Encyclopédie méthodique/Art aratoire et du jardinage/Labour

Définition

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Labour ; action de remuer la terre avec une charrue ou un outil, à dessein de la rendre fertile.

Labourer ; c’est diviser la terre, & déraciner en même tems les mauvaises herbes.

Article

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L

LABOUR ; c'est l’action de remuer la terre avec quelque outil ou instrument que ce puisse être, la renversant sens dessus dessous, à dessein de la rendre fertile.

Le premier labour est le défrichement de la terre qu'on veut mettre en valeur ; il se fait en tems sec pour les terres humides, & en tems pluvieux pour les terres légères & pierreuses.

On dit labour foncier quand il est profond & lorsque le sol a du fond. On nomme labour léger celui qui se fait à la superficie de la terre.

La profondeur du labour doit être proportionnée à la qualité du sol, aux besoins de la graine qu'ou veut semer, & aux circonstances qui déterminent à labourer. On ne peut sans doute trop labourer les terres fortes pour les atténuer, les briser, les diviser & les réduire en menues parcelles. Quant aux terres légères, il faut être grandement en réserve au labour qu'on leur donne. Dire qu'on doit labourer davantage les terres légères que les terres fortes, est un paradoxe insoutenable. Les terres maigres remplies d'un sable léger sont sujettes à perdre beaucoup de leurs sucs par les grands vides qui s'y forment naturellement, d'où il suit que les labours trop fréquens en atténuent trop les molécules.

On doit donner deux labours aux arbres fruitiers, un au printems, & un autre avant l'hiver.


LABOURER ; c’est diviser les molécules de la terre, les exposer successivement aux influences de l’air, & déraciner, en même tems, les mauvaises herbes qui nuiroient aux semences.

On dit labourer à la houe, à la fourche, à la bêche ; mais le labour le plus parfait est celui de la bêche.

Pour bien labourer en jardinage, il faut, 1°. que la jauge qu'on fait devant soi avec la bêche soit toujours bien évidée. On amasse, dans ce creux les pailles, les fumiers, les mauvaises herbes qui sont à la superficie, excepté les chiendens & autres racines traînantes, & on recouvre le tout de terre.

2°. La bêche doit toujours entrer en terre


jusqu'à la douille, & être peu inclinée ; les jardiniers paresseux inclinent beaucoup, pour aller plus vite.

3°. On doit prendre garde en labourant de bien niveler la terre, la rendre égale par-tout & l’ameublir.

4°. Si quelques endroits sont plus élevés, on en retire le trop de terre, on la réserve pour la dernière jauge de son carreau, on en couvre les endroits les plus bas, ou on la répand partout.

Les terres légères se labourent moins souvent que les fortes.

6°. Enfin, quand on veut semer dans un terrain ainsi labouré, on y passe le râteau avec lequel on nettoie & on unit la terre.

Mais passons aux différentes façons de labourer, indiquées par Tull, agriculteur anglois, & Duhamel, son commentateur.

Toutes les terres, disent ces auteurs, ne doivent pas être labourées de même, & c'est probablement ce qui a donné lieu aux différentes espèces de charrues qui sont en usage dans diverses provinces.

Il y a des terres maigres & légères qui n'ont point de fond ; c'est-à-dire, qu'à une petite profondeur, on trouve le tuf blanc ou la craie, ou même la roche. Jamais on ne peut espérer un grand produit de ces sortes de terres. Néanmoins quand elles se trouvent dans un pays habité, on ne laisse pas de les cultiver ; & à force de les fumer, on en tire quelques secours, d’autant qu'il en coûte peu pour les labourer : car on se contente de gratter cette superficie où réside toute la fertilité, avec un crochet de bois qui est armé d'un morceau de fer ; & un petit cheval ou même, un âne suffit pour tirer ces espèces de charrues qui n’ont pas de roues.

Il y a d’excellentes terres à bled, mais qui ne forment qu’un lit d’environ quatre pouces d’épaisseur, sous lequel on trouve une terre rouge stérile. Comme ces sortes de terres s’mbibent de l’eau des pluies aussi-tôt qu’elles sont tombées, on les laboure à plat, & l’on a soin que la charrue ne pique pas jusqu’à la terre rouge, qui diminueroit la récolte suivante, à moins qu’à force de fumier l’on ne rendit à la terre sa fertilité.

