Dictionnaire topographique, historique et statistique de la Sarthe/CHÂTEAU-DU-LOIR

CHÂTEAU-DU-LOIR ; MONT-SUR-LOIR, en 1793 ; Castrum ad Lidum ; Castrum seu Castellum Lid, Lidi, Lith ; Castrum Ligeris. Ville et commune cadastrée, située sur la rive droite du Loir, d’où elle tire son nom, quoiqu’elle en soit éloignée d’un kilomètre et demi ; chef-lieu de la contrée appelée Vau-du-Loir ; de l’arrondissement et à 33 kilom. 1/2 N. E de Saint-Calais ; à 3o, kil N. N. O. du Mans, Autrefois chef-lieu d’un doyenné, d’un archidiaconé et d’une élection du diocèse du Mans et de la province du Maine, et du district de son nom en 1790. Voir plus bas hist. civ. — Distances légales, 4 2 et 4-6 kilomètres.

descript. Bornée au N. et au N. E., par Fiée ; au S. E. et au S., par Vouvray-sur-Loir ; à l’O. et au N, O., par Luceau ; la forme de celte commune est celle d’un triangle irrégulier, dont les côtés, qui varient de 3 à 4 et 5 kil., se présentent au IN. E., au S. E., et au N. O. La ville, bâtie autour d’un château fort qui lui avait donné son nom, située à la presqu’extrémité S. S. O. de la commune, laquelle .s’étend jusqu’à 4— kilom. dans la campagne, vers le N. et le N. E., tandis que celles de Luceau et de Vouvray pénètrent flans ses faubourgs au S. et à l’O., se cumpose d’une rue principale, de nouvelle construction, tirée au cordeau, qui la traverse en entier, en bordant les deux côtés de la route du Mans à Tours. Cette rue, dont le point de vue en ligne droite se termine aux sommités des deux coteaux situés au N. O. et au S. O., à-pcu-près comme la rue royale de Tours, est le beau quartier et le plus marcband de la ville. Garnie de boutiques et de jolies maisons bourgeoises, de jardins en terrasses et de berceaux de verdure, elle est comme divisée en deux parties par une place carrée, servant de promenade, entourée de maisons neuves, et plantée d’arbres ; située dans remplacement de l’ancien château, dont il ne reste plus qu’une tour servant de prison, le surplus ayant été démoli il y a 58 ans. Des éboulemens qui ont eu lieu dans la ville, et les recherches auxquelles ils ont donné lieu, ont fait découvrir des caves très-profondes, qui ont fait croire que de vastes souterrains conduisaient de ce château à la rive du Loir. Le surplus de la ville se compose de rues montueuses, étroites, mal percées, et assez mal bâties ; de petites places où se trouvent l’hôtel-de-ville, la halle, construite en bois, l’hôpital, ancien et assez beau bâtiment, avec une chapelle ; et l’église de S.-Guingalois, la seule des deux anciennes églises paroissiales qui subsiste actuellement, d’une très-belle construction, à arcades intérieures cintrées du côté droit, semiogives à gauche, à ouvertures également de différens styles ; à cordons des voûtes formant par leurs enlrecroisemens de nombreux comparlimens, l’un des caractères du gothique secondaire ; etc. On y remarque un bel autel à la romaine en marbre, et un groupe, aussi en marbre, placé au fond du chœur, représentant le Christ mort, couché sur les genoux de sa mère, ouvrage qui paraît d’une assez bonne exécution. Le clocher, supporté par une grosse tour carrée, a été rebâti depuis peu de temps. Les autres monuinens de la ville sont une porte vers Je sud, la seule partie conservée des murs dont elle était enceinte ; l’ancien couvent des Récollets, dans lequel on a placé le collège et la caserne de la gendarmerie ; une salle de spectacle passablement grande ; un jardin public d’agrément, nommé Tivoli ; et des bains proprement tenus, alimentés par le ruisseau de Rioblai, qui passe dans le jardin où sont ces bains ; enfin, le petit et vieux castel de Rioblai, tout près et au nord de la ville, qui n’offre rien d’intéressant que le souvenir traditionnel du séjour qu’y fit Henri IV, lorsqu’il vint de Vendôme mettre le siège devant la ville du Mans, en i58o,. — Cimetière situé sur le coteau sud de la ville, grand et bien clos de murs.

populat. Portée à 435 feux dans les anciens états de l’éïeclion, la commune en compte 6g3 actuellement, qui comprennent i, 364 individus mâles, i, 520 femelles, total, a, 884 ; dont 42 5 dans la campagne. Si, ce dernier nombre déduit, on ajoute, à ce qui reste, la moitié de ce même nombre, pour celui des individus des faubourgs qui dépendent de Luceau et de Vouvray, la ville se trouvera contenir une population totale agglomérée d’environ 2, 670 individus. Il est fâcheux que l’opération cadastrale n’ait pas donné lieu à l’adoption de meilleures circonscriptions communales, qui eussent empêché les em, iétemens si désagréables qui ont lieu dans les parties agglomérées des villes et des bourgs, comme ici, à la Chartre, à la Ferté-Bernard, à Beaumont, à Milesse, et dans une infinité d’autres lieux.

