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Édition : La Logique déductive dans sa dernière phase de développement, Alessandro Padoa, Gauthier-Villars, Paris, 1912


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LA LOGIQUE DÉDUCTIVE DANS SA DERNIÈRE PHASE DE DÉVELOPPEMENT PAR Alessandro PADOA AVEC UNE PRÉFACE DE GIUSEPPE PEANO PARIS GAUTHIER-VILLARS, ÉDITEUR 55, QUAI DES GRANDS-AUGUSTINS 1912 oSxmfi MATH-STAT, 5GJ50ti P(2 PRÉFACE Plusieurs savants de tous pays ont adopté l'idéographie logique, telle qu'elle a été perfectionnée et complétée de nos jours. M. Padoa — déjà mon élève distingué et maintenant mon collègue et ami — a donné sur ce sujet, depuis 1898, des séries de conférences très 'suivies dans les Universités de Bruxelles, Pavie, Rome, Padoue, Cagliari et Genève, et a fait des communications très appréciées aux Congrès des philosophes et des mathématiciens à Paris, Livourne, Parme, Padoue et Bologne. En poursuivant son œuvre de collaborateur et de vulgarisateur. M. Padoa s'est proposé de mettre tout le monde à même d'apprécier la simplicité et la puissance du langage idéographique — qui a donné naissance à un nouveau développement de la logique déductive et à une nouvelle analyse des différentes branches des mathématiques — et de consulter avec profit et sans difficulté les nombreux ouvrages dans lesquels on en fait l'application. Le but me paraît atteint par ce traité, qui est clair, ordonné, complet : il contient l'explication de tous les symboles logiques, l'étude de leurs propriétés, l'analyse de leurs liens et leur réduction au nombre minimum, due à M. Padoa. Beaucoup d'exemples, tirés du langage courant et du langage scientifique, en rendent la lecture plus intelligible et plus agréable; et des _ 4 - notices historiques bien choisies permettent de suivre les progrès de ces études, depuis Leibniz jusqu'à nos jours. Enfin, bien qu'il soit assez mince, ce traité fait connaître tout ce qu'on sait sur cette science, qui intéresse aussi bien les philosophes que les mathématiciens. Turin (Université), mai -191-2. Giuseppe PEANO. LA LOGIQUE DÉDUGTIVE DANS SA DERNIÈRE PHASE DE DÉVELOPPEMENT ' AVANT-PROPOS Termes logiques et termes scientifiques dans le langage ordinaire 1. Prenons un livre qui puisse mériter notre confiance au point de vue de la propriété du langage, par ex. un traité de géométrie élémentaire; et, en le lisant, proposons-nous d'y séparer les termes scientifiques (savoir en ce cas, ceux qui sont propres à la Géométrie et, en d'autres cas, ceux qui sont propres à l'Arithmétique, à la Physique, à la Chimie, etc.) de ceux qu'on emploie dans un discours sur un objet quelconque, et que pour cela j'appellerai termes logiques, au sens étymologique du mot. 2. Certainement, il y a des mots qui ne permettent aucune hésitation sur le choix du vocabulaire dans lequel ils doivent être placés ; par ex., les mots 1. C'est le titre d'un Cours de sept conférences que je viens de faire sous les auspices de l'Université de Genève. Mes nombreux auditeurs l'ont suivi avec un intérêt qui a dépassé mes prévisions les plus optimistes et plusieurs d'entre eux m'ont aimablement demandé de le publier. Il était conforme à mon but de vulgarisateur de leur donner satisfaction, mais certainement je ne l'aurais pas encore fait si la Revue de Métaphysique el de Morale ne me faisait l'honneur de me publier, malgré la longueur du texte et les difficultés typographiques. J'exprime donc ma plus vive reconnaissance à mes auditeurs de Genève, à la direction de cette Revue et à l'éditeur M. Gautliier-Villars qui a bien voulu se charger de la diffusion de mon ouvrage. I,'Avant-propos a été ma leçon d'ouverture, Y Idéographie logique m'a pris deux leçons et la Logique déductive les deux suivantes. J'ai consacré les deux dernières leçons de mon Coursa un essai de Méthodologie pure et appliquée (aux principes de l'Arithmétique), que maintenant je laisse de côté, parce que, avant de le publier, je me propose de le développer davantage. Lorsqu'il ne s'agit pas de fixer une date, il me parait inutile de citer mes publications, dont j'ai emprunté plusieurs matériaux épars, en les coordonnant et en les complétant; je préfère réserver mes citations pour les autres auteurs. Gênes (Institut technique), mai 191-2, A. P. — 6 — point, droite, plan, circonférence seront placés dans le vocabulaire géométrique1, tandis que les mots chaque, quelque, aucun, seulement trouveront leur place dans le vocabulaire logique. Mais, si la distinction est simple pour ces mots, dont chacun a toujours la même signification, elle n'est pas si simple pour les mots qui ont plusieurs significations, c'est-à-dire pour la majorité. En effet, il suffit par ex. d'ouvrir, à n'importe quelle page, un dictionnaire français-italien, pour y rencontrer des mots qui doivent être traduits d'une manière différente selon l'emploi qu'on en fait dans le discours : ce qui prouve la multiplicité de leurs significations. 3. Mais, dira-t-on, dans la plupart des cas il s'agit de nuances qui ne pourraient avoir aucune influence sur la nette séparation entre le vocabulaire logique et le vocabulaire d'une science spéciale. Malheureusement les choses ne se passent pas ainsi; il y a, en effet, beaucoup de mots bien propres à nous mettre dans une perplexité embarrassante, même parmi ceux que notre dictionnaire nous apprend à traduire d'une manière uniforme. C'est le cas, par ex., du mot « un » qu'on traduit en italien « uno », aussi bien dans l'une que dans l'autre des propositions : Praxitèle fut un sculpteur, un et un font deux, bien que dans l'une il soit employé comme terme logique et dans l'autre comme terme arithmétique; par suite — malgré son unicité de traduction, qui pourrait faire croire à son unicité de signification —le mot « un » doit être placé aussi bien dans Vun que dans Vautre vocabulaire. Cet exemple prouve que— si l'étude d'une langue étrangère est un moyen pour réfléchir sur les différentes significations des mots qu'on a appris à employer correctement par la force de l'habitude — ce moyen n'est pas le seul, ni le plus efficace. On arrive, en effet, à une analyse plus subtile moyennant une autre espèce de traduction; c'est-à-dire en tâchant de remplacer le mot qu'on veut étudier 1. Bien que le mot « point » soit aussi employé à la place de « pas » ou de « nullement », et par suite au sens logique.

par d'autres mots tirés de sa -propre langue. Car la nécessité, dans laquelle on se trouve parfois, de remplacer le même mot d'une manière différente, nous donne la preuve décisive de la multiplicité de ses significations. L'emploi systématique de ce procédé nous porte à cette assertion paradoxale : qu'on n'est pas maître d'un mot, jusqu'à ce qu'on ait réussi à s'en passer, en le supprimant ou en le remplaçant! Par ex., le mot « un » qui se trouve dans la première des deux propositions énoncées ne pourrait nous préoccuper, car nous pouvons le supprimer, tout bonnement. Mais il n'en est pas ainsi du même mot dans la seconde proposition ; on ne pourrait le supprimer et pour le remplacer il faudrait analyser les principes de l'arithmétique. 4. Pour un autre exemple, prenons le mot « sont », indicatif présent du verbe être, troisième personne pluriel. Quelqu'un sera peut-être disposé à le placer seulement clans le vocabulaire logique; mais, pour lui faire changer d'avis, il suffit de lui faire analyser les deux propositions : les rubis sont rouges les mois sont douze. Leur ressemblance est apparente; en effet, tandis qu'on peut mettre la première au singulier, en disant : tout rubis est rouge on ne pourrait pas dire : tout mois est douze. C'est qu'après le « sont » de la seconde proposition on peut imaginer sous-entendus tous les mots suivants : « autant que les nombres de la succession naturelle de l jusqu'à 12 »; et on voit alors, qu'en ce sens tout à fait exceptionnel, le mot « sont » doit être placé dans le vocabulaire arithmétique. 5. Mais allons feuilleter le livre de géométrie dont j'ai parlé au commencement. J'y lis : cette droite passe par le point donné. Placerons-nous le mot« passe » dans le vocabulaire géométrique'! mais, puisqu'icion peut l'éviter en disant : — 8 — le point donné appartient à cette droite et comme le mot « appartient » est un terme logique, il faut conclure qu'ici le mot « passe » l'est aussi. Je feuillette encore et je rencontre une proposition qui commence ainsi : le lieu des points tels que, etc. Arrêtons-nous ; où faut-il placer ce mot « lieu »? dans le vocabulaire géométrique"! Mais, est-ce qu'on ne pourrait pas dire, et bien dire : l'ensemble des points tels que, etc.? Or, comme « ensemble » est un terme logique, le mot « lieu », dans l'acception considérée, l'est aussi. Je continue à feuilleter et ici je lis : si un point est donné en dehors d'un plan, etc. et plus loin : si un point est donné en dehors d'une surface sphérique, etc. Qu'allons-nous faire de ce mot « dehors »? Dans le premier cas, on énonce tout simplement que le point donné n'appartient pas au plan considéré et par suite il s'agit d'un terme logique; mais, dans le second cas, outre qu'affirmer que le point n'appartient pas à la surface sphérique, on veut exclure qu'il se trouve à l'intérieur et par suite ici il s'agit d'un terme géométrique. Il faudra donc placer le mot « dehors » dans les deux vocabulaires à la fois. (>. Vous voyez donc que très souvent il est impossible de préciser la signification d'un mot sans connaître la.phrase dans laquelle il est employé. On pourrait alors projeter d'étendre et de perfectionner nos vocabulaires, en n'y plaçant pas seulement des mois, mais des locutions, savoir : le peu de mots isolés qui ont toujours la même signification et, à côté de chacun des autres, toutes les phrases qui en précisent les différentes significations. Mais, puisque ce projet est justement celui de tout compilateur de vocabulaires et de dictionnaires, ne ménagerions-nous pas nos forces... en nous contentant d'acheter la dernière édition du Larousse?! — 9 — Il nous reste cette dernière espérance : notre analyse patiente et diligente nous permettra, peut-être, d'atteindre un plus haut degré de perfection, en vue de notre Lut (qui était, ne l'oublions pas, la nette séparation entre les termes logiques et les termes d'une science ■particulière quelconque). ^ Hélas! aux difficultés dont j'ai donné quelques exemples, d'autres s'ajoutent, plus difficiles à surmonter. D'abord, il faudrait préciser ce que nous entendons par une phrase; quelle étendue allons-nous donner à chacune d'elles? On pourrait dire : nous considérons comme phrase complète et indivisible tout groupe de mots ayant toujours la même signification et auquel on ne pourrait ôter un seul mot sans lui faire perdre cette précieuse unicité de signification. C'est bien. Cependant, dites-moi, s'il vous plaît, quelle phrase complète pourrait-on tirer, par ex., de la proposition : A est équivalent à B1 le groupe de mots : est équivalent à? Mais non; car, si on veut l'éviter, il faut le remplacer différemment selon l'interprétation des lettres A et B; par ex., si A et B sont des « rectangles », par a la même aire que ; s'ils sont des « prismes », par a le même volume que ; s'ils sont des « locutions », par a la même signification que; et d'une autre manière encore s'ils sont des « fractions ». Ainsi, dans les deux premiers cas le groupe de mots est équivalent à appartiendrait à la Géométrie, dans le troisième à la Logique et dans le dernier à Y Arithmétique ; nous ne pouvons donc pas même l'appeler une phrase, au sens que nous avons essayé de préciser tout à l'heure. 7. Je ne crois pas nécessaire d'insister sur ces difficultés, pour vous convaincre que le projet de composer nos deux fameux — 10 — vocabulaires n'est pas si aisé à exécuter que d'abord on aurait pu le croire. Au contraire, il est parmi les plus ardus, exigeant une connaissance, scientifique aussi bien que littéraire, profonde et bien assurée, de la signification de chaque mot : signification qui à l'examen attentif d'un esprit exercé se révèle, pour la plupart des mots, si variable qu'il devient très difficile de la saisir et de la fixer, chaque fois, avec une précision irréprochable. Et une difficulté encore plus grande nous est présentée par l'analyse des mots qui expriment les concepts fondamentaux moyennant lesquels une certaine branche du savoir se sépare du grand tronc des connaissances communes; car, peu à peu, le langage ordinaire absorbe et défigure la partie élémentaire des terminologies spéciales. Or, celui — qui aura persévéré en celte diligente analyse du langage ordinaire jusqu'à l'accomplir, au moins par rapport à une science déterminée, et voudra en faire recueillir les fruits par ceux qui n'ont ni le temps ni la patience de parcourir, pas à pas, un chemin si pénible — reconnaîtra que ce même langage qu'il vient d'analyser est incapable d'exprimer avec précision les résultats de ses subtiles recherches. Idéographie des algébristes 8. Ces défauts du langage ordinaire furent remarqués et éliminés, pour la plupart, par les algébristes, qui, au moins dans les parties essentielles de leurs écrits, les remplacèrent, peu à peu, par une idéographie spéciale : c'est-à-dire par une écriture conventionnelle dans laquelle à chaque symbole on fait correspondre une idée, par une coordination immédiate de l'esprit. Les symboles, précisément parce qu'ils sont étrangers à tout langage naturel, sont universels et ne demandent aucune traduction; ils n'exigent pas même de lecture. Cependant, chacun peut les lire par les locutions les plus appropriées qu'il trouve dans sa langue; mais, au lieu d'inférer la signification d'un signe de sa lecture, c'est celle-ci qui doit être adaptée, le mieux possible, à la signification du symbole; et cette signification doitrésulter seulement de l'emploi qu'on peut faire de ce signe. — 11 — Ainsi, par ex., à chacun des symboles arithmétiques 1,2, ...+,X,... correspond, tout de suite, la même idée dans l'esprit d'un Italien et. d'un Anglais; et, pour qu'un Italien et un Anglais s'accordent à admettre que 5 + 3 = 8 aucun d'eux ne sent le besoin de savoir comment l'autre lit cette écriture. Et si, par ex., un Français lit « plus » le signe « -+- », c'est qu'entre les différentes significations du mot « plus » il y a aussi la signification universellement attribuée à ce symbole; maïs — tandis qu'on peut toujours remplacer le signe « -+- » par le mot « plus » — personne, si ce n'est un amateur de rébus, ne remplacerait le mot « plus » par le signe « -4- » en traduisant le vers de Dante : Tanto è amara che poco è più morte. 9. D'ailleurs — et le langage de la Géométrie nous en offre un exemple — on peut composer une idéographie avec des mots, en choisissant, pour exprimer chaque idée, la locution que l'étymologie et l'usage ont consacrée; mais en imposant ensuite et explicitement a cette locution de représenter seulement cette idée, comme si l'étymologie ne lui donnait aucune signification et l'usage n'en permît aucune autre. Cependant — tandis que l'idéographie algébrique, étant composée de signes, est arrivée, relativement, en peu de temps à un si haut degré de perfection et d'universalité — l'idéographie géométrique, étant composée de mots et entravée par les exigences philologiques et par une tradition millénaire, est restée nationale et souvent ambiguë dans une môme langue. De sorte que, lorsqu'on veut construire une idéographie nouvelle, il est préférable d'avoir recours à des signes, brefs et universels, au lieu de gaspiller son temps à analyser, débattre et sanctionner la signification des mots; c'est pourquoi l'idéographie logique a été composée de signes plutôt que de mots. 10. L'imprécision du langage ordinaire, dont je vous ai parlé, justifie les promoteurs et les partisans de l'idéographie symbolique — 12 — d'avoir recours à elle comme moyen d'analyse et d'expression scientifiques. Dois-je ajouter qu'ils n'ont jamais eu la risible prétention de l'employer à la place des langages naturels dans les usages communs de la vie et moins encore dans le domaine de l'Art? et qu'on se tromperait tout à fait en les croyant indifférents aux beautés merveilleuses des idiomes nationaux, dont la plasticité inépuisable conserve le cachet de tous les génies des grandes familles humaines? La Science et l'Art sont les deux grandes manifestations de notre esprit et sont également admirables et bienfaisants. Mais, comme ils ont une substance et un but différents, ils exigent des outils divers; et si la rigidité du langage scientifique ne peut convenir à la grâce de l'Art, la souplesse du langage artistique pourrait être nuisible à la rigueur de la Science. Le kêve de Leibniz et sa réalisation 11. La recherche et la construction d'une Idéographie logique a été le souci le plus assidu, je dirais presque le plus pénible, de Gottfried Wilhelm Leibniz pendant sa longue et glorieuse vie intellectuelle (164C-1716). Dès sa première jeunesse, il en sent le besoin et en a la première intuition; à vingt ans il entrevoit en elle « l'étoile polaire du raisonnement » et encore dans ses dernières lettres il insiste sur son ancien projet et regrette de ne pas l'avoir réalisé. Il écrivait : « Si j'avais été moins distrait, ou si j'étais plus jeune, ou assisté par des jeunes gens bien disposés, j'espérerais donner une manière de cette... langue ou écriture universelle, mais infiniment différente de toutes celles qu'on a projetées jusqu'ici, car les caractères... mêmes y dirigeraient la raison, et les erreurs... n'y seraient que des erreurs de calcul. Il serait très difficile de former ou d'inventer cette langue... mais très aisé de l'apprendre sans aucun dictionnaire ». Cependant même à lui, qui a été l'un des mathématiciens et des philosophes dont l'humanité peut s'honorer le plus, ne fut pas épargnée la douleur de la raillerie. Il écrivait dans sa veillesse : « J'en ai parlé à M. le marquis de l'Ilospital et à d'autres, mais ils n'y ont point donné plus d'attention que si je leur avais conté un songe. Il faudrait que je l'appuyasse par quelque usage palpable, mais pour — 13 — cet effet il faudrait fabriquer une partie au moins de ma langue ; ce qui n'est pas aisé, surtout dans l'état où je suis ». » 12. Mais, environ deux siècles après, ce rêve de l'un des inventeurs du calcul infinitésimal est devenu une réalité. A la formation d'une Idéographie logique ont contribué, après Leibniz, ses deux élèves Segner (1704-1777) et Lambert (1728-1777); son perfectionnement progressif est dû aux importantes recherches de plusieurs mathématiciens et philosophes, parmi lesquels je me contenterai de rappeler ici de Morgan (1806-1871), Boole (1815-1804) Schroder (1841-1902), Me Coll. Peirce, Macfarlane, Peano (dont je suis fier d'être disciple et collaborateur), et Russell2. 13. En 1889, M. Giuscppe Peano (professeur d'analyse infinitésimale à l'Université de Turin) parvint le premier à exposer une théorie complète — définitions, postulats, théorèmes et démonstrations — en remplaçant tout à fait le langage ordinaire par un petit nombre de symboles à signification précise et constante. Onze ans après, G7 mémoires avaient déjà paru en différents pays, dans lesquels 15 auteurs adoptaient YIdeographie logique telle qu'elle avait été complétée par M. Peano3. De nouvelles et nombreuses dissertations ont paru ensuite, dans plusieurs revues et dans les comptes rendus de Congrès et d'Académies d'Europe et d'Amérique; et dès 1892 plusieurs disciples ont 1. Opéra pkilosophica, Erdmann, Berolini, 1840, p. 701, 703. 2. Voici les œuvres principales des auteurs que je viens de nommer : feegner (lohann Andréas), Spécimen logicœ universalité)- demonstralse, 1740. Lambert (lohann Heinrich), Logische und pivlosophische Ahhandlungen, 1781. De Morgan (Augustus), Formai logic, 1847; — On Ihe syllogism, 1838. Boole (George), Mathematicalanalysis of Logic, 1847 ; - The laws ofthoaght, 1 Soi fcenroder (Ernst), Operalionskreis des Logikkalkuls, iHTi; —Algeùra der Logih, loaUj l&yij 1895. Me Coll(Hugh), The calculus of équivalent statements, 1S78. Peirce (Charles), Three papers on logic, 1S67; — On Ihe Alqebra of Logic, 1SS0. Macfarlane, Principles of Ihe Algebra of Logic, 1879. Russell (Bertrand), Sur la logique des relations, 1901 ; — The Principles of Malhematics, 1903. De M. Peano je devrais donner une bibliographie très étendue; j'en rappelle, pour le moment, ses Arithmetices principia, nova melhodo exposita, l'ouvrage dont je vais parler dans le texte. 3. On en trouve la liste dans la Revue de Mathématiques, t. Vil, p. 3, qui dirigée par M. Peano, contient plusieurs de ses recherches originales et de celles de ses collaborateurs. (Dans les citations, j'indiquerai cette revue par « RdM »). — 14 — collaboré et collaborent avec M. Peano à la publication du Formulaire mathématique, qui est déjà arrivé à sa oe édition. C'est un ouvrage qui s'accroît toujours et qui contient déjà plusieurs milliers de propositions qui vont de la Logique à l'Arithmétique, au Calcul infinitésimal et aux théories plus récentes des Qua-teruions et de la Géométrie différentielle; elle est encore enrichie par de nombreuses notices historiques et bibliographiques sur la Logique et les Mathématiques, qui méritent toute confiance par leur exactitude soigneusement contrôlée, et dont la plupart sont dues à M. Giovanni Vacca. Après M. Peano, le maître reconnu des études de Logique mathématique en Italie, je dois rappeler deux savants morts depuis peu : Albino Nagy (1866-1901), un précurseur de la dernière phase ', et Giovanni Vailati (1863-1909), un savant génial, dont on vient de réunir en un gros volume les écrits qu'il avait répandus en de nombreuses revues2. Et parmi les vivants : M. C. Burali-Forti, producteur et vulgarisateur3, et M. Mario Pieri dont les recherches rigoureuses sur les principes de la Géométrie, élémentaire et projective, 'ont le cachet des nouvelles études de logiques. RÉFUTATION D'UN SOPHISME ET D'UNE OBJECTION SCEPTIQUE 1-4. II y a douze ans, un professeur de Philosophie théorique déclara naïvement ne pas vouloir s'occuper de Logique mathématique, parce que (déclarait-il) « ou elle mène à des résultats différents de ceux de la Logique traditionnelle et alors elle est fausse; ou elle conduit aux mêmes résultats et alors elle est inutile ». Mais au lieu d'un dilemme spirituel et inattaquable, ainsi qu'il le croyait, il s'agit d'un sophisme ingénu; car la Logique mathématique — outre qu'elle a précisé les rapports mutuels entre les concepts qui appartenaient à la Logique traditionnelle — en a révélé plusieurs de plus intimes ou de plus complexes, qu'on n'avait pas encore soupçonnés et qu'on aurait difficilement découverts par une autre méthode de recherches. Cela a été désormais reconnu par plusieurs savants qui d'abord en avaient douté. Par exemple, tandis 1. Dont j'ai donné une notice biographique et bibliographique dans la Rivista filosofica, Paria, 1901, fasc. III. i. Scrtlti di G. Vailati, Firenze-Seeber. Leipzig, Barth, 1911. 3. Dont ici je rappelle seulement : Lor/ica maternatica, Milano, Hoepli, 1S94. — 15 — qu'en 1900 M. L. Couturat, tout en admettant que « l'école italienne avait atteint des résultats merveilleux de rigueur et de subtilité », demeurait incertain « si l'on devait les attribuer à, Futilité du symbolisme logique ou à la pénétration des savants qui le manient1 », en 1903 il affirma sans hésitation « que c'est l'instrument indispensable pour rejoindre la pureté logique des concepts et la rigueur déduc-tive des raisonnements2 ». On peut ajouter que cet instrument ne cesserait pas d'être précieux, même s'il ne devait pas être jugé nécessaire par des esprits souverains. Ainsi, le fait que Diophante (325-409) a résolu des systèmes d'équations lorsque les artifices de l'Algèbre étaient encore ignorés3, n'ôte rien au prix inestimable de ces procédés : puisque, moyennant leur aide, des intelligences médiocres peuvent résoudre aujourd'hui des questions que Diophante, avec les moyens dont la science disposait alors, n'aurait pas pu résoudre, ni même soupçonner. De même, les chemins de fer et les bateaux à vapeur permettent aujourd'hui à qui que ce soit de franchir aisément des distances, qu'autrefois seulement peu de gens très audacieux osaient braver. 