Il paroît probable qu'à la suite du tems & à force de culture, la terre rouge qu'on a mêlée avec celle de dessus deviendroit bonne ; mais un fermier ne veut pas s'exposer à perdre plusieurs récoltes : d'ailleurs il lui en coûte moins pour ne labourer que la superficie de la terre, que pour la labourer à une grande profondeur.

On laboure ces terres avec de petites charrues qu'on appelle à oreille, parce qu'à côté du soc qui est assez étroit, il y a une planche contournée de façon qu'elle renverse la terre du côté qu'elle est placée ; & comme cette planche peut être changée de côté, le charretier est le maître de renverser la terre du côté qu'il veut.

Pour rendre ceci plus clair, supposons qu’un charretier commence sa raie en A, & qu’il aille en B. Ayant mis l’oreille de sa charrue du côté de sa main droite, & incliné le coutre du même côté, il renversera la terre du côté de c c c. Etant arrivé en B, il retourne sa charrue ; mais comme il veut encore renverser la terre du côté de c c c dans le sillon qu’il vient de faire, avant de commencer la raie D, il détache l’oreille du côté droit où elle étoit, & il l’attache du côté de sa main gauche ; il change aussi la direction du coutre. De cette façon, la terre qu'on laboure se renverse toujours dans le sillon qu'on vient de former, & tout le champ se trouve labouré à plat.

Si l’on a fait le premier labour de A en B, on fait le second de C en D, & les raies se trouvent disposées comme d, c.

Il paraît que par ce croisement les mottes sont mieux brisées, & la terre mieux remuée que si l’on faisoit tous les labours dans le même sens de A en B. Lorsque les terres ont beaucoup de pente, ou lorsqu'elles sont longues & étroites, comme il n'est pas alors possible de croiser les raies, on les biaise le plus qu'on peut ; & si les raies du premier labour ont eu la direction f, g, on donnera à celles du second la direction h, i.

Quand les terres sont fortes, telles qu'un sable gras, on se sert de charrues plus fortes que pour les terres dont nous venons de parler. Le soc de ces charrues est au moins une fois aussi large que les socs des charrues à oreille. Ces grandes charrues n'ont point cette partie qu'on nomme l’oreille ; mais elles ont une pièce de bois qui en tient lieu, qui est fermement attachée au côté droit de la charrue. On la nomme le versoir ; & pour cette raison, l’on appelle ces sortes de charrues des charrues à versoir. Il est évident que comme le versoir est toujours du même côté de la charrue, il renverse toujours la terre du même côté qui répond à la main


droite du charretier. C'est pourquoi l'on ne laboure pas avec ces charrues comme avec celles à oreille.

Pour faire comprendre cette autre façon de labourer, supposons qu'on veuille labourer la pièce ABCD, le charretier va de A en B, & il renverse la terre sur sa droite vers E. Ensuite il va commencer une autre raie en C ; & allant vers D, il renverse encore la terre sur sa droite vers F. Puis il transporte sa charrue pour ouvrir une nouvelle raie en G ; & allant vers H, il renverse la terre sur sa droite vers E dans le sillon qu'il avoit formé en faisant la raie AB. Cette raie achevée, il en va commencer une en I ; & allant vers K, il renverse la terre sur la droite dans le sillon qu'il avait formé en faisant la raie CD, & quand tout le champ est ainsi labouré, il reste un grand sillon au milieu.

Ces charrues ne font pas un labour profond. Comme le soc est fort large, elles enlèvent une grande largeur de terre qu'elles renversent à côté presque tout d'une pièce. Il est vrai qu'on a plutôt labouré un arpent avec ces charrues, qu'avec celles à oreille ; mais aussi il faut quatre forts chevaux pour tirer les charrues à versoir, au lieu que deux suffisent pour celles à oreille.

Au second labour, on commence à ouvrir la première raie de n en o, & l’on verse la terre dans le grand sillon L M. Puis on ouvre une raie de p en q, renversant encore la terre dans le sillon L M qui se trouve rempli. La seconde raie s'ouvre de r en s, la troisième de r en u, & l’on finit par une raie de x en y, & une de z en &, où il reste deux petits sillons qu'on remplit lorsqu'on donne un troisième labour, après lequel il reste un grand sillon au milieu du champ comme au premier labour.