Mouv. décenn. De i8o3 à 1812, inclusivement : mariages, 216 ; naissances, 620 ; décès, 740. — De i8i3 à 1822 : mar, 235 ; naiss., 656 ; déc., 740.

hist. ecclés. L’église actuelle, dédiée à S. Guingalois, est celle de l’ancienne paroisse du même nom ; une autre paroisse, dont l’église ne subsiste plus, avait pour patron S. Martin. S. Guingalois était un prieuré régulier, à la présentation de l’abbé de Marmoutier : le prieuré du Houx, à Jupilles, et celui de S Biaise ou de Jajolai, à Chahaignes, en dépendaient. En février 177 1, l’évêque du Mans, de Grimaldi, réunit à la paroisse de S. Guingalois, le faubourg de la Pitoulière, attenant à la ville de Château-du-Loir, qui appartenait à la commune de Luceau. S. Guingalois contenant une partie de la ville et d’où partaient les processions, était considéré comme la principale paroisse : elle s’étendait à une lieue dans la campagne, et on y comptait 1, 100 communians. La cure de S. Martin, qui n’en avait que 900, était à la présentation du chapitre cathédral de S.-Martin de Tours. Il existait un fief dépendant de cette dernière cure, connu sous le nom du Bois S.-Martin, formant actuellement un hameau, au N. E. de la commune, pour leqnel Pierre Bodineau rendait aveu en 1489. Une troisième église paroissiale, sous le vocable de S.-Laurent, fut donnée aux Récollets qui s’établirent dans cette ville, en 1616, avec la permission de l’évêque Charles de Beaumanoir, du consentement du prieur de S. Guingalois et des habitans. Sous le même épiscopat, en i63o, les religieuses bénédictines vinrent aussi fonder une communauté à Château-du-Loir, avec les mêmes permission et consentement. Une maison de Templiers, dont un moulin conserve le nom, y existait : elle fut donnée à l’ordre de S.— Jean-de— Jérusalem, et devint un membre de la commanderie d’Arlins, lorsque Tordre du Temple fut supprimé. Quelques bois situés dans la paroisse de S. Guingalois, appartenaient à cette commanderie, par suite de la réunion dont on vient de parler, à l’époque de la révolution.

hist. féod. L’histoire de la ville de Château-du-Loir qui, comme toutes celles d’origine féodale, a commencé par un château fort, autour duquel vinrent se grouper, d’abord les habitations des commensaux du châtelain, puis celles de ses vassaux, qui se plaçaient ainsi sous sa protection, ne remonte pas au-delà de la fin du io. e siècle. Son premier seigneur connu fut Hamon ou Aimon, surnommé de Château-du-Loir, père de l’évêque du Mans Gervais et mari d’Ildeburge, fille d’Yves de Creil, premier et célèbre comte de Bélesme et d’Alençon. Après Aimon et Gervais son fds, mort en 1067 » Rohert Brochard ou Bouchard, second fils d’Aimon, fut châtelain de Château-du— Loir. Le fils de celui-ci, Gervais II, seigneur de Mayet, de Lucé et d’Ouslillé, et père d’un autre Gervais qui fut doyen du chapitre du Mans, ayant marié sa fille Mathilde, vers l’an 1090, à Hélie, châtelain de la Flèche, qui devint comte du Maine, et leur fille unique ayant épousé Foulques V, comte d’Anjou, puis roi de Jérusalem, cette châtellenie fut possédée successivement, sans compter ceux qui l’usurpèrent, par Geoffroi-le-Bel, dit Plantegenêl, fils de Foulques, qui y mourut en ii5i ; et par les rois d’Angleterre dont Geolïroi fut la souche, depuis Henri II jnsqu’à Jean-sans-Terre. Saisie sur ce dernier, par le roi de France Philippe— Auguste, après sa condamnation pour l’assassinat de son neveu Arthur, la terre de Châteaudu-Loir, que Jean avait affectée pour le douaire d’Isabelle, sa femme, avec la Flèche et plusieurs autres terres en Anjou, fut donnée par le roi de France à Guillaume des Roches, en récompense de ses services ; ou plutôt ce don, comme le titre de sénéchal d’Anjou, Maine, et Touraine, ne fut qu’une confirmation des faveurs d’Arthur, qui l’avait créé sénéchal héréditaire et feudataire d’Anjou, et lui avait donné la terre seigneuriale de Mayet, en 1199. Jean sans terre, en lui confirmant les mêmes litre et dons, en 1201, y ajouta celui de la forêt de Bersay, cum toto honore.

