Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Biseau

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BISEAU, s. m. Se dit d’une arête abattue. Les constructeurs, pendant la période ogivale, évitaient les arêtes vives, à angle droit, surtout dans les parties inférieures des édifices ; et lorsque ces arêtes n’étaient pas masquées par des colonnettes ou adoucies par des moulures, ils se contentaient souvent de les tailler en biseau. Les tableaux des portes, des fenêtres, dans l’architecture civile, sont presque toujours biseautés à l’extérieur ; on évitait ainsi les écornures, et plus encore les saillies gênantes des arêtes vives sur les points des édifices où la circulation est active. Ce principe se trouve appliqué également à la charpente et à la menuiserie ; les bois équarris sont souvent biseautés sur leurs arêtes.

Voici (1) un exemple d’une baie, dont toutes les arêtes extérieures sont biseautées. Parfois le biseau n’existe que là seulement où l’arête saillante gênerait le passage ; le linteau et l’extrémité supérieure des piédroits hors de la portée de la main conservent leurs arêtes pures (2). Dans les ouvrages de charpente, les biseaux s’arrêtent au droit des assemblages, afin de laisser aux bois toute leur force sur ces points.

La fig. 3 donne un poinçon et un entrait biseautés, conformément à cette méthode. Les retraites de soubassements de la maçonnerie sont toujours, dans l’architecture ogivale, ou moulurées, ou biseautées, en raison de ce principe qui n’admettait pas les surfaces horizontales, telles petites qu’elles fussent (voy. Base). Sur les arêtes horizontales, ces biseaux, forment presque toujours un angle au-dessus de 45 degrés (4), tandis que les biseaux sur les arêtes verticales sont taillés suivant un angle de 45 degrés. Cette loi est trop naturelle pour avoir besoin d’être commentée. On voulait dérober, autant que possible, les arêtes horizontales ; il était tout simple de donner une forte inclinaison au biseau, et l’angle à 45 degrés eût encore présenté une trop grande acuité, surtout dans les retours d’équerre saillants ; tandis qu’il fallait abattre les arêtes verticales par une face formant, avec les deux autres faces se coupant à angle droit, deux angles égaux (5).
Les arcs doubleaux, arcs ogives et formerets des voûtes construites avec économie, sont biseautés au lieu d’être moulurés ; et, dans ce cas, le biseau est taillé suivant un angle de 45 degrés pour les arcs doubleaux larges A et de plus de 45 degrés pour les arcs ogives B ou formerets (6).
On laissait ainsi plus de force aux arcs doubleaux, et on donnait de la légèreté aux arcs ogives.

Le biseau n’est, par le fait, qu’un épannelage, et, dans l’architecture ogivale, il est taillé en raison de la moulure qu’il est destiné à préparer (voy. Épannelage).