Comme par cette façon de labourer on renverse une bande de terre ou de larges gazons à côté de la charrue, on ne croit pas que la terre, soit aussi bien remuée qu'elle l’est par le labour qui est fait avec la charrue à oreille.

La largeur des gazons que la charrue enlève, donne occasion aux paresseux de faire une très-mauvaise manœuvre que nous allons expliquer.

Je suppose, dit Duhamel, qu'on veuille labourer un champ pareil à ABCD, le laboureur commence une raie en A, & il renverse la terre du côté E ; il va ensuite, comme on l'a dit plus haut, commencer une autre raie en C, & il renverse la terre du côté F. Quand il est arrivé en D, il va former une troisième raie du côté de A ; mais au lieu de la commencer en G pour renverser la terre dans le sillon, il la commence en H, & il renverse la terre sur la terre non labourée G qui est à côté, & il reste un sillon HL. Il va ensuite commencer une autre raie de M en N, renversant la terre sur une lesse de terre qui n'a point été labourée.

Et continuant ainsi jusqu'à la fin, toute la terre paroît labourée par de profonds sillons, quoique réellement on n'en ait labouré que la moitié. Ceux qui suivent cette méthode, n'ayant en vue que de détruire l’herbe, ils croyent faire des merveilles, parce que l’herbe qui est sur les endroits non labourés, est étouffée par la terre qu'on renverse dessus. Mais il ne s’agit pas seulement de faire périr l’herbe, il faut de plus remuer & atténuer la terre ; c'est ce que cette espèce de labour ne peut opérer. Il est vrai qu'au second labour on forme les sillons où étoient les éminences, qu'on renverse dans les anciens sillons. Mais qu'arrive-t-il de-là ? C'est qu'on croît avoir fait deux labours, & que réellement on n'en a fait qu'un, puique toute la terre n'a été remuée qu'une fois.

Quand les terres sont très-fortes, & argilleuses, on les laboure avec des charrues à versoir comme les précédentes ; mais leur soc n'est pas si large, & elles piquent plus avant en terre. C'est pourquoi il faut quatre chevaux pour les tirer, quoiqu'en faisant chaque raie on remue une moindre largeur de terre.

Les terres spongieuses (ou qui boivent l’eau) se labourent à plat, mais on est obligé de donner un écoulement à l’eau lorsque les terres la retiennent. C'est pour cela qu'on a coutume de former dans les terres argilleuses des sillons dans lesquels l’eau se ramasse & s'écoule comme dans des ruisseaux.

Quand les terres ne sont pas extrêmement sujettes à être inondées, on fait les raies à une plus grande distance les unes des autres ; c'est quelquefois à cinq toises, quelquefois à quatre, quelquefois à deux ; & les terres ainsi labourées s'appellent des terres labourées en planches.

Lorsque les terres sont plus sujettes aux inondations, on fait les sillons beaucoup plus près à près, ne laissant d'un sillon à l'autre que trois ou même deux pieds de distance, & ces terres sont dites labourées en billons.

Il faut expliquer comment on s'y prend pour donner cette forme aux guérets.

Supposons pour cela qu'on veuille labourer en planches la pièce ABCD, & qu'on se propose de placer les sillons en EEEE.

Le laboureur commence par ouvrir une raie de F en G, puis il en ouvre une autre de L en I qui remplit le sillon qu'il vient de former.


Il revient de H en K, renversant encore la terre du côté du sillon F, ce qui forme le milieu de la planche ; & continuant de labourer de M en N, de O en P, de Q en R, de S en T, une planche est formée, & elle est bordée de deux sillons ; ce qu'il falloit faire.

Souvent on laboure toute la terre à plat avec la charrue à versoir ; & quand tout le champ est ensemencé & hersé, l’on fait de distance en distance les raies EEEE qui forment les planches. Mais cette méthode n'est pas si bonne que la précédente, parce que les planches étant plates & bordées d'une petite élévation de terre, l’eau s'en écoule moins bien.

Pour labourer par billons, on ouvre un sillon, de A en B, puis allant de C en D, & de E en F, non-seulement on remplit le sillon, mais on forme en cet endroit une éminence qu'on nomme le billon, qui est bordée de deux sillons. On fait la même chose aux endroits GH, IK, & toute la pièce est labourée en billons.