La reine Bérengère, veuve de Richard-cœur-de-Lion, à qui Philippe— Auguste avait cédé le comté du Maine, en échange des possessions qui constituaient son douaire, situées en Normandie, céda au sénéchal tous ses droits comme comtesse douairière du Maine, tant au château du Loir que dans la forêt de Bersay et autres lieux de cette seigneurie, ce que Philippe— Auguste ratifia, à la condition du rétablissement <le ces droits à la sénéchaussée du Maine, après la mort de Rérengère, événement à la suite duquel il donna en pleine propriété, à Guillaume des Roches, la lerre de Château-du-Loir. Guillaume des Roches s’étant croisé contre les Albigeois, en 1201, fit le partage de ses biens, et donna ie Château-du-Loir, avec Mayet, la Suze et Loupelande, à Clémence sa fille puînée, qui épousa en secondes noces Geoffroi IV, vi-COmte de Chateaudun, seigneur de Montdoubleau et de Saint-Calais. En 124.8, le 3 juin, Geoffroi étant sur le point de partir pour la Terre— Sainte, fait, avec Clémence des Roches sa femme, à l’imitation de son beau-père, le partage de tous ses biens, et donne à Jeanne, l’aînée, Château-du-Loir, Mayet, le Roux, avec la foret de Burçay ( sic) et le Bois-Corbon, Monglenet et la foret de Douvres, et tout ce qu’il avait à Oustillé, à la Suze et à Loupelande. Clémence, sa fille puînée, qui épousa Robert de Dreux, eut tout ce qu’il possédait à Chateaudun et dans le Dunois, Montdoubleau, Saint-Calais, etc. Jeanne épousa Jean, comte de Monlfortl’ Amaury, qui accompagna S. Louis dans son premier voyage d’outremer, et mourut dans l’île de Chypre en 12/J-9. Leur fille Réatrix, qui hérita de tous leurs biens, fut mariée à Robert IV du nom, comte de Dreux, et mourut le 9 mars i3i 1. Robert, second fils de Robert IV, sans alliance, posséda ensuite la terre du Château-du-Loir, et la laissa à son frère aîné, Jean II, comte de Dreux, décédé en i3o9, qui eut pour héritier de cette seigneurie Robert V, aussi comte de Dreux, décédé en 1329. Le fils de ce dernier, Jean IV, étant mort sans enfans, Pierre, comte de Dreux son frère ; en hérita et la céda à Philippe— de— Valois, roi de France, le l’j mai i33y, pour la somme de 3i mille livres. En i34-5, au mois d’août, Philippe-de-Valois étant à Sablé, qualifie, dans des lettres-patentes datées de celle ville, la terre de Château-du-Loir de baronnie, et la déclare « d’aussi noble » condition que le comté du Maine. » Donnée en apanage, avec le Maine, à Louis I. er duc d’Anjou, fils du roi Jean, et tige de la troisième maison d’Anjou, cette terre fut de nouveau réunie à la couronne sous Louis XI ; mais Charles VIII, son fils, la donna en 1^96, à Jean-Jacques de Trivouîze (Trivulce), maréchal de France, tant pour lui que pour ses héritiers, avec droit de présentation aux offices, faveur qui fut continuée par lettres-patentes de Louis XII, vérifiées le 8 février i4-99’sous ^ a r ^ serve du rachat perpétuel, moyennant la somme de i5 mille écus. Elle fut retirée pour être réunie pour la troisième fois à la couronne, des mains de Pierre de Rohan, maréchal de Gié, à qui le maréchal de Trivulce l’avait cédée par échange. La maison de Soissons l’obtint dans la suite, par engagement, d’où elle passa dans celles de Clermont-Gallerande, de Courcillon, et en dernier lieu, par alliance, dans celle de Chevreuse de l’Huisne, qui possédait aussi celle de Bonnétable. L’engagisle avait ses parties casuelles, pour les offices du siège, lorsqu’ils étaient vacans. — En i^jS, Pierre du Boys, écuyer, nommé lieutenant de la baronnie de Château-du Loir, reçut en outre l’office de greffier aux assises de la même baronnie. Noms féodaux, p. 127.

Gervais de Château— du-Loir, devenu évêque du Mans, déchargea le chapitre de son église de tous devoirs et coutumes, pour les biens que ledit chapitre pouvait avoir dans l’étendue de sa terre de Château-du-Loir. Guillaume des Roches, Marguerite de Sablé, son épouse, Jeanne et Clémence leurs filles, la première mariée alors à Amauri de Craon, la seconde veuve en premières noces du comte de Blois, fondèrent, dans la paroisse de Bannes, l’abbaye de Bonlieu (v. ce mot). En i33i, l’année de sa mort, Jean IV, comte de Dreux, sire de Monlpensier, seigneur de Châteaudu-Loir, fit des dons nombreux à la collégiale de Pruillél’Eguillé (v. cet article), paroisse peu éloignée de ladite ville.