15. Un de mes amis se plaisait à lancer contre toute espèce de Logique une objection qu'il estimait décisive : « elle ne guérit ni les idiots ni les fous, et pour les sages elle ne sert à rien ». Mais il reconnut son erreur, lorsque je lui donnai l'exemple d'un rustre, qui entendant parler du microscope, demandait s'il guérissait les aveugles; et, ayant appris que non, ne comprenaitpas quel avantage pouvaient en tirer ceux qui ont les yeux sains. En effet : comme le Microscope est un instrument et la Bactériologie est une science, et ni l'un ni l'autre ne nous apprennent à voir, ainsi l'Idéographie logique est un instrument et la Logique mathématique est une science, et ni l'une ni l'autre ne nous apprennent à raisonner. Mais, comme le Microscope permet de voir les bacilles qui par leur petitesse échappent à la vue ordinaire, de même l'Idéographie logique nous permet de représenter des concepts qui par leur subtilité échappent à toute détermination précise avec le langage ordinaire. 1. Les Mathématiques au Congrès dePhilosophie : L'enseignement mathématique, Paris, Carré et Naud, 15 nov. 1900, p. 401. 2. Les Principes des Mathématiques. Paris, Alcan, 1905, p. v, vi (Avant-Propos). 3. A:oçàvToy 'A).ei;xvôpéws 'Api6[/.r,Tixà>v. — 16 — Ainsi, pour ceux qui apprennent à s'en servir, l'Idéographie logique n'est pas, comme le langage delà Logique scholastique, une robe somptueuse et encombrante dont le professeur se dégage aussitôt sa leçon achevée; mais la compagne secrète et fidèle de son travail, à laquelle il a recours sans cesse lorsqu'il veut sonder la rigueur de ses raisonnements ou de ceux d'autrui. Certainement, le Microscope et l'Idéographie ne créent pas des bacilles et des concepts; mais ils les révèlent à l'œil et à l'esprit, de manière à en former l'objet des études du Bactériologue et du Logicien. Et même si ceux-ci en vulgarisent la connaissance, en les reproduisant d'une manière approximative dans des dessins ou des phrases compréhensibles par n'importe qui, ceux qui voudront pénétrer l'essence intime de ces études et les faire progresser devront avoir recours à l'emploi direct de ces instruments. Le vocabulaire logique réduit a une ligne 16. Il ne faut pas croire que l'Idéographie logique soit le résultat de conventions absolument arbitraires; car — si le choix des signes moyennant lesquels on représente les idées n'est subordonné qu'à des exigences de commodité et de clarté — la liberté dans le choix des idées qu'il convient de représenter par des signes est très restreinte. Comme la Chimie, en exploitant avec habileté les réactions mutuelles entre les corps, arrive à décomposer plusieurs d'entre eux dans leurs éléments les plus simples et, outre qu'elle peut reproduire ceux-là, parvient ensuite à associer ceux-ci en de nouvelles synthèses plus complexes; ainsi une diligente analyse des rapports mutuels entre les idées conduit à découvrir celles qui sont, d'une certaine manière, les éléments constitutifs de toutes les autres, et dont les groupes, outre qu'ils reproduisent les idées qu'on vient d'analyser, en suscitent dans la pensée d'autres complètement nouvelles. En effet, les symboles logiques — dont je vous expliquerai la signification, l'emploi et les propriétés — ne sont qu'au nombre de seize, et ils suffisent amplement pour exposer une théorie déductive quelconque, en renonçant tout à fait au langage ordinaire; pourvu, naturellement, que la théorie dont il s'agit ait son idéographie complète. — 17 — 17. Par exemple, pour supprimer l'emploi des mots dans les énoncez et dans les démonstrations des 97 propositions qui composent ma théorie des nombres entiers relatifs1, je n'ai recours qu'à 9 symboles logiques et (voyez étrange coïncidence) à autant de symboles algébriques ! Voici le vocabulaire logique que j'ai employé dans ce mémoire, pour y remplacer tout à fait le langage ordinaire : , £ GlS 3 =g n î | Une ligne suffit à le contenir, maisj'aurais pu le restreindre davantage, ainsi que je vous démontrerai dans la suite [127]. Bien que ces symboles doivent paraître mystérieux à ceux d'entre vous qui ne les avaient jamais vus, leur nombre est si petit que tout le monde doit se sentir bien rassuré. En effet j'ose affirmer que l'Idéographie logique est incomparablement plus facile que tout autre langage connu; et vous en avez la preuve dans le fait qu'en deux leçons, pas plus, je me propose de faire pénétrer votre esprit dans l'essence intime de ce langage sans pareil. Est-ce que si peu de temps suffirait pour apprendre à lire seulement, une langue étrangère, même une de celles qui ont avec le français une parfaite communauté d'origine, tel que l'italien ou l'espagnol? Et il faut ajouter que, tandis que pour les langages naturels le « légère » est si loin de 1' « intelligere » que plusieurs années d'étude systématique ne suffisent pas à soustraire les meilleurs élèves de nos écoles à la tyrannie du dictionnaire et de la grammaire, pour l'Idéographie logique, ainsi que vous pourrez l'expérimenter, lire et comprendre c'est la même chose. La sténographie et les langues artificielles 18. Tout le monde sait que la sténographie ne fait qu'abréger la représentation graphique des différents langages naturels, sans éliminer leurs diversités phoniques; ainsi, par exemple, un Anglais et i. Numeri interirelativi. Revue de Mathématiques publiée parG. Peatio, Turin, t. VII, n. 2, a. 1901. — C'est la traduction symbolique de la théorie que j'avais présentée en 1900 à Paris aux Congrès de Philosophie {Essai d'une théorie algébrique des nombres entiers précédée d'une introduction logique à une théorie déd'uc-tive quelconque) et des Mathématiciens (Un nouveau système de postulats pour l'algèbre). PADOA. 2 — 18 — un Allemand, qui emploient les mêmes signes sténographiques, sans que l'un connaisse la langue de l'autre, se trouvent dans l'impossibilité de déchiffrer réciproquement leurs écrits. L'universalité de l'idéographie logique ne permet donc pas de la considérer comme une sténographie, bien qu'elle pût mériter ce nom, au sens étymologique du mot, par sa concision merveilleuse; qui, aux avantages graphiques et éditoriels bien appréciables, enjoint un autre plus important que présente aussi la commune idéographie algébrique. C'est-à-dire : tandis qu'une écriture prolixe retarde et entrave le travail intellectuel, en faisant paraître compliqué ce qui est simple et empêchant presque d'exprimer ce qui est vraiment compliqué, il arrive le contraire en employant une écriture concise (pourvu qu'elle ne soit pas ambiguë). Car, en donnant une forme simple et compacte aux concepts les plus ardus et les plus complexes, elle excite la pensée à franchir ses bornes habituelles et l'empêche de s'égarer ou de s'exténuer. Demandez à un mathématicien si, par exemple, l'étendue énorme de l'Analyse infiniLésimale et de ses applications à la Géométrie et à la Mécanique aurait été possible sans l'aide précieuse d'une idéographie appropriée! 19. D'autre part, à cause de son universalité, on pourrait être tenté d'associer l'Idéographie logique aux langues internationales artificielles, dont quelques-unes ont déjà atteint un degré de perfection qui permet de les employer, avec une facilité suffisante et sans crainte d'équivoques, même dans une dissertation scientifique; voir par exemple les Discussiones publiées par YAcademia pro interlingua, dont le Président est justement M. Peano qui, moyennant son Latino sine flcxione, a mis à exécution un autre projet de Leibniz. Mais, en laissant de côté toute opinion à cet égard, les langues internationales artificielles ne sont que des instruments d'expression, comme les langages naturels, tandis que l'Idéographie logique, seule, est un instrument d'analyse de la pensée. En effet, c'est grâce à elle seulement que l'on peut aujourd'hui séparer nettement, dans une science quelconque, les termes logiques et les termes spéciaux qui sont propres à cette science. Car le mérite essentiel de l'Idéographie logique est celui d'établir une correspondance parfaite et immédiate entre symboles et idées, de manière à éliminer la possibilité des discussions interminables qui naissent de la signification ambiguë de — 19 — quelques mots et qui n'aboutissent à rien, ne détournant personne de son opinion. Logique mathématique? 20. J'ai déjà dit que l'Idéographie logique est un instrument etque la Logique mathématique est une science [15]; maintenant je précise ma pensée en disant que la Logique mathématique est la Science dont rIdéographie logique est le Langage. En effet — comme toute Science, considérée dans son expression verbale, n'est autre chose que l'ensemble de toutes les relations connues entre les symboles de sa terminologie spéciale — de même la Logique mathématique est l'ensemble des relations connues entre les symboles logiques. En d'autres termes, VIdéographie logique et la Logique mathématique fournissent respectivement le vocabulaire et \txsyntaxe qui sont communs à toutes les Sciences déductives. 21. Mais la Logique mathématique ne diffère pas seulement par l'écriture de la Logique traditionnelle : car, en vertu des actions réciproques entre pensée et langage, dont j'ai touché un mot et qui en lient les progrès d'un lien indissoluble, le contenu de cette science s'est perfectionné avec sa structure. Pour la distinguer de la Logique traditionnelle, M. Peano l'appela Logique mathématique, parce qu'elle forme l'Introduction naturelle et nécessaire aux Mathématiques et leur est comparable par la précision du langage et la rigueur des procédés. Cependant, cette dénomination a donné naissance à une équivoque funeste qui en a retardé la diffusion. Presque tous les philosophes de profession — qui, par le caractère plus littéraire que scientifique de leur préparation intellectuelle, ont une forte répugnance pour les formules — se sont apaisés par le renoncement à élargir l'enceinte de leurs connaissances, en croyant peut-être que cette Logique mathématique n'était qu'une partie de la Logique qu'ils avaient apprise et qu'ils enseignent. Ainsi, croyant peut-être que cette partie avait été développée minutieusement pour les buts immédiats des Mathématiques, les philosophes lettrés ont cru pouvoir se soustraire à l'étude pénible de détails techniques qu'ils estimaient insignifiants à leur point de vue. — 20 — Eh bien! je crois que l'œuvre déjà accomplie par M. Peano et par ses collaborateurs leur donne le droit d'affirmer que la Logique mathématique est l'extension naturelle et perfectionnée de cette analyse de la pensée qu'Aristote (-384, -322) conçut, le premier, comme une science en soi l et à laquelle, jusqu'à Leibniz, il fut ajouté bien peu, si l'on excepte quelques commentaires et quelques divagations non exempts d'erreurs. Par suite il me semble que le temps est venu pour l'appeler Logique déductive tout court : car, entre la logique traditionnelle et la logique mathématique, c'est bien à celle-ci, qui contient l'autre, que l'on doit la dénomination la plus générale! Si grâce à ce Cours je parviens à justifier cette affirmation audacieuse, j'espère qu'on trouvera raisonnable que j'aie tenté la diffusion de ces études en dehors de l'enceinte, nécessairement très restreinte, des spécialistes. 22. D'abord, dans mes deux prochaines leçonsj'expliquerai Y Idéographie logique, en mettant tout le monde à même de lire sans difficulté le Formulario malhematico et les dissertations originales des auteurs que je viens de nommer. Mais, — comme la simple connaissance de la signification des signes employés dans l'Arithmétique et dans l'Algèbre ne permet pas d'entrevoir l'ampleur de ces Sciences et la variété de leurs applications — de même la seule connaissance de l'Idéographie ne permet pas de deviner à quelle étendue est déjà parvenue « la Logique déductive dans sa dernière phase de développement ». 11 s'ensuit qu'en deux autres leçons sur ce sujet, je ne pourrai en donner qu'un essai: assez vaste toutefois pour vous donner une idée exacte des résultats les plus importants que l'on a obtenus, et aussi des recherches qu'on pourrait encore entreprendre avec profit. Mon Cours se terminera par un essai de Méthodologie2, qui relèvera toute la valeur et toute l'importance des études d'Idéographie et de Logique, en montrant quelle aide précieuse (je dirai même indispensable) elles donnent autant à la construction qu'à la critique d'une théorie déductive quelconque. Ce n'est pas que j'espère vous insinuer l'optimisme sympathique et touchant de Leibniz qui, prophétisant le succès triomphal de ces l.'AvaJ'jiiyà Tipo'-repa. 2. Voir la note à la p. 5. — 21 — recherches, affirmait : « J'ose dire que ceci est le dernier effort de l'esprit humain et, quand ce projet sera exécuté, il ne tiendra qu'aux hommes d'être heureux, puisqu'ils auront un instrument qui ne servira pas moins à exalter la raison que le télescope ne sert à perfectionner la vue ». Bien que, depuis une quinzaine d'années, je me sois adonné à ces études, moi-môme, je n'ai pas en elles une confiance si hyperbolique ; mais j'aime toujours à rappeler la candeur de ce Grand qui, étant absorbé dans ses investigations scientifiques et philosophiques, oubliait que la plupart des hommes ont cherché et continueront à chercher le bonheur dans la conquête fiévreuse du plaisir, de l'argent et des honneurs. Toutefois il convient d'éviter un scepticisme excessif; car, toujours et partout, il y a eu une élite — aujourd'hui moins restreinte que par le passé — laquelle s'est plu et se plaît à tout ce qui l'élève au-dessus des vagues troubles des passions, dans l'immensité imperturbable de la connaissance, dont les horizons deviennent plus vastes à mesure que les ailes de la pensée deviennent plus puissantes et plus rapides. IDÉOGRAPHIE LOGIQUE Égalités 23. Nous remplacerons la phrase « est la même chose que » par le signe « = ». De Viète (1540-1603) à Leibniz, on donna cette signification au signe oc, qui était une déformation de la lettre œ initiale de œqualis; Recorde (1500-1558) lui donna la forme actuelle ', probablement empruntée aux manuscrits du moyen âge dans lesquels il signifie « est », qui fut adoptée et répandue par Newton (1642-1827). C'est le seul symbole de l'idéographie logigue dont l'usage soit devenu universel; mais seulement entre deux « nombres », comme en 9—2=4+3 où tous les autres signes appartiennent à l'idéographie arithmétique. D'habitude on le lit « est égal à » ; c'est pourquoi on appelle égalité toute proposition dont il est le symbole principal. D'ordinaire, entre deux « figures », la phrase « est la même chose 1. The Whetstone of witle or the seconde parte of aritmetike, 155". __ 22 — que » est remplacée par l'autre « coïncide avec », tandis qu'à la phrase « est égal à » on donne une signification géométrique (à savoir « coïncide ou peut être portée à coïncider avec ») qu'il vaudrait mieux exprimer d'une autre manière (par ex. « est superposable à »). En effet, le double emploi de la phrase « est égal à » en Logique et en Géométrie, avec des significations et des propriétés différentes, a donné naissance à des confusions bien étranges, que j'ai analysées dans un de mes mémoires » et qui relèvent l'importance de la déclaration suivante : Nous emploierons le symbole « = » dans toutes les branches de la Science, mais toujours pour signifier « est la même chose que », quoique sa lecture puisse varier dans la même langue; par ex., « sera lu » pour : « 5 = cinq », « représente » pour : « t. = le rapport constant entre la longueur d'une circonférence et son diamètre », « vaut » pour : « n = 3,14 159... », « est » pour : « Rome = la capitale de l'Italie », « signifie » pour : « polygone régulier = polygone équilatéral et équiangle», « seulement si » pour : «  demain est mardi = aujourd'hui c'est lundi», etc. Appartenances 24. Les concepts d'individu et de classe (ou groupe, catégorie, collection, ensemble, genre, type, famille, variété, etc.) sont intimement liés entre eux dans notre esprit, qui sans cesse a recours à ces deux concepts ; bien que le plus souvent d'une manière implicite, c'est-k-dire moyennant d'autres concepts qui, au point de vue de la connaissance, sont liés aux deux premiers d'une manière indissoluble, mais qu'au point de vue logique on peut isoler. Un de ces concepts (des autres je m'occuperai ensuite) est le lien qui lie un individu quelconque à une classe à laquelle il appartient. M. Peano représenta ce concept par le symbole « e », lettre initiale du mol « £<jt! »; en l'adoptant, nous pouvons écrire, par ex., Jupiter e planète 1. Logica malematica e matematica elementare, Livorno, 1901. — 23 — Toute proposition, comme celle-ci, dans laquelle le signe « s » est le symbole principal, sera appelée une « appartenance »; car, quelle qu'en soit la lecture, ce symbole exprimera toujours le fait qu'un certain individu appartient à une certaine classe. On pourrait le lire justement « appartient à la classe » ou « est un individu de la classe » ; mais la lecture « est un », outre qu'elle est plus brève et plus usitée, présente l'avantage d'éviter l'emploi des mots individu et classe; par suite nous lirons : Jupiter est une planète '. 25. L'occasion est bonne pour donner, une fois pour toutes, l'avertissement général suivant : en écrivant une proposition symbolique, on doit se passer complètement des flexions, c'est-à-dire des varia-lions dans la forme grammaticale d'un même mot, dues au genre, au nombre, à la personne, au temps et au mode, etc.; mais, en la lisant, on peut respecter ces flexions et il est bon de le Taire. Ainsi, par exemple, j'écris : Genève s ville mais je lis Genève est une ville ; j'écris Pierre e apôtre ou Pierre e apôtres et je lis la première fois Pierre fut un apôtre et la seconde Pierre fut un des apôtres. Mais, comme la lecture « est un » est la plus simple, nous préférerons écrire le nom de la classe au singulier. On peut ajouter que la distinction entre individu et classe, que je n'ai pas énoncée explicitement, mais qui résulte assez clairement des exemples que je viens de vous donner, ne correspond pas exactement à celle de la grammaire entre nom propre et nom commun. En effet par exemple, bien que pour les grammairiens « cinq » ne soit pas un nom propre, on a que cinq e nombre 1. Les appartenances pourront aussi être appelées prédications; car, dans chaque appartenance, l'individu est le sujet dont la classe est le prédicat. — 24 — Extension ou compréhension des classes 2G. La logique traditionnelle envisage toute classe h deux points de vue différents, qu'on appelle de Y extension et de la compréhension ; c'est-à-dire qu'elle considère une classe comme l'ensemble des individus qui la composent ou bien comme l'ensemble des propriétés qui la caractérisent. Dans l'usage commun, on peut remarquer que les deux points de vue alternent sans règles bien précises; et certaines locutions, qu'on dirait équivalentes, peuvent servir à exprimer tantôt l'intention extensive et tantôt l'intention compréhensive. 11 y a seulement cette nuance, par exemple, entre les phrases arithmétiques « multiple de » et « divisible par ». En effet, lorsqu'on dit, par exemple : 15 est un multiple de 3 on affirme que le nombre 15 se trouve parmi les individus qui sont des multiples de 3, tandis qu'en disant : 15 est divisible par 3 on énonce que le nombre 15 a la propriété d'être divisible par 3. D'après cet exemple on pourrait dire que, selon qu'on veut se placer à l'un ou l'autre de ces deux points de vue, le langage ordinaire exprime les appartenances par l'une ou l'autre des locutions « est un » et « est ». Cette distinction est bien marquée lorsque la classe est désignée par un seul mot, selon qu'il est un nom commun ou un adjectif; par exemple : le narcisse est une fleur et le narcisse est blanc mais, lorsqu'on résume ces deux appartenances en une seule, en disant : le narcisse est une fleur blanche c'est la forme extensive qui triomphe de Yintention compréhensive. 27. Leibniz a préféré envisager les classes seulement au point de vue de l'extension ; en effet, il dit qu'une classe est égale à une autre — 2o — classe pour dire que les mêmes individus appartiennent à l'une et à l'autre. Ses deux disciples que j'ai déjà nommés, Segner et Lambert, envisagèrent les classes d'un seul point de vue, mais différent, et précisément : Segner de celui de Y extension et Lambert de celui de la compréhension. Par suite, en donnant une signification logique aux signes arithmétiques « > » et « < » ainsi, qu'ils faisaient — tandis que Segner aurait écrit, par ex. : animal > vertébré pour dire que la classe des animaux comprend tous les individus de la classe des vertébrés — Lambert aurait écrit: animal < vertébré pour dire que toutes les propriétés des animaux sont comprises parmi celles des vertébrés. M. Peano, lui aussi, reconnut qu'il était suffisant et prudent d'envisager toujours les classes à un seul point de vue; et, comme l'avaient fait Leibniz et Segner, il choisit celui de Yextension. Par suite, son symbole « Gis » ne signifie pas seulement «classe», mais « classe envisagée au point de vue de l'extension » ; mais, puisque cette déclaration peut suffire, une fois pour toutes, on pourra le lire « classe » tout simplement, sans crainte d'équivoques. Principe de permanence 28. Le fait qu'en différents chapitres d'un même livre on reconnaît la nécessité de déclarer de nouveau la signification d'un certain signe, semble nier l'unicité de sa signification. La contradiction est apparente, parce qu'un même symbole peut avoir des rôles différents, dans une même science, pourvu que ces rôles soient nettement distingués entre eux et que les propriétés de ce symbole dans tous ses rôles restent toujours les mêmes. Ainsi, par ex., en arithmétique, toutes les fois qu'on étend le concept de nombre (en passant des nombres entiers aux nombres rationnels et de ceux-ci aux nombres réels et ensuite aux nombres complexes, ou des nombres absolus aux nombres relatifs), on recommence à définir chacun des signes « -+- , — ,...>,<... », — 26 — qui sont employés aussi en géométrie entre des longueurs, des aires, des volumes, des angles, etc. La signification d'un quelconque de ces signes n'est pas toujours la même dans ses rôles différents, au sens qu'on doit l'exprimer différemment pour chaque rôle ; mais elle est toujours la même au point de vue de l'ensemble des propriétés de ce symbole dans tous ses rôles différents. C'est pourquoi j'ai déclaré que la signification d'un symbole résulte seulement de l'emploi qu'on peut faire de ce signe [8], savoir de Xensemble de ses propriétés*. On appelle principe de permanence cette immutabilité de Vensemble des propriétés de chaque symbole dans tous ses rôles différents. Mais au lieu d'avoir une origine presque mystérieuse, ce principe est le produit de la collaboration de l'instinct de l'économie intellectuelle et du désir de la précision; c'est-à-dire que, pour employer une phrase à la mode, l'origine de ce principe est essentiellement pray-maliste. En effet, l'instinct de l'économie nous pousse d'un côté à employer le plus possible les mêmes symboles — car de cette façon, comme dans les exemples que je viens de donner, si l'on excepte les détails dans l'exécution des opérations et peu de règles spéciales, chaque nouveau chapitre de l'arithmétique, bien que distinct des précédents pour le contenu, les renferme en soi au point de vue de l'apparence des formules; ce qui donne un grand soulagement à la mémoire2. Mais d'un autre côté le désir de la précision nous impose, après avoir donné un premier rôle à un symbole, de ne pas lui en donner un deuxième avant d'avoir vérifié que ses propriétés formelles ne changeront pas. 29. Parfois, il peut arriver qu'on ait violé involontairement le principe de permanence; ce cas se présente lorsqu'on découvre qu'un 1. On ne pourrait pas considérer les deux significations de la phrase « est égal à », en Logique et en Géométrie [23], comme deux rôles d'un même symbole; car, si dans le second rôle ce symbole serait propre aux « figures », même dans le premier rôle il se rapporterait aussi aux figures, envisagées comme « ensembles de points », savoir comme « classes ». Par suite, on conçoit aisément l'impossibilité de représenter d'une même manière deux relations dont l'une (l'égalité géométrique) peut subsister entre deux figures même si l'autre (l'égalité logique) ne subsiste pas; ainsi, par ex., les deux côtés d'un triangle isoscèle sont égaux au sens géométrique, sans être égaux au sens logique. 