Il y a aussi des paresseux qui ouvrent une raie de a en b, renversant la terre sur l’espace c c c qui n'a point été labouré ; puis ils ouvrent une autre raie de d en e, renversant encore la terre sur l’espace c c c. De cette façon, toute la terre paroît labourée, quoiqu'elle ne le soit effectivement qu'à moitié.

Il est inutile de faire observer que comme on ne fait tous ces sillons que pour égoutter les eaux, il faut les diriger suivant la pente du champ qu'on laboure, afin que l’eau s'écoule plus promptement.

Les terres légères ou douces qui ont été labourées à plat ou par grandes planches, sont ensemencées à sa main. La plus grande partie des grains tombe dans le fond des raies ; ensuite la herse abat les éminences des raies dans les petits sillons. De cette façon le bled est enterré, & il semble qu'il a été semé par petites rangées, ou comme dans des rigoles.

Il ne seroit pas possible de semer de même les terres très-fortes & argilleuses, parce que les mottes étant dures, la herse ne peut les briser, & saute dessus, & le bled seroit toujours mal enterré. C'est pourquoi l'on enterre le bled à la charrue, c'est-à-dire, qu'on répand la semence avant de donner le dernier labour qui renverse la terre & recouvre le grain.

Nous l’avons dit plus haut ; il ne convient pas de labourer toujours les terres de la même manière. C'est pourquoi une charrue, qui est propre à labourer une espèce de terre, ne vaut rien pour en labourer une d'un autre genre. Si on vouloit labourer les terres de Beauce avec les charrues sans coutre & sans roues qu'on emploie dans les terres extrêmement légères, à peine égratigneroit-on la terre. De même, si on vouloit labourer des terres très-fortes & argilleuses avec les petites charrues qu'on emploie en Beauce, on ne seroit qu'un labour superficiel qui ne vaudroit rien. Aussi les laboureurs de Beauce ont-ils des charrues à versoir pour défricher les sain-foins, les lusernes, & pour labourer les chemins où la terre est quelquefois si dure que les charrues à oreille romproient plutôt que de l’ouvrir.

A l'égard des terres fortes qui ont bien du fond, il faut les labourer le plus profondément qu'il est possible, & pour cela il faut de fortes charrues qui aient de la largeur ; car si elles sont étroites, comme il faut ouvrir la raie tout auprès des sillons qu'on vient de former, & comme la terre résiste beaucoup, la charrue retomberoit dans le sillon ; au lieu que quand la charrue est large, elle entame la terre à une plus grande distance du sillon, & elle l'ouvre sans tomber dans le sillon précédemment formé.

L'objet qu'on se propose en labourant les terres, est de détruire les mauvaises herbes, & de briser la terre de façon qu'elle soit réduite en petites molécules. La bêche est bien propre à remplir ces vues, parce qu'en retournant la terre, l’herbe se trouve recouverte de beaucoup de terre, où elle pourrit : d'ailleurs elle remue la terre à huit ou dix pouces de profondeur. Mais cette opération est longue, pénible & coûteuse, de sorte qu'on ne peut en faire usage que dans les jardins.

La charrue est beaucoup plus expéditive ; mais communément elle ne remue pas la terre à une aussi grande profondeur, & souvent elle la renverse tout d'une pièce sans briser les mottes ; car le coutre coupe le gazon, le soc qui suit l’ouvre, & le versoir ou l’oreille le renverse tout d'une pièce sur le côté. L'agriculteur anglois s'est attaché à perfectionner ce labour, & pour cela il a imaginé une charrue qui porte en avant quatre coutres au lieu d'un. Ces coutres sont placés de façon qu'ils coupent la terre, qui doit être ouverte par le soc, en bande de deux pouces de largeur ; ce qui fait que le soc ouvrant un sillon de sept à huit pouces de largeur, le versoir renverse une terre bien divisée qui ne forme plus de grosses mottes plates, comme le font les charrues ordinaires. Il arrive de là que quand on vient à donner un second labour, la charrue ne trouve à remuer que de la terre meuble au lieu de rencontrer des mottes, ou même des gazons qui n’ayant pris racine depuis le dernier labour, sont aussi difficiles à di-


viser que si la terre, n'avoit jamais été labourée.