Les 8 et i5 octobre 1608, maistre Hélie Frambouscher, procureur de messire Pierre de Rohan, chevalier, maréchal de France, baron de Château-du-Loir, assiste à l’examen et à l’acte de publication de la Coutume du Maine, au nom dudit baron ; et Guillaume Gault, licencié-ès-lois, bailli de Château-du-Loir, à l’examen de cette coutume seulement.

Suivant un titre extrait des registres du domaine du roi, de la sénéchaussée du Maine, le sire de Pescheseul, baron de Parce, etc., avait droit, au premier de ces titres, de chasser à cor et à cri, à toutes bètes noires et rousses, sur les terres et forêts des baronnies de Château-du-Loir, etc.

historiq. Nous avons dit au Précis Historique ( page lxxxv), et à la Chronologie des Evêques du Mans (page xxx), comment Gervais de Château-du-Loir, assiégé dans cette ville par Geoffroi-Martel, duc d’Anjou, avait été attiré dans le camp de ce duc et forcé par lui de lui faire cession de la place de Château-du-Loir, et à s’expatrier. Quelques historiens entendent que Gervais fut retenu sept ans prisonnier par Geoffroi-Martel, avant de céder son patrimoine : toujours est-il vrai que la place résista pendant cet espace de temps aux efforts du duc d’Anjou, et qu’il ne put en devenir maître que par la cession forcée que lui en fit Gervais.

En io5y, comme nous l’avons dit également ( page lxxvii du même précis), le château du Loir fut assiégé de nouveau par Foulqucs-Réchin, neveu de Geoffroi-Martel, « dedans » > lequel il trouva, dit l’annaliste d’Anjou, J. Hiret, les thresors de l’église du Mans ; il print la maschouere du corps » de S.-Julien, et des os de S.-Guingalois, il les mint en sa » chapelle du chasleau d’Angers. » Hiret place cet événement vers l’année ioo, 5 ; d’autres, après la mort de Geoffroi-Martel, arrivée en 1060. (V. la page citée). Ce fut à celte occasion qu’Herbert II offrit sa fdle Marguerite en mariage à Guillaume-le-Bâlard, pour son fds Robert. Or, d’après Orderic Vital, cet événement aurait eu lieu avant 1064. Il cst souvent bien difficile de concilier les récils des historiens de ces temps reculés, et surtout de faire concorder les dates qu’ils fixent, ou que souvent ils négligent d’assigner aux événemens. Au surplus, suivant notre premier récit, Foulques n’aurait pu s’emparer de Château-du-Loir : peut-être la date de ioq5, aurait-elle rapport à une prise de possession de cette ville, après l’alliance contractée par ce prince avec Hélie de la Flèche, lorsque celui-ci eut acheté le comté du Maine de son cousin Hugues III, et que Foulques et Hélie se liguèrent, pour opposer leurs forces réunies à celles de Guillaume-le-Roux.

Hélie de la Flèche, dit Lepaige, mécontent de l’évêque Hoël (1081 à 1097), lequel était dans le parti de Guillaumele-Bâlard qui l’avait placé sur le siège du Mans, le retint prisonnier à Château-du-Loir. Il est possible que ce soit dans cette ville qu’Hélie le fit arrêter, lors d’une visite pastorale qu’il fit dans son diocèse ; mais on sait que ce fut dans le château de Fissa, la Flèche, qu’Hoël fut retenu prisonnier.

Lorsqu’en 1 099, Guillaume-le-Roux vint mettre le siège devant Mayet qui appartenait à Hélie, celui-ci, qui, à son retour de sa prison de Rouen, avait recommencé les hostilités contre Guillaume, se retira avec des troupes considérables au Château-du-Loir, après avoir mis le feu aux châteaux de Vaux et d’Oustillé, dont Guillaume fit éteindre les flammes, se réservant pour de plus favorables circonstances, dit Orderic Vital, en attendant l’événement.

En ii5i, Philippe— Auguste, suivant plusieurs historiens, poursuivant le vieux el infortuné Henri 11, roi d’Angleterre, s’empara de Chateau-du-Loir qu’il rendit à Richard— Cœur-de-Lion, son allié dans cette guerre impie, où deux fils dénaturés cherchèrent à détrôner leur père et causèrent sa mort. Nous avons déjà dit, et nous le repétons, que ce fut Jeansans-Terre, qui ayant levé un corps de gens d’armes, s’empara de cette place et de plusieurs autres des environs. £n i58q, au mois de décembre, le Château-du-Loir, qui tenait pour Ja ligue, fit sa soumission à Henri IV : ce prince y passa le 2 5 du même mois, pour se rendre au Mans. Après l’invasion de cette dernière ville par les calvinistes, en i562, la réaction qui eut lieu dans la province, de la part des catholiques, se fit sentir « es— villes de Châleau-du-Loir, etc. ; où furent tués plusieurs de la religion ; et la » campagne blanchit des corps humains qui n’ont pour sépullure que le ventre des oiseaux de l’air. » Hist. de la prise du Mans par les Calvin., etc.