2. Dans mon lntroduzione alla teoria délie frazioni (leçon couronnée par le Congrès de « Mathesis » — Padova, septembre 1909) j'ai montré à quels artifices cachés on a recours parfois pour atteindre ce but précieux. — 27 — symbole a une certaine propriété dans un certain rôle et pas dans les autres; mais, puisque jusqu'à cet instant on ne s'était jamais occupé de cette propriété, la violation dont je parle ne peut avoir apporté aucune mauvaise conséquence (si l'on excepte, peut-être, celle d'avoir retardé la découverte de cette propriété). Mais, dès que l'infraction involontaire est connue, il faut l'éliminer : ce qu'on peut faire ou en délivrant le vieux symbole du rôle qui ferait exception, pour le confier à un nouveau symbole, ou en tâchant de déguiser de quelque façon la violation du principe de permanence. Évidemment la première méthode est la bonne; cependant on a recours à la seconde, toutes les fois que l'inconvénient à éviter est petit par rapport aux avantages à conserver1. Donc, en pratique et jusqu'à un certain point, l'instinct de l'économie triomphe sur le désir de la précision; et par suite, en plusieurs cas, le principe de permanence se réduit à une illusion qu'on préfère ne pas abandonner. Toutefois, s'il peut convenir de tolérer des petites infractions au principe de permanence lorsqu'il s'agit de symboles universellement adoptés, nous nous proposons de le respecter sans restriction. 302. Leibniz et ses disciples, ayant découvert des analogies frappantes entre certains concepts logiques et certains concepts arithmétiques, représentèrent les premiers par les signes qui représentaient les seconds. En effet, nous avons vu de quelle manière Segner et Lambert employaient les signes « > » et « < » [27] et nous verrons un peu plus loin [39] quelle signification logique ils donnaient aux signes arithmétiques « -f- » et « X ». Un demi-siècle après, Boole — qui ne semble pas avoir eu connaissance des écrits de ses prédécesseurs allemands — retrouva la plupart des résultats qu'ils avaient déjà obtenus, et employa, lui aussi, les signes arithmétiques comme symboles logiques. Les concepts logiques et arithmétiques que ces auteurs représentaient d'une même façon ont en effet plusieurs propriétés communes, 1. L'idéographie arithmétique ordinaire nous offrirait maints exemples de pareils inconvénients très bien déguisés; mais ce n'est pas ici le litu de les démasquer. 2. Les notices et les considérations contenues dans ce paragraphe sont tirées du mémoire de G. Vailati, La Logique mathématique et sa nouvelle phase de développement dans les écrits de M.J. Peano (xxxix du volume complet [13] ou Revue de Métaph. et de Morale, janvier 1S99), auquel j'ai emprunté aussi l'idée du titre de ce Cours. — 28 — que je vous signalerai; mais ils ont aussi des propriétés différentes, ce qui suffirait à nous défendre de les représenter par les mêmes signes. En 1888, M. Peano, dans la Préface à son traité de Calcolo geo-metrico seconda V Ausdehnungslehre di Grassmann, publia un résumé des règles essentielles du calcul logique, dans le but de préparer le lecteur à l'usage qu'il allait en faire dans les démonstrations géométriques. C'était la première fois que la Logique symbolique était présentée comme un instrument forgé en vue de son application immédiate à une branche déterminée des recherches scientifiques. Tout en se conformant à la méthode de Boole, M. Peano se trouva ainsi amené, par les exigences mêmes des applications qu'il se proposait d'en faire, à y introduire des modifications et des additions, contenant les germes des perfectionnements ultérieurs qui lui permirent, l'année suivante, d'écrire ses Arilhmetices principia [13] en se passant complètement du langage ordinaire. On comprend aisément que, dans une même proposition, il ne pouvait pas donner aux mêmes signes un rôle arithmétique et un rôle logique; c'est pourquoi il représenta les concepts logiques par des signes spéciaux. Inclusions 3t. Nous allons délivrer, d'abord, les signes « > » et « < » du rôle logique que les disciples de Leibniz leur avaient confié. Pour nous, qui considérons les Cls au point de vue de Yexiension [27], la classe des animaux contient celle des vertébrés en peu de mots animal contient vertébré. En remplaçant le mot « contient » par sa lettre initiale et en la déformant un petit peu, pour obtenir un signe, plus marqué, nous pouvons écrire : animal ci vertébré ou, en invertissant l'écriture, vertébré => animal où le symbole « => » peut être lu « est contenu dans ». — 29 — Mais, selon le langage courant, celte lecture du symbole « =3 •> ferait penser que la première Cls doit être plus restreinte que la seconde, c'est-à-dire que la seconde renferme au moins un individu qui n'appartient pas à la première; tandis qu'il est préférable (et l'on a préféré) d'établir le droit d'employer le signe « =j » entre deux Cls, dès qu'on sait que tout individu appartenant à la première appartient aussi à la seconde, sans se soucier de savoir si dans celle-ci il y a ou non d'autres individus. C'est pourquoi, il vaut mieux de lire notre proposition ainsi : tout vertébré est un animal ou bien les vertébrés sont des animaux. On voit, par cet exemple, que la lecture plus convenable d'un symbole peut se composer de mots qui ne se suivent pas immédiatement. 32. Comme en arithmétique on pourrait supprimer un quelconque des deux signes «  >  » et «  < » (car, par ex., il est indifférent d'écrire : « 8 > 5 » ou bien « 5 < 8 »), ainsi l'on peut supprimer un quelconque des deux symboles « c= » et « = » ; en effet, ayant donné la préférence au symbole « => » par suite d'une remarque très intéressante dont je vous parlerai [53], le symbole « c; » a été supprimé. Nous appellerons donc « inclusion >> toute proposition dont le symbole principal est « => » placé entre deux Cls (tandis que, dans les appartenances [24] le symbole « e » est placé entre un individu et une Cls). La liberté, que nous avons voulu nous réserver d'employer le symbole « => » entre une Cls et elle-même [31], aurail suffi à nous défendre d'avoir recours à l'un ou à l'autre des signes « > » ou « < » comme symbole d'inclusion; car jamais, en arithmétique, il n'est permis d'employer un de ces signes entre un nombre et lui-même. 33. Il arrive souvent, aussi bien dans la science que dans la vie, que les obstacles, qui nous avaient empêché d'atteindre des résultats très importants ou un but vivement désiré, nous paraissent faciles à surmonter, dès qu'un autre les a dépassés. 11 est donc à propos — 30 — de rappeler ici que M. SchrOder — qui s'était mis à l'œuvre avant M. Peano et qui en 1877 avait déjà publié son Operationskreis des Lngikkalkuls — n'a pas réussi à nous laisser une idéographie logique satisfaisante; et cela, principalement, parce qu'il n'a pas distingué les appartenances [2-4] des inclusions [32] et par suite il les représenta par un seul symbole. Et même ensuite — dans ses trois gros et lourds volumes sur VAlgebrader Logik, dont le premier suivait déjà les Arithmetices principia de M. Peano — il ne voulut pas reconnaître la nécessité de cette distinction. Mais je crois que deux exemples suffiront à vous éclaircir la différente signification des deux symboles « e » et « => ». que d'ailleurs les logiciens scholastiques distinguaient en « sensus composlti » et « sen-sus divisi », toutefois sans donner à cette distinction l'importance que justement lui donna M. Peano. Voici les deux exemples : d'un côté vous avez les inclusions genevois =a suisse suisse => européen desquelles on tire genevois => européen et d'un autre côté vous avez les appartenances Pierre s apôtres apôtres e douzaine (qu'on peut lire « Pierre fut un des apôtres » et « les apôtres étaient une douzaine ») desquelles on ne peut pas tirer Pierre e douzaine1 i. On pourrait objecter qu'on a un peu varié la manière d'interpréter le mot « apôtres ». Mais c'est bien ainsi qu'il arrivera forcément toutes les fois qu'on voudra lier trois termes par deux « e », car le deuxième terme doit être considéré comme Cls par rapport au premier et comme individu par rapport au troisième, qui par suite ne peut pas être une Gis simple, mais une clause de classes; c'est pourquoi le premier terme n'est jamais un individu du troisième terme. Voici deux autres appartenances : Venise e ville ville s (nom commun) desquelles on ne peut pas tirer Venise e (nom commun) En voici deux autres : 7 e (nombre premier) (nombre premier) e (ensemble infini) qui ne permettent pas de conclure 7 s (ensemble infini) — 31 — _ 34. Permettez-moi d'insister sur la distinction entre appartenance [24] et inclusion [32], en me servant d'une comparaison En représentant chaque Cls par une boite et chaque individu par une allumette, chacune des allumettes renfermées dans une boite sera hee à celle-ci par une appartenance ; tandis que - si dans une boîte contenant ou non des allumettes éparses, se trouvait une petite boîte' qui à son tour renfermât ou non d'autres allumettes - cette secondé boîte se trouverait liée à la première par une inclusion. D'ailleurs, cette comparaison est bien proche de la représentation géométrique à laquelle ont eu recours Leibniz lui-même, dans ses manuscrits, et le grand mathématicien Euler (1707-1783) dans ses Lettres à une princesse d'Allemagne. En effet, représentant une Cls par une ligne simplement fermée Fier. 1. (par ex., une circonférence) et ses individus par des points intérieurs à cette ligne — Y appartenance « xsa » et l'inclusion « a => b » sont représentées respectivement par les figures bien distinctes 1 et 21. Quelques classes arithmétiques 35. Dans l'idéographie arithmétique ordinaire il n'y avait aucun signe pour représenter les différentes Cls de nombres. Pour combler cette lacune et rendre possible d'écrire les propositions de l'Arithmétique en se passant du langage ordinaire, on a introduit dans le Formulaire, comme symboles, des abréviations de mots ou de phrases d'usage commun ; ainsi, par ex. : N= nombre entier absolu (que pour le moment, on peut lire « nombre » tout court) ÏSTp = nombre premier 1. Dans les figures on marque seulement les points et les circonférences dont la position réciproque nous intéresse; mais, lorsqu'on ne déclare pas autrement, on peut imaginer d'autres points et d'autres circonférences, placées d'une manière arbitraire par rapport aux points et aux circonférences qu'on trouve marqués. — 32 — En outre, on a convenu que toute opération indiquée pour une Cls doit être exécutéesur chacun de ses individus ; ainsi, par ex. : 7N = 7 X N ^ 7 multiplié par un N (quelconque) = multiple de 7 2N = multiple de 2 = nombre pair 2N +1 = nombre pair augmenté de 1 = nombre impair N2 = carré d'un N N3=cube d'un N Nî-(-Nî-= somme des carrés de deux N, etc. Comme je me servirai de ces écritures conventionnelles dans les exemples tirés de l'arithmétique, il est bon de s'accoutumer à les lire couramment et de la manière qui est la plus proche de l'usage commun. Voici, par ex., des appartenances [24] : 6eN 47eNp 42s7N 10e2N 15e(2N-M) 49 eN2 8eN3 13e(N2 + N2) et des inclusions [32] : 15N = 3N 6N => 2N1 Mais on ne doit pas mettre ces écritures au compte de Y Idéographie logique. 30. Pour les mathématiciens, j'ajoute qu'au lieu d'écrire « N » tout court, dans le Formulaire on écrit « N0 » ou « N, » selon qu'on commence la succession naturelle de 0 ou de 1; par suite, le théorème (découvert par Bachet en 1621 et démontré par Fermât et derechef par Lagrange en 1770) : « tout nombre entier est un carré ou bien la somme de deux ou de trois ou de quatre carrés » est exactement, représenté par la formule : N, =» rV+N0« + rV + N0* tandis que le théorème (découvert par Fermât en 1036) : 1. On lira donc : « 6 est un nombre », « 47 est un nombre premier », - 42 est un multiple de " » (ou « 42 est divisible par 7 »), « 10 est un nombre pair », « 15 est un nombre impair », « 4(J est un carré », « 8 est un cube », « 13 est la somme de deux carrés » (en effet, 13 est la somme de 9, carré de 3, et de 4, carré de 2); « tout multiple de 13 l'est aussi de 3 », « les multiples de 6 sont pairs ». — 33 — « tout produit d'un carré par un multiple de 8 augmenté de 7 est la somme de quatre carrés » se représente ainsi rVx(8N0 + 7) = N^ + NV + N^ + Ni» et celui (que M. P. Tannery a donné en 1898) : « le carré d'un nombre, plus grand que 1, est la somme de deux ou de trois ou de quatre carrés » est représenté par (Nt + i)* = iv + iv + N^ + iy Les formules, outre qu'elles sont plus brèves que les énoncés communs, permettent une comparaison plus immédiate entre les différents résultats obtenus. Rien et tout 37. Le plus souvent, on s'occupe de Cls pour chacune desquelles on peut déterminer au moins un individu qui lui appartient et au moins un individu qui ne lui appartient pas. Mais il peut arriver d'avoir à considérer une CIs à laquelle n'appartient aucun individu, telle que des Genevois qui ne seraient pas des Suisses, des points qui seraient communs à deux droites parallèles, des nombres qui seraient en même temps plus petits que S et plus grands que 8, etc. Ces CIs sont différentes entre elles, au point de vue de la compréhension [26]; mais, au point de vue de Y extension, elles forment nécessairement une seule Cls, que nous représentons par le signe « A », qu'on peut lire « rien ». Ainsi, par ex. : poisson invertébré = A (Pour me servir encore de ma comparaison [34], le rien serait une boîte vide; et si quelqu'un faisait l'objection qu'on pourrait bien avoir des boîtes vicies différentes entre elles, il faudrait répondre que, en tant que vides, elles seraient toutes égales entre elles au point de vue de ce qu'elles renferment.) PADOA. 3 56206 — 34 — Au contraire, il peut arriver de devoir considérer la Cls à laquelle appartiennent tous les individus dont il peut être question (universe of discours); nous la représentons par le signe «  V », qu'on peut lire « tout ». Le « tout » n'est employé dans aucune proposition scientifique ; toutefois, on le rencontre dans certaines formules de logique, qu'il sera intéressant de comparer à celles dans lesquelles on rencontre le « rien ». En 1887, M. Peirce avait employé le signe « V », comme lettre initiale du mot « vrai » ; en 1889, M. Peano adopta ce signe pour représenter le « tout » et le même signe renversé pour représenter le « rien » '. 38. Boole représenta le « rien » et le « tout » par les nombres « 0 » et « 1 » qui présentent une analogie frappante avec ces concepts, que j'aurai l'occasion de vous signaler; mais vous verrez aussi que cette analogie n'est pas complète [49]. D'ailleurs, si au lieu d'écrire, par ex. : (Np compris entre 31 et 37) = A on écrivait « (Np compris entre 31 et 37) = 0 », on pourrait croire qu'on veut affirmer que 0 est un nombre premier compris entre 31 et 37. C'est pourquoi, on ne pouvait employer le « 0 », au sens logique, au moins dans les propositions arithmétiques. Toutefois — c'est une remarque pour les mathématiciens — on pourrait éviter le « A » moyennant le « 0 », au sens arithmétique, et la phrase « le nombre des », ainsi : le nombre des (i\"p compris entre 31 et 37) = 0 où le signe d'égalité peut être lu « est »,tout court. Cet exemple offre l'occasion à une autre remarque, savoir que le mol « nombre » n'est pas seulement le nom d'une Cls [35]; il entre aussi dans la composition de la phrase fonctionnelle « le nombre des », qui dans le Formulaire est représentée par le symbole spécial « Nu m ». 1. En 1894, M. Peano signala dans une note(!7n precursore delta logica, Rev. de Math.) un ouvrage par Ludovico Richeri (1723-1800), Algebrse philosophicse in usum ariis invenîendi spécimen primum, 1761), dans lequel le « tout » et le « rien » étaient représentés par les signes « U » et « n "< bien Peu différents de ceux qui avaient été adoptés dans le Formulaire. — 35 — RÉUNION ET INTERSECTION DE CLASSES, RÉUNION DISJONCTIVE 39. Nous écrirons le symbole « « » entre deux Cls pour obtenir leur« réunion », c'est-à-dire l'ensemble des individus qui appartiennent à une au moins de deux Cls, savoir à l'une ou à l'autre; par suite, le signe « w » pourra être lu « ou ». Par ex., vertébré « invertébré = animal 4N v 6N =j 2N (c'est-à-dire : tous les nombres divisibles par 4 ou par 6, sont pairs). Nous écrirons le symbole « « » entre deux Cls pour obtenir leur « intersection », c'est-à-dire l'ensemble des individus qui appartiennent aux deux Cls à la fois, savoir à l'une et à l'autre ; par suite le signe « n » pourra être lu « et ». Par ex. : losange n rectangle = carré (c'est-à-dire : les quadrilatères qui sont en même temps des losanges, savoir qui sont équilatéraux, et des rectangles, savoir qui sont équi -angles, sont les quadrilatères réguliers, qu'on appelle carrés); 4N r, 6N => 12N (c'est-à-dire : tous les nombres qui sont divisibles en même temps par 4 et par 6, le sont aussi par 12). Leibniz et ses disciples — ayant remarqué des analogies entre la réunion de deux Cls et la somme de deux N, ainsi qu'entre l'intersection de deux Cls et le produit de deux N [49] — employèrent les signes « + » et « x » (renfermés parfois entre des petits cercles) aussi entre des Cls, en leur donnant la signification que nous venons d'attribuer aux signes « w » et « « ». C'est pourquoi, dans les notes explicatives du Formulaire on a conservé les dénominations somme et produit de deux Cls, auxquelles je préfère celle de réunion et d'intersection, qui me semblent plus expressives et plus claires. Boole appela « élection » l'intersection des Cls; c'est une autre dénomination convenable de la même opération, car elle nous impose de choisir les individus qui appartiennent en même temps aux deux Cls données. Mais lui aussi représentait cette opération par le signe arithmétique « X ». - 36 — Or, la question des noms de ces opérations est indifférente, pourvu [30] qu'au lieu des signes arithmétiques « + » et « X », on emploie les signes spéciaux « « » et « - » ; dont le premier est la lettre « o » de l'alphabet sténographique de Gabelsberger (car, justement le mot français « ou » est la traduction du mot italien « o »>) et le second est le même signe renversé. 40 Nous dirons que deux Cls sont disjointes lorsque leur intersection [39] est rien [37]; autrement nous dirons qu'elles sont conjointes. Par ex., « vertébré » et « invertébré » sont les noms de deux Cls disjointes, car vertébré /■« invertébré = A Ainsi, par ex., la proposition arithmétique (énoncée en 992 par l'astronome arabe Alchodschandî et démontrée rigoureusement par Euler en 1760) : « la somme de deux cubes n'est jamais un cube » S'éCrU (ns + n») ^K»=A Mais, par ex., « polygone équilatéral » et « polygone équiangle » sont les noms de deux Cls conjointes; car, en complétant l'écriture symbolique (au point de vue logique) d'une proposition que nous avons déjà vue [23] : polygone régulier = polygone équilatéral « polygone équiangle 41. Souvent, dans le langage courant, entre un nom et un adjectif on sous-entend l'idée représentée par le signe « n »; par ex. : peintre italien = peintre n italien Mais pas toujours; par ex., les phrases « nombre négatif», « nombre premier », « polygone régulier », « angle aigu », etc. représentent des Cls dont chacune est contenue respectivement en celle indiquée par le nom seulement; mais en ces cas Vadjectif ne suffit pas à désigner une Cls bien déterminée (en effet — tandis que les phrases «... est un nombre», «... est un polygone », «... est un angle » ont un sens précis — le sens de ces autres serait très incertain : «... est un négatif », «... est un premier », «... est un régulier », «... est un aigu »). — 37 — 42. Boole employait le signe « + » entre deux Cls pour indiquer leur réunion [39], mais seulement si elles étaient disjointes [40]; cette application plus restreinte de l'opération logique dont il est question lui permettait de conserver une analogie plus étroite entre l'addition des Cls et celle des nombres. Notre symbole « ^ » [39], ainsi que le « + » des disciples de Leibniz, s'emploie indifféremment entre deux Cls conjointes ou disjointes et par suite a une application plus vaste. Mais, avec Jevons, on pourrait désirer de former l'ensemble des individus qui appartiennent à une seule de deux Cls données, qu'elles soient conjointes ou disjointes; en ce cas on dira que l'on forme la « réunion disjonctive » des deux Cls, et on la représentera en écrivant entre les deux Cls le symbole « o ». Le français et l'italien ne permettent pas de lire différemment les deux symboles « v » et « o »; pour tous les deux en français il n'y a que le mot « ou » et en italien que le mot « o ». Mais le latin nous offre deux mots qui correspondent à ces deux symboles, savoir les mots « vel » et « aut ». Par suite (en réservant la lecture « ou » pour le signe « v », d'usage plus fréquent) le signe « o » pourra être lu « aut ». La réunion simple [39] et la réunion disjonctive de deux Cls diffèrent entre elles en ce que l'une inclut et l'autre exclut leur intersection [39]; par ex., des deux Cls losange v rectangle losange o rectangle la première contient les « carrés » et la seconde les exclut. Mais, pour cela même, la réunion simple et la réunion disjonctive de deux Cls disjointes [40] sont \&même chose; et par suite, en ce cas, on peut employer indifféremment l'un ou l'autre des deux symboles « « » et « o » ; par ex. : vertébré o invertébré = vertébré ^ invertébré parce que vertébré n invertébré = A Cette remarque permet toujours de transformer la réunion disjonctive de deux Cls conjointes dans la réunion simple de deux Cls disjointes. Considérons par ex. les Cls « dur » et« transparent » qui sont conjointes (car la « vitre », par ex., est «dure n transparente »). Leur réu- — 38 — nion disjonclive est l'ensemble des individus dont chacun est dur sans être transparent (savoir « dur n opaque ») ou transparent sans être dur (savoir « transparent ^ mou ») ; donc : dur o transparent = (dur n opaque) ^ (transparent « mou) Comme on peut éviter aisément le symbole « o », il fut abandonné dans les dernières éditions du Formulaire; mais il a des propriétés qui pourraient intéresser par elles-mêmes. 43. La partie hachée dans les fig. 3, 4, 5 représente [34] respecti- vement l'intersection « a r, b >> [39], la réunion simple « a w b » [39] et disjonciive « a o b » [42] de deux Cls conjointes [40]; la partie hachée dans la fîg. C représente en môme temps la réunion simple et la réunion disjonclive de deux Cls disjointes (dont Vintersection manque [40,42]). Individu, élément, agrégat 44. Nous appellerons « élément » toute Cls à laquelle appartient un seul individu ; en abrégeant le mot, on obtient le symbole « Elm » '. 1. M. C. Burali-Forti (Le Classifinite, Atti dell' Ace. R. (telle Scienze di Torino, 1896) représenta la même idée par le symbole « Un » ; pour éviter le doute sur le caractère logique de cette idée, qu'on serait tenté d'attribuer à l'arithmétique, j'ai proposé le symbole « Elm » (Note di logica tnatematica, Rev. de Math., 1899), — 39 — (Pour me servir encore une fois de ma comparaison [34], un Elm serait donc une boîte qui renfermerait une seule allumette.) Par ex., puisque : Napoléon Ior a eu un seul fils, on peut exprimer ce fait en écrivant : (fils de Napoléon I") s Elm, qu'on peut même lire : il ny a eu qu'un (fils de Napoléon Ier). 45. Lorsqu'il s'agit d'un Elm, on serait tenté de représenter d'une même manière l'individu et la Cls; mais, si l'on faisait ainsi (savoir, si l'on confondait l'allumette avec la boîte qui la renferme), on supprimerait toute distinction entre les égalités, les appartenances et les inclusions. En effet, cet Elm qui est égal h soi-même, comme toute autre chose [23j, appartiendrait (comme allumette) à lui-même (comme boîte) [24]. Et encore, si une Cls (une autre boîte) contenait cet Elm, celui-ci (comme boîte) serait contenu dans cette Cls [31] tandis que (comme allumette) il appartiendrait à cette Cls. Il faut donc, sous peine de confondre à jamais les idées représentées par les symboles « =s =>«, qu'aucun Elm ne soit représenté comme l'individu qui lui appartient. Personne n'avait reconnu cette nécessité avant M. Peano. 