D'ailleurs, Tull prétend qu'avec sa nouvelle charrue il peut remuer la terre à dix, douze, & quatorze pouces de profondeur ; & comme par cette charrue on fait de profonds sillons & des billons fort élevés, la terre est bien plus en état de profiter des influences de l’air.

Quand on veut mettre en façon une friche ou un champ qui n'a point été labouré depuis longtems, il faut que la terre soit très-humide, surtout si elle est forte, car sans cela elle seroit si dure que les contres ne pourroient la couper, ni le soc la renverser. Mais quand les terres sont en façon, il faut éviter de les labourer lorsqu'elles sont fort humides ; car alors le trépignement des chevaux & le soc même corroyent & aglutinent les terres fortes, à peu près comme le font les potiers lorsqu'ils préparent, leur terre pour en faire des vases, & ainsi l'on gâte la terre au lieu de l'améliorer.

Cependant la charrue à quatre coutres la corroye moins que la charrue ordinaire ; parce que le soc de celle-ci la détache par une pression, au lieu que les coutres de l'autre l’ayant coupée en plusieurs pièces fort petites, le soc la renverse sans presque la pétrir. D'ailleurs, comme la charrue à quatre coutres entre dans la terre jusqu'à la profondeur de douze ou quatorze pouces, elle y trouve la terre assez sèche, lors même que celle du dessus est très détrempée.

Tull recommande qu'on mette tous les chevaux les uns devant les autres quand on laboure une terre molle, afin que marchant tous dans le sillon, ils ne pétrissent pas tant la terre.

Si la terre est en bonne façon, l'on peut la labourer par le sec ; mais le tems le plus avantageux est lorsqu'elle est un peu pénétrée d'eau, sur-tout pour la nouvelle charrue qui auroit peine à piquer bien avant si la terre étoit fort sèche.

Il est vrai que comme cette charrue pique bien avant & quelle remue beaucoup de terre, il faudra employer plus de force pour la tirer ; ainsi il sera nécessaire de mettre trois chevaux au lieu de deux, & quatre au lieu de trois. Mais on sera bien dédommagé de cette augmentation de dépense par la perfection qu'on donnera au labour.

La charrue à quatre socs ne sert que pour les principaux labours, pour défricher les terres, ou pour mettre en bonne façon celles qui n’ont point été labourées, ou qui l'ont été mal depuis long-tems. Elle est encore très propre à faire des labours d'hiver, & l’on peut s’en servir de tems en tems pour former de grands sillons dans le milieu des plates-bandes entre les rangées de bled.

Mais l'agriculteur anglois ne prétend pas qu'on donne tous les labours avec cette charrue. Il ne bannit point la charrue ordinaire ; il en approuve même l’usage pour les labours d'été : il recommande aussi l’usage d'une autre espèce de charrue à un coutre qui n'a point de roues, & qui est plus légère que la charrue commune. Il la nomme la houe à chevaux, parce que cet instrument doit faire un labour assez semblable à celui qu'on fait à bras d'homme : nous la nommerons la charrue légère. C'est principalement avec cette houe qu'il laboure les plates-bandes, ou qu'il cultive les plantes pendant qu'elles sont en terre.

Pour bien exécuter ces labours, il faut que la charrue soit légère & maniable, qu'elle puisse approcher aussi près qu'on veut des plantes, & qu'on soit maître de faire prendre au soc une autre direction que celle des chevaux : C'est pour remplir ces intentions que Tull a supprimé les roues ; & effectivement on sait qu'en Provence les laboureurs font aller leurs charrues qui n'ont point non plus de roues, sous les oliviers, quoiqu'ils soient trop bas pour que les chevaux puissent passer dessous.

Mais ces charrues de Provence ne font qu'égratigner la terre, au lieu que l'intention de l'agriculteur anglois est que sa charrue la laboure. C'est pourquoi il l’a artistement construite de façon que quand le cheval marche suivant la ligne A B (Pl. II, fig. 20), le coutre suive une ligne parallèle, mais plus ou moins éloignée de A B, telle que C D, E F, ou G H, I K. (Voyez Animaux propres au labour.)