Pendant la révolution, et lors des événemens des cent jours de i8i5, des partis royalistes insurgés se montrèrent sur plusieurs poiuts du canton de Château-du-Loir, sans pourtant qu’aucune affaire importante y ait eu lieu.

antiq. « On peut croire, dit M. Cauvin (Statist. de l’arrondiss. de S.-Calais) ; que le Castrum Lit fut un des postes que l’empereur Charles-le-Chauve fit fortifier dans le Maine, pour s’opposer aux courses des hommes du nord. » Ajoutons que l’origine de ce poste paraît remonter à l’occupation romaine, qui donna lieu à l’établissement d’une nombreuse suite de stations, bien faciles encore à déterminer, placées de 2 en 2 myriam. à-peu-près, le long du cours du Loir. Jl paraît aussi qu’à l’époque où vivait Hamon ou Aimon, le premier châtelain connu de ce lieu, l’enceinte du château devait se prolonger jusqu’à la cour d’Hamon (Coëmon), où naquit, dit-on, l’évêque Gervais son fils ; ou que ses gens d’armes, occupant la forteresse, il faisait personnellement, avec sa famille, sa demeure dans ce manoir, lequel, dans ces temps de guerres intestines continuelles, devait se trouver en dedans du système défensif de toutes les possessions du seigneur.

On a trouvé à Château-du-Loir, des médailles de L. Septimus Severus Pert. Aug. ; P. L. Galienus Aug. ; M. Cass, Lat. Postumus ; M, Aur. Cîaudius Aug. ; on ne dit point en quel métal.

hist. civ. Aucune ville du département n’a autant souffert du nouvel ordre de choses que la ville de Château-du-Loir, par la perte de ses anciens établissemens publics, aussi nombreux et aussi importans, que ceux qui existent aujourd’hui le sont peu. Aucune pourtant n’a mieux retenu ces belles paroles de Louis XVI : « J’aurais bien aussi des pertes à compter si, au milieu des plus grands intérêts de l’état, je m’arrêtais à des calculs personnels : mais je trouve une compensation pleine et entière, dans l’accroissement du bonheur public. » Ces établissemens consistaient, dans une élection dont 83 paroisses dépendaient, qui conlenait i3, g53 feux, payant 179, 603 liv. de taille, lorsque celle-ci se trouvait fixée à 2, o34, 20o liv. pour toute la généralité de Tours ; dans un siège royal d’élection, et une sénéchaussée, d’où rcssorlissaicnt 78 paroisses et dont les appels allaient au présidial du Mans, pour les cas présidiaux ; un grenier à sel où s’approvisionnaient 35 paroisses, qui consommait 32 muids de sel par an, dont le prix fut fixé à 6 liv. 5 s. le quintal, en 178g ; une maîtrise des eaux et forets ; une brigade de maréchaussée, composée d’un lieutenant du prévôt provincial du Mans, d’un assesseur, d’un exempt, et de six archers ; d’un gouvernement particulier, composé d’un gouverneur et d’un lieutenant de roi ; enfin, d’un hôtel-de-ville, ayant pour officiers un maire, un commissaire et un procureur de ville.

En 1790, un district avec un tribunal civil, furent établis à Château-du-Loir. Ce district se composait de 6 cantons et de 3g communes, lesquelles n’en forment plus que 35 actuellement, comprises dans les arrondissemens de la Flèche et de S.-Calais. Sa population était de 45 mille habitans, qui payaient 371, 561 liv. g s 6 s. d’impôts directs.

Vers la fin du ij. e siècle, un Hôtel-Dieu fut fondé à Château-du-Loir et doté par arrêt du Conseil des 20 janvier et 6 juillet i6g6, et 22 février 1697, ^ cs mens et revenus de plusieurs établissemens de charité, savoir : des maladreries de Mayet, de Kahard et de Tréhet ; des maladrerie et Maison-Dieu de la Chartre, qui en furent distraites en 1699 ; des aumôneries du Gué-de-la-Fcugère et de Dissay-sous-Courcillon. Cet établissement fut chargé, par l’acte d’union de la maladrerie de Rahard, de faire 3oo Jiv. de pension au prieur ; il recevait des enfans trouvés. Administré par six sœurs libres, avant la révolution, il est desservi actuellement par quatre sœurs d’Evron, un aumônier, deux médecins et un chirurgien. Cet hospice, qui entretient 24 lits, dans deux salles, avait 6, 226 liv. de revenu en 1789, 6, 166 fr. en i8o5, et a à-peu-près la même somme aujourd’hui. Le bienfaisant Jacques de la Motte, abbé de Saint-Prix ( voir son article à la Biogr.), fondateur du collège de Courdemanche, sa patrie, en dota un aussi, vers la fin du i6. e siècle, à Château-du-Loir : une maison et un assez vaste jardin faisaient partie de cette dotation ; il est transféré depuis la révolution, dans l’ancienne maison des Récollets, où deux professeurs dont l’un ayant le litre de principal, y enseignent le latin ; la ville leur donne chaque année une somme de six cents francs.

