Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Réduit

Redent <
Index alphabétique - R
> Réfectoire
Index par tome

RÉDUIT, s. m. Dernier refuge d’une forteresse. Les villes fortifiées du moyen âge avaient leur réduit, qui était le château ; le château avait son réduit, qui était le donjon. Le donjon avait même parfois son réduit, dernière défense permettant d’obtenir une capitulation, ou de prendre le temps d’évacuer la place par des souterrains ou des poternes masquées. La défense des places et des postes était si bien divisée pendant le moyen âge, qu’elle pouvait se prolonger pour chaque poste, pour chaque tour. Elle était à outrance au besoin ; de telle sorte qu’une poignée d’hommes déterminés tenait en échec, à l’occasion, un corps d’armée. C’est ainsi que nous voyons de puissants seigneurs, à la tête de troupes nombreuses, obligés d’assiéger pendant des mois une petite garnison d’une centaine d’hommes. On prenait un ouvrage, il fallait recommencer. On prenait une partie d’un donjon, il fallait prendre l’autre. On s’emparait d’une porte ; la tour voisine, réduit de cette défense, tenait encore.

La ténacité est certainement, dans l’art de la guerre et surtout dans la guerre de sièges, une qualité supérieure. La féodalité nous a été une dure école pour acquérir cette qualité. Nous la possédions, et nous avons montré que nous la possédons encore, à la guerre du moins. Soyons donc plus équitables lorsqu’il s’agit de porter un jugement sur cette vieille institution contre laquelle il n’est pas besoin de tant invectiver, puisqu’elle est bien morte et que nous avons recueilli le meilleur et le plus pur de son héritage. Qui oserait dire que dans les veines de ces petits fantassins abandonnés dans un blockaus ou dans quelque village, pivot d’une grande manœuvre, et qui brûlent jusqu’à leur dernière cartouche, sans espoir d’être secourus, il n’y a pas un peu de ce sang traditionnel des vieilles garnisons féodales, défendant pied à pied chaque tour, chaque étage d’une tour, s’ingéniant à accumuler les obstacles et à retarder la chute d’un poste, ne fût-ce que d’une heure ! Nous avons décrit ailleurs les défenses générales ou particulières des places et châteaux ; il n’y a pas lieu d’y revenir ici à propos des réduits, qui ne sont qu’un point relatif de ces défenses, aussi nos lecteurs voudront-ils recourir aux articles : Architecture Militaire, Château, Donjon, Siége, Tour.