Dictionnaire pratique et historique de la musique/Pied
Pied, n. m. 1. Ancienne mesure
de longueur, valant 0 m. 324, qui
s’est conservée dans la facture d’orgue,
pour désigner certains jeux d’après
les dimensions de leurs tuyaux les plus
graves. Le son le plus grave des grandes
orgues et de tout le système musical
est l’ut0 (ut-1 de G. Lyon) sonnant
par conséquent une octave plus bas
que l’ut le plus grave du piano, et
deux octaves au-dessous de la note
écrite, rendu par un tuyau ouvert
de 32 pieds de 32 cm. 4, ou 10 m. 368.
En montant à l’aigu, on a les jeux de
16 et huit pieds, * ces derniers sonnant
au diapason de la note écrite ; les jeux
de deux, quatre, un pied, et même
1/2 pied, sonnant respectivement une
octave au-dessus les uns des autres pour
une même note écrite. On a aussi construit
tout à fait exceptionnellement,
des jeux de 64 pieds (voy. Orgue), une
octave plus bas que le 32 pieds. Les mutations
sonnant la quinte s’expriment
en tiers de pied : la plus usitée est
le petit nasard, de 2 pieds 2/3, le gros
nasard étant de 5 pieds 1/3, et même de
grands instruments ayant, à la pédale,
une grosse quinte de 10 2/3. Les mutations
qui sonnent la tierce ont pour
mesure le cinquième de pied : on a
ainsi les tierces de 6 pieds 2/5, 4 p. 1/5,
1 p. 3/5. Celles, fort rares, qui sonnent
la septième, sont basées sur le septième
de pied : on a ainsi des septièmes
de 4 pieds 4/7, 2 pieds 2/7, 1 pied 1/7.
— Dans la facture d’orgue, le mot pied
est aussi employé pour désigner la
base des tuyaux parlants, souvent
formée d’une autre matière que la
partie résonnante. || 2. Unité rythmique
de la métrique ancienne ou moderne,
formée elle-même de combinaisons
de temps brefs et longs. Les genres rythmiques des Anciens sont :
Genre à quatre temps :
Dactyle
◡◡,
Anapeste
◡◡,
Spondée —.
Genre à trois temps :
Iambe
◡,
Trochée
◡,
Tribachys
◡◡◡.
Genre à cinq temps ou péon, composé
de 3 + 2, genre crétique ou de
2 + 3, genre bacchiaque.
Genre à six temps, ou ionique.
Sa forme la plus simple est le molosse
de trois longues — — —.
L’ionique majeur
— ◡◡ ;
l’ionique mineur
◡— — ;
l’hexabrachys, ou six brèves
◡ ◡◡ ◡◡, etc.
Comme corrélation
aux mesures modernes, remarquer
que ces mètres à six temps se divisent
par trois, et n’ont aucun rapport
avec nos rythmes en triolets, 6/8, etc.
La concordance des mesures modernes
avec les mètres antiques ne
peut pas s’établir dans la plupart des
cas. On peut dire dérivés du genre
trochaïque nos mesures à 3/8, 3/4,
dont le numérateur indique le nombre
des temps, le dénominateur leur
valeur. Le rapprochement peut être
essayé pour certaines mesures composées,
mais sans mener à des résultats
clairs et fixes. Cependant, les
classifications de la métrique ancienne
sont employées pour analyser les
formes mélodies des maîtres de
l’époque classique (Bach, Haydn,
Mozart, Beethoven), par Combarieu,
Dorsan van Reyschoot, etc. Elles ne
peuvent s’appliquer qu’aux œuvres de
cette période, parce que la régularité
symétrique des formes y est prédominante ;
de plus, elles ne peuvent
guère s’appliquer qu’aux formes instrumentales,
parce que dans le chant,
le compositeur attentif au sens et à
l’expression des paroles, est amené à
sacrifier ou à oublier les cadres symétriques.
À plusieurs époques, littérateurs
ou musiciens se sont cependant
efforcés de composer suivant les mètres
antiques, même les plus opposés à nos
mesures. (Voy. Mètre ; Musique mesurée à l’antique ; Ode.)