11 représenta donc chaque Elm, en écrivant le symbole « i » (qui est la lettre « iota », initiale du mot Ïgoç) avant le nom de l'individu qui lui appartient. Réciproquement, en écrivant le signe renversé, c'est-à-dire « i », avant le nom d'un Elm donné, il représenta l'individu qui lui appartient. En français, et en italien non plus, il n'y a aucun mot qui exprime exactement l'idée représentée par le symbole « t »; c'est pourquoi, nous nous contenterons de le lire « isos ». Mais le symbole « i » correspond exactement à l'article « le » ou à la phrase « le seul ». qui fut adopté par M. B. Russell {Sur la théorie des relations, Rev. de Math-, 1901). Mais, comme cette note pourrait provoquer le doute que je voulais prévenir, j'ajoute, pour l'éliminer, que, lorsqu'on dit qu'une classe est un Elm, on veut dire qu'elle n'est pas rien [31] et que, en supposant que des individus y appartiennent, on trouve toujours qu'ils sont égaux entre eux [23], Donc « Elm » exprime un concept logique. — 40 — Le fait que le langage courant n'a aucune lecture correspondante au symbole « i », au lieu de former un défaut de notre idéographie, en forme déjà un petit succès; n'est-ce pas un beau résultat que d'être arrivé à fixer une idée que le langage courant ne permet pas même d'exprimer? Mais ce fait justifie la difficulté qu'on rencontre à comprendre la signification exacte du « i »; pour cela je reviendrai sur cette signification et je proposerai même une lecture en français de ce symbole, mais elle ne sera pas conforme au vrai langage courant [89]. Pour le moment, il faut réfléchir à la nécessité déjà expliquée de représenter différemment un individu et l'Elm qui le renferme, tâcher de bien comprendre la signification (plus facile à saisir) du symbole « i » et considérer simplement le « t » comme son inverse. 46. Par ex., dans le cas que nous venons de considérer, le. fils de Napoléon Ier sera bien représenté par la formule  : i (fils de Napoléon Ier) après quoi, nous pouvons écrire : (le roi de Rome) = i (fils de Napoléon I") où les symboles « = » et « i » peuvent être lus « était » et « le seul ». On peut exprimer le même fait en écrivant : t (le roi de Rome) = (fils de Napoléon Ier) La première est une égalité entre individus, la seconde entre Cls; tandis que : (le roi de Rome) = (fils de Napoléon Ier) serait une égalité mauvaise, entre un individu et une Cls; et l'appartenance : (le roi de Rome) s (fils de Napoléon Ier) serait juste, mais incomplète, n'excluant pas que Napoléon Ier ait eu d'autres fils. Nous allons tirer de l'arithmétique [35] un autre ex. d'application des symboles « Elm t i » (et du symbole « « » [39]); le voici : (Np r, 2N) e Elm — 41 — c'est-à-dire « il y a un seul Np qui soit en même temps un 2N »; comme ce N est 2, il forme FElm « 12 » et par conséquent c2 = Np r, 2N ou bien 2 = i (Np n 2N) qu'on lira : 2 est le seul Np qui soit en même temps un 2N. 47. Moyennant les symboles « t » et « w » on peut former 1' « agrégat » d'un nombre quelconque d'individus donnés, c'est-à-dire la Cls à laquelle appartiennent précisément les individus en question. A cet effet, il faut passer d'abord des individus aux Elm correspondants et puis former la réunion simple de ces Cls [39]; par ex., (t Sem) w (t Cham) u (t Japhet) = (fils de Noé) De la sorte, par une seule proposition, on affirme que Sem, Cham et Japhet étaient fils de Noë et que Noé n'avait pas d'autres fils. Symboles constants ou variables 48. On dit constant tout symbole qui a toujours la même signification, au sens que j'ai précisé [28]; savoir que, dans tous ses rôles (s'il en a plusieurs), il a toujours le même ensemble de propriétés. Tous ceux, dont je viens de vous expliquer la signification et l'emploi, sont des symboles constants; tandis qu'on dit variables d'autres symboles qui représentent des objets qu'on suppose bien déterminés, mais dont on laisse libre le choix. A cet effet — depuis Aristote pour la Logique et Euclide (—315, —253) pour l'Arithmétique — on emploie des lettres, qui néanmoins doivent obéir à une loi qui est la condition primordiale du langage ; savoir que, après avoir choisi leur signification, on est forcé de la conserver jusqu'à la fin de la question dont il s'agit. Mais, dans une autre question, on est libre de donner aux mêmes lettres d'autres significations. Dans le Formulaire, les variables sont toujours représentées par des lettres minuscules en italique (telles que « a, b, c,... ») ; tandis que les symboles constants, ainsi que nous l'avons vu, sont formés par des lettres grecques (e t) ou romaines (Cls Elm), ou sont des signes spéciaux (= =3 A V ^ u oi). — 42 — 49. Nous pouvons employer une lettre pour relever l'analogie, dont j'ai touché un mot [38, 39], entre les symboles logiques A V ^ ~ et les signes arithmétiques 0 1 -+- X Si a représente une Cls quelconque, on a toujours les formules, dues à Boole : a v A =«  « " A = A a^V=«  a ^ V = V pareillement, si a représente un N quelconque, on a toujours : a + 0 = a (ixO = 0 «Xl = « L'analogie est saisissante, mais elle s'arrête devant la dernière formule logique; car, pour les N on n'a pas a +1 = 1 Cela prouve que, pour représenter les idées logiques dont il est question, il fallait avoir recours à de nouveaux symboles [28, 30]. Propositions catégoriques ou cojsditionkelles 50. D'habitude, on dit qu'une proposition (au sens grammatical du mot) est vraie ou fausse; est-ce exact? Il suffit de lire les propositions : 5 + 3 > 7 (1) 4+1 > 6 (2) Dan le + Virgile > Homère (3) x-h 2 > 9 (4) pour reconnaître que la (1) est vraie et que la (2) est fausse, tandis que la (3) n'est ni vraie ni fausse, étant dépourvue de signification. Et la (4)? elle est telle quon veut, selon la significalion qu'on va donner à la variable x; en effet, par ex., elle est vraie si x vaut 10, elle est fausse si x vaut 4 et elle est dépourvue de significalion si x n'est pas un nombre. En laissant de côté la proposition (2) qui est fausse et la (3) qui est irrémédiablement dépourvue de signification, il nous reste : la proposition (1), dont la vérité ne saurait dépendre de notre volonté (dès qu'on a fixé, comme d'ordinaire, la signification des symboles constants dont elle se compose) et que pour cela nous disons catégorique; et la proposition (4), dont la vérité (malgré la détermi- — 43 — nation des symboles constants) dépend de la volonté du lecteur, savoir de Vinterprétation qu'il donnera à la variable qui entre dans sa composition, et que pour cela nous dirons conditionnelle. 51. Mais il peut y avoir une autre espèce de propositions catégoriques; en voici un ex. [35] : « x n'est pas un 2N » ou bien « x-\- 1 est un 2N -f- i » (5) Pour que cette proposition soit vraie il est nécessaire et suffisant qu'une au moins des propositions conditionnelles [50] x n'est pas un 2N (6) x + i est un 2N + 1 (7) soit vraie. Or, si x est un N, selon qu'il est pair ou impair, la (7) ou la (6) sont vraie; et, si x n'est pas un N, la (6) est encore vraie. Donc la proposition (5) est vraie quelle que soit l'interprétation de sa variable et pour cela elle aussi est catégorique. Variables réelles ou apparentes 52. Soit une proposition formée par des symboles constants et une seule variable, par ex., x [48]. Nous dirons que, dans la proposition donnée, x est une variable réelle ou apparente selon que la vérité de cette proposition dépend ou ne dépend pas du choix de Vinterprétation de x; par ex., x est une variable réelle dans les propositions (4), (6), (7), tandis que c'est une variable apparente dans la proposition (5). En résumant : les propositions catégoriques sont des propositions vraies formées par des srjmboles constants, ainsi que la (1), ou par des symboles constants et des variables apparentes, ainsi que la (5); ce sont au contraire des propositions conditionnelles celles dans lesquelles entre au moins une variable réelle, ainsi que les (4), (6), (7). Dans les explications, on abrège la phrase « proposition catégorique » en écrivant « P », qu'on pourra, lire « proposition », tout court; et à la place de « proposition conditionnelle dans laquelle entre seulement la variable réelle x » on écrit « condition par rapport à a; ». 53. J'ajoute pour les mathématiciens que la distinction ordinaire des égalités en « identités » et « équations » (d'où prend naissance — 44 — celle entre l'arithmétique et l'algèbre) correspond exactement à celle que je viens de faire entre P et conditions. Voici, par ex., des identités : 49 — 4 = 9X5 a-hb — b^-a dans la première desquelles il n'y a que des symboles constants, tandis que dans la seconde il y a aussi les variables a et b, mais qui sont des variables apparentes (si dans le traité on a déclaré, une fois pour toutes, que chaque lettre a, b, c, ... représente un nombre) ; tandis que , .. est une équation, dont x est la variable réelle, qui est vérifiée seulement si x vaut 21. Cette distinction mathématique correspond donc exactement à la distinction logique que je viens d'expliquer; mais celle-ci est bien plus générale, car elle s'étend à des écritures pouvant avoir une forme quelconque (et pas seulement d'égalité) et à des variables pouvant avoir des interprétations quelconques (et pas seulement des nombres). Implications 51. Deux conditions par rapport à une même variable x étant données [52], il peut arriver que, toutes les fois que la première est vérifiée par une interprétation de x, la seconde aussi se trouve vérifiée par la même interprétation de x. En ce cas, nous dirons que la première condition implique la seconde. Par ex., « x s poisson » implique « x s. vertébré » (8) La signification précise que nous donnons à cette écriture est celle ci : « x n'est pas un poisson » ou bien « x est un vertébré » (9) On peut répéter pour la (9) ce que nous avons dit au sujet de la (5) [51]; par suite x, qui est une variable réelle [52] dans chacune des conditions « x s poisson » et « x e vertébré », est une variable 1. Celles qui, dans le langage algébrique, sont appelées les inconnues d'une équation, ne sont que ses variables re'eltes; ses solutions ou racines ne sont que les interprétations des variables réelles, qui transforment {'équation en une identité (savoir la condition en une P). — 45 — apparente [52] dans l'écriture (9) ou dans son équivalent (8); donc celle-ci est une vraie P [82], qu'on appelle une « implication». Même à la (5) on peut donner la forme d'une implication : « x e 2N » implique « (a-+1) s (2N -f- 1) » (10) Dans toute implication, la première condition est appelée « hijpo-Ihèse « (qu'on abrège par « Hp ») et la seconde « thèse » (qu'on abrège par <■ Ts »). 55. On peut prouver d'une autre manière que dans l'implication (8) a; est une variable apparente; en effet, on peut éviter l'emploi de cette variable, en disant: tout poisson est un vertébré ou en écrivant [31] : poisson => vertébré (11) Mais alors, en général, si a et b sont des Cls quelconques, Y implication «!£«» implique « x s b » est équivalente à Vinclusion a => b (12) Ces deux dernières propositions étant équivalentes, au lieu d'inventer un nouveau symbole pour remplacer le mot « implique », on peut donner au signe « => » ce nouveau rôle [28], en écrivant : « x e a » => « x s b » (13) Les deux rôles du signe <o» sont bien distincts : il est le symbole de l'inclusion ou de l'implication selon qu'on le trouve entre deux Cls ou entre deux conditions par rapport à une même variable [52]. Ainsi donc l'implication (8) s'écrira : « x s poisson » =3 « a? £ vertébré » (14) et, tandis que la lecture du signe « => » dans la (11) est « tout... est un... », dans la (14,) cette lecture devient « implique » (ou bien « donc » ou bien « si... alors... »). On verra dans la suite qu'en faisant ainsi nous respectons le principe de permanence [28], car le signe « => » a les mêmes propriétés formelles dans les deux rôles que nous lui avons donnés (et nous ne lui en donnerons pas d'autres1). 1. Leibniz avait remarqué les liens entre les inclusions et les implications : — 46 — 56. On pourrait faire l'objection que peut-être l'analogie entre les inclusions et les implications n'est pas toujours si saisissante qu'elle paraît en comparant les formules (12), (13) et en particulier les P (11), (14); parce que, en ces cas, cette analogie semble dépendre de la forme particulière des conditions considérées. lïn effet, comment pourrait-on se tirer d'affaire si l'Hp et la Ts d'une implication n'étaient pas deux appartenances par rapport au même individu variable? L'objection n'a aucune valeur; car, ainsi que nous le verrons [60], chaque condition par rapport à a? [52], quelle qu'en soit la forme, peut se changer en une appartenance entre x et une Cls déterminée. Ponctuation 57. Pour séparer les parties d'une formule, Leibniz et Newton employèrent des barres horizontales (qu'on appelait vinculum) placées au-dessous ou au-dessus de chaque partie; on emploie encore ces barres dans l'écriture des fractions et des racines des nombres. Jacques Bernoulli (1054-1705) et son frère Jean (1667-1748), qui furent les premiers disciples de Leibniz, introduisirent et répandirent l'emploi des parenthèses, qui ensuite furent universellement adoptées dans les formules de l'Arithmétique et de l'Algèbre, pour marquer l'ordre selon lequel les opérations indiquées doivent être exécutées, et dont nous faisons le même usage dans les formules analogues. Mais, dans les autres cas, nous préférons les points isolés « . » ou groupés « : », « .-. », etc., dont Leibniz avait fait le même usage dans quelques-uns de ses manuscrits. Les parenthèses et les points forment la ponctuation logique, qui remplit le même rôle que les pauses dans le discours et que la ponctuation grammaticale dans l'écriture commune; mais elle le remplit avec une précision et une évidence sans exceptions, qui permet justement de se passer complètement des flexions [25]. « Et cum dico A est B, et A et B surit propositiones, intelligo ex A sequi B ». Le signe « 3 » avait été employé par Gergonne, mais seulement pour les inclusions (a. 1816), et par Abel (1802-1829), mais seulement pour les implications. C'est justement pour lui donner le double rôle que M. Peano a préféré, même pour les inclusions, le signe zj en abandonnant le signe e: [31]. — 47 — Voici un ex., qui permet une comparaison entre l'emploi des parenthèses et des points dans une même formule » : (ab) \(cde) [f(gh)]\ ab .-. cde : f. gh Les points sont sans doute moins encombrants et forment par suite un système de ponctuation plus simple et plus clair. Voici donc la forme définitive de la P (10) [54] x e 2N . => . (x + l) e (2N -+-1) qu'on lira : « si x est un nombre pair, alors or-M est un nombre impair ». Dans le Formulaire on a établi des conventions sur la ponctuation pour la rédu.re au mmtmMm strictement nécessaire; l'application de ces conventions est sans doute très commode, mais leur explication pourrait fatiguer plus que la chose ne le mérite, c'est pourquoi ici j'y renonce. Classes et conditions 38. Voici deux appartenances [24, 35] oeNp et xzNp dont l'une est une P, tandis que l'autre est une « condition par rapport h x » [52]. Évidemment, cette condition sera vérifiée ou non selon qu'on remplacerai par un nombre premier ou par n'importe quelle autre chose; c'est pourquoi nous pouvons écrire : « l'ensemble des valeurs de x qui vérifient la condition (x s Np) » = Np; ou, en abrégeant, « l'ensemble des x tel que {x s Xp) » = Np Il ressort de cet ex. (et on verra en général [00]) que les deux phrases « l'ensemble des x tel que » U) e*- « x est un » /g) indiquent deux transformations inverses, pareillement aux phrases « le double de » et « la moitié de » qui donnent, par ex., le double de (la moitié de 10) = 10 1. A chaque place, on met autant de points qu'il y avait de signes de parenthèses; mais on supprime tout signe aux extrêmes. — 48 — Cette remarque, bien simple mais très importante, amena M. Peano à représenter ces deux transformations de manière à mettre sous les yeux que l'une est l'inverse de l'autre; en effet, ayant déjà représenté la phrase (2) par l'écriture « x c », il représenta la phrase (1) par l'écriture « a; 3 ». Ainsi, nous pouvons écrire en symboles a?3(a;£Np) = Np Il est bon de prendre note qu'en général, si a est une Cls quelconque, x?(x s a) = « ce qui s'exprime complètement en symboles moyennant l'implication [55] ' j_ aeCls. => .X3(xe.a)=a Ici x est une variable apparente [52]; a est une variable réelle dans l'Hp ainsi que dans la Ts, séparément considérées, mais elle est apparente dans l'implication. 59. Une « condition par rapport an étant donnée, même si elle n'avait pas la forme à.'appartenance par rapport à x, nous pouvons représenter l'ensemble des x qui la vérifient, en écrivant devant elle « a;s » [58]. Ainsi donc, si u est une équation ayant as pour inconnue [53], avant de la résoudre et quand même on ne serait pas capable de la résoudre, l'écriture «ïîu » représentera l'ensemble de ses racines. Par ex., en nous bornant à considérer les racines réelles (au sens mathématique) d'une équation donnée, le fait que, des trois équations x>- + 26 = 10a; a?2 -+- 25 = 10a; a;2 +16 = 10a; la première n'a aucune solution, la deuxième a la seule solution 5 et la troisième a les deux solutions 2 et 8, est exprimé respectivement par les formules [37, -45, 47] : x 3 (a;2 -+- 26 = 10a;) = A x 3 [x- -i- 25 = 10a;) = 15 x; (a;2 -+-16 = lOx) = i2 - 18 4. Ici commence la numération des P générales, savoir de Logique déductive, complètement écrites en symboles. B. Russell commence chaque P vraie par un signe particulier qui signifie « il est vrai que » ; mais, par une convention universelle du langage, cette phrase est sous-entendue devant chaque assertion — 49 — 60. Nous envisageons toujours les conditions au point de vue de l'extension, ainsi que nous faisons pour les Cls [27] et qu'on fait d'ordinaire pour les équations. En d'autres termes : deux conditions par rapport à x étant données, quelle qu'en soit la forme, nous disons que l'une est égale à l'autre (selon le langage courant on les dirait équivalentes, mais c'est bien d'une égalité qu'il s'agit [23]) toutes les fois que l'ensemble des x qui vérifient la première est égal à (savoir, est te même que) Vensemble des x qui vérifient la seconde. Gela étant établi, je vais démontrer qu'à toute condition par rapport à a; on peut donner la forme d'une appartenance entre x et une Cls déterminée, forme que je nommerai « condition explicite par rapport h x ». Soit m la condition donnée; désignons par a l'ensemble des x qui vérifient u, c'est-à-dire posons que [59] I3M = a Avec cela, a est une Cls déterminée, même si Ton n'en connaît encore aucun individu; donc, en comparant cette formule à la PI [38], on obtient xiu = x*{xza) et par suite u = xza c. q. f. d. Comme toute « condition par rapport à x » peut acquérir ainsi la forme «xza», où a est une Cls déterminée, c'est bien celle-ci la forme que nous lui donnerons dans les formules générale^. En remplaçant a par sa valeur, dans la dernière formule, elle devient U = IE(j3«) et, en résumant cette formule avec la PI, il résulte que les écritures « ie» et « u» se détruisent l'une par l'autre, quel qu'en soit l'ordre, c'est-à-dire qu'elles représentent toujours deux transformations inverses. Et précisément : l'écriture « xz » transforme une Cls quelconque en une « condition par rapport à a; » et l'écriture «X3 » transforme toute « condition par rapport à a; » en une Cls. 61. Boole, et avant lui Leibniz et Lambert, tout en s'occupant des Cls, n'avaient pas manqué d'observer certains liens entre la théorie isolïe. D'autre part, si l'on sent ce scrupule, pourquoi s'arrêter au premier pas? pourquoi ne pas sentir le besoin de placer cette phrase même devant une 1 commençant par « il est vrai que »? et ainsi sans fin? 4 PADOA. — 50 — ■ des Cls et celle des conditions; après Boole, un autre logicien anglais, Mac Coll, avait même tâché de construire une théorie des conditions, complète en soi (The calculus of équivalent statements). Mais, c'est à M. Peano que revient le mérite d'avoir mis en pleine lumière la connexion intime et réciproque qui relie entre elles ces deux théories; c'est une vraie découverte, dont l'importance fut bien comprise et relevée par M. L. Couturat dans l'Introduction à son livre sur Les Principes des Mathématiques [14]. « Jusqu'au milieu du xix° siècle, la Logique et les Mathématiques avaient vécu absolument distinctes et même séparées. « La Logique était restée confinée dans le domaine étroit que lui avait assigné Arislote, à savoir dans l'étude desrelations d'inclusion ou de prédication... » (ces dernières sont celles que j'appelle des appartenances). « De leur côté, les Mathématiques (ce pluriel est significatif) formaient une collection de sciences spéciales d'un caractère technique : science du nombre, science de la grandeur, science de l'espace, science du mouvement, dont l'unité., assez vague, consistait uniquement dans la communauté de méthode. « Mais, chose curieuse, cette méthode déductive était absolument inconnue de la Logique formelle, qui pourtant prétendait étudier toutes les formes de la déduction, de sorte qu'il s'était constitué implicitement une Logique mathématique tout à fait différente de la Logique classique (syllogistique); et les philosophes, pour expliquer cette dualité, se contentaient d'opposer entre elles la Logique de la qualité et la Logique de la quantité, sans chercher le lien qui devait les unir, en tant que branches d'une seule et même Logique. » Ce lien est celui dont je vous ai déjà parlé, mais dont l'importance ne pourrait être appréciée avant d'en voir des applications. 62. Dans la Logica matematica de M. Burali Forti, ainsi que dans les premières éditions du Formulaire, la théorie des conditions précédait celle des Cls. Mais, ayant reconnu l'analogie parfaite entre les deux théories, on a préféré, et je préfère, développer complètement celle des Cls, qui est d'une compréhension plus immédiate; en me contentant d'indiquer, pour ainsi dire, les ponts qui relient les deux rives du même fleuve et qui permettent de marcher un peu sur un bord et un peu sur l'autre, ainsi que l'on veut. — 51 — Pourtant, deux ponts de communication sont donnés par les P suivantes qui relient les deux rôles de chacun des symboles «=» et « =, », selon qu'ils sont employés entre deux Cls ou entre deux conditions explicites par rapport à la même variable [60] : xea. = .xeb: = :a — b (1) xea. => .xeb : = : a =3 b (2) dont la première exprime en symboles que les conditions sont aussi envisagées au point de vue extensif [60] et la seconde exprime l'egalite entre les formules (12) et (13) [55]. On peut les lire : « la condition x e a est égale à (ou implique) la condition x c b toutes les fois que a est égal à (ou est contenu en ) b ». Affirmations simultanées ou alterk ES 03. Si a et b sont des Cls, leur intersection « a^b » est aussi une Cls [39]; par suite, « xe (a r, b) » est une condition explicite par rapport à x [60], qui est égale à l'affirmation simultanée des conditions « xea » et « xeb »; en effet [60], l'ensemble des x qui vérifient à la fois ces deux conditions est égal à l'ensemble des x qui vérifient la condition « xe (a* b) », c'est-à-dire [58 PI] à la Cls « a n b ». C'est pourquoi on donne au signe « a » le rôle de symbole d'affirmation simultanée (entre deux conditions, tandis qu'entre deux Cls il reste le symbole d'intersection), en lui conservant la lecture « et ». Donc, en symboles : xea. r, .xeb : = : xe(a r-. b) ou bien X3(xza.*.xsb) = a r, b 64. Lorsque le signe « r, » se Irouverait placé entre des écritures qui, par leur forme, sont nécessairement des conditions, on a l'habitude de le sous-entendre; mais sa place reste marquée par ««des points ou des groupes de points qui se trouvaient à ses côtés. Donc, •2- xea.xeb : = : xea. rs.xeb Par suite, les deux dernières formules s'écrivent ainsi : 3- xea.xeb : = : xe(a « b) X3(xea.xeb) — a n b (3) — S2 — CS. La P 3 nous apprend à condenser en une seule deux appartenances ayant le même sujet, et cela d'une manière conforme au langage courant; en effet, par ex., au lieu de {'affirmationsimultanée « Homère était un poète » et « Homère était un Grec », on dit « Homère était un poète grec », (4) où « poète grec » est bien {'intersection des deux Cls conjointes « poète » et « grec » [41]. De même, le langage courant condense en une seule deux appartenances ayant le même prédicat; par ex., au lieu de {'affirmation simultanée : « Homère était un poète » et « Virgile était un poète », on dit « Homère et Virgile étaient des poètes ». (5) Mais cet « et », qui vient lier deux sujets (c'est-à-dire deux individus), est bien différent de F « et » qui lierait deux prédicats (c'est-à-dire deux Cls), car ce nouveau « et » n'est pas assurément un signe d'intersection [39]; et par suite nous ne pouvons pas le représenter par le signe « ^ ». Puisque nous n'employons pas la virgule « , » comme signe de ponctuation [57], nous allons l'employer comme symbole, en lui confiant seulement le rôle déclaré. Par suite, sans nous soucier des flexions, nous écrivons ainsi les (4), (5) Homère e (poète a grec) Homère, Virgileepoète Donc [P2], la signification du symbole « , » est établi par la P 4. x, yea : = : xsa.yea d'où, en particulier, 5. a, isCls : = : a s Cls. es Cls 60. Dans le Formulaire la P 4 est précédée par l'Hp « os Cls » qui me paraît superflue, car pour moi l'affirmation « xta » implique que « as Cls », c'est-à-dire 6. xea.zs.aiQs D'ailleurs, la P 4 dit seulement qu'on peut toujours remplacer — 53 — l'une par l'autre deux écritures de laforme «a;, y.a» et «xea.yta», ce qui est permis sans exception. Et de même pour la P 2 [64] ; en ajoutant que, comme on admet que 7- a, èsCls. = .