En 1798, la ville de Château-du-Loir fut victime d’un incendie qui consuma le quart de ses habitations ; et dans le mois de juin 1800, une partie de son territoire fut dévasté par une inondation. Château-du-Loir est la patrie de Jacques Hallier, dominicain ; de Robert-lc-Maçon, qui devint chancelier de France ; de l’abbé le Maçon des Rabines, de Julien le Breton, Louis et Jean le Breton, et de Jacques Anger, écrivains ; et du célèbre sénéchal Guillaume-des-Roches, dit-on, ce qui ne nous paraît pas certain. C’est aussi la patrie de M. Rousseau, ancien député, conseiller à la cour de cassation. (Voir ces différens articles à la Biographie). Le P. Coiffeteau, qu’on a cru originaire de Château-du-Loir, paraît être né à Saint-Calais, où nous le portons.

Nous avons parlé, à l’article du canton, de l’esprit de sociabilité et d’union de ses habitans. Il tient sans doute à leur caractère aimable et gai, que retrace un usage chevaleresque qui s’est conservé jusqu’à notre époque. L’un des jours du carnaval, les jeunes gens de la ville montent à cheval et vont tirer la bague. Celui qui dans des courses au grandgalop la remporte trois fois, est proclamé roi. Il choisit une reine à laquelle ses compagnons, devenus ses sujets, s’empressent d’aller rendre hommage. La reine les en remercie en leur donnant un bal qui termine la fête ; et l’on a vu plus d’une fois, dit l’auteur du mémoire d’où nous tirons ce récit, M. le docteur Gendron, à qui nous devons une partie des élémens de cet article et de plusieurs autres, le roi de la bague chanter son triomphe en vers assez passables, et un heureux hymen succéder à cette royauté d’un instant.

hydrogr. La commune est arrosée par les petites rivières de Prélambert ou Profontevaut et d’Ire qui, venant de la forêt de Bersay, coulent du N. au S., se réunissent au IN. de la ville et vont se jeter dans le Loir, sous le nom de Queue de Doué ou de Due. Le ruisseau de Riablé, venant du N. E., se perd dans l’Ire, peu avant sa jonction, après un cours de 2. kil. 1/2 seulement. Moulins : de la Pontonnerie, du Château et du Temple, sur l’Ire ; le premier à tan, les deux autres à blé. Un quatrième, aussi à tan, dans l’ancienne cure de S.-Guingalois, ne marche plus.

géolog. Minéral. Sol montueux et coupé, formé de trois collines qui, venant du IN. O., du N. et du N. E., se réunissent avec le coteau qui, de l’E. à l’O., limite sur sa rive droite, le bassin du Loir. Terrain secondaire, offrant le calcaire crayeux grossier appelé Tufeau, et beaucoup de pierres cosse ou silex décomposés à sa superficie. ( V. l’article précédent).

Plant. rar. Nigella arvensis, lin. ; Lactuca virosa, lin.

cadastr. La superficie totale de la commune, de 867 hectares 47 ares, se divise de cette manière ; — Terres labourables tables, 626 hect. 95 ar. o cent., en 5 cl., estim. à 4> 9> 18, 27 et 36 f. — Jardins potag. et d’agrém, 34-o5~77 ; 4 cl. : 36, 5o, 70, 90 f. — Vignes, 50-89-22 ; 5 cl. : 6, 12, 20, 3o, 4o f. _ p rés > 2 4-8 9 —55 ; 4 cl. : 24, 36, 45, 90 f. — Pâtures, 12-01-60 ; 3 cl. :.2, 9, i5 f. — Bois taillis, rhâtaigner. , 47-84— 4o ; 3 cl. : 9, 18, 24 f— — Landes et friches, 20-26-45 ; 3 cl. : 1, 2, 6 f. — Saisonnières, o-47~4 ; à 27 f. — Etangs et mares, 0-19-20 ; à 9 f. — Pièces d’eau, o-o6-5o ; à 36 f — Superficie des bâtimens, i6-63-2 4 ; à 36 f. Objets non imposables : Eglise, cimet., pr » ! sbyt., 3-o4~ o5. — Rout., chem., plac. publ., 28-45-64— — Rivières et ruisseaux, 1-68-98. = 653 maisons, en masse, à 44i 2 °8 f.

