Dictionnaire philosophique/Garnier (1878)/Gracieux

Éd. Garnier - Tome 19
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GRACIEUX[1].

Gracieux est un terme qui manquait à notre langue, et qu’on doit à Ménage. Bouhours, en avouant que Ménage en est l’auteur, prétend qu’il en a fait aussi l’emploi le plus juste, en disant :

Pour moi, de qui le chant n’a rien de gracieux[2].

Le mot de Ménage n’en a pas moins réussi. Il veut dire plus qu’agréable ; il indique l’envie de plaire, des manières gracieuses, un air gracieux. Boileau, dans son Ode sur Namur, semble l’avoir employé d’une façon impropre, pour signifier moins fier, abaissé, modeste :

Et désormais gracieux,
Allez à Liége, à Bruxelles,
Porter les humbles nouvelles
De Namur pris à vos yeux.

La plupart des peuples du Nord disent : Notre gracieux souverain ; apparemment qu’ils entendent bienfaisant. De gracieux on a fait disgracieux, comme de grâce on a formé disgrâce : des paroles disgracieuses, une aventure disgracieuse. On dit disgracié, et on ne dit pas gracié. On commence à se servir du mot gracieuser, qui signifie recevoir, parler obligeamment ; mais ce mot n’est pas employé par les bons écrivains dans le style noble.


  1. Encyclopédie, tome VII, 1757. (B.)
  2. Églogue II (à la reine de Suède), vers 145.
Grâce (de la)

Gracieux

Grand, grandeur