Dictionnaire portatif de cuisine, d’office, et de distillation/CITRON

inconnu
Lottin le Jeune (p. 170-178).

CITRON : fruit dont l’écorce est jaune & ridée, & d’une odeur très-agréable par l’huile essentielle dont elle abonde. Sa pulpe contient un suc aigrelet d’un goût très-agréable. Ce fruit, dont il y en a d’aigres & de doux, est très-rafraîchissant. On se sert beaucoup, en cuisine, du jus, pour donner du relief aux alimens. L’office emploie toutes les parties de ce fruit. La partie quintessencieuse, ou les zestes, sont d’un grand usage dans la distillation. On fait, avec le suc de la pulpe, du sucre & de l’eau, une boisson très-agréable, très-saine, & très-rafraîchissante qu’on appelle limonade. Dans nos provinces méridionales, on confit les fleurs, & on les emploie en distillation ; mais ces procédés sont impraticables dans les provinces du nord ; & on n’emploie, à ces deux égards, que la partie quintessencieuse de ce fruit.

Citrons à l’eau-de-vie. Prenez des citrons ; ratissez, la superficie, avec du verre cassé ; coupez l’écorce en filets que vous ferez blanchir. Faites-leur faire quelques bouillons au sucre clarifié. Laissez reposer. Le jour suivant, faites-leur en faire autant. Laissez encore reposer. Le troisieme jour, finissez votre sucre au syrop, & y faites faire encore quelques bouillons à vos filets. Mettez ces filets en bouteilles. Faites chauffer ensuite autant d’eau-de-vie que de syrop mêlés ensemble, mais sans bouillir, & le mettez sur votre sucre. Le sucre ne doit être que la moitié du poids du fruit.

On peut encore confire les citrons au liquide, comme nous allons dire, &, après les avoir mis en bouteilles, versez dessus un syrop tel qu’il vient d’être dit.

Citrons au liquide. Tournez votre fruit. Faites une ouverture en rond, du côté de la queue : faites-les blanchir, & les vuidez. Faites-leur faire quelques bouillons au sucre clarifié. Tirez-les, & les mettez dans une terrine. Faites rebouillir votre sucre par cinq fois différentes, en augmentant le sucre ; & à la derniere cuisson, mettez-le à perlé. Mettez-y votre fruit, & lui faites faire quelques bouillons : il faut qu’il baigne dans le sucre, pour acquérir & le degré de cuisson, & prendre le sucre qui lui est nécessaire.

Citrons au liquide. (Tailladins de) Tournez-les, & les coupez en filets de leur longueur. Faites-les blanchir jusqu’à ce qu’ils fléchissent sous le doigt, & achevez leur cuisson, comme les précédens.

Citrons au sec. Faites confire comme ceux au liquide. Tirez-les ensuite, & les faites égoutter sur le tamis ; poudrez-les de sucre fin, & les faites sécher à l’étuve.

Citrons au sec, (Tailladins de) glacés. Faites confire comme les tailladins au liquide. Étant confits, tirez-les de leur syrop, & leur faites prendre un bouillon dans le sucre à la grande plume, en remuant la poële. Tirez-les ensuite, & travaillez votre sucre sur les bords de la poële, jusqu’à ce qu’il blanchisse. Retournez vos tailladins dans ce sucre, jusqu’à ce qu’ils soient bien glacés ; & à mesure que vous les retirez, faites sécher sur des grillages à l’étuve.

Citrons. (Biscuits de) Choisissez un beau citron ; rapez-le, & faites tomber la rapure dans l’eau nette. Passez cette rapure à travers un linge, & la faites sécher. Mettez cette rapure dans une terrine, avec quatre jaunes d’œufs frais, demi-livre de sucre en poudre, huit blancs d’œufs fouettés en neige, un quarteron de fleur de farine : fouettez le tout. Dressez vos biscuits en long sur du papier blanc ; saupoudrez de sucre fin, pour les glacer. Faites cuire à feu doux.

