dire ici sur les qualités qui conviennent aux graveurs, nous n’entendons pas parler de ces artistes à imagination qui, par une pointe rapide, incorrecte & spirituelle, ont su enrichir les portefeuilles des amateurs de leurs fécondes compositions. Tels sont Tempesta, Callot, Labelle, Rembrandt, Silvestre, Leclerc, &c. les estampes de ces maîtres célèbres tiennent plus à l’art du peintre ou du simple dessinateur, qu’à celui du graveur. Nous voulons parler de l’art qui constitue essentiellement la belle gravure, de l’art qui multiplie & transmet aux temps & aux pays les plus reculés, les productions distinguées que la sculpture & la peinture ont enfantées. C’est ce talent que les Goltzius, les Bolswert, les pontius, les Vorsterman, les Maçon, les Gérard Audran, les Edelinck, & les Drevet ont rendu si utile & si précieux à toutes les sciences, aux arts en général, & à tous ceux qui les connoissent les aiment & les cultivent.
Article de M. Robin.
- ↑ (1) Wattelet, poëme sur la peinture.
- ↑ (1) Plat. Loix, l 2.
- ↑ (2) Voyez ce qui est dit sur les obstacles qui s’opposoient aux progrès des arts chez les Egyptiens, dans l’article PEINTURE, sous le titre : Peinture des Egyptiens, & dans le premier article Sculpture, sous le titre : Sculpture chez les Egyptiens. Il faut distinguer entre les bronzes & autres ouvrages égyptiens qui nous restent, ceux qui ont été faits sous la domination des rois Grecs, successeurs d’Alexandre, & qui ne prouvent tien conter ce qui a été avancé par Platon. Au contraire, le passage du philosophe peut aider à faire cette distinction. La loi d’Égypte qui défendoit aux artistes de s’écarter en rien de ce qu’avoient fait leurs prédécesseurs, explique l’état d’immobilité qu’éprouvèrent les arts dans cette contrée. Enfin, suivant les règles de la saine critique, le témoignage de Platon qui avoit vu l’Égypte, qui avoit pu y comparer avec les gens du pays les ouvrages qui passoient pour avoir une grande antiquité, & ceux qui se faisoient sous ses yeux, ce témoignage, dis-je, a plus de poids que les conjectures contraires que pourroient se permettre les modernes, & suffit pour leur interdire ces conjectures. On peut seulement ne pas prendre à la rigueur le terme de dix mille ans donné par Platon aux anciens ouvrages de l’Égypte, & regarder ce terme comme l’expression d’une antiquité très-reculée. (Note du Rédacteur.)
- ↑ Le Mierre, poëm. La peinture
- ↑ (1) Le grand livre des peintres, par Lairesse, trad. par M. Jansen, chez Moutard. 1787.
- ↑ Voyez la gallerie électorale. Bruxelles, 1781. Par M. de Pigage.
- ↑ (1) Cet article a été écrt au mois d’Avril 1790.
- ↑ (l) Jon.
- ↑ (2) Dicerie sacre. Volume primo.
- ↑ Pline, l. 35, cha. 10. Voy. Œuvres de Falçoner, tom. I. édit. de 1789.