Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Zeuxis


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ZEUXIS, peintre fort célèbre [* 1], florissait quatre cents ans avant Jésus-Christ, vers la 95e. olympiade (A). Ce que l’on sait touchant sa patrie est un peu confus (B). La peinture était alors aux premiers degrés de son éclat : il l’éleva de ce commencement de gloire, où Apollodore l’avait porté, à une grande perfection. Il y a des auteurs qui disent que ce fut lui qui inventa la manière de ménager les jours et les ombres [a] (C) ; et l’on demeure d’accord qu’il excella dans le coloris. Aristote [b] trouvait ce défaut dans ses peintures, que les mœurs ou les passions n’y étaient pas exprimées ; cependant Pline témoigne tout le contraire à l’égard du portrait de Pénélope, dans lequel il semble, dit-il, que Zeuxis ait peint les mœurs [c]. Il gagna des richesses immenses [d] ; et il en fit une fois parade durant la célébration des jeux olympiques, où il se fit voir avec un manteau semé de lettres d’or qui formaient son nom. Quand il se vit si riche, il ne voulut plus vendre ses ouvrages ; il les donnait, et il disait sans façon qu’il n’y saurait mettre un prix égal à ce qu’ils valaient. Avant cela, il en faisait payer la vue : on n’était admis à voir son Hélène qu’argent comptant ; et de là vint que les railleurs appelèrent ce portrait Hélène la courtisane [e]. Il ne fit point difficulté de mettre au bas de ce portrait les trois vers de l’Iliade, où Homère rapporte que le bon homme Priam et les vénérables vieillards de son conseil demeurèrent d’accord que les Grecs et les Troyens n’étaient point blâmables de s’exposer depuis si long-temps à tant de maux pour l’amour d’Hélène, dont la beauté égalait celle des déesses [f]. On ne saurait bien dire si cette Hélène de Zeuxis était la même qui était à Rome du temps de Pline, ou la même qu’il fit aux habitans de Crotone, pour être mise au temple de Junon [g]. Il ne sera pas hors de propos de dire ici ce que Zeuxis exigea de ceux de Crotone, par rapport à ce portrait. Ils l’avaient fait venir à force d’argent, pour avoir un grand nombre de tableaux de sa façon, dont ils voulaient orner ce temple ; et lorsqu’il leur eut déclaré qu’il avait dessein de peindre Hélene (D), ils en furent fort contens, parce qu’ils savaient que son fort était de peindre des femmes. Ensuite il leur demanda quelles belles filles il y avait dans leur ville, et ils le menèrent au lieu où les jeunes garçons apprenaient leurs exercices. Il vit le plus commodément du monde s’ils étaient beaux et bien faits partout ; car ils étaient nus : et comme il en parut très-content, on lui fit entendre qu’il pouvait juger par-là s’il y avait de belles filles dans la ville, puisqu’on avait les sœurs des garçons qui lui paraissaient les plus admirables. Alors il demanda à voir les plus belles, et le conseil de ville ayant ordonné que toutes les filles vinssent en un même lieu, afin que Zeuxis choisit celles qu’il voudrait, il en choisit cinq ; et prenant de chacune ce qu’elle avait de plus beau, il en forma le portrait d’Hélène. Ces cinq filles furent fort louées par les poëtes de ce que leur beauté avait obtenu le suffrage de l’homme du monde qui s’y devait connaître le mieux [h] (E), et leur nom ne manqua point d’être consacré à la postérité. Je pense pourtant qu’il n’en reste plus aucune trace. Cicéron, qui nous apprend toutes ces choses, a laissé à deviner à son lecteur que le peintre voulut voir toutes nues ces cinq jeunes beautés : mais Pline l’a dit expressément ; et même qu’avant d’en choisir cinq, il les avait vues toutes en cet état [i]. Il est vrai qu’il veut que Zeuxis ait travaillé pour les Agrigentins, et non pas pour les Crotoniates, et qu’il ne dit point de qui était le portrait : à cela près on voit qu’il rapporte la même histoire que Cicéron. Il ne faut pas oublier que Zeuxis ayant disputé le prix de la peinture avec Parrhasius, le perdit [j] (F) ; voici comment. Zeuxis avait si bien peint des raisins, que les oiseaux fondaient dessus pour les becqueter. Parrhasius peignit un rideau si artistement, que Zeuxis le prit pour un vrai rideau qui cachait l’ouvrage de son antagoniste, et tout plein de confiance il demanda que l’on tirât vite ce rideau, afin de montrer ce que Parrhasius avait fait. Ayant connu sa méprise, il se confessa vaincu, puisqu’il n’avait trompé que les oiseaux, et que Parrhasius avait trompé les maîtres mêmes de l’art. Une autre fois il peignit un garçon chargé de raisins : les oiseaux volèrent encore sur ce tableau : il s’en dépita, et reconnut ingénument que son ouvrage n’était pas assez fini, puisque s’il eût aussi heureusement