Citrons (Biscuits de) à l’écorce de citron confite. Prenez des blancs d’œufs, selon la quantité de pâte que vous voulez faire. Rapez-y de la chair de citron ; mettez-y de la marmelade de ce fruit, avec du sucre en poudre. Mêlez le tout, pour en faire une pâte maniable : ajoutez-y de l’écorce de citron confite, pilée bien menu. Formez vos biscuits, & les faites cuire à l’ordinaire. Ces biscuits doivent être secs & cassans.

Citrons (Biscuits de) grands. Faites cuire du sucre à cassé. Tirez-le, & y mettez de la raclure de citron, avec deux blancs d’œufs fouettés en neige. Versez cette glace dans un papier, de telle forme & grandeur que vous jugerez à propos. Lorsqu’elle commencera à se refroidir, coupez-la de la grandeur que vous voudrez, & faites cuire à l’ordinaire.

Citrons blancs en bâtons. Tournez vos citrons, & les mettez à mesure à l’eau froide ; ensuite coupez-les en quatre, & chaque quartier en plusieurs autres plus minces. Faites-les bouillir avec leur jus. Quand ils seront amollis, mettez-les prendre huit à dix bouillons au sucre clarifié, & faites refroidir dans une terrine jusqu’au lendemain. Égouttez du syrop & faites rebouillir votre fruit, en augmentant de sucre, & ainsi de suite, par trois fois, d’abord au petit lissé, ensuite au grand lissé & perlé, & enfin au perlé, augmentant de sucre à chaque cuisson. Égouttez votre sucre &, mettez le fruit en pot. Si c’est pour garder, vous jettez votre syrop sur le fruit ; & vous pouvez le tirer au sec, quand vous le jugez à propos. Si vous voulez le glacer, vous procéderez, comme il a été dit à l’article des Tailladins glacés.

Citrons. (Compôte de) Tournez-les ; mettez à l’eau froide ; coupez en quartiers ; faites blanchir ; mettez ensuite faire quelques bouillons au sucre clarifié. Cinq à six heures après, lorsqu’ils auront pris sucre, finissez-les ; & servez avec leur syrop.

Citrons (autre Compôte de) Faites une gelée de pommes ; & en la cuisant, ayez un gros citron que vous pelerez jusqu’à la chair. Coupez cette chair en plusieurs tranches, & les jettez dans votre gelée, les pépins ôtés. Faites bouillir le tout jusqu’à ce que votre gelée soit à son degré de cuisson. Laissez refroidir à moitié ; faites une assiette de tranches de citron, & jettez votre gelée par-dessus.

Citron. (Conserve de) Mettez dans du sucre à la grande plume, de la rapure d’écorce de citron ; étant à moitié froid, travaillez votre sucre ; & lorsque vous le verrez prêt à s’épaissir, vous mettrez votre conserve dans les moules.

Citrons. (Conserver blanche de) Faites cuire du plus beau sucre à la petite plume ; étant à ce degré, retirez-les, & mettez-y, à plusieurs reprises, en le travaillant, du jus de citron, jusqu’à ce que cette conserve soit bien blanche ; après quoi vous la mettrez dans les moules.

Citrons. (Crême de) Blanc de six œufs frais, jus de six citrons, demi-verre d’eau avec de la raclure de l’écorce de ce fruit. Battez bien le tout ; passez-le deux ou trois fois, après y avoir mis le sucre nécessaire. Mettez sur un plat, & faites cuire doucement sur la cendre chaude, en remuant toujours, pour qu’elle ne bouille pas. Quand elle sera un peu épaisse, vous dresserez votre crême sur une porcelaine, & la servirez froide.

Citrons. (Dragées de) Coupez des citrons en filets ; mettez-les à l’eau fraîche, pendant vingt-quatre heures. Faites blanchir jusqu’à ce qu’il cédent à la pression des doigts. Égouttez & mettez dans le sucre cuit à lissé ; faites faire quelques bouillons. Laissez refroidir. Tirez, & faites sécher à l’étuve. Remettez ensuite au sucre cuit au grand lissé, avec de la gomme détrempée ; & finissez comme les dragées ordinaires.

