Dictionnaire pratique et historique de la musique/Port de voix
Port de voix, n. m. Passage d’un son à un autre en glissant légèrement et très doucement sur les intervalles qui les séparent. Les anciens maîtres de chant distinguaient plusieurs sortes de ports de voix, ou plusieurs procédés dans son exécution : ils recommandaient aux chanteurs de s’en servir avec ménagement et reconnaissaient la difficulté de s’en servir avec sûreté et avec goût. — Ce nom a été également employé par les auteurs français du xviie et du xviiie s., pour désigner l’appogiature (voy. ce mot). — Aussi bien que pour d’autres termes indiquant des agréments ou ornements (voy. ces mots), la locution « port de voix » a donc servi en des sens différents : il convient d’avoir toujours cette observation présente à l’esprit, en étudiant les anciens traités de musique. Cet ornement est marqué et interprété différemment par les maîtres français des xviie et xviiie s., L’Affilard (1635) l’indique par un V placé au-dessus de la note et le traduit par un petit pincé :
Il y ajoute le port de voix double dans lequel une virgule renversée se place sous le V et succède à une barre oblique, le tout combinant la même petite note supérieure que l’accent, avec une formule avec note de passage :
Mais Chambonnières, dans ses pièces de clavecin, note et exécute tout autrement le port de voix : il le note par une croix et le joue :
D’Anglebert (1689)
l’appelle « cheute ou
port de voix en
montant » et « en
descendant »
et le marque par une virgule.
Couperin (1717) en distingue
trois sortes, le port
simple, double, et coulé, qu’il
marque tous trois par une petite
note et un signe en forme de fleuron,
et qui s’exécutent :
En composition : artifice mélodique. Le port de voix noté en petites notes ou en notes ordinaires mesurées dans la musique de clavier et en général dans la musique instrumentale moderne, n’a plus qu’une relation nominale avec l’ornement vocal connu sous ce titre, puisque le glissement sur les sons intermédiaires est supprimé. (Voy. Strascino.)