(a« 6)eCIs (c'est-à-dire, en éliminant les variables apparentes, que « l'intersection de deux Cls est aussi une Cls »), ainsi j'admets la P (qu'on ne trouve pas dans le Formulaire) : 8- {a « 6)eCls.=s.a, beCls Pour justifier cette P, j'analyse le symbole « n » dans ses deux rôles [39, 63], en déclarant qu'il n'en aura pas d'autres; or, selon qu'on le place entre deux Cls ou entre deux conditions, on obtient une Cls ou une condition; donc, selon que « anb «est une Cls ou une condition, on a le droit de conclure que a et b sont aussi, respectivement, des Cls ou des conditions; d'où la P 8. Mais par rapport à la formule (1) [62] la chose est différente; en effet, tandis que 9. xza. = .xab : => : â = b pour que « <z = 6 » implique « .tea. = .xzb » il faut que a et b soient des Cls; donc iO. a, 6 s Cls. a = b: ■=> : xza. = .xeb On peut faire des distinctions analogues au sujet des formules (2) [62] et (3) [64], qui donnent les P ii. xza. =3 .xeb : =3 : a => b i2. a, btCls.a =j b : zd : xeci. => .xsb i3. a, ieCls. => .xî{xia.xtb) — a * b 67. Nous savons que, si a et b sont des Cls, leur réunion simple « a « b » est aussi une Cls [39], c'est-à-dire que l'on a : i4. a, bzCls. =>(«- ô)sCls (P7)1 Par suite, si « a, bz Cls », l'écriture « x s (a « b) » est une condition explicite par rapport à x [60] qui est égale à l'affirmation alterne des conditions « xza » et « xib »; en effet [60], l'ensemble des a? qui vérifient une au moins de ces conditions est égal à l'ensemble des x qui 1. Une P entre [ ] indique une citation, tandis qu'une P entre ( ) indique une remarque d'analogie. — 54 — vérifienlla condition « xs (a - b) », c'est-à-dire [58 P 1] à la Cls « awb ». C'est pourquoi on donne au signe « o » le rôle de symbole d'a/^r--wafe'on alterne (entre deux conditions, tandis qu'entre deux Cls il reste le symbole de réunion simple) en lui conservant la lecture « ou » (au sens du latin « vel » [42]). Donc en symboles : 15. xia. ^ .xzb: = xe(a^b) (P3[P2]J ./6'. a, beC\s.-^.x?(xea. ^ .XEb) = av b (P 13) Comme au symbole « ^ » on ne donnera pas d'autres rôles, par des considérations analogues à celle que je viens de faire pour le symbole « ^ » [GO] je suis amené à admettre que 17. (av6)sCls.=3.a, ôsCls (P 8) » 68. Voici des applications des symboles que nous connaissons, tirées de la Logique et de VArithmétique et qui sont propres à relever encore une fois Y analogie partielle entre ces deux sciences [49] : iS. a^b= /\: — :a= A-b = A savoir [37, 39, 64] « la réunion de deux Cls est rien, toutes les fois que chacune d'elles est rien », de même que a, 6£N.-. = .,.a + 6 = 0: = _:a = 0.6 = 0 savoir [35] « la somme de deux N (absolus) est zéro toutes les fois que chacun d'eux est zéro »; y 9. a.^ô=V: = :ffl=V-6=V savoir «  ri»tersec«icm de deux Cls est tout, toutes les fois que chacune d'elles est tout », de même que a, bsK .-.=> .\axb — i: = :a — i.b = \ savoir [35] « le produit de deux N (entiers) est un, toutes les fois que chacun d'eux est m» ». Comme [37 et P5] 20. A, VeCls il est inutile de placer devant les P 18,19 l'Hp « a, JeCIs » [P 17 et P 8]. \. Voici un ex. pour mieux éclairer la distinction entre les affirmations simultanées [65] ou alternes [67]; si « xzS », alors 2 O < 7. r, .4 O < 9 : = : 4 O < 7 tandis que 2<><7. u .4 < a: < 9 : = : 2 < x < 9


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Boole avait découvert les P 18, 19 et les avait exprimées par les signes arithmétiques analogues et par le langage ordinaire. Mais l'analogie n'est pas complète; en effet, tandis que : a, 6tN.-. =3 .-.oxt = 0: = :a = 0.v.6=0 a, 6eN :: =j :; a + 6 = l.-. = .-.a = 1.4 = 0: ^ : a =0.6 = 1 savoir « le |»>arfm{ de deux N est zéro, toutes les fois qu'au moins un d'eux est zéro » et « la somme de deux N est un, toutes les fois qu'un d'eux est un et que l'autre est zéro », les propriétés logiques analogues ne subsistent pas '. Négation, Classes contraires 69. Nous exprimerons le fait qu'une P est fausse en écrivant devant elle le signe « - », qui est le symbole de la négation et qu'en ce cas on peut lire « il n'est pas vrai que » 2; par ex., -(8 + 3 = 10) et -(6sNp) Mais il est préférable de transporter le signe de négation devant le symbole principal de la P; en faisant ainsi, on se passe d'une parenthèse et on abrège la lecture qui devient simplement « ne ... pas » ; par ex., 8+ 3- = 10 et 6-sNp qu'on lit : 8 + 3 n'est pas égal à 10 et G n'est pas un Np . Ce que je viens de dire pour les P, peut se répéter pour les conditions [52] ; donc, en général : 21. x- = y. = .-(x = y) 22. x - sa . = . - (xeu) 70. Si « as-Cls », nous représenterons par « -a » (qu'on lira « non a ») l'ensemble des individus qui ne sont pas des a [69], qu'on peut appeler la Cls contraire à a. Donc [58] : 1. En efïet : si deux Cls sont disjointes [40], leur intersection est rien, même si toutes les deux sont différentes de rien; et la réunion de deux Gis peut bien être tout, sans que l'une soit tout et que l'autre soit rien. 2. Dans les manuscrits, pour éviter toute confusion avec le signe arithmétique « — » (« moins »), que Leibniz et Segner employaient aussi comme signe de négation, on lui préfère le signe >> r\J », savoir la lettre « n » (initiale du mot « non ») de l'alphabet sténographique de Gabelsberger. — È56 — 23. «eCIs. =3 .- a = xt(x - ea) 24. a«Cls.=3.(-a)eCls 25. a * Cls. =>.-(-a) = a (Leibniz) J'ajoute la P 26. (-a)zCAs.=>.atC\s Si chacune des lettres x et a a une signification déterminée, il peut arriver que « x-ea » pour deux raisons différentes : il peut se faire que « a-sCls », ou bien que « xi(-a) » (ce qui implique qae « (-a)ECls » [P 6] et par suite que « aeCls » [P 26]); donc [67] : 21. x-ea: = :a~zC\s.'->.xt(-a) 28. aeCls : => : a?-sa. = .a:s(- a) De ce qui précède il résulte que la négation d'une condition par rapport à x [52] est aussi une condition par rapport à x. En effet, si à la condition donnée on donne la forme explicite « xea » [60], alors « aeÇls » [P6]; et par suite [P 22 et 28] les formules «-(xta)» u x ~ s.a » «xt(-'a)» ont toutes la même signification; et la troisième est bien une condition explicite par rapport à x [60]. 71. L'équivalence entre les deux dernières formules confirme, encore une fois, la distinction faite entre les appartenances et les inclusions [33, 3-4]; car, si « a, 6 s Cls », les formules « a ~ =j b » « a => - b » ont des significations différentes. En effet, tandis que la seconde dit [31 et P 24] que « tout a est un (non b) », savoir que « aucun a n'est un b », la première [69] dit seulement que « quelque a n'est pas un b », ce qui peut bien arriver même si « quelque a est un b ». ' Ainsi, par ex., Suisse - => Genevois mais non Suisse => (- Genevois) 72. Dans le langage courant, lorsqu'il arrive souvent de considérer la Cls contraire d'une Cls donnée [70], on lui donne un nom exprès qu'on tire du premier moyennant des règles dont s'occupent les philologues; mais ce n'est presque jamais la vraie Cls contraire. Par exemple, il n'est pas exact que : ■ invertébré = - vertébré — 57 — car, en parlant d' « invertébrés », on sous entend d'abord qu'il s'agit d' « animaux ». Ce n'est donc pas le « tout » qu'on partage en « vertébrés » et « invertébrés », mais seulement la Cls des « animaux »; par suite, il est plus exact d'énoncer que : invertébré = animal <-, (- vertébré) ou, en abrégeant, invertébré = animal - vertébré En général, nous convenons donc que £9- a-b=za^{-b) et cela même si a et b, au lieu d'être deux Cls, étaient deux conditions. Dans la fig. 5 [p. 38], les hachures désignent à gauche la Cls « a -b » et à droite la Cls « b-a ». 73. Par suite [42] 30. aob = (a-b)^(b-a) 3i. aob = (av 6)-[a n b) et cela si a et b sont des Cls ' et même si elles sont des conditions; pourvu qu'en ce cas on convienne que « aob » représente leur affirmation disjonctive, par laquelle on demande qu'une seule des conditions a et b soit vérifiée. Mais les P30, 31 nous permettent de représenter le symbole « o » (« aut »), dans ses deux rôles, par les signes « a ^ - »; c'est pourquoi il fut abandonné [43]. Existence 74. Les symboles « A » et « V » [37] sont employés dans quelques P de Logique, pour faire mieux ressortir les propriétés des idées 1. Si a et b sont conjointes [40], il suffît de regarder la fig. 5 pour se convaincre de la vérité de la P30; et pour la P 31 il suffit de faire une comparaison entre les fig. 3, 4, 5. Mais si a et 6 sont disjointes [fig. 6], alors .< a a b = /\ » « a-b = a » « b-a = b » en simplifiant par ces formules les P 30 et 31, elles se réduisent toutes les deux à la formule aob = a ~-j b ainsi que nous l'avons déjà énoncé [42]. (Pour la réduction de la P 31 voir aussi les P 36, 35 [14] et la P 29.) — S8 — qu'elles représentent et des analogies remarquables entre certaines P logiques et arithmétiques; par ex., aux P 18, 19, 20 [68] on peut ajouter ces autres qu'on obtient en complétant des formules déjà vues [49] par THp « asCls ». 32. aeCls. = .a ~ A = A 33. euCls.s.a w A = a 34. aeGls.=i.a« V = V 35. aeCls.=>.a « V =« Et l'on peut ajouter 36. V=-A 37. A=-V Mais dans les applications on a préféré remplacer ces écritures par d'autres plus commodes, que je vais expliquer. 75. Si « aeCls », au lieu que « a - = A » (« a n'esl Pas égal à rien »), on écrit « ya M, ou Ie symbole « g » se lit « il existe des » ou « il y a des » '. Ainsi, par ex. [35] : g[N2 « (N2 + N8)] « il y a des carrés qui sont la somme de deux carrés ». Dans le Formulaire on énonce que : aeCls : =3 : ya. = .a - = A mais moi je préfère la P 38. ga : = : aeCls.a -= A moyennant laquelle on déclare aussi que l'écriture « ga » ne sera employée que si « aeCls », car de la P 38 on tire : 39. ga. zd .aeCls De la P 38 il résulte aussi que, a étant donné, il peut arriver que « - ga » [69] pour deux raisons différentes : il peut se faire que « « - eCls » ou bien que « a= A »• Donc : 40. - ga : = : a - eCls. ^.a= A Par conséquent, si « aeCls », au lieu que « a= A » on écrit « - ga », où la suite de signes « - g » se lit « il n'existe pas des » ou « il n'y a pas des » ou « il n'y a aucun »; ainsi, par ex., en écrivant d'une autre manière une P déjà vue [40] : -a[N'«(N' + N»)] 1. Le symbole « g » est la lettre initiale du mot « existent », qu'on a renversée parce que la lettre « E » avait été déjà adoptée par Legendre, Théorie des nombres, a. 1808, comme symbole arithmétique ( signifiant « l'entier de »). — 59 —. ' J'ai déjà averti que le symbole « V » n'a pas d'applications [371; toutefois, si « atGls », on pourrait toujours remplacer « a= V », savoir [P 37] « -a= A », par « -a(-a) »; et de même « a-= \J », savoir « (- a) - = A », par « g (- o )». Comparaison entre l'idéographie logique et le langage ordinaire 76. Ainsi, j'ai terminé d'expliquer la signification des seiie symboles logiques préannoncés [16] et qui sont = [23] e [24] Cls [27] = [31,55] A V [37] « (39, 63, 64 P 2, 72 P 29] w [39, 67] o [42, 73] Elm [44] u [45] 3 [58] ,[65] -[69,70] g [75] dont cinq ont un double rôle « => -v w o - »; mais dont le nombre se réduit à treize, parce que les symboles « o A V » ont été abandonnés dans les applications [73, 751. 77. Avant de commencer la Logique déductive — savoir d'étudier les propriétés de ces symboles et par suite d'en constater la puissance comme moyen d'analyse — il ne sera peut-être pas sans intérêt d'en constater la précision comme moyen d'expression, en faisant quelques comparaisons entre l'idéographie logique et le langage courant. Je vais d'abord vous rappeler ces deux P, apparemment semblables, que j'ai déjà analysées [4] : les rubis sont rouges (1) et les mois sont douze (2) dont la première est Y inclusion [31] rubis = rouge tandis que la seconde est l'égalité [23, 38] (Num mois) = 12 Voici deux autres P qu'on dirait presque semblables entre elles : les carrés sont des losanges et des rectangles (3) les animaux et les végétaux sont des êtres vivants (4) mais qui en symboles deviennent [39] carré = losange r\ rectangle être vivant = animal ^ végétal — 60 — Enfin, voici trois P qu'on dirait d'un même type : Homère et Virgile sont poètes (o) Caïn et Abel sont frères (6) Sem et Cham sont frères (7) Ainsi que nous l'avons vu, la première s'écrit [65] : Homère, Virgile s poète mais on ne pourrait pas écrire la deuxième P de la même façon, car le mot « frère » n'est pas le nom d'une Cls déterminée; si l'on veut exprimer que Caïn était le frère d'Abel, on doit l'écrire [46] : Caïn = i (frère d'Abel)> et ni Tune ni l'autre de ces deux traductions symboliques convient à la dernière P, car Sem ne fut pas le seul frère de Cham (il y avait aussi Japhet); par suite, il faut écrire [24] : Seme(frère de Cham) Ces exemples me semblent suffisants à justifier le reproche d'ambiguïté que j'ai fait au langage ordinaire, dès le commencement, et à justifier aussi mon assertion paradoxale « qu'on n'est pas maître d'un mot, jusqu'à ce qu'on n'ait réussi à s'en passer, en le supprimant ou en le remplaçant! » [3]. On remarquera que dans chacune des sept P, que je viens d'analyser, il y a le mot « sont » et dans les cinq dernières, il y a le mot « et ». Eh bien ! pour les remplacer, nous avons eu recours à sept P symboliques, toutes différentes entre elles, ce qui prouve bien la multiplicité de significations de ces mots « sont » et « et », qui à un esprit non exercé paraîtraient avoir un sens si innocemment uniforme. LOGIQUE DÉDUCTIVE RÉFLEXIBILITÉ, SYMÉTRIE ET TRANSITIVITÉ 78. Incidemment, j'ai déjà employé le mot « relation »; maintenant je vais le préciser. Nous appellerons « signe de relation », ou simplement « relation », — 61 — toute écriture telle qu'on puisse déterminer une interprétation (au moins) de deux variables x et y de manière qu'en plaçant eette écriture entre x et y, il en résulte une P vraie; et nous dirons que ces interprétations sont des valeurs possibles de x et de y par rapport à la relation donnée. Voici des ex. de relations tirés du langage courant : « aime» (Paul aimait Virginie), « hait » (Caïn haïssait Abel), « est un fils de », « est le fils de », « voyage avec », « arrive de », etc. Voici des ex. tirés de l'Arithmétique : « est plus grand que », « est divisible par », « est premier avec », etc. Et voici des ex. tirés de la Géométrie : « est perpendiculaire à », « est parallèle à », « est une projection ou une section ou une translation ou une rotation ou un déplacement de », etc. 79. En 1901, M. Russell publia dans la revue de M. Peano son remarquable mémoire Sur la théorie des relations, qui ôtait toute valeur à certaines critiques à la Logique faites par M. Poincaré1, mais justifiait l'objection défensive de cet illustre mathématicien que voici : puisqu'on avait introduit de nouveaux symboles logiques, qui n'étaient pas de simples combinaisons des anciens, on ne pouvait s'étonner que certaines vérités qu'il avait déclarées irréductibles à la logique, au sens ancien du mot, se trouvassent être devenues réductibles à la logique, au sens nouveau, qui était tout différent2. Cette objection de M. Poincaré me donna l'envie d'analyser la théorie de Russell ; heureusement, dans mon mémoire « Che cos'è una relazionel » (« Qu'est-ce qu'une relation? » publié en 1906 par l'Académie des Sciences de Turin) j'ai pu démontrer que les nouveaux symboles et les nouveaux principes de Russell n'étaient aucunement nécessaires, étant tous réductibles aux symboles et aux principes du Formulaire de 1899 dont M. Poincaré avait pris connaissance et d'où, par conséquent, il aurait pu les tirer, ainsi que je venais de le faire. Il y a donc déjà une théorie des relations; mais, au lieu de la développer, je me contenterai de considérer les propriétés les plus importantes des relations logiques que nous connaissons déjà, savoir des égalités [23], des appartenances [24], des inclusions [31, 32], des 1. Sur la nature du raisonnement mathématique. La science et l'hypothèse. 2. Les mathématiques et la logique, Revue de Métaphysique et de Morale, nov. 1905. — 62 — implications [5-4, 55] et leurs négations [69, 70], c'est-à-dire des symboles « = s => - » (le troisième dans ses deux rôles et le dernier seulement pour ce qui a rapport aux trois autres). 80. D'après Vailati on dit qu'une relation est réflexible si elle subsiste entre x et x, pour toute valeur possible de x [78]. Végalité est ré flexible; en effet, quel que soit x : 41. x = x L'appartenance n'est pas réflexible, parce que le signe « s » est toujours placé entre un individu et une Gis [24]. Nous avons déjà remarqué que l'inclusion est réflexible [31], c'est-à-dire que 42. asCls. =3 .a =3 a (Leibniz) d'où [66 P 6 et 12] 43. xza. => .xza et par suite Vimplication est aussi réflexible (par rapport à une condition quelconque [60]) '. 81. On dit qu'une relation est symétrique si, lorsqu'elle subsiste entre x et y, elle subsiste aussi entre y et x. L'égalité et sa négation sont symétriques, c'est-à-dire : 44. x = y.=>.y = x 45. x- — y.=>.y- = x L'appartenance n'est pas symétrique. L'inclusion et YimjMcation ne sont pas symétriques (sauf lorsqu'il s'agit d'une même Cls ou d'une même condition [80]). En effet, par ex., reptile => vertébré c'est-à-dire « tout reptile est un vertébré », mais g (vertébré - reptile) c'est-à-dire [75 et 72 P 29] « il y a des vertébrés (par ex. des poissons) qui ne sont pas des reptiles »; et par suite [71] vertébré - =3 reptile 1. De ce qui précède il résulte que la négation de Végalité ou de l'inclusion ou de l'implication n'est jamais réflexible. Il y aurait des raisons pour dire que la négation de l'appartenance est réflexible, c'est-à-dire que « x - zx » ; cependant, avant d'affirmer cela, quel que soit x, il faudrait prendre des précautions et engager une discussion très subtile mais dépourvue d'importance pratique. — 63 — De .même, par ex. [64 P 2], xz=o.y = 4: =d:x-+-i/ = 9 mais z-t-y = 9:-=>:x = 5.y = 4 Donc aussi la négation de l'inclusion ou de l'implication n'est pas symétrique. 82. On dit enfin qu'une relation est transitive si, lorsqu'elle subsiste entre x et y et entre y et z, elle subsiste aussi entre x et 3. L'égalité est transitive, c'est-à-dire [64 P 2] : L'appartenance n'est pas transitive, ainsi que nous l'avons déjà vu [33]. L'inclusion et l'implication sont transitives, ainsi que l'avait énoncé Aristote et l'a répété Leibniz, c'est-à-dire que : 41. «=> b.b • c : =3 : a dans sa double lecture : « si tout a est un b et si tout h est un c, alors tout a est un b », « si a implique b et si b impliquée, alors a implique c ». On remarquera que le « => » principal de la P 47 n'a pas changé de lecture; en effet, chacune des formules «aai », 4st », « a => c », soit qu'on l'envisage comme inclusion ou comme implication, est toujours une condition; par suite, ce qui précède le « za » principal est l'affirmation simultanée de deux conditions [63, 64], c'est-à-dire une condition, et de même ce qui le suit; c'est pourquoi le « => » principal de la P 47 est forcément un signe d'implication [34, 55] '. 83. En résumant : l'égalité est réflexible, symétrique et transitive; l'appartenance n'a aucune de ces propriétés; l'inclusion et l'implication sont seulement ré/lexibles et transitives. La comparaison de ces propriétés confirme encore une fois la nécessité de la distinction entre les symboles « = £ =3 » [33, 34, 71]. 1. De l'affirmation simultanée «x- = y.y-=z » on ne peut tirer aucune relation entre x et z. De même pour l'affirmation simultanée «a- = 6.é~=»c» dans sa double lecture. — 64 — Propriété substitutive de l'égalité SA. Mais l'ensemble des trois propriétés que nous venons de considérer [83] ne suffit pas à caractériser l'égalité, parce qu'il y a d'autres relations qui jouissent des mêmes propriétés à la fois; par ex., les relations géométriques « est superposable à », « est équivalent à », « est semblable à », « est projectif à », etc. Le Formulaire énonce une propriété de l'égalité qui sert à la distinguer de toute autre relation : 48. x = y := : xta. => .i/ea Dans cette P, x et y étant donnés, le second membre est une implication entre des conditions par rapport à a; c'est-à-dire : « x= y » signifie que « si x appartient à une Cls [66 P 6], alors, quelle que soit celte Cls, y lui appartient aussi ». C'est exact; mais, à mon avis, cette P n'a pas la forme la plus convenable pour des applications immédiates. Je préfère dire que légalité est caractérisée par la propriété substitutive, savoir que : si « x=y », alors « en remplaçant x par y dans une écriture quelconque, la signification de celte écriture ne change pas ». Pour exprimer cela, en se passant du langage ordinaire, il suffit de remarquer que dans nos P les signes se suivent toujours sur une même ligne; c'est pourquoi une écriture quelconque, dans laquelle on rencontre la lettre x, aura nécessairement une des formes « UX », (( XV », « UXV », selon que x est seulement précédé ou seulement suivi ou en même temps précédé et suivi par d'autres signes quelconques, dont je désigne l'ensemble par u et v. Mon principe sera donc énoncé dans tous les cas possibles moyennant les P 49. x = y.=>.ux = uy 50. x = y.zz.xv = yv 51. x = y. ^ .uxu — uyv 83. Voici une conséquence de ces P, qui me semble très importante pour la méthodologie. Dans presque tous les traités d'Arithmétique on rencontre des P telles que : — 65 — a, x, ?/eN.x= y : = : a-t-x = a-hy (1) qui, malgré son apparence, n'est pas une vraie P arithmétique. En effet, si l'écriture quelconque désignée par u dans la P 49 est « a-+- », cette P devient : et ainsi la vérité de cette dernière P reste établie indépendamment de la Cls à laquelle appartiennent a, x, y et de la signification du symbole « -+- ». Et réellement : ne resterait-elle pas vraie même si a, x, y, au lieu d'être des N, étaient des nombres d'une espèce différente ou d'autres choses quelconques (par ex., des longueurs, des angles, des volumes, des forces, des vitesses, des poids, des valeurs, etc.) pour lesquelles on eût donné une signification, n'importe laquelle, au signe «-+-»? et ne resterait-elle pas vraie même si, au lieu du signe «-+-», il s'agissait de n'importe quel autre signe d'opération (par ex., «X», « — », etc.), pourvu que a el x soient des valeurs possibles par rapport à cette opération [94] P1. La P (2), ainsi que ses semblables par rapport à un autre signe d'opération, appartient donc aux applications immédiates de la Logique et n'exige aucune autre condition dans l'Hp; toute tentative de démonstration de P de ce type ne saurait être qu'un paralogisme. 