Citron. (Eau de) Zestez un citron. Mettez ces zestes dans une aiguiere, avec le jus de deux citrons, une pinte d’eau & un quarteron de sucre. Laissez infuser le tout, pendant quelques heures. Passez & mettez à la glace.

Citrons en olives. Rapez du citron verd. Mettez cette rapure dans un mortier, avec des blancs d’œufs frais, selon la quantité que vous voudrez, & du citron ce qu’il en faut, pour que le goût en domine. Mettez-y du sucre en poudre, & l’augmentez jusqu’à ce que cela forme une pâte assez ferme. Roulez-la en long ; coupez ensuite en morceaux que vous façonnerez en olives, & ferez cuire à feu doux, pour les conserver ensuite en lieu sec.

Citrons entiers. Zestez ou tournez-les, & les mettez à mesure à l’eau fraîche avec un peu de jus du même fruit, pour les conserver blancs. Faites blanchir à l’eau bouillante avec encore un peu de jus de citron, jusqu’à ce qu’ils quittent l’épingle. Vuidez les avec une cuiller, par une ouverture faite à la tête. Faites cuire, & les finissez comme les Citrons blancs en bâtons. (Voyez cet article pour le surplus du procédé.)

Citron. (Essence de) Tournez legérement vos citrons, & mettez les zestes dans un grand entonnoir bien bouché, dont le bout entrera dans le gouleau d’une bouteille, avec lequel il sera bien lutté ; & laissez distiller cette essence d’elle-même, comme celle de cedrat. (Voyez Cedrat.) On peut encore couper des citrons par quartiers, les mettre dans un pot avec leur jus, & de l’eau tiéde, infuser quelque tems, ensuite distiller le tout à l’alambic. L’essence, comme plus legere, gagnera le haut du récipient ; & pour la séparer de la partie aqueuse, on renverse la bouteille sens-dessus-dessous, fermant l’orifice avec le pouce ; & quand l’essence a regagné le fond, on laisse échapper l’eau, en levant un peu le pouce, jusqu’à ce qu’il n’y en ait que peu ou point.

Citrons. (Glace de) Prenez de la marmelade de ce fruit ; faites-la prendre à la glace à la salbotiere ; mettez-la ensuite dans des moules que vous envelopperez de papier, & remettez à la glace. Avant finir, donner-lui couleur avec de la gomme-gutte.

Citrons. (Grillage de) On en fait avec la rapure de ce fruit, & avec les tailladins. Si on fait ces grillages de tailladins, on les fait cuire au sucre à la grande plume ; & étant presque grillés, on les poudre de sucre. Si c’est à la rapure de citron, on la fait cuire de même ; &, étant grillée, on la sert par petits tas sur des assiettes.

Citrons. (Marmelade de) Coupez-la par morceaux ; ôtez-en les durillons, s’il y en a. Faites cuire dans l’eau bouillante avec de leur jus, jusqu’à ce qu’ils soient tendres ; passez-les ensuite à l’eau fraîche. Égouttez-les bien, & exprimez-en la marmelade à travers une serviette. Faites cuire cette marmelade dans du sucre à la grande plume, où vous lui ferez faire quelques bouillons. Pour demi-livre de marmelade, vous emploierez une livre de sucre.

Citrons. (Massepains de) Pelez & pilez une livre d’amandes ; délayez cette pâte dans trois quarterons de sucre cuit à soufflé. Ajoutez-y demi-livre de marmelade de citron. Faites cuire le tout ensemble, en remuant, jusqu’à ce que cette pâte ne tienne plus à la poële. Formez-en vos massepains, en la dressant sur du papier ; faites cuire d’un côté, sous le couvercle d’un four de campagne. Détachez, & les glacez de l’autre côté, avec du sucre battu dans le blanc d’œuf, & un peu de rapure de citron ; & faites cuire comme ci-devant.

Citrons. (Pastilles de) Faites infuser des zestes de citrons à l’eau chaude. Quand votre infusion aura le goût du fruit, pressez-la dans une serviette ; faites fondre dans l’expression, de la gomme adraganth. Mettez-la dans un mortier, & y délayez du sucre, jusqu’à ce que cela devienne une pâte maniable, & vous en formez vos pastilles.

