Encyclopédie méthodique/Art aratoire et du jardinage/Racine

Définition

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Racine ; c'est, dans les plantes, la partie inférieure qui tient à la terre.

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RACINE ; c'est dans les plantes la partie inférieuse qui tient à la terre. La racine est toujoura formée la première dans les semences. Elle pompe directement les sucs de la terre pour les transmettre à tout le reste de la plante. Le principal brin des racines se nomme pivot, parce qu’il est ordinairement dirigé comme le tronc.

Excepté le lierre, la cuscute, le gui, les lichens, qui ont la plupart de leurs racines découvertes, on ne connaît point de plantes qui les ait hors de terre. Celles qui rampent, au lieu de plonger, s'alongent horisontalement sans s'éloigner de la surface de la terre.

Tull, agriculteur anglois, & son commentateur Duhamel du Monceau, rangent les racines des plantes sous deux classes relativement à la direction qu'elles prennent en terre.

Les unes, dit-il, nommées pivotantes, s'enfoncent presque perpendiculairement dans le terrain, & les autres, appelées rampantes, s'étendent suivant une direction presque horisontale.

Les racines qui sortent immédiatement de la semence, sont toujours du genre des pivotantes. Elles pénètrent perpendiculairement dans la terre, jusqu'à ce qu'elles trouvent le sol trop dur ; & quand la terre facile à percer, a du fond, ces racines pivotantes pénètrent quelquefois à plusieurs brasses de profondeur, à moins qu'on ne les coupe ou qu'on ne les rompe, soit de dessein prémédité, soit par accident ; car alors elles changent de direction. C'est une observation qu'on a eu l’occasion de faire bien des fois, mais principalement en élevant des plantes dans de l'eau bien pure.

Les racines pivotantes poussent des rameaux qui s'étendent horisontalement ; & ces rameaux sont d'autant plus vigoureux qu'ils sont moins profonds en terre ; de sorte que les plus forts le trouvent à la superficie dans cette épaisseur de terre qui est remuée par la charrue.

Ce sont là les racines rampantes. Elles s'éloignent quelquefois assez considérablement de la plante qui les a produites ; mais alors, elles deviennent si fines, qu'elles échappent à la vue, sur-tout quand elles ont pris la couleur de la terre qui les environne, ce qui arrive ordinairement.

Une carotte, par exemple, qui ne paroît avoir qu'une grosse racine en navet, garnie de quelques filamens, jette néanmoins, suivant Tull, ses racines à une distance considérable ; mais elles sont si déliées qu'on ne peut les distinguer de la terre qui les couvre, à moins qu'on n'y fasse beaucoup d'attention. Il en est de même de presque toutes les plantes. Pour s'en convaincre, l’on peut faire l’expérience suivante que cet auteur propose.

Il faut choisir un champ qui n'ait pas été labouré depuis long-tems, & y bêcher un espace de terre triangulaire A B D C, qui ait vingt brasses de longueur de A en D, douze pieds de largeur de B en G, & que cet espace se termine en pointe du côté A. Ensuite il faut semer dans la longueur A D vingt graines de ces gros navets qu'on appelle des rabes, & avoir soin de labourer fréquemment cet espace de terre. Quand les navets seront parvenus à leur grosseur, si l’on observe que celui qui est à la pointe A est le plus petit, & que les autres grossissent toujours de plus en plus en s'approchant de E, où le champ labouré a quatre pieds de largeur, on pourra conclure que les racines de ces navets se seront étendues à deux pieds de distance ; & si les navets sont à peu près d'une égale grosseur depuis E jusqu'à P, on aura lieu de croire que leurs racines ne se seront pas étendues au-delà de deux pieds.

C'est une façon très-commode de connoître à quelle distance une sorte de plante peut étendre ses racines dans une terre labourée, qui est la plus favorable à leur extension. Voici comment on s'en est assuré. En examinant celles d'une haie fossoyée, on a vu qu'après avoir passé par-dessous le fossé, elles remontoient pour


se distribuer dans la terre de la superficie qui étoit labourée.

J'ai fait la même observation sur une allée d'ormes qui pensa périr, parce qu'on avoit fait à une petite distance un grand fossé, dans l'intention d'empêcher les racines d'endommager une pièce de terre ; mais les ormes jetèrent des racines dans la terre qui s'étoit écoulée dans le fossé ; ces racines remontèrent de l'autre côté du fossé pour se distribuer dans la terre labourée, & bientôt les ormes reprirent leur première vigueur.

J'ai encore remarqué que si, à une petite distancé d'un jeune orme, on faisoit une tranchée,. En la remplissant de bonne terre, les racines de cet orme prenoient la direction de cette tranchée, & y devenoient fort longues.

De plus, quand on a planté des arbres trop avant en terre, ils languissent jusqu'à ce que leurs racines étant remontées vers la superficie, aient atteint l'épaisseur de terre qui est remuée par les labours ; mais souvent, il vaut mieux les arracher pour les planter plus à la superficie.

Toutes ces observations prouvent que les racines s'étendent fort loin, sur-tout quand elles rencontrent une terre remuée. Cela est assez naturel. Les feuilles sont les organes de la transpiration, & les racines, ceux de la faction de la sève. Or il est nécessaire qu'il y ait plus de sève aspirée qu'il ne s'en dissipe par la transpiration. Si maintenant, on fait attention à l'énorme surrface des feuilles, & à la grande étendue des organes de la transpiration, on sera disposé à croire que les racines, ou les organes de la suction se procurent par leur grande étendue en longueur, des surfaces au moins aussi considérables que celles des feuilles.