86. Il faut encore remarquer que les P 48, 49, 50 ne sont pas invertissables, c'est-à-dire que « ux = u>j » n'implique pas nécessairement « x = y » ; et de même « xv = yv », « uxv = uyv ». En effet, par ex., du fait que « le père de x = le père dey » on ne peut pas conclure que « x = y », car x pourrait être un frère ou une sœur de y. Donc, toutes les fois qu'une écriture donnée u est telle que « ux=uy» implique «x = y», ce fait constituera une propriété remarquable de cette écriture u. C'est pourquoi, par ex., la P a, x, y&N.a-hx = a-i~y : => :x = y (3) est une vraie P arithmétique, qui énonce une propriété de l'addition ; en effet, s'il y a d'autres opérations pour lesquelles sont vraies les P analogues à la (3), il y en a aussi de celles qui n'ont pas la même 1. Car, si «a: = ,y », cette opération sera forcément possible aussi par rapport à a et y' el le résultat ne pourra être que le même d'auparavant. PADOA. ° — 66 — propriété1. Eh bien! Malgré ce que je viens de dire, si vous prenez au hasard un traité d'Arithmétique, il est plus probable que vous y rencontriez la (1) que la (3) ! Transformation des relations logiques 87. Les relations logiques « = e => » sont liées entre elles par des propriétés très importantes. Nous avons déjà vu [81] que la formule « a = b » (tant comme inclusion que comme implication, selon que a et b sont des Cls ou des conditions par rapport à la même variable) n'implique pas la formule « b => a » (qu'on peut appeler la réciproque de la précédente); mais, lorsque « a =s 6 » et « b => a » subsistent toutes les deux, leur affirmation simultanée (c'est-à-dire « tout a est un b et tout b est un a », ou bien « a implique b et b implique a ») implique « a — b », car les Cls et les conditions sont toujours envisagées au point de vue de l'extension [27, 60]. Donc : 5i». a=»b.b=>a:=3:a—b (Leibniz) La réciproque de cette P, c'est-à-dire : « a — b » implique « a => b .b => a » est vraie seulement si a (et par conséquent aussi b [P 57]) est une Cls ou une condition, ce qu'il faut déclarer, parce qu'on pourrait avoir « a= b » même en d'autres cas. Donc : 53. aeCls. a — b: => : a =3 b.b^sa (Leibniz) et l'on sous entend la P analogue pour les conditions à cause des considérations déjà développées [62]2. 88. Comme le signe « => » est toujours employé entre deux Cls ou entre deux conditions (parce qu'on ne lui donnera pas d'autre rôle outre que ceux d'inclusion [31] et d'implication [55]), j'ajoute aux P du Formulaire les P 54. «cCls.a = b : => : 6sCls 1. Telle, par ex., la détermination du plus grand commun diviseur qui, par es., est i aussi bien pour 8 et 12 que pour 8 et 28, bien que 12 ne soit pas égal a 23 2.'Ainsi que les analogues des P 7, 8 [C6], 14, 17 [67], 24, 26 [70] et, dans la suite immédiate, les analogues des P 54, 55, 57, 58 [88]. — 67 — ôo- l>cCls.a=,6:=i:aeGls qui permettent d'abréger l'Hp de plusieurs P du Formulaire. Ainsi, par ex., à cause de la P 6 [66] et de la P 54, dans l'Hp de la P 56- xza.a=3 b: zz-.xib on n'a plus besoin d'énoncer que « a, 6 t Cls ». On peut aussi remarquer, comme ex. d'application de la propriété substitutive de l'égalité [84], que : 57- «sCls.a = ô.=.6cCls 5S- t>tC\s.a = b.=>.aïCls 89. Pour simple que puisse paraître la relation d'égalité [23] on peut la décomposer. En effet, x étant un objet donné quelconque, 1 écriture « y = x » est une condition par rapport à y [52] ; l'ensemble des y qui la vérifient, c'est-à-dire [38] « y 3 (y=x) „, estIa cls dont x est le seul individu, c'est-à-dire [45] « t x ». Donc : °9- tx = y*[y = x) d'où [60] 60 ■ Ijî(ix). =.y = x Ainsi toute égalité peut se transformer dans une appartenance. On voit par là que le signe « i .» pourrait être lu « égal à » (tandis que le signe « = » se lit « est égal à »). Mais ce n'est pas une lecture qui convienne au langage courant; on ne saurait l'adopter, par ex., pour lire la P [46] « i 2 = Np r, 2 N ». Après quoi, pour la suite des signes « - t » [701 on peut proposer la lecture « différent de » (tandis que «- = ,, se lit « n'est pas égal à » ou « est différent de »); ainsi, par ex., la P [72 P 92] Np-.2=>2N-f-l sera lue « lout nombre premier différent de 2 est un nombre impair ». 90. Moyennant le symbole « >. » on peut aussi transformer toute appartenance en une inclusion; en effet : °^ . xta. rr.iiaa c'est-à-dire [23, 31, 45] : on peut dire indifféremment que x appartient à la Cls a [66 P 6] ou bien que la Cls dont x est le seul individu est contenue dans la Cls a [88 P 54]. — 68 — Ainsi la P 56 [88] devient un cas particulier de la P 47 [82]. 91. Les transformations indiquées par les P 60 et 61 confirment l'importance du symbole « i », dont nous allons considérer quelques autres propriétés fondamentales. D'abord, quel que soit x, moyennant la P 60 [89], la P 41 [80] se transforme ainsi : 62. xzi}x) De cette P, moyennant la P 6 [66] et [74] la P 63. xs.a.=>.%a on déduit, quel que soit x, que : 64. (ije)eCIs 65. a(tœ) On remarquera encore que [44, 45] : 66. cuElm : =t :xta. = .a = uc. = .x — *a 6'7. aeElm . = . 3 x*(a = ix) 92. On peut aussi transformer toute formule d'inclusion ou d'implication dans une égalité, et cela de plusieurs manières, indiquées par Leibniz. En effet, dans le double rôle du signe « => » [31, 55, 39, 34 fig. 2], 68. a ■=> h. = . a r, J = a 69. b-=3 a. = . a « b = a On a aussi, mais seulement pour les inclusions, que [72 P 29] : 70. aeCls.a =j b : = : a- è= A 71. aeCls.b =i a: = :a^ - b—-\/ l 93. Ayant ainsi obtenu la transformation d'une égalité dans une appartenance[89 P60], d'une appartenance dans une inclusion [90P61] et d'une inclusion dans une égalité [92 P 68, 69, 70, 71], on peut aussi obtenir la transformation inverse de chacune d'elles en exécutant successivement les deux autres 2. 1. Pour rendre plus commodes des comparaisons que je ferai, j'ai préféré considérer « a => b » dans les P 68, 70 et « b = a » dans les P 69, 71. On remarquera, dans la P 70, que son premier membre implique « 6e Cls » [88 P 54] et que du second on déduit « (a - i)sCU ». [68 P 20, 8S P 58], c'est-à-dire « (a « - A)eCIs » [72 P 29], d'où « a, -45Cls » [66 P S], d'où •< a, éeCls» [70 P 26]. Et de même pour la P 71. 2. 11 y a des manières plus simples pour obtenir ces transformations inverses; mais ici ce n'est pas le cas d'insister sur cette question. — 69 — 11 est à propos de rappeler ici que la P28 [70] transforme \a négation dune appartenance dans l'affirmation d'une appartenance- par suite, on peut même transformer la négation d une égalité ou inclusion (transformées d'abord en appartenance) dans l'affirmation d une (appartenance, qu'après on pourra transformer en) égalité ou inclusion. En résumé: les différentes relations logiques sont transformables 1 une dans l'autre et même le caractère affirmatif ou négatif d'une assertion n est qu'une question de forme. Propriétés smplificative, commutative, associative ET DISTRIBUTIVE DES OPÉRATIONS LOGIQUES 9-ï. Nous appellerons « signe d'opération », ou simplement « opération », tout signe qui, placé entre deux objets a et b d'un ensemble donné, désigne un objet déterminé du même ensemble; en ajoutant que, parfois, le choix de a et de b, dans l'ensemble donné, est assujetti à des restrictions. Par ex., le signe « + », dans toutes ses acceptions, est un signe d'opération ; car, selon que a et b sont des nombres ou des longueurs ou des angles ou des vitesses etc., l'écriture « a + b » désigne respectivement un nombre, une longueur, un angle, une vitesse, etc. ^ De même pour le signe « — » (moins); saur que, si l'on veut s'occuper seulement des nombres et des grandeurs absolus, il faut assujettir a et b à la restriction que a ne soit pas plus petit que 6. Notre idéographie logique a deux signes d'opérations, savoir « v » [39, 67] et « o » [39, 63] (puisque je ne m'occupe plus du signe « o » [73]); car, selon qu'ils sont placés entre deux Cls ou deux conditions, ils donnent naissance à une Cls (la réunion ou l'intersection des Cls données) ou à une condition (l'affirmation alterne ou simultanée des conditions données). . Tous les deux, et dans le double rôle de chacun, ils ont des propriétés analogues à celles des signes « + » et « x », ainsi que l'avaient remarqué Leibniz et ses disciples [-49,68]; en effet, les deux opérations logiques ont la propriété commutative : 72. avb = b^a 73. a*b = b*,i et la propriété associative : 74. («v4)ue = ^(iuc) 75. {a*b)*c = ar{b « c) — 70 — Mais ces opérations ont aussi une propriété : 76. aiC\s.zs.a^a — a 77. asCls. => .a ^ a —a qu'on peut appeler simplificative, dont ne jouissent pas les opérations correspondantes de l'Arithmétique (car, si « asN », alors « a-+■ a = 2a » et «axa = a2 »). Les propriétés commutative et simplificative avaient été remarquées par Leibniz ; la propriété associative du signe « r, » a été découverte par Boole (a. 1854) et celle du signe « w », par Schrôder (a. 1877). 93. Tout le monde sait que, si « a, b, ceN », alors cx(a+J) = (cX«) + (tXi) et (a^-b)xc = {axc)-h{bxc) ce qu'on exprime en disant que la multiplication est distributive (à ^awcAe et à droite) par rapport à Vaddition. Eh bien! Chacune des opérations logiques représentées par les signes « ^ » et « w » est distributive (à gauche et à droite) par rapport à. Vautre; c'est-à-dire : 7S. CA(d4) = (cAa)"(c4) 7fl.(a"5)"C = (a"c)« (6^c) 80. tv(anii) = (ev(i)A(t4) S/, (a ^ 6) v c = (a ^ c) r, (6 w c) La propriété distributive du signe « a » par rapport au signe « ^ » a été découverte par Lambert (a. 1781) et celle du signe « w » par rapport au signe « r, » par Peirce (a. 1867). Voilà donc un autre manque d'analogie, puisqu'en Arithmétique l'addition n'est pas distributive par rapport à la multiplication1. Les P 79 et 81 sont des conséquences immédiates des P 78 et 80, d'après les P 73 et 72. On peut vérifier chacune des P 74, 75, 78, 79, 80, 81 en exécutant séparément sur la figure 7 [34] les opérations indiquées par leurs deux membres2. 1. On devrait avoir : a+(bxc) = (a + b)x(a + c) ce qui est vrai seulement si « a = 0 » ou si «a+* + c=l». 2. Cette figure représente le cas le plus général, au sens que les trois CIs qu'on — 71 — L'application simultanée des P 78, 79 et des P 80, 81 donne les P 82. {a^b)^(c^d) = (ar^c)^(br,c)^(ar,d)^[br,d) (Lambert) 83. (a ^ b) kj (c ^ d) = (a w c) ^ (b w c) ^ (a w d) ^ (b w rf) qui apprennent à transformer une Intersection de réunions dans une réunùm d'intersections et réciproquement; et dont seulement la première a son analogue pour les signes « + » et « x ». 96. En échangeant entre eux les deux membres de la P 3 (et en y écrivant le signe « ^ », qui y est sous-entendu par la P 2) et de la P 15 [67], on obtient : xe(a (-i b) : = : xea.r^.xs.b Xi (a w b) : = : xsa.^.xeb On peut dire que le signe « e » a la propriété distributive (à gauche) par rapport aux signes >< r. » et « w ». Mais il faut remarquer que ces signes changent de rôle d'un membre à l'autre; car, dans les premiers membres ils désignent respectivement une intersection ou une réunion de Cls, tandis que dans les seconds ils désignent une affirmation simultanée ou alterne de conditions. D'après la P l, les P 13 et 16 permettent de dire, avec la même remarque, qu'aussi le signe « 3 » a la propriété distributive (h gauche) par rapport aux signes « n » et « « ». 97. Le signe « => » a aussi la propriété distributive (à gauche) par rapport au signe « r, », qui conserve ou change son rôle selon que a, b, c sont des conditions ou des Cls : 84. a => b r^ c : = : a => 0.a =3 c (Me Coll, a. 1878 ^ ainsi qu'on peut vérifier, dans le cas des Gis, en se rapportant à la figure 8. Mais le signe « => » n'a pas la propriété distributive à droite par rapport au signe « ^ ». En effet, tandis que (fig. 9) : suppose données partagent le tout dans le plus grand nombre possible de Cls. On obtient tous les cas particuliers, en imaginant qu'une ou plusieurs des huit Cls obtenues soient égale à rien [37]. 1. Leibniz avait énoncé seulement que a =a à . n = c : => : a = b r,c Pour abréger, dans les formules du type « a = (i /-. e) » ou « (6 /-* c) => a » on sous-entend les parenthèses [P 84,85]; et de même pour les formules du type « a = (6 v c) » [P 86] ou « (b « c) = a » [P 87]. — 7:2 — 85. b = a.c => a: =3 : br~.c => a (Leibniz) « b r\ c => a » n'implique pas « b => a. c => a » (fig. 10). a Fig. 8. Fig. 9. L'analogie entre les propriétés des signes « n » et « w » (telle qu'elle résulte, par ex., de la comparaison des P 72, 74, 76, 78, 80, 82 avec les P 73, 75, 77, 79, 81, 83) justifierait l'attente que le signe « => » eût la propriété distributive à gauche aussi par rapport au signe « « ». Fig. 11. Fig. 12. Mais le signe « =3 » n'a pas du tout la propriété distributive par rapport au signe « « », ni à gauche ni à droite. En effet, tandis que (si a, b, c sont trois Cls ou trois conditions) — 73 — 86 ■ «=» i-^-a =>c: = :a=6wC (Me Coll, a. 1878) (ainsi qu'il résulte de la fig. 11, même en y échangeant entre elles les lettres b et c), « a = b u c » n'implique pas « « = /,...a => c » (fig. 12). Encore (fig. 9) de la P 87 ■ b^c=>a: = :b=>a.c=i <z(Mc Goll, a. 1878 ') (qui relie le signe « =, ,> aux signes « v, ,, et « « », dont celui-ci est isous entendu) on déduit2 b^czs a: zd:/j =3 a.^.c=>a mais « b =s a.w.e = a » n'implique pas « 6 w c =j a » 13. (ainsi qu'il résulte de la figure 13, môme en y échangeant entre elles les lettres 6 et c). Dans la suite [115] il résultera que ce manque d'analogie, entre les propriétés des signes « ~ » et « w » par rapport au signe « => »>, est tout à fait apparent. Autres propositions remarquables 98. Les P 42, 57, 52 énoncent des propriétés du signe « => » qui ont leurs analogues pour le double signe arithmétique « ^ » (qui est l'affirmation alterne des signes « < » et « = »). En effet : si « a, i, csN », alors a^a a^b.b^c:-=3 :a-^c a^b.b^a: => : a = b Il y a d'autres propriétés pour lesquelles subsiste cette analogie 1. Leibniz avait énoncé seulement que 6= a . c=> a:z> : 6 v c=> a. 2. Cette P a une importance momentanée, en vue de notre discours; mais elle est dépourvue d'intérêt, étant comprise dans la P 87 [note à la p. suivante]. — 74 — (et celle, déjà remarquée, entre les signes logiques « ^ », « r-, » et les signes arithmétiques « -+- », « X »)• Par ex., si « a, b, c, d eN », alors «^/). = .o+c^4 + c a^b.=i .axc^bxc a ^ b .c ^ d : => : a -+- c ^ b -+- d a^b.c^d: ■=> : axc^bxd Et de même, si a, b, c, d sont des Cls ou sont des conditions, alors (d'après Leibniz) : SS.aaè.D.avCD^c 89.a=)b.^.anc=>b^c 90. azD b.c^ d: = : a *■ c => i ^ d 91. a^ b.c zd d : =s : a ^ c => b ^ d Fig. 14. ainsi qu'il résulte de la flg. 11 pour les P 88, 89 et de la fig. 14 pour les P 90, 91. Mais cette analogie n'est pas complète; en effet, elle subsiste pour les deux premières des P 93. bzDav b 95. a n b ■=> b 92. a zd a v b 94. a r* b =3 a remarquées par Leibniz et qui sont valables soit pour des Cls que pour des conditions (et que, dans le premier cas, on voit vérifiées dans les fig. 3 et 4 [p. 38]), tandis que les deux autres n'ont pas leurs analogues dans l'Arithmétique1. 99. Si a est une Cls, dire que « b = - a » signifie que « b est la Cls contraire de a » [70]. Cette dernière relation étant symétrique [81], il s'ensuit que : 1. Des P 95, 93 on déduit (soit pour des Cls que pour des conditions), moyennant un syllogisme [P 47], que 96- b=-a. = .a — ~b Si « est une Cls, dire que « b => - a » signifie que b est disjointe de a » [40]. Cette dernière relation étant aussi symétrique, il s'ensuit que 97. b => -a. = .a => - b Donc : tandis que chacun des deux couples de signes « - = >, et « = - » forme une relation symétrique [P 45, 96], des deux couples « - =j » et « =3 - » le second seulement est symétrique [P 97]; car, par ex., « N - =j Np » mais « Np =j N » [35]. En remplaçant a par « - a » et en se souvenant de la P 25 les P96, 97 deviennent : 98. b = a. = .-a = -b 99. b=,a. = .-a=>~!> Ces quatre P (qui sont valables aussi bien pour des Cls que pour des conditions) et la P 25 énoncent des propriétés du signe logique « - » qui sont analogues à celles du signe arithmétique « — « dans la théorie des nombres relatifs (signés), pourvu qu'on remplace « =3 » par «^» [98]. Mais, môme ici on n'a pas une analogie complète. En effet, par exemple, la P arithmétique (—a)X(—b) = axb n'a pas son analogue dans la logique; car, si « a, 4eC1s », la Cls " (- a) ^ (- b) », au lieu d'être égale à la Cls « a^b », en est disjointe. 100. Nous verrons [105] que, dans quelques raisonnements faux, de l'Hp « a e Cls . a => b » on prétend tirer la Ts « g b » [75]; mais, pour que cette Ts soit légitime, il faut savoir aussi que « g a » (ce qui rend superflu d'énoncer que « a s Cls » [P 39]), car autrement l'Hp pourrait être vérifiée par « a = b= /\ ». Donc : 100. ga.a => b : => : 36 c'est-à-dire : « s'il y a des a et si tout a est un b, alors il y a aussi des b ». En général, on ne peut tirer une affirmation d'existence d'une Hp qui n'en renferme aucune, au moins dans la forme d'appartenance [P63]. — 76 — Syllogistique •101. Le syllogisme est la forme de raisonnement que les scholastiques ont toujours considérée comme le pivot de la Logique déduc-tive, jusqu'à identifier celle-ci avec la Syllogistique. Comme les scholastiques distinguent 19 modes du syllogisme et que nous n'en considérons qu'un (dans ses deux formes : collective [P 47] et individuelle [P 56], dont la seconde est une particularisation de la première [90]), on croit que notre Logique est plus restreinte que la Logique scholastique. Mais, au contraire, tandis qu'un si grand nombre de modes du syllogisme n'est qu'une illusion due aux moyens imparfaits dexpression dont se servent les scholastiques, nous avons déjà énoncé 100 P (et nous en verrons bien d'autres) dont 2 seulement sont des syllogismes! L'analyse que je vais faire de la syllogistique (et qui ne se trouve pas dans le Formulaire) sera fatigante et peu agréable; mais le but que je me propose est justement de persuader les futurs professeurs de Logique de ne plus fatiguer leurs élèves avec des leçons inutiles sur celte question. 11 me faut donc affronter et abattre des moulins à vent; en effet, comme la plupart des hommes croient encore qu'ils sont des géants, si je les évitais, quelqu'un pourrait croire que j'en ai peur! Je vais donc adopter la langage des scholastiques. 102. D'abord on distingue quatre espèces de jugements, à savoir : universel affirma tif, universel négatif, particulier affirmatif, particulier négatif; et on les représente en cet ordre par les voyelles A, E, I, O. Donc, a et b étant deux Cls données, l'on a : A) « tout a est un b », E) « nul a n'est un b » ou bien « tout a est un non b », I) « quelque a est un b », 0) « quelque a n'est pas un b » ou bien « quelque a est un non b ». En symboles [31, 70, 71, 75, 39, 72 P 29] : A) « a => b », E)iaa-i », I) « g [a r\ b) » 0) « g (a - b) ». Comme tout syllogisme se compose de trois propositions, les scho- — 77 — lastiques distinguent les modes du syllogisme selon l'espèce A, E, I, 0 de chacune des trois propositions. Or, en changeant de toute' manière possible l'espèce A, E, I, 0 de chaque proposition, le nombre des modes du syllogisme serait « 4x4x4 = 64 »! Heureusement la plupart ont déjà été éliminés comme faux, par les scho-lastiques eux-mêmes; mais il en resterait toujours un bon nombre, à savoir 19 ! 103. Les deux premières propositions de chaque syllogisme s'appellent prémisses, la troisième conclusion. Dans tout syllogisme il doit y avoir seulement trois termes : on appelle respectivement petit terme et grand terme le sujet et l'attribut (ou prédicat) de la conclusion; et on appelle terme moyen un terme qui doit se trouver seulement dans les prémisses, une fois avec le grand terme (et c'est la prémisse qu'on dit majeure) et l'autre avec le petit terme (et c'est la prémisse qu'on dit mineure). Pour fixer les idées, j'indiquerai toujours par a, b, c (en cet ordre) le petit terme, le terme moyen et le grand terme '. On distingue quatre figures du syllogisme, selon le rôle du terme moyen : dans la première figure, b est sujet par rapport à c et attribut par rapport à a ; dans la deuxième figure, b est toujours attribut; dans la troisième figure, b est toujours sujet; dans la quatrième figure, b est, attribut par rapport à c et sujet par rapport à a. Il y aurait 4 modes de la première figure, 4 de la deuxième, G de la troisième et 3 de la quatrième, auxquels on a donné des noms mnémoniques dont l'importance réside dans les voyelles; en effet, dans chaque nom il y a trois voyelles qui désignent, dans cet onlre, l'espèce [102] de la majeure, de la mineure, et de la conclusion -. 104. Voici ces 19 modes du syllogisme, exprimés par nos symboles, avec leur noms scholastiques à côté. Première figure 1) b=tc.azDb:^:a=>c bXrbkrX 2) b=}~c.a^b: =2-.az3~c cElArEnt i. Que d'habitude on représente par les lettres S, M, P (Sujet, Moyen, Prédicat). 2. Petrus Hispanus, ponlifex sub nomine lohannes XXI (m. 1-221). — 78 — 3) b=>c.^[{ar, b) : => :g(a^c) d\rll 4) b r> - c.g(a ^ é) :=> : a(a-c) /"ErlO Deuxième figure 5) c=>-b.a=>b: =>:a=3-c cEskrE 6) c Z3 b .a ■=> - b : zs : a -=3 - c ckmEstrEs 7) c=a -6.g(a^6) : =3 : 3 (a - c) fEstlnO 8) c=)è.a(a-6) : =3 :a(a-c) ÔArOcO Troisième figure 9) 6 => c.6 => fl : =3 : g(a^c) dkrkptl 10) y(è^c).A =3 a : = : a(«^c) dlsAmls 11) 6 =3 c.g(^a) : =3 : a(«^c) dA/FsI 12) b =-c.6 => a: = :g(a-c) [ElkptOn 13) g (6 - c). 6 = a : => : g (a - c) 1/OcArdO 14) 6 =3-c.a(^^a): = : a(«-c) /EHsOn Quatrième figure 15) c = 6. ô =3 a : =3 : a i'a ^ c) brkmkntlp 16) c=>6.6=3-a: = :a = -c cAmEnEs 17) a(c ^ &)■& => a : => : a(ar^c) rflmAî-k 18) c => - 6.6 =3 a : =) : a (a - c) /'EsApO 19) c =3 - A. a (* ^ «) : =3 : a (a " c) /»'EsIhO« 105. Ou remarquera d'abord que, moyennant la P 73  : a n b = b r, a et son analogue b ^ c = c « 6 le /)«/('.<( (11) se réduit au $ara (3), le Ferison (14) au Ferio (4), le Dimaris (17) au Disamis (10) et le Fresinon (19) au Festino (7). On remarquera ensuite que, moyennant la P 97 [99^ et son analogue 6=3-c.=.c=3-£ le C'esare (5) se réduit au Celarent (2), le Festino (7) au .Ferio (4), le Camenes (16) au Camestres (6) et le Fesapo (18) au Felapton (12). La P 96 [99] b=-a. = .a — -b et ses analogues nous permettent par exemple d'appeler «- d» et «rf » les Cls qu'on nommait « c » et « - c », ou celles qu'on nommait « b » — 79 — et « - * ». Dans le premier cas, sauf le remplacement partout de la lettre d à la lettre c (ce qui n'a aucune importance), le Celarent (2) se réduit au Barbara (1), le Ferio (4) au Darii (3) [P 29] le Felapton (12) au Darapli (9) et le Docardo (13) au Disamis (-10;. Dans le second cas, saufle remplacement partout de la lettre d à la lettre b, le Cameslres (6) se réduit au Cesare (5) _ qui a déjà été réduit au Celarent (2), qui à son tour a déjà été réduit au Barbara (1) -et en même temps le Baroco (8) se réduit au Festino (7) — qui a déjà été réduit au Ferio (4), qui à son tour a déjà été réduit au Darii (3). Maintenant nous pouvons échanger entre eux les noms des Cls a et c; alors le Disamis (10) se réduit au Darii (3), à cause de la propriété commutative [P 78] du signe « a » d'intersection et du signe « ~ » sous-enlendu d'affirmation simultanée [P 2]. Quant au Darii (3), de son Hp on tire [P 73, 89] la formule g (a n b). a « b =3 a « c dans laquelle on trouve seulement deux termes (à savoir « a n 6 », « « n c ») et d'où l'on tire la Ts « g (a ~ c) » comme application rârae-diale de la P 100. En résumant, il nous reste seulement les syllogismes en Barbara (1), en Darapli (9) et en Bramantip (15). Mais ces deux derniers sont faux1; en effet leurs Ts sont des affirmations d'existence, tandis que leurs Hp n'en renferment aucune, pas même sous forme d'appartenance [400]2. Il nous reste donc seulement le syllogisme en Barbara (1), c'est-à-dire la propriété transitive du signe « => » [P 47], ou syllogisme en forme collective. Si on pose à côté, comme cas particulier [90], le syllogisme en forme individuelle [P 56], toute la Sgllogistique vient se trouver résumée dans ces deux P! 106. J'ajouterai un mot au sujet du sorite, qui n'est autre chose que l'application répétée, autant de fois que l'on veut, du syllogisme en Barbara. 1. Ainsi que ie Felapton et le Fesapo, équivalents au Darapti. 2. La fausseté des modes traditionnels du syllogisme, moyennant lesquels de deux jugements universels on voudrait déduire un jugement particulier, a été reconnue séparément par Jliss Ladd (a. 1883), Sclirôder, Nagy, Peano, etc. C'est un des premiers et des plus remarquables résultats de l'adoption d'une idéographie logique. — 80 — C'est-à-dire que : étant donnée une succession de Cls (ou de conditions), telles que (dans l'ordre donné) chacune (sauf la dernière) soit contenue dans (implique) la successive, on pourra conclure que la première est contenue dans (implique) la dernière. Par exemple, a, b, c, d, e étant des Cls (ou des conditions), 101. azi h.b => ce => d.d=> e : ■=) : a=) e Dans le cas des Cls, la première (seulement) des inclusions et la Ts peuvent être remplacées par des appartenances par rapport au même individu; c'est-à-dire, par ex. : 102. xib.b => c.c => d.d =a e : 2» : xee Relations entre les symboles « ~ « - » 107. Les idées représentées par nos symboles « ^ w - » sont reliées entre elles par quatre relations, qui ont été découvertes par De Morgan (a. 1838) : 103. -(a^b) = {-a)r,{-b) 105. flvl = .