représenté le garçon que les raisins, les oiseaux auraient eu peur du garçon. On dit qu’il effaça les raisins, et qu’il ne garda que la figure où il avait le moins réussi [k]. Archélaüs, roi de Macédoine, se servit du pinceau de Zeuxis pour l’embellissement de son palais ; on peut voir là-dessus une bonne réflexion de Socrate dans Élien [l]. L’un des meilleurs tableaux de ce peintre était un Hercule étranglant des dragons dans son berceau, à la vue de sa mère épouvantée : mais il estimait principalement son athlète, sous lequel il mit un vers qui devint célèbre dans la suite [m] (G). Il y a de l’apparence qu’il faisait cas de son Alcmène [n], puisqu’il en fit présent aux Agrigentins. Il ne se piquait pas d’achever bientôt ses tableaux (H). On dit qu’ayant peint une vieille femme, il se mit tellement à rire à la vue de ce portrait, qu’il en mourut. C’est Verrius Flaccus qui le rapporte [o] (I). il y a dans Lucien la description d’un tableau de Zeuxis, qui mérite d’être lue. Ce tableau représentait un centaure femelle. J’avais rassemblé beaucoup de choses pour cet article ; mais je les supprime, à cause du Junius de Picturâ Veterum [p] (K). Je mettrai ici une remarque qui fut insérée dans les additions de mon projet. Elle concerne un ouvrage de Carlo Dati (L). Je n’oublierai point la première que je fis dans cet article du projet. Elle indique quelques imperfections (M) générales du Dictionnaire de M. Moréri.

(A) Il florissait.. vers la 95e. olympiade. ] C’est une faute à M. Moréri ; d’avoir dit tout simplement que Zeuxis vivait dans la 78e. olympiade [1] ; car il ne devait pas ignorer que Pline, qui a marqué la chronologie de ce peintre avec la dernière précision [2], savoir à la quatrième année de la 95e. olympiade [3], réfute ceux qui l’ont placée à la 89e. Je m’étonne que Scaliger n’ait point observé cela de la note qu’il a faite sur l’endroit d’Eusèbe où il est dit que Zeuxis florissait dans la 78e. olympiade. Eusèbe méritait là d’être relevé, puisqu’on ne peut nier, sans démentir presque tous ceux qui parlent de Zeuxis, qu’il n’ait été fort connu d’Archélaüs roi de Macédoine. Or y ayant eu deux Archélaüs, et le premier n’ayant commencé à régner, selon la chronologie d’Eusèbe, qu’au commencement de la 87e. olympiade, il faudrait que Zeuxis fût parvenu, à une vieillesse digne d’être remarquée, si son état florissant tombait à la 78e°. olympiade, et que néanmoins il eût travaillé à la cour d’Archélaüs. J’avoue que ce ne sont pas des choses incompatibles ; mais en tout cas Eusèbe se serait trop hâté, il aurait dû renvoyer Zeuxis au temps de ce roi de Macédoine. Je dirai en passant que la manière dont les anciens ont placé la chronologie des hommes illustres est propre à jeter dans la confusion. Il fallait marquer l’année de leur naissance et celle de leur mort, et non pas le temps où ils ont fleuri ; car ce temps est vague, il avance ou il recule selon les occasions ; il y a des gens qui sont au faîte de leur réputation à trente ans, d’autres n’y sont qu’à soixante. Cela me fait prendre garde à la preuve que Pline emploie contre ceux qui ont placé Zeuxis à la 89e. olympiade. Il les réfute par la raison que c’est une olympiade, où il faut nécessairement placer le peintre dont Zeuxis a été l’élève. Cette raison peut passer, vu le temps où Zeuxis paraît dans Pline ; mais si l’on change dans le texte la 89e. olympiade en la 79e., comme a fait le père Hardouin sur la foi des manuscrits, le raisonnement de Pline ne paraîtra guère bon : il réfutera ceux qui font fleurir ce peintre dans la 79e. olympiade ; il les réfutera, dis-je, en montrant que c’est le temps qu’il faut assigner au maître de Zeuxis. Mais pourquoi faut-il lui assigner un tel temps ? Parce que Zeuxis ne s’est signalé qu’à la fin de la 95e. olympiade. C’est une faible raison : faut-il qu’un peintre ne fasse du bruit que soixante ans après son apprentissage ? J’aimerais donc mieux la leçon ordinaire de Pline que celle des manuscrits de la bibliothéque du roi. Je n’ai garde d’imputer à un aussi habile homme que le père Hardouin ce que je vais dire ; il faut que ses imprimeurs aient oublié quelques chiffres. Il prétend que Suidas s’accorde avec Pline sur le temps de Zeuxis, puisque Suidas, appuyé sur Aristote, met la naissance ce peintre à l’olympiade 86, et le fait fleurir au temps d’Isocrate. Peu après on réfute la leçon vulgaire de Pline touchant la 89e. olympiade, par la raison qu’il est constant, en vertu même de ce qu’on venait de rapporter de Suidas, que Zeuxis mourut en la 89e. olympiade. Je suis sûr que si mes yeux ne me trompent point, les imprimeurs du père Hardouin ont brouillé ici les lettres numérales de l’original.