contrib. Foncier, 9, 61 1 f. ; personn. et mobil., 3, 673 f. ; port, et fen., i, 5o3 f. ; 290 patentés : dr. ûxc, 2, 43<) f. ; dr. proport., 1, 373 f. 49 C. Total, 18, 59g f. 49 c. — Chef-lieu de perception.

cultur. La partie agricole de cette commune, offre un terrain assez fertile, couvert de quelques bouquets de bois. On y cultive en céréales : méteil, orge et seigle, en plus grande quantité ; moins de froment, peu d’avoine ; trèfle, chanvre, pommes de terre ; prés de médiocre qualité ; une assez grande quantité de vignes ; arbres fruitiers, noyers et châtaigners. Elèves de menu bétail ; moutons, peu de porcs, quelques ânes et quelques chèvres ; volailles. — Assolement triennal. Quatre fermes principales, beaucoup de bordages et d’autres plus petites tenues ; 35 charrues.

comm. agric. Exportation d’une faible partie des grains produits, de la campagne dans la ville. Graine de trèfle, chanvre et fd ; bois, vins, fruits, noix, châtaignes et marrons connus sons le nom de nousillards, très — estimés ; jeunes bestiaux, moutons et agneaux, chevreaux ; laine, gibier, menues denrées. Le principal commerce des productions du sol est celui des vins, dont le prix varie, en blanc, de 80 à 120 fr. la barique. Les vins rouges, d’un moindre prix, s’exportent en Normandie, plus particulièrement.

L’ancienne busse ou barique de Château-du-Loir, encore en usage, et la plus grande du pays, contient 254 litres 79 centil. — L’ancien boisseau, comble, 20 litres 13 centilitres ;ras, 17 litres 32 centilitres. — La pinte, 1 litre 22 centilitr.

comm. industr. Comme on l’a dit à l’article précédent, Château-du-Loir est le centre d’une fabrique de toiles renommées par la bonne qualité de ses produits, qui occupe environ 800 métiers, dans 4o communes des environs, lesquels fournissent chaque semaine de i5o à 200 pièces de 5o à 60 et 70 aunes. En 1789, cette fabrique fournissait au commerce 6 mille pièces ; en 1812, 8 mille ; en 181g, 5 mille seulement ; actuellement de 8 à 10 mille pièces, dont le prix variant de 80 à i5o francs, donne, par an, un produit d’environ un million. Les communes de Verneil et de Mayet, fabriquent plus particulièrement les qualités propres à faire les voiles, pour les bateaux qui naviguent sur la Loire et sur le Loir ; celles de Château-du-Loir, Vouvray et S.-Pierre-de-Chevillé, les plus fines et la plus grande quantité. Les principales sortes de ces toiles sont les communs, en 4/4— ; les lesins, 4/4 î les larges, 17/16 ; puis des i5/i6, des 7/8, des 3/4, en commun ou gros, et en brin. Les pièces en brin ont de 5o à 60 aunes de longueur ; les communs, à voiles, de 60 à 70 aunes. Outre celles destinées à la voilure, il en est employé à faire des tentes ; le surplus, comme toiles de ménage, l’est par les particuliers et dans les hôpitaux. Les fils servant à leur fabrication, outre ceux des environs, viennent particulièrement des communes du Lude, la Fontaine-S.-Marlin, Mansigné, Luché et Pringé.

Une filature de coton, établie depuis un certain nombre d’années, est située sur la commune de Vouvray ; la mécanique à pelotonner, qui en dépend, est placée dans la ville de Châleau-du-Loir. L’ancienne fabrique d’élamines est totalement tombée ; celle des serges, droguets, et autres étoffes de laine, qui occupait jusqu’à 4-1 métiers dans la ville, n’existe plus. Les cinq tanneries qui étaient encore en activité, il y a peu d’années, se trouvent réduites à deux.