[j.fl)n(.J)] 104. -j(inJ) = (.a)u(.J) 106. a^b — -[(-a)^{-b)} En supposant d'abord que a et b soient des Cls quelconques, conjointes ou disjointes [lig. -4 ou 6, p. 38] : tout individu, qui n'appartient pas à leur réunion, n'appartient ni à l'une ni à l'autre, et par suite il appartient à l'intersection des Cls contraires, et réciproquement [P 103]; de même [fig. 3] : tout individu qui n'appartient pas à leur intersection, n'appartient pas à une au moins de deux Cls données, et par suite il appartient à la réunion des Cls contraires, et réciproquement [P 104]. En adoptant la terminologie de Leibniz et de ses disciples [39], la lecture de ces deux P devient très suggestive : « la négation d'une somme est le produit des négations de ses termes, » « la négation d'un produit est la somme des négations de ses facteurs; » dont la seconde serait, d'une certaine manière, la propriété logarithmique de la négation, étant tout à fait semblable à la P arithmétique bien connue : « le logarithme d'un produit est la somme des logarithmes de ses facteurs ». — 81 — Maintenant, comme on peut transporter le signe « - » d'un membre à l'autre d'une égalité [P 96], on passe des P 103 et 104 aux P 105 et 106, qu'on peut énoncer ainsi : « La réunion de deux Cls est le contraire de Vintersection de leurs contraires » [P 105]; « ^intersection de deux Cls est le contraire de la réunion de leurs contraires » [P 106]. Ainsi donc la P 105 nous donne une manière d'exprimer une réunion par une intersection et la P 106 nous donne une manière d'exprimer une intersection par une réunion. D'où il paraît que, le signe « - » étant connu, on pourrait conserver un seul des signes « ^ » et « ^ », celui qu'on voudrait, en se passant de l'autre. Ce n'est qu'une remarque de possibilité, car les deux signes considérés sont si commodes qu'on ne saurait conseiller de renoncer à aucun d'eux. 108. Comme exemple d'application de nos procédés idéographiques, je vais montrer comment de la vérité des quatre P, dont je viens de parler en supposant que a et b étaient des Cls, découle celle des mêmes P, en supposant qu'a et b soient des conditions par rapport à une même variable. En effet, si a; est cette variable, on pourra déterminer [60] deux Cls «ett! telles que xtu=za xzv = b (1) Comme u et v sont des Cls, elles vérifient la P 103, c'est-à-dire - [u ^ V) = (- U) r^ (- v) En opérant sur les deux membres de cette égalité par l'écriture « x s » [P 10], on obtient XE-(«u»)=ïs[('l')n (- V)] Dans le second membre on peut distribuer l'écriture « x i » par rapport au signe « ^ » [96]; on obtient ainsi xs~(u^v): = :xs-u . ^ . x z - v Puisque « et» sont des Cls, « - (m ^ v) », « - u » et « - v » sont aussi des Cls [P 14, 24] ; on peut donc transposer partout les deux signes « i » et « - » [P 28], après quoi on peut même transposer partout x et « - » [P 22]; on obtient .[xe(u^v)]: = :'{xeu).r,.-(xtv) PADOA. — 82 — Dans le premier membre on peut distribuer l'écriture «n« par rapport au signe « ^ » [96] ; donc -[it».u,i£ti]: = :-(j;E«).n.-(ït») Maintenant, en remplaçant « x s u » et « x t v » par a et b (1), on retrouve la P 103 dont nous sommes parti et qui résulte vraie aussi dans le second rôle des signes « w » et « r\ ». Et de même pour les trois autres P [107]. 109. Mais ce qu'il y a de plus remarquable dans les quatre P dont nous nous occupons, c'est que, pour passer de la P 103 à la P 104 (et réciproquement) ou de la P 105 à la P 106 (et réciproquement), il suffit d'échanger entre eux les signes « ^ » et « ^ » (et par suite. dans la lecture de ces P, il suffit d'échanger entre eux les mots « réunion » et « intersection », ou les anciens mots « somme » et « produit »). Cette propriété est tout à fait analogue à celles qu'on rencontre dans la géométrie, projective, dont les P restent vraies en y échangeant entre eux les mots point et droite dans le plan, point et plan dans l'espace, droite et plan dans la gerbe. L'ensemble de ces propriétés est appelé par les géomètres « loi de dualité. ». Dualité logique 110. Il y a donc une loi de dualité (ou de corrélation) aussi dans la Logique [109]; c'est M. Peirce qui en 1867 lui donna ce nom et lui reconnut une étendue que les seules P de De Morgan [107] ne permettaient pas de soupçonner. D'abord je précise, le plus grand champ d'application de la dualité logique. Cette loi s'applique (comme on verra tout de suite [111]) à toute P dans laquelle chaque variable représente une Cls et — en dehors des écritures du type « a e Cls », ««,6e Cls », etc. et des signes de ponctuation — on trouve seulement les symboles = => w^ A V - Elle s'applique aussi aux P à double rôle, c'est-à-dire dans lesquelles les variables sont toutes des Cls ou toutes des conditions, et — 83 — par suite, en dehors des variables et des signes de ponctuation, on n£ trouve que les symboles mais, môme en ce cas, on opérera comme si chaque variable devait représenter une Cls, pour interpréter ensuite la P corrélative comme 1 a double rôle. 111. J'appelle transformation corrélative celle au movende laquelle, une P du type considéré [110] étant donnée : 1) tout « w » de réunion est changé en « ^ »; et, réciproquement, tout « r, » d'intersection (même sous entendu, dans des écritures du type «a-b»[P 29]) est changé en « w » ; 2) on échange entre elles les deux Cls entre lesquelles se trouve un « => » d'inclusion; 3) tout « A » est changé en « V », et réciproquement. On ne doit pas faire d'autres changements; par suite, les symboles « = », « - » et les signes de ponctuation demeureront toujours invariés, ainsi que le symbole « w » d'affirmation alterne, le symbole « ^ » d'affirmation simultanée (ordinairement sous entendu [P 2]), le symbole « =3 » d'implication et les variables, sauf dans le cas 2). Ainsi la transformation corrélative résulte réciproque par définition, c'est-à-dire : si y. est une P du type considéré et si [3 est sa corrélative (obtenue en assujettissant a à la dite transformation), alors la corrélative de S est derechef *. 112. Avant de justifier la loi de dualité (selon laquelle, si une P du type considéré [MO] est vraie, alors sa corrélative [111] aussi doit être vraie), il est bon de se familiariser avec la transformation cor-relative. Commençons par les P les plus simples, dans lesquelles on trouve seulement les symboles « = ^ ^ »; il y a dualité entre les P 72 et 73 [94], 7-i et 73 [ibid.], 78 et 80 [93], 79 et 81 [ibid.], 82 et 83 [ihid.]. Si l'on veut des P corrélatives dans lesquelles entre aussi le symbole « - », on n'a qu'à observer les P 103 et 104 [107], 103 et 106 [ibid.], ainsi que je viens de dire [109]; tandis que les P 68 et 69 [92], 92 et 9-1 [98], 93 et 93 [ibid.] nous offrent des couples de P corrélatives dans lesquelles entre aussi le symbole Celles-ci sont toutes des P à double rôle dans lesquelles, en opérant comme si chaque variable devait représenter une Cls [110], on — 84 — ne trouve que les symboles « w ^ => » qui soient assujettis à la loi de dualité. Mais, par exemple, dans la P 84 a=)b^c: — :a^b.a=>c on trouve deux « r> » (dont un sous entendu entre « a ■=> b » et « a = c ») dont le premier seulement est assujetti à la transformation corrélative (car, si a, 6, c sont des Cls, le premier est un symbole ^intersection, tandis que le second est tout de même un symbole d'affirmation simultanée); donc sa corrélative est la P 87 è^->c=>a: = :bz3a.c^a Pour un autre exemple, dans la P 88 a3 J.D.a^cD Jwc il y a trois « => » dont seulement le premier el le troisième sont assujettis à la transformation corrélative (car, si a, b, c sont des Cls, ils sont des symboles d'inclusion, tandis que le deuxième est tout de même un symbole d'implication) ; donc sa corrélative est la P 89 b Z3 a . Z3. b r->C -=3 ttr^C Ainsi donc la P 90 a pour corrélative b=>a.d=3c:^:b<^dz3a<^c c'est-à-dire (en échangeant entre elles les lettres a et b, et aussi c et d) la P 91 ODj.cD(i:3;anCDèn(l On se tromperait donc en croyant réciproques entre elles des P telles que les P 85 et 86 car on assujettirait à la transformation réciproque un symbole d'affirmation simultanée (le « ^ » qui est sous entendu dans la première) ou d'affirmation alterne (le premier « w » de la seconde). Ces P ont respectivement pour corrélatives les P — 85 — a=>b .a=>c:=>:a=> b ^ c 108. t>=>a.^.c=>a:=>:br,c^a (Me Coll, a. 1878.) 113 Nous avons donné plusieurs exemples de dualité entre des P a double rôle [112]; maintenant, nous allons en donner entre des P qui appartiennent exclusivement à la théorie des Cls. Les P 18 et 19 [68] sont corrélatives entre elles, ainsi que les P A £ Cls v £ cis (dont se compose la P 20, à cause de la P 4), ainsi que les P 32 et 34 [74], 33 et 33 [ibid,], 36 et 37 [ibid.], 70 et 71 [92] '. 114. Ainsi qu'il arrive dans la géométrie projective [109]. il y a des P logiques qui (sauf un changement de lettres, sans aucune importance) ont pour corrélatives les mêmes P; on peut les appeler auto-corrélatives. C'est le cas, par exemple, du syllogisme en Barbara dans sa forme collective [82 P 47,105] a => b . b => c : =3 : a => c (1) que la dualité transforme dans la P b=>a.c^b: =3: c=3a (d'où, en appliquant au signe «^» sous-entendu la propriété com-mutative [P 73] et en échangeant entre elles les lettres a et c) on retourne à la (1). De même pour le sorite dans sa forme collective [P101]. Parmi les P auto-corrélatives il y a aussi des égalités sur lesquelles la dualité ne produit d'autres effets que l'échange des deux membres entre eux; par exemple, la P de Schroder (a. 1890) / 09. (flu})n({u()r,(cus)=:(ar,J)u(Jnc)u(cn(l) qui est vraie pour les deux rôles des signes « ^ » et « w» et que l'on peut vérifier pour les Cls dans la fig. 7 [p. 70]2. 1. Parmi les P que nous avons eu l'occasion de remarquer, sont aussi corrélatives les P7[66] et li [67], 8 et n [ibid.], ai et 55 [88], 76 et 77 [94]; tandis qu'il y a seulement une apparence de corrélativité entre les P 3 [611 et 15 rS71, 13 [661 et 16 [67]. 2. La transformation réciproque ne produit aucun effet sur les P 24, 25, 26 [70], 96, 98 [99]; elle produit un simple échange de lettres dans la P 99 [99] et la commutation d'une affirmation simultanée dans les P 52, 53 [87]. Donc ces P sont aussi auto-corrélatives. — 86 — 115. L'idéographie logique adoptée par M. Peano ajoute aux autres mérites celui très remarquable de rendre très aisée et immédiate la transformation corrélative [111], parce que cette transformation s'obtient en renversant les caractères typographiques qui correspondent aux symboles à transformer l. La loi de dualité, dont il me paraît superflu de relever l'importance intrinsèque, nous offre aussi le pourquoi de certains faits que par d'autres voies on n'avait pas expliqués; par exemple le fait que chacun des signes «^» et « r\ » a la propriété dislributive par rapport à l'autre (parce que les P 78 et 79 [95] ont respectivement pour corrélatives les P 80 et 81), tandis que le signe « =j » a la propriété distribulive (à gauche) par rapport au signe « r\ » mais non (ni à gauche, ni adroite) par rapport au signe «^» [97]. En effet la P 84 n'a pas pour corrélative la P fausse [97] a^b^c: — :a=>b.^.az3C mais la P 87 JuC3fl: = :iDa,e3(i et ainsi la Iransformation corrélative nous conduit d'une P dans laquelle entrent deux « r^ » (dont un sous entendu) à une P dans laquelle entrent un « <~i » et un «^» (sous entendu), sans que cela forme aucunement un cas d'exception. 116. Je m'attends à la question suivante : d'où tire-t-on la certitude que, une P vraie du type considéré [110] étant donnée, sa corrélative [111] aussi doit être vraie? Dans quelques éditions du Formulaire (par exemple celle de l'an 1902) on dit que « la loi de dualité dépend des deux points de vue de l'extension et de la compréhension, sous lesquels on peut envisager les « Cls » [26]. Examinons la valeur de cette explication. 1. Cela est évident pour les signes « v n », « /\ V » ; en outre, les signes « = - » ne changent pas en les renversant. Le signe « => » deviendrait « <= », et en effet, la formule corrélative de « a => b » serait « a = b » [31]; mais l'on préfère écrire à sa place « b => a », en conservant ainsi le symbole « = » [32] et en échangeant entre elles les variables [Ht]. — 87 — Nous avons déjà remarqué [27] que, les Cls a et b étant données, si « a contient b » au point de vue extensif, alors « b contient a » au point de vue compréhensif; et réciproquement. Donc, dans le passage d'un langage à l'autre (de l'extension et de la compréhension) la formule « a => b » devient « b =3 a », c'est-à-dire qu'elle est assujettie à la transformation corrélative [lit]. Admettons pour un moment (ce qui n'est pas vrai1) que cela arrive sans exception pour toute formule composée moyennant les symboles considérés [110]; quelle conséquence pourra-t-on en tirer? Ce ne sera pas la loi de dualité, mais la dualité entre les deux langages dont je viens de parler; au sens que, si par exemple y. est une P du type considéré [MO] qui soit vraie dans un des deux langages, la P p qu'on obtient en assujettissant a il la transformation corrélative devra être vraie dans Vautre langage; de manière que y. et H exprimeraient un même fait par deux langages différents/ Or la loi de dualité, dont nous avons vu de nombreuses applications, [112, 113] dit tout autre chose: et précisément que, si a est vraie dans un des deux langages (pour nous celui de l'extension [27]), fi aussi est vraie dans le même langage; de manière que (sauf le cas des P auto-corrélatives [114]) a et fi expriment dans le même langage deux faits différents! 117. Il faut donc démontrer la loi de dualité moyennant l'analyse des symboles dont il s'agit [110], en les considérant toujours au même point de vue (par exemple celui de l'extension, ainsi que nous l'avons fait jusqu'à présent) K Soit y. une P du type considéré [MO]. Pour compliquée qu'elle soit, au moyen des substitutions litlé- 1. Je me propose de .justifier ailleurs cette assertion, qui est contraire à l'opinion commune; ici il n'est pas nécessaire de le faire, parce que ce n'est pas sur elle que s'appuie ma réfutation. 2. Ma première démonstration de la loi de dualité, que j'avais donnée à ce point de la leçon, présupposait plusieurs notions de Méthodologie, dont j'avais dû anticiper concisément l'exposé. Maintenant, pour suivre un ordre plus systématique, je préfère en différer la publication (voir la note en tête de cet ouvrage) et la remplacer ici par une autre démonstration dont l'idée, un peu vague, m'a été suggérée, dans une conversation, par le prof. \i. E. Levi, de l'Université de Gênes. rates opportunes (dont je vais donner un exemple en note), on peut la transformer de manière qu'elle se compose seulement des formules du type «a=A», «a=V», «a = ù», «a = ~b» (I) dans lesquelles a, é, c,... sont des Cls; ces formules étantre/imentre elles par des signes «w» d'affirmation alterne, « o» sous entendus d'affirmation simultanée, « => » d'implication, « = » d'égalité entre des conditions, outre que par des signes de ponctuation '. En assujettissant la P a à la transformation réciproque [111], on obtiendra une P p dans laquelle à la place des formules (I) on trouvera respectivement les formules « ô =» a », «a^6 = c», «a<^b=zc», «a=V», «a=A», «« = 6», «a = -6» • (II) dans lesquelles a, 6, c,... sont aussi des Cls et rtUu entre elles comme les (I) dans la P a. Or, en posant «a' = -a», «6'=-i», «c' = -c »,..., (III) des P connues [P 36, 37, 96, 99, 105, 106] on déduit ô=sa.=:.-a=ï-ô. = .a'=>6' a^* = c.= .-[(-a)r,(.*)] = c. = .(.a)„(_é)__c>_-a/^y_c, °=V- = .-a=^-\/. = .-o=A- = .a'=A a=A- = --a=-A . = .-«=V. = .a'=V « = *. = .- a, = -4. — . a' = è'

  • =-b. = .-a = -(- b) . = . a1 = - b'

1. Gomme exemple des substitutions littérales dont je viens de parler, analysons la formule J a w . b = V (1) qu'on trouve dans la P 71. En posant « c = - b ., par suite de la propriété substitutive de Vegahié [Si] \z (i) devient « a w c = V •; qui, en posant,, awC = rf„f devient « d = y>. Réciproquement, de cette dernière, moyennant les dites substitutions, on retourne à la (1). Par suite, la (1) est équivalente à l'expression c = -b. a^c=d: => : d = \/ qui est formée par trois formules du type (I) (on remarquera que, si dans la (1> a et b sont des Gis, c et d doivent être aussi des Cls [P 2-i, 14, 57, 58]) Ces trois formules sont reliées entre elles par un « « - sous entendu d'affirmation simultanée et par un « => , d'implication, outre les signes de ponctuation (subordon-nement auxquels il faudra modifier ceux de la P dont la formule (1) n'est qu'une partie). ' M — 89 — c'est-à-dire : les formules (II) sont équivalentes ordonnèrent aux formules (I) dans lesquelles a, b, c,... sont remplacés par a\ b\ c',.. A.nsi donc, pour ce qui précède, la P p, corrélative de la P «, est égale à la Pa', qu'on peut obtenir tout de suite de la P * en y remplaçant a, b, c... par a' b' c',... Mais, puisque a, b, c,... sont des Cls, a', b', c',... (III) sont aussi des Cls [P 24, 58]; donc, si la P a est vraie (catégoriquement [52], c'est-à-dire quelles que soient les Cls a, b, c,...), aussi la P*' doit être vraie; par suite, aussi la P p, corrélatioe de a, rfoif être «raie; car, pour ce que je viens de dire, elle est égale à la P «.'. 118. La loi de dualité est donc un moyen sûr de preuve et un moyen aussi puissant que facile de découverte; car, si d'une manière quelconque on parvient à démontrer une P du type considéré [110], la vérité de sa corrélative doit être admise ipso facto (et d'ailleurs sa démonstration ne serait autre chose que le raisonnement corrélatif de celui qui aurait servi à démontrer la première P). 119. Nous savons que lesPà double rôle sont celles dans lesquelles, outre que des variables et des signes de ponctuation, on trouve seulement les symboles et nous savons aussi que ces P sont susceptibles de dualité [110]. Remarquons à ce point qu'on pourrait considérer comme P à double rôle mêmes celles dans lesquelles on rencontre aussi des formules du type « a— A » ou bien «a = V »; pourvu que (au moment de considérer que a désigne une condition par rapport à x, au lieu d'une Cls) on remplace ces formules par « (x 3 a) = A » ou bien « (x s a) = V » (car « /\ » et « V », étant des noms propres [371, ne sont pas susceptibles de plusieurs rôles '). Ainsi, par exemple, si a et b sont des conditions par rapport à x, les P 70, 71 deviennent 1. L'avertissement n'est pas inutile, car on serait tenté de donner un second rôle même aux symboles « /\ V », avec les,significations respectives : condition absurde (ou condition jamais vérifiée, quelle que soit la valeur de la variable) qu'on appelle aussi : fausseté logique ou impossibilité logique; condition illusoire (ou condition toujours vérifiée, quelle que soit la valeur de la variable) qu'on appelle aussi : vérité logique ou nécessité logique. Si l'on voulait représenter ces idées par des symboles spéciaux, il faudrait donc en employer de nouveaux (par ex., « A » et« y >); mais ce qui va suivre [120] montre qu'on compliquerait les choses inutilement. — 90 — a=>i. = .a?3(a-6)=A jDŒ. = .a:3(au-(i) = V c'est-à-dire : « a implique b » signifie qu'i^n'y a pas des valeurs de x qui vérifient a et ne vérifient pas b; « b implique a » signifie que toute valeur de x vérifie a ou ne vérifie pas b. On peut simplifier l'écriture de la dernière P (toujours en supposant que a et b soient des conditions par rapport à une même variable), en l'écrivant ainsi : JDO. = .flw.jl c'est-à-dire : « b implique a » signifie qu'une au moins des conditions a et « - b » est vérifiée, quel que soit x. C'est ainsi que, dès le commencement, nous avons précisé la signification de toute implication [54]. Principes d'identité, de contradiction et du tiers exclu 120. Les (rois principes que je viens de nommer sont exprimés, dans le mémo ordre, par la P 41 x = x (I) (dans laquelle x désigne un objet quelconque) et par les P 110. as Cls.. => .ars-a= A (II) 111. aeCls. =5 .aw-a—V (III) Dans la (II), pour plus de clarté et pour mieux faire ressortir la comparaison avec la (III), j'ai écrit, entre a et « - a » le signe « ^ » que j'aurais pu sous entendre [P 29]. Dans les traités ordinaires de Logique, au principe d'identité on donne souvent la forme un peu vague « A eslA », sans préciser si A désigne une Cls ou une condition ou un objet quelconque, ni la signification donnée au mot « est » ; par conséquent, on ne saurait décider si l'on entend parler des P a = a (Y) ïEfl. = .i£«(l") dans lesquelles a est une Cls, ou des P 41, 42, 43. Mais, sans doute, la P 41 mérite la préférence, parce qu'elle s'applique à tout objet; et en effet les (Y) (I") n'en sont que des cas particuliers. — 91 — On peut aussi exprimer les deux autres principes (II) (III), en se rapportante une condition [119] : x s [x s a . w . - (x t a)] _ y (!!,,-, c'est-à-dire : l'affirmation simultanée d'une condition et de sa négation est une condition absurde [1191]; tandis que : Vaffirmation alterne d'une condition et de sa négation est une condition illusoire [1191]. Au principe (III') on peut aussi donner la forme plus simple [119] : ÏS8.^.-(lSfl) (III") 121. La simplicité excessive du principe d'identité pourrait faire douter de sa fécondité. Dans plusieurs livres j'ai lu, en effet, que de l'affirmation tautologique «t = x » on ne saurait rien tirer; mais il n'en est pas ainsi. Tout le monde sait, par exemple, que x, y, s e N : => : x — y = ; . = . z -|_ y — x c'est-à-dire que : trois nombres qui vérifient l'égalité «x — y = zy> vérifient aussi l'égalité « 2 + y = .r », et réciproquement. Par suite, la vérité de chacune de ces égalités peut servir comme preuve de la vérité de l'autre. Ainsi donc, pour démontrer que a,AsN.3.(a + i) — b = a il suffit de savoir que a, I) s N . => . (a-h b) eN et que (sans aucune Hp) a-+- b = a-+- b c'est-à-dire : un fait arithmétique (qui dépend de la signification des symboles « N » et « + ») et un fait logique (qui ne dépend pas de la signification du symbole «-t-») à savoir une application immédiate du principe d'identité. De même, pour démontrer que a, b s N . a =: b : => : {a — b)-\-b = a — 92 — il suffit de savoir que a, 6eN.a>4. => . (a — J)tN et que a—b=a—b c'est-à-dire : un fait arithmétique et un fait logique, à savoir une autre application immédiate du principe d'identité. Donc le principe d'identité, même dans sa forme lautologique, peut servir comme moyen de preuve. Mais, bien que pour nous le signe « = » signifie toujours « est la même chose que » [23], ce signe ne relie pas nécessairement deux écritures identiques. En effet, par exemple, les polygones équilatéraux et les polygones équiangles forment deux Cls qu'on définit séparément; mais on démontre, d'après Euclide, que triangle équilatéral => triangle équiansle et que ° triangle équiangle = triangle équilatéral d'où il résulte [P 32] que triangle équilatéral = triangle équiangle Cette égalité n'est pas une tautologie. Ainsi que des centaines de P analogues, elle énonce la découverte que deux Cls, différentes au point de vue de la compréhension (c'est-à-dire des propriétés qui les caractérisent), se sont révélées égales au point de vue de Vextension (c esl-à-dire des individus qui les composent); car les mêmes triangles sont en même temps équilatéraux et équiangles. Et celte égalité caractérise les triangles parmi tous les polygones; car un polygone, qui ne serait pas un triangle, pourrait être équilatéral sans être équiangle, ou équiangle sans être équilatéral; c'est pourquoi il faut une troisième locution « polygone régulier » pour désigner les polygones qui sont en même temps équilatéraux et équiangles (par exemple, les quadrilatères, des trois espèces que je viens de considérer, sont nommés losanges, rectangles, carrés). Et ce que je viens de dire pour les Cls pourrait être répété pour les conditions; en effet, par exemple, les formules x — y = z et i-hy = x dont nous venons de nous occuper, sont différentes au point de vue de la compréhension, mais elles sont égales au point de vue de Vextension (car les nombres x, y, z qui vérifient la première, vérifient aussi la seconde, et réciproquement). — 93 — 122. Le principe du tiers exclu [120 (III) (III') (III")] est celui qui est employé le plus souvent dans les mathématiques, comme moyen de preuve, dans les démonstrations qu'on appelle par absurde et qu'il ■vaudrait mieux appeler par exclusion. En effet, on démontre qu'une assertion est vraie, en excluant la vérité de sa négation (ou d'une assertion qui serait impliquée par la négation de l'assertion donnée), savoir en prouvant que sa négation est fausse. Or, si la fausseté de la négation d'une assertion suffit à prouver la vérité de l'assertion donnée, c'est bien en vertu du principe du tiers exclu. (C'est de ce principe que prennent naissance aussi ces raisonnements qu'on appelle dilemmes.) Il serait donc plus exact d'appeler démonstrations par l'absurde celles qui ont pour but de prouver la fausseté d'une assertion, au moyen de la vérité de sa négation; et cela en vertu du principe de contradiction [120 (II) (II')]. Mais, très souvent, dans les démonstrations mathématiques qu'on appelle par l'absurde on a recours aux deux principes à la fois, du tiers exclu et de contradiction. 