Au reste, je ne voudrais pas trop m’attacher à la précision de Pline, elle me paraît mal placée [4]. Ce n’est pas sur la réputation d’un grand homme qu’il faut regarder de si près au temps, et il serait aisé de prouver, en prenant droit sur les propres paroles de cet auteur, qu’il eût été plus exact s’il eût marqué la chronologie d’une façon un peu plus vague. Car que veut-il dire par cette quatrième année de la 95e. olympiade ? veut-il dire qu’avant ce temps-là Zeuxis avait vécu dans l’obscurité, et qu’il ne commença à se faire connaître que cette année ? Mais ce n’est pas ainsi que l’on doit marquer le temps où quelqu’un fleurit ; il faut le marquer par rapport à une réputation qui ait eu quelque durée ; et si Pline en avait usé autrement pour Zeuxis, il se serait bien trompé. En effet, il vous apprend que ce peintre ne donna pour rien ses ouvrages qu’après qu’il se fut extrêmement enrichi. Or, quand il les donnait pour rien, Archélaüs était en vie ; car le don qu’il fit de Pan à Archélaüs est un des exemples de sa libéralité rapportés par Pline. Il avait donc acquis avec de grandes richesses une grande réputation par la peinture, avant la mort du dernier Archélaüs, c’est-à-dire avant la fin de la 94e. olympiade [5] ; et par conséquent Pline se serait étrangement abusé, s’il avait mis le commencement de la réputation de Zeuxis à la 4e. année de la 95e. olympiade. Je crois, pour moi, qu’il faudrait prendre le milieu entre Eusèbe et Pline, d’autant plus que nous lisons dans Plutarque [6] que ce grand peintre florissait lorsque Périclès fit construire un grand nombre d’édifices publics, dont il donna l’intendance à Phidias. Or, sans alléguer que Pline [7] a mis Phidias dans la 84e. olympiade, il est sûr que Périclés fit faire ces bâtimens plusieurs années avant sa mort, qui arriva durant la 87e. olympiade. On ne voit donc pas que Pline ait eu beaucoup de raison de réfuter ceux qui ont mis Zeuxis à la 89e. olympiade, et de n’en faire alors qu’un jeune élève.

(B) Ce que l’on sait touchant sa patrie est un peu confus. ] Car encore que le témoignage de Tzetzès [8], qui le fait natif d’Éphèse, ne doive point nous faire douter qu’il ne soit né à Héraclée, puisque Cicéron [9], Pline [10] et Élien [11], s’accordent à l’assurer, ce n’est point un fort petit embarras que de choisir entre un grand nombre de villes qui ont porté le nom d’Héraclée celle où Zeuxis est venu au monde. Il y en a qui conjecturent qu’il était d’Héraclée, proche de Crotone dans l’Italie [12].