foir. et march. Fort marché le samedi, pour grains, bestiaux, toiles et toutes sortes de denrées du pays ; petit marché le jeudi, pour les marrons, en hiver seulement. — 6 foires d’un jour, fixées aux samedis, 2." de mars, de mai et de juin ; 4— e d’août, 3. e de novembre et i. cr de décembre ; pour toute espèce de bestiaux et pour les toiles du pays (Décret du 6 septembre 1802). C’est à ces marchés et à ces foires que se rendent les fabricants de toiles de toutes les communes du canton, et de celles de Verneil, Lavernat, Mayet, Pontvallain, Sarcé, Mansigné, Vaas, Aubigné, Ecommoy, Marigné, Pruillé-l’Eguillé, S. — Vincent — du — Lorouer, le Grand-Lucé, Courdemanche, l’Homme, la Charlre, Marçon, Chahaignes, S.-Germain-d’Arcé, Chenu, la Bruère, Beaumont-la-Chartre, etc., toutes du département ; Saint-Paterne, S. —Christophe, Villebourg, S.-Aubin-le-Dépeint et Bueil, de celui d’Indre-et-Loire, pour vendre leurs produits ; et que se trouvent aussi, par eux-mêmes ou par des commissionnaires, des négocians du Mans, de Montoire, de Vendôme, Bloîs, Montrichard, Orléans, Tours, Saumur, Angers, Nantes, Bayonne, du Berry, etc. pour en faire des achats. Ce commerce, et la fabrication de ces toiles par conséquent, seraient pins considérables encore, si leur prix élevé ne les empêchait de soutenir la concurrence avec d’autres fabriques, ce qui nuit à leur exportation dans des départemens plus éloignés.

L’aune ancienne de Châleau-du-Loir équivaut à i mètre iq8 millimètres.

rout. et chem. La route royale n.° i58, de Tours à Caën, par le Mans ; celles départementales n. os et 9, allant l’une à Montoire et la seconde au Lude, traversent la commune en passant au chef-lien. Deux chemins principaux viennent aussi y aboutir, l’un du Grand-Lucé, l’autre de S.-Calais.

Le pont de Coëmon (voir cet article), construit sur le Loir, depuis trois ans, a donné lieu à l’établissement d’un péage si exhorbitant et si onéreux pour les habitans de Château-du-Loir, que c’est ici le lieu de consigner leurs justes récriminations. Coëmon, hameau de la commune de Vouvray, est une sorte de faubourg de Château du-Loir, au-delà duquel un grand nombre d’habitans de cette ville ont des propriétés rurales. Une partie des fonds nécessaires pour la construction de ce pont, avait été faite sous Napoléon, mais ne se trouva plus disponible, lorsque vint le moment de l’exécution, et ceux qu’on y a employés ( environ ^.00 mille francs), ont été fournis par des capitalistes qui reçoivent 6 pour % par an, du gouvernement, lequel perçoit lui-même le péage. Le taux en est énorme à tel point, qu’un propriétaire qui fait rendre ses denrées chez lui, pourra trouver ses revenus absorbés par les frais du péage ; qu’un moulin affermé de 6 à 7 cents francs, n’a obtenu qu’avec peine uu abonnement à 200 francs ; que plusieurs des voitures publiques du Mans à Tours, ont été forcées de cesser leur exploitation ; et que le roulage, lui-même, dont Château-du-Loir était un entrepôt important, a dû prendre une autre direction. Lt pourtant ce péage ruineux, contre lequel les habitans de Châleau-du-Loir réclament auprès des ministres et des chambres, ne donne que 18 mille francs de produits annuels. Dans cet état de choses, les habitans de Châleau-du-Loir se demandent si l’administration des ponts et chaussées a le droit d’imposer de telles charges à un pays qui ne Jui demandait rien, et qui d’ailleurs possédait à Coëmon un pont qui pouvait encore servir un grand nombre d’années ? le directeur général, dans le refus qu’il a fait de prendre en considération les justes plaintes des citoyens, a donné pour motif que le nouveau pont était plus commode qu’un bac. Il n’y a jamais eu de bac, mais l’ancien pont qui existe encore en bon état, est interdit.

habit. et lieux remarq. Le Bois S. —Martin, hameau ; il en a été parlé plus haut, hist. ecclés. Belair, Beauregard, Richelieu, noms de fermes qui indiquent bien la beauté et la fertilité de cet agréable pays. La Ménagerie, autre nom de ferme, semble annoncer que les anciens seigneurs de Château— du— Loir y nourrissaient des animaux rares et curieux.

établ. publ. Mairie, justice de paix, cure cantonnale ; hospice et commission administrative de cet hospice ; collège, peu florissant ; école pour les jeunes filles ; résidence de deux notaires, de cinq huissiers, et bureau d’enregristrement ; brigade de gendarmerie à cheval et prison de dépôt pour le passage des condamnés ; résidence d’un sous-inspecteur des eaux et forêts ; résidence d’un contrôleur des contributions directes et d’un percepteur ; bureau de déclaration des boissons, quatre débits de tabac, un débit de poudre de chasse. Bureau de poste aux lettres ; relais de poste aux chevaux.

établ. partic. Quatre docteurs en médecine et en chirurgie, deux officiers de santé, trois sages-femmes ; un vétérinaire ; deux pharmaciens ; un établissement de bains. Plusieurs instituteurs particuliers et professeurs d’arts d’agrément. Trois messagers allant, plusieurs fois la semaine et à jours fixes, au Mans ; plusieurs voitures publiques, du Mans à Tours, dont une fait le service quotidien des dépêches, passent à Château-du-Loir.