Citrons. (Pâte de) Faites cuire de l’écorce de citron à l’eau bouillante ; étant bien égouttée, pilez-la & la passez au tamis. Desséchez-la ensuite, & la mettez dans le sucre à la grande plume, pour lui faire faire deux bouillons, & la mettrez ensuite dans des moules ; il faut deux livres de sucre pour livre de fruit.

Citrons. (Petits pains de) Battez un ou deux blancs d’œufs, plus ou moins, avec un peu d’eau de fleurs d’orange. Mettez ensuite du sucre en poudre, jusqu’à ce que cela devienne une pâte, comme celle à massepains. Ajoûtez-y de la rapure de citron. Formez-en de petites boules de vous applatirez, & les faites cuire à feux doux.

Citrons. (Ratafia de) Ce procédé est extrêmement simple. Pour une pinte d’eau-de-vie, employer les zestes de cinq citrons, & y mettez trois quarterons de sucre, & ainsi à proportion. Laissez infuser long-tems ; passez-le ensuite. Plus il est gardé, meilleur il est.

Citron. (Syrop de) Ce procédé est encore très-simple. Il ne s’agit que de faire cuire du sucre au lissé, une livre, par exemple, sur laquelle on met le jus d’un bon citron, & on fait réduire le sucre à perlé. La dose ci-dessus est la régle pour une plus grande quantité.

Citrons (Tailladins de) filés. Faites vos tailladins, comme il a été dit à l’article (Tailladins confits au liquide.) Étant égouttés & séchés à l’étuve, rangez-les sur des feuilles d’office frottées de bonne huile. Faites couler dessus, avec deux fourchettes, du sucre cuit au caramel ; de sorte que cela forme une espece de filigrane. Quand le caramel sera froid d’un côté, répétez l’opération de l’autre.

Citrons verds confits. Fendez-les par le côté, & les mettez à l’eau tiéde. Étant prêts à bouillir, mettez de l’eau fraîche, pour les empêcher de monter. Tirez-les du feu ; couvrez & les laissez reverdir. Faites-les bouillir ensuite dans d’autre eau, jusqu’à ce qu’ils soient tendres. Laissez-les refroidir, & les mettez ensuite dans une terrine. Versez dessus du sucre clarifié cinq livres pour demi-cent. Faites bouillir ce sucre par quatre fois ; & à sa derniere cuisson au grand perlé, vous y mettrez vos citrons faire quelques bouillons.

Les citrons verds des Indes se confisent de même.

Citrons. (Zestes de) Faites bouillir vos zestes dans quatre eaux différentes, un quart d’heure chaque fois. Mettez-les ensuite au sucre clarifié sur le feu, près de bouillir, & leur y faites faire une vingtaine de bouillons. Tirez vos zestes. Faites cuire votre syrop à lissé. Remettez-y vos zestes faire huit à dix bouillons. Tirez-les encore ; faites cuire votre syrop à perlé. Remettez-y vos zestes ; donnez-leur un bouillon couvert ; laissez refroidir, & tirez au sec. Ce qui reste de ce syrop, sert ensuite pour la conserve, le massepain, les pralines & noix vertes.

Citrons (Zestes de) en rocher. Finissez-les comme pour une compôte. Faites cuire leur syrop au grand perlé ; laissez-les-y pendant deux jours. Tirez-les ensuite ; faites égoutter ; dressez en rocher, & les faites sécher à l’étuve.

Observation médecinale.

Le citron est un des fruits les plus sains que nous ayons ; son jus acide est rafraîchissant, apéritif, stomachique, propre à prévenir & à corriger la corruption des humeurs du corps, & leur trop vive circulation ; à arrêter les progrès, & opérer la guérison des maladies qui en proviennent, comme les fiévres malignes & putrides, le scorbut, l’état inflammatoire du sang, les fiévres chaudes, les hémorragies : son écorce est legérement astringente, stomachique, utile aux estomacs foibles, aux personnes sujettes aux glaires, au dévoiement, à l’incontinence d’urine, aux hémorragies du nez ou autres, & aux vers.