123. Dans plusieurs traités de Logique scholastique j'ai rencontré des pseudo-réductions de ces trois principes à un seul d'entre eux, n'importe lequel. Eh bien! ces réductions sont impossibles, si l'on n'admet pas d'autres principes. L'emploi du langage idéographique nous donne le droit de l'affirmer a priori; car, pour passer de l'un à l'autre de deux quelconques des énoncés symboliques de ces trois principes, il faut introduire ou éliminer quelques symboles., c'est-à-dire les idées logiques qu'ils représentent. Cela est possible; mais, pour le faire, il faut connaître les procédés qui permettent ces transformations, c'est-à-dire... d'autres principes logiques/ D'où : l'impossibilité de réduire la Logique déduclive à un seul principe. Si cela semble possible dans quelques traités, c'est que le langage ordinaire a tendu des pièges aux auteurs, qui ne se sont pas aperçus avoir recours dans leurs réductions aux principes mêmes qu'ils voulaient démontrer ou à d'autres principes qui n'étaient pas les trois en question. 124. D'ailleurs, cette analyse est bien facile. Le principe de contradiction et celui du tiers exclu [120 (II) (III)] sont corrélatifs [111]; il est donc très aisé dépasser de l'un à l'autre, — 94 — et réciproquement,... pourvu qu'on connaisse une partie au moins de la loi de dualité/ On peut aussi passer du principe d'identité au principe de contradiction ou du tiers exclu, et réciproquement. Pour simplifier les choses, considérons ces principes tels qu'ils se présentent dans la théorie des Cls et supposons connue la P 112. a e Cls .-. •=> .-. a= b : = : a => b . b =a a qui résulte des P 52 et 53, en les résumant moyennant les P 52, 54, 57. En y remplaçant b par a, elle devient a e Cls .•. =3 .•. « = a : = : a => a . a =3 a (1) La propriété simplificalive du signe « <-, » (sous entendu), c'est-à-dire la P 77 appliquée aux conditions, nous donne a e Cls .'.3.'.aD(i.(iD(i: = :(i3(i (2) Les P 70 et 71, en y remplaçant b par a, donnent a e Cls : ■=> : a => a . — . a r-, - a— /\ (3) a e Cls :D:«3ii. = .iju-a=V (4) Enfin, au moyen de la propriété transitive'de l'égalité [P46], des P (1) (2) (3) on obtient la P a e Cls : = :« = «. = .a^-<z=r/\ (5) qui énonce l'équivalence des principes d'identité et de contradiction ; tandis que des P (1) (2) (4) on obtient la P a e Cls :3:a=:fl. = .av-4=:V (6) qui énonce l'équivalence des principes d'identité et du tiers exclu. Mais pour démontrer les P (5) (G) nous avons eu recours aux P 112, 77, 70, 71, 46, c'est-à-dire h cinq autres principes logiques! 125. Les principes de contradiction et du tiers exclu [120 (II) (III)] prennent parfois, pour les Cls, les formes (corrélatives entre elles [1111) '113. ar-.b= A • = . b =3 - a 114. swJ=V. = .-fl = J et les formes (aussi corrélatives entre elles) à double rôle a=> - (- a) - (- a) => a — 95 — dont Y affirmation simultanée est équivalente [P 521 à la formule [P25] - (- a) = a qui, par suite, résume les deux principes de contradiction et du tiers exclu. On démontre une P sans se soucier de ce qu'elle dit 12G. Jusqu'à présent, sauf peu d'exceptions, je me suis contenté de vous persuader (par Yinluition immédiate, par des exemples, par la vision de figures, parle souvenir de vos expériences, par la/a'dtoé d'en faire de nouvelles) de la vérité des P logiques que je vous ai énoncées; c'est-à-dire que j'ai fait de l'empirisme logique, ainsi que l'on fait de Y empirisme mathématique dans les écoles primaires. Maintenant je vais vous donner un exemple de la puissance de nos P logiques comme formes de raisonnement, c'est-à-dire comme moyen de preuve; elles conduisent à ce résultat paradoxal : qu'on peut démontrer une P, même sans se soucier de savoir ce qu'elle dit. Prenons par exemple la P à double rôle 115. a^bzsc^d.=:.ar~,~d=>c^-b qui a été découverte par Peirce en 1880 (et dans laquelle, pour plus de clarté, j'ai écrit le signe « ^ » que j'aurais pu sous entendre entre a et « - d »). En supposant que « a, b, c, d e Cls », et en remarquant [P 7, 14, 24] qu'alors « a r. b », « c w d », «a^-d », « c ^ - b » sont aussi des Cls, je prends les deux membres de la P 115 et je les transforme séparément, moyennant la P 70 [P 29], en obtenant : (a ^ b) ^. - (c w d) — A (a ^ - d) ^ - (c w ~ b) — A d'où, respectivement [P 103, 25], (a ^ b) r> (- c rs - d) = A (a ^ - d) ^ (- c ^ b) = A d'où, en ordonnant (moyennant les propriétés commutative et associative du signe «^» [P 73, 73]), on arrive au même résultat : a r\b r\ - C i~, - d=. A Or, comme toutes ces transformations sont invertibles et par suite — 96 — [P 52] chacun des deux membres de la P 115 est égal à la dernière formule, ces deux membres sont égaux entre eux [P 44, 46]; ce qui prouve la vérité de la P 115 (pour le passage du premier rôle au second, voir le § 108). Sa corrélative serait [111] cr-.d^a^b. = .cr^-l>^a^-d c'est-à-dire la même P (sauf le changement réciproque des lettres a et b en c et d)\ donc la P 115 est auto-corrélative [114]. En l'exprimant par le langage pseudo-arithmétique [39], elle dit que : « un facteur de l'Hp et un terme de la Ts peuvent changer de place, en perdant ou en prenant le signe « - » selon qu'ils en étaient précédés ou non, et en changeant entre eux leurs qualités de facteur et de terme ». Possibilité de réduire le vocabulaire logique a trois symboles 127. A l'occasion d'un cours de conférences que j'ai donné à l'Université de Padoue en 190G, je me suis proposé de choisir un groupe peu nombreux de symboles logiques, au moyen desquels on pouvait exprimer tous les autres; et je suis arrivé à la réduction que je vais exposer et qui est encore inédite. Les symboles que j'ai choisis comme point de départ sont au nombre de trois, à savoir Il résultera donc que, en le voulant, on pourrait se servir toujours et seulement de ces trois symboles logiques; mais ce qui est intéressant c'est seulement la possibilité de cette réduction, car il serait très incommode de renoncer aux autres symboles, et par suite je ne propose pas leur élimination effective. Au contraire, dès que j'aurai défini un symbole1, je m'en servirai pour en définir d'autres, en formant ainsi une chaîne de définitions dont on ne pourrait pas altérer l'ordre d'une façon arbitraire (bien qu'on puisse faire quelques transpositions). 1. Ici on parle seulement de ces Df (définitions) que les scholasliques appellent nominales; et il suffit de savoir que définir une écriture (nouvelle ou qu'on suppose telle) vaut la déclarer égale à une autre dont la signification soit connue; le symbole « = » [23], qui relie entre eux le terme défini et le terme définissant, pourra être lu « signifie ». — 97 — Les P que j'emploie étaient presque toutes connues et je les ai déjà énoncées (toutefois avec quelques modifications que j'y ai introduites en vue du but actuel, que je m'étais proposé dès le commencement); c'est que, dans les questions de ce genre, plus que de découvrir de nouvelles P, il s'agit de découvrir de nouveaux liens entre les P connues. 128. Par la P G8 : a =3 b . = . arsb=za (I) on définit le symbole « => ». Comme je suppose connue la signification du signe « ^ » dans ses deux rôles, à savoir A'intersection et à'affirmation simultanée, le signe « => » résulte aussi défini dans ses deux rôles d'inclusion et A'implication ». On remarquera qu'il n'est pas même nécessaire Rapprendre à lire la formule qu'on définit; car de sa signification (c'est-à-dire de la formule définissante) n'importe qui est amené à trouver la lecture la plus à propos. En effet, dans les explications préalables (dont j'ai touché un mot1), on aura eu soin d'éclaircir les concepts de classe et de condition, en ajoutant que le signe « ^ » sera employé seulement entre deux classes ou entre deux conditions, et de préciser quelle est la nouvelle classe ou la nouvelle condition qui en résulte. Il s'ensuivra ainsi que : 1) si a et b sont des classes, on n'aura « a ^ b= a » que lorsque 1. Dans le Formulaire on trouve la (I) sous la forme a, b e Cls : = : c = è. = .a^6 = a Or, puisque le signe « = » d'implication y est employé comme lien entre l'IIp et la Ts, celle-ci pourrait définir le signe « = » seulement dans le rôle d'inclusion; mais, tandis que moi, pour le définir en même temps dans ses deux rôles, j'emploie seulement les 2 symboles « = r\ », ici il faudrait employer les 6 symboles « = n , s Cls = » (dont le « n » dans le premier rôle et le « => » dans le second). On voit par là comme une petite modification peut avoir des conséquences très importantes. Mais on pourrait me demander si la suppression de l'IIp ne peut produire des ambiguïtés; et je répondrais que non. En effet, d'abord il faudra expliquer (d'une manière empirique et par suite en ayant recours à des eremples, à des figures et même à des concepts qu'après on définira) la signification des symboles par lesquels on entend commencer, et àcette occasion on devra distinguer et préciser les deux rôles du signe « a », et déclarer qu'il n'en aura pas d'autres. Par suite, — comme la Df (définition) I dit simplement que, partout où l'on rencontrera une des écritures « a n b = a » et « a => b », on pourra les remplacer l'une par l'autre, — il résulte (sans aucune Hp) que la nouvelle écriture à aussi deux rôles, bien distingués et bien précisés, et qu'elle n'en aura pas d'autres. padoa. 7 — 98 — « il n'y a pas des a qui ne soient pas des h », à savoir lorsque « tout a est un b » ; 2) si a et b sont des conditions, on n'aura « a rs b = a » que lorsque « a ne peut jamais être vérifiée sans que b le soit aussi », à savoir lorsque « a implique b ». Ainsi, les deux lectures du signe « = », en correspondance de ses deux rôles, seront : « tout... est un... » et « ... implique ... » ou d'autres équivalentes, telles que : « ... est contenu en ... » et « si ... alors ... ». 129. Par la P 59 : ix = y^{y — x) (II) on définit le symbole « t ». Des explications préalables [1281] il résultera que « y 3 (y = x) » est « l'ensemble des valeurs de y, telles que y soit la même chose que x », c'est-à-dire qu'il est « l'ensemble auquel n'appartient que x ». La phrase « l'ensemble auquel n'appartient que... » est donc une lecture possible du signe « t »; si en ce cas on n'en trouve pas spontanément une autre plus concise, c'est que le langage courant ne nous en donne pas; donc, seulement pour des raisons de concision, on pourra conseiller la lecture « isos » tirée de la langue grecque [45,89]. Par la P 61 : ÏE«. = .|J3(1 (III) on définit le symbole « s », moyennant les deux symboles que je viens de définir '. Par ce qui précède, «naa» signifie « l'ensemble, auquel n'appartient que x, est contenu en a », c'est-à-dire en abrégeant « x appartient à a » ou « a; est un a » ; ainsi, on arrive spontanément à la lecture « est un » du signe « e ». 1. On voit par là qu'on pourrait transposer les Df I et II, mais qu'elles doivent précéder la Df III. Dans le Formulaire on trouve la (III) sous la forme a s Cls : = : x e a . = . : x => a qui ne peut pas servir comme Df du symbole « e », car ce signe se trouve déjà dans I'Hp. — 99 — Par la P 4 [P 2] x,yea:^=:xta.^.yza ^\) on définit le symbole « , >, moyennant le symbole « e » que je viens de définir '. Le langage courant suggère immédiatement de lire l'écriture « ... ,... s... » comme il suit : « ... et... sont des ... » [65]. 130. Maintenant je vais définir le symbole « Gis»; à ce sujet, dans le Formulaire on trouve seulement la P 1 : as Cls. => .a-s (i£fl) = fl /^ c'est-à-dire : « si a est une Cls, alors l'ensemble des valeurs de x, telles que x soit un a, est a ». Comme dans le Formulaire on n'a donné aucune signification (et par suite aucune propriété) à l'écriture « xia » lorsque a n'est pas une Cls, je lui donne en ce cas cette propriété : j16- ~(ae Cls) .=> .xi(xea)= f\ qu'on peut lire : « si a n'est pas une Cls, aucune valeur de x n'est telle que ar soit un a ». Or, comme « A e Cls »> [P 20], de la P 58 on tire que a= A • => ■ aeCIs d'où [P 99] -(as Cls). => . ~(a= a) De la comparaison de cette P avec la P 116 il résulte que, si a n'est pas une Cls, alors les deux écritures « x 5 (x s a) » et « a » ne peuvent pas être égales entre elles, parce que la première est égale à « A » et la seconde non; donc [69] - (a e Cls) .D.-[x3(îE(!) = fl] d'où [P 99] la P : it7. is (isa) = a . => . a s Cls En résumant [P 52] cette P avec la (1), on obtient ii8. a sCls . = . xs (x s a) = a c'est-à-dire : « a est une Cls » signifie que « l'ensemble des valeurs de x, telles que x soit un a, est a ». En voulant isoler le symbole « Cls », on arrive ainsi [60] à la P 1. Dans le Formulaire, la (IV) aussi est précédée de l'Hp ■ a e Cls », qui est devenue inutile. — 100 — 11 S. C\s — a^[x3(xta) = a] (V) e'esl-à-dire : « Cls » est « tout symbole a tel que, l'ensemble des valeurs de x, telles que x soit un a, est a ». Celte P définit le symbole « Cls » par le symbole « £ », qui a été déjà, défini (III) '. 131. Par le symbole « i », qui a été déjà défini (II), je définis le symbole « i » [45], au moyen de la P 120. a = ix .=> .ia = x (VI)2 1. L'analyse qui précède cette P a seulement pour but d'indiquer la voie par laquelle j'y suis arrivé et d'y distinguer ce qu'elle renferme de connu et ce qu'elle contient de nouveau [P 116]; mais, en voulant l'adopter comme Df, elle n'a besoin d'aucune prémisse. Plutôt, le fait de donner une propriété quelconque à l'écriture >!£«• lorsque a n'est pas une Cls, pourrait sembler en contradiction avec la P 6 x e a . => . a e Cls c'est-à-dire : « l'assertion qu'un x quelconque appartient à a implique que a soit une Cls ». Mais il s'agit d'une contradiction apparente; car, au contraire, si l'on regarde bien, cette P et la P 116 énoncent, de différente manière, un même fait (il suffit de comparer leurs lectures). 2. Dans le Formulaire on définit le symbole « ■ » au moyen de la P a s Cls . g a : y, z e a . = . y = : .'. = .". x = i a . = . a = ix (1) c'esl-à-dire : si 1) a est une Cls 2) il y a des a 3) si y et z appartiennent à a, alors y doit être égal à z; alors, dire que <• x est le a » signifie que - a est l'ensemble auquel n'appartient que x ». Ce qui était le définissant dans la (1) devient la seulellp de ma Dr (VI), parce qu'elle renferme, d'une manière implicite, les trois conditions dont se compose l'Hp de la (1). En effet : comme « ne Cls » [P64], « a= u » implique [P 58] : 1) « aeCls»; après quoi [P 53], <j = u> implique '• a = i x >■ et « '. x = a » ; mais « i x => a » implique (111) 'Isa », qui implique [P 63] : 2) « g a » ; enfin ■ a = ii. implique que [P 56] si « y £ a », alors .ysu», c'est-à-dire [P 60] que ., y = x » ; donc • y sa . z> .y = x et de même

£ a . = .
=2;

d'où [P 91 et IV] j!,3£a: = :y = ;r.:; = ;K d'où [PU, 46] : 3) y , zia.=> .y = z J'ai donc obtenu une vraie simplification de la (1), sans rien lui ajouter ou lui ôter, et j'ai obtenu deux avantages : dans la (1) la formule définie était « x = i a », tandis que dans la Df VI elle est simplement «ta» (qui contient seulement le symbole à définir); dans l'IIp de la (1) était employé le symbole « a » que je — 101 — Maintenant on pourrait définir l'écriture « a=A » en disant qu'elle signifie que « a est contenu dans une Cls quelconque ».; en symboles 121. a=A : = :stCls.=>.a=>s Mais nous voulons isoler le symbole « A » [37]; à cet effet, dans la P 121 remplaçons « a= A » par « a 11 A » [P 60], en obtenant ati A : = :seC1s. t A = a 3 [s e Cls . =a d'où [60] d'où (VI) la P 122- A ='«3 [se Cls . =3 . a-=is] (VII) c'est-à-dire : « A » est « cet a qui est contenu (extensivement) dans toute Cls », à savoir « rien »; ainsi on définit le symbole « A >> par les symboles déjà définis « => £ Cls i » (I) (III) (V) (VI) '. 132. Pour définir le symbole « - » devant une Cls [70], je me sers d'une P qui se trouve déjà dans le Formulaire, et dans laquelle sont employés les symboles « t % Cls A » que j'ai déjà définis (II), (III) (V) (VII) : 123. aeC\s . =3 . ~a = x3[a^ix= f\] (VIII) c'est-à-dire : si a est une Cls, alors « - a » désigne l'ensemble des x tel que a et « ix » [P Gi] sont disjointes [40], c'est-à-dire l'ensemble des individus qui n'appartiennent pas à a. Maintenant, on peut définir la négation d'une appartenance, au moyen de la P, qui se trouve déjà dans le Formulaire, 134. aeC\s:=3:-(xea). = .x-ea. = .xt-a (IX) qui découle des P22, 28 et dans laquelle le définissant « x s - a » correspond en même temps aux deux formules définies « - (x e a) » (il n'est pas vrai que x soit un a) et « x - e a » (a; n'est pas un a). Nous savons que toute condition peut acquérir la forme d'une n'ai pas encore défini et que je définirai par le symbole « A ». Que je vais déli-nir justement par le symbole « î ». Donc, sans ma simplification, on se trouvait dans un cercle vicieux qui forçait à adopter sans Df un des symboles « i g A »• 1. Dans le Formulaire on trouve une P presque identique à la (Vil) A = ' Cls r-, a 3 [s t Cls . = . a = s] La petite simplification que j'y ai introduite, et qui d'ailleurs n'était pas nécessaire pour l'exécution de mon plan général de réduction, se fonde sur la P 55; car, s étant une Cls, on ne pourrait avoir « a = s » si a aussi n'était pas une Cls, ce qui rend superflu de l'énoncer. — 102 — appartenance [60]; par suite la (IX) définit la négation d'une condition quelconque. Par exemple, des P 00 et 98 on déduit d'où (IX) la P 125. ~(x = y). = .xe-ig c'est-à-dire : « il n'est pas vrai que x soit égal à y » signifie que « x est différent de y ». La P 125 ne doit pas être considérée comme une Df, parce qu'elle est une conséquence de la (IX); plutôt, si l'on veut adopter la formule « x - = y », on la définira par la P 21 x - — y . =. - {x = y) (X) dont la P 125 complète l'explication. Après quoi, je définis la formule « a- 6» dans ses deux rôles, moyennant la P 29 : a-b = ars-b (XI) et je définis le symbole « w » dans ses deux rôles au moyen de la P105 fluJ = .[-ar>.4] (XII)1 Le symbole « V » se trouve déjà défini par la P 36 V=-A (XIIIi et le symbole « o » (aut) par la P 30 aob — {a-b)^{b-a) (XIV) Je définis l'écriture « g a » par la P 126. ao. = .oe(Cls-iA) (XV) c'est-à-dire : « g a » signifie que « a est une Cls distincte de A », d'où la lecture : « il y a des a » 2. -1. Les (XI), (XII) se trouvent aussi dans le Formulaire, mais précédées de l'Hp « a, b e Cls » et par suite elles peuvent servir à définir les écritures « a - b • et « a w 6 • seulement dans leur premier rôle. 2. Si dans la P 38 aa: = :ae Cls.a- = A on remplace <■ a - = A • par « - (a = A) " (X) et ensuite par « a e - i A ' Ip t»L on obtient g « : = : a e Cls .fle-iV — 103 — Enfin, je définis mon symbole « E 1 m » [44] par la P ^7- Elm = «3 [g a-3 (a = 1,1;)] (xvi) c'est-à-dire : « E 1 m « est tout symbole a tel qu'on puisse déterminer x de manière que a résulte égal à « ix »; on la déduit immédiatement [60] de la P 67. Ainsi tous les symboles logiques résultent successivement définis par les trois symboles : = r\ 3 comme j'avais annoncé [17, 127]. 133. Ainsi le problème de la construction d'une Idéographie logique est complètement résolu. Leibniz, le plus grand logicien après Ahistote, en a conçu le projet et en a commencé l'exécution [11], qui a été poursuivie par ses disciples Segner et Lambert, et par d'autres savants, notamment De Morgan et Boole [12]. Enfin, surtout au moyen de l'analyse des idées qu'il représenta par les symboles «eau» [24, 33, 45, 58], M. Peano l'a complétée définitivement; en effet, son Formulaire démontre que l'idéographie logique suffit désormais à exprimer toutes sortes de propositions [13]. Leibniz, ses disciples et ses continuateurs, en donnant trop d'importance à l'analogie frappante entre certains concepts logiques et certains concepts arithmétiques, les avaient représentés par les mêmes signes [30, 38, 39]. Mais les nombreux manques d'analogie [49, 68, 94, 95] constituaient une violation trop grave au principe de permanence [28], et le double emploi des mêmes signes empêchait toute application de la Logique à l'Arithmétique [30j. Ces considérations ont amené M. Peano à imaginer une idéographie logique complètement distincte de l'idéographie arithmétique. Et, à cet effet, il n'aurait pu choisir un système de signes qui fût plus propre à faire ressortir les deux grandes lois logiques : à savoir, d'où, en appliquant au second membre les P 3 et (XI), on obtient la (XV). Dans le Formulaire, l'écriture .< g a » est définie par la P a e Gis : = :ga. = .a- = A mais je trouve plus convenable de renfermer la condition « a z Gis » dans la signification de l'écriture « g a ». — 104 — l'identité substantielle entre les deux théories des classes et des conditions [61], et le principe de dualité [115]. Ainsi, le vocabulaire logique de M. Peano, bien qu'il soit incomparablement plus mince que tout autre [76], est le plus complet et le plus exact, le plus commode et le plus clair. Je souhaite d'avoir contribué, par cette étude, à en révéler toute la beauté à un public un peu plus vaste que celui des lecteurs du Formulaire. L'analyse que je viens de faire de cette idéographie, en dégage aussi le vrai noyau; car, au moyen de mon système de définitions, tous les symboles de M. Peano découlent de trois seuls d'entre eux [127], qui résument donc virtuellement toute l'idéographie logique. TABLE DES MATIÈRES Préface ................. „ AVANT-PROPOS Termes logiques et termes scientifiques dans le langage ordinaire 5 Idéographie des algébristes.................. 10 Le rêve de Leibniz et sa réalisation................" 12 Réfutation d'un sophisme et d'une objection sceptique ......... li Le vocabulaire logique réduit à une ligne..............- ig La sténographie et les langues artificielles................. 17 Logique mathématique?.................., ' la IDÉOGRAPHIE LOGIQUE Egalités.......................... 2i Appartenances...................... 2i Extension ou compréhension des classes................. 24 Principe de permanence....................... 25 Inclusions......................... 2s Quelques classes arithmétiques...................... 31 Rien et tout............................ 33 Réunion et intersection de classes. Réunion disjonctive.......... 35 Individu. Élément. Agrégat........................ 3S Symboles constants ou variables...................... 41 Propositions catégoriques ou conditionnelles............... 42 Variables réelles ou apparentes...................... 43 Implications............................ 44 Ponctuation................................ 4g Classes et conditions........................... 47 Affirmations simultanées ou alternes................... 51 Négation. Classes contraires........................ 55 Existence......................•......... 57 Comparaison entre l'idéographie logique et le langage ordinaire...... 5'J LOGIQUE DÉDUCTIVE Réflexibilité, symétrie et transivilé........•........... 60 Propriété substitutive de l'égalité..................... 64 — 106 — Transformation des relations logiques................... 66 Propriétés simplificalive, commutative, associative et distributive des opérations logiques.......................... 6<j Autres propositions remarquables..................... 75 Syllogistique............................... 76 Relations entre les symboles « ~ u - ».................. 80 Dualité logique.............................. 82 Principes d'identité, de contradiction et du tiers exclu.......... 90 On démontre une P sans se soucier de ce qu'elle dit........... 93 Possibilité de réduire le vocabulaire logique à trois symboles....... 96 Coulommiers. — Imp. Paul BRODARD u^ V C^fc^j^ \ X ~,^»> v

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