Ce raisonnement exige une petite restriction. Les feuilles qui transpirent pendant la chaleur, aspirent la nuit l'humidité des pluies & des rosées ; & il est très-bien prouvé que cette aspiration contribue beaucoup à la nourriture des plantes. D'ailleurs il n'y a point d'expérience, qui prouve que la transpiration & la suction se fassent en raison des surfaces, & il pourroit arriver qu'un pouce de surface des racines aspireroit plus de sève qu'un pouce de surface des feuilles ne laisseroit échapper de transpiration. Il est pourtant vrai que les racines courent beaucoup ; car de même que les veines lactées des animaux ont leur ouverture dans les intestins pour sucer le chyle, les plantes ont les ouvertures de leurs vaisseaux lactés, ou plutôt de leurs vaisseaux à sève à la superficie de leurs racines. Mais les animaux vont chercher leur nourriture, & ils en remplissent leur estomac & leurs intestins ; au lieu que les racines sont obligées d'aller chercher la nourriture des plantes dans l’intérieur de la terre. Il faut dès-lors que les racines s'allongent beaucoup, sans quoi, elles auroient bientôt épuisé la terre qui les environne.

Il est donc avantageux de labourer les terres, afin que les racines puissent s’étendre, & être ensuite pressées par la terre à mesure qu’elle s’affaisse. Mais voici un autre avantage des labours qui est moins douteux.

Il est prouvé que quand on coupe ou qu'on rompt une racine, elle ne s'allonge plus, mais bientôt elle produit plusieurs racines au lieu d'une, & ces nouvelles racines sont toutes propres à fournir beaucoup de nourriture aux plantes. Or il est certain que quand on laboure, on coupe ou rompt beaucoup de racines, d’où il suit qu'on multiplie les suçoirs toutes les fois qu'on laboure.

On appelle encore racines certaines plantes dont on ne mange que la partie qui vient en terre. Telles sont les raves, les navets, les carottes, les betteraves, &c. On leve ces racines tous les ans vers la fin de l’automne pour les replanter aussitôt, si on veut les couvrir l’hiver, sinon on les met dans la serre.

Les racines succulentes se tirent de terre au printems, & les autres en automne.

Toutes les racines des plantes sont composées d’une peau & d'une sur-peau, & criblées de toutes parts de petits trous ou de pores tr-s-ouverts. La deuxième peau est toujours imbibée d'un gluant, qui est un suc limoneux & gras, servant à faire couler la sève. Il est aussi dans toutes les racines des espaces, des interstices, des parois, qui se vident & se remplissent continuellement des sucs de la terre.

Quiconque est au fait du mécanisme tant interne qu'externe des racines, & de ce qui compose leur tissu intérieur, se garde bien, dit Schabol, de les mutiler & de les offenser aucunement.

Racines ; machine propre à couper en terre les racines, publiée dans les Mémoires de la Société d'Agriculture de Paris.

Les navets peuvent servir d'engrais, & être considérés sous ce point de vue comme une très-grande ressource lorsqu'on manque de fumier. On peut alors cultiver les navets de la manière que nous avons déjà indiquée : on les éclaircit, afin que ceux qui restent deviennent plus gros ; on donne ensuite un coup de charrue, afin de découvrir les racines & de les faire pourrir en les exposant ainsi à la gelée. Dès que les navets


ont été endommagés, ils s'enflent, ils pourrissent, & forment un très-bon engrais en même tems qu'ils ameublissent la terre. C'est dans cette intention qu'on peut employer avec succès une charrue garnie de coutres disposés de manière que les racines sont découpées en terre. M. Rey de Planazu a bien voulu nous communiquer le dessin d'une machine de ce genre, & dont nous joignons ici la figure. Les terres dans lesquelles on a laissé des navets ainsi découpés, sont très-bonnes pour les chanvres, les lins, &c. Celles où l'on a récolté toutes les racines doivent être ensemencées d'orge.

Cette machine est composée de trois parties qui forment une espèce de charrue : d'un'train, d'un avant-train, qui portent les roues, & d'une sorte de herse. L'avant-train (fig. 3, pl. XXXVII), a deux branches C F, F D, qui traversent l’essieu A B, dans lequel elles sont solidement arrêtées par des coins de fer ; à la naissance des deux fusées A & B. Cet essieu reçoit, selon sa longueur, un coussinet G F, qui, est traversé, ainsi que l’essieu en E, par un boulon de fer G destiné à assujettir la chaîne C. C’est pour donner passage à cette chaîne que le coussinet est échancre en F à sa partie inférieure. Dans son échancrure supérieure est appuyé l’axe B G de la charrue. Cet axe, entraîné par la chaîne dont nous venons de parler, est percé de plusieurs trous, afin qu'on puisse le faire avancer, plus ou moins sur l’essieu, parce que la hauteur des roues D étant toujours la même, on donne par ce moyen plus ou moins d'inclinaison à l’axe, & par conséquent aux coutres de la herse G, qui fait corps avec lui. Cette herse est dessinée plus en grand dans la fig. 1 ; elle consiste en un bâtis de bois A B C D, très-fort, & dans lequel sont fichés les dix coutres de fer E, dont les inclinaisons & la disposition sont telles, qu'aucun d'eux ne passe sur la trace d'un autre. En appuyant sur les poignées des queues E H, on force ces coutres d'entrer en terre à une certaine profondeur, & découper toutes les racines qu'ils peuvent y rencontrer. Ces racines ainsi découpées en morceaux, pourrissent beaucoup plus promptement, augmentent & améliorent l'engrais.