(C) Il y en a qui disent que ce fut lui qui inventa la manière de ménager les jours et les ombres [13]. ] La gloire de l’invention étant celle dont les hommes font le plus de cas, il fallait que M. Moréri fit savoir à son lecteur cet endroit de Quintilien. Au lieu de cela il nous assure que l’artifice des ombres des belles pièces de Zeuxis excédait toute sorte de prix. C’est d’un côté oublier le principal, et de l’autre c’est outrer la chose. Il a oublié de dire que Zeuxis fût l’inventeur du mélange des ombres et de la lumière dans les tableaux ; et il a dit sans fondement que l’artifice des ombres était ce qui rendait inestimables les pièces de Zeuxis. Voici ce qui l’a trompé. Il avait lu dans un auteur [14] dont il a pris plusieurs choses qu’on remarquait de Zeuxis qu’encore que ses tableaux, où l’artifice des ombres parut premièrement, excédassent toute sorte de prix, ce qui le réduisit à la nécessité de les donner gratuitement, il avait néanmoins ce défaut de représenter les têtes plus grosses qu’elles n’étaient, et la plupart des membres de même [15] ; en quoi Quintilien [16] trouve qu’il ne faisait qu’imiter Homère, dont les plus belles femmes sont robustes et pleines d’embonpoint. M. Moréri, dis-je, avait lu cela, et ne sut point s’en servir. Il en devait tirer ce que l’on trouvait à redire dans les ouvrages de Zeuxis ; mais surtout il en devait tirer cette remarque, que l’artifice des ombres fut une invention de ce peintre. Il devait au moins, après avoir supprimé cette remarque, ne pas lier ensemble les paroles qui la précédaient et celles qui la suivaient ; car en le faisant il a falsifié le passage de la Mothe-le-Vayer, qui avait plus de besoin de correction que de falsification. Ce qui m’en fait juger de la sorte est que ce fameux écrivain donne pour un fait constant, que la véritable raison pourquoi Zeuxis discontinua de vendre ses tableaux fut qu’il n’aurait été possible à personne d’en payer le juste prix. C’est prendre trop à la lettre les paroles de ce peintre [17], qui apparemment ne pensait pas ce qu’il disait : et s’il l’avait cru, il aurait été le plus fanfaron de tous les hommes : et par conséquent sa rodomontade ne devrait pas être alléguée comme une véritable raison. Il est fort apparent que les tableaux qu’il donnait, après être devenu fort riche, n’étaient pas meilleurs que ceux qu’il avait vendus ; car ce n’est pas la coutume de travailler plus ce qu’on veut donner pour rien que ce qu’on veut vendre bien chèrement. À propos de quoi je me souviens qu’on dit que les sermons d’un abbé sont beaucoup meilleurs pendant qu’il aspire à l’épiscopat qu’après qu’il est parvenu. Si donc la raison de Zeuxis eût été véritable, il aurait dû cesser de vendre plus tôt qu’il ne cessa. J’ai été surpris de ne trouver pas les remarques de Quintilien parmi ce que M. Felibien a dit de Zeuxis. M. Hofman a traduit l’expression de M. Moréri d’une façon un peu équivoque, puisque ces paroles, Donare opera sua, inter quæ Umbræ eminebant, instituit, orthographiées comme elles sont, semblent signifier qu’il y avait un tableau de Zeuxis où il avait peint les ombres, qui était le plus excellent de ses ouvrages. D’ailleurs le terme eminebant ne semble point fait pour umbræ en style de peintre ; car il n’y a point d’endroits qui semblent avoir moins de relief dans la peinture que ceux qui marquent les ombres [18].

(D) De peindre Hélène. ] N’avoir dit autre chose sur le portrait d’Hélène, si ce n’est que Zeuxis le fit, est un péché d’omission inexcusable à Charles Étienne et à MM. Lloyd, Moréri, et Hofman, vu les singularités de plusieurs sortes que les anciens ont rapportées touchant ce portrait. Charles Étienne n’a cité que Pline, qui n’en a parlé qu’en passant ; il fallait citer Cicéron et Élien, qui en ont touché les circonstances. MM. Lloyd et Hofman ne citent à proprement parler que comme Charles Étienne : car encore qu’ils nous renvoient à Cicéron, il est visible que c’est par rapport à Zeuxis en général, et non par rapport au portrait d’Hélène ; cela, dis-je, est visible, puisqu’ils nous renvoient aussi à Plutarque dans la vie de Périclès, où il ne s’agit point du tout de ce portrait. Par la faute des imprimeurs on voit Cicéron cité dans le Dictionnaire de M. Lloyd, II de Juvent., et dans celui de M. Hofman, lib. II de Juventut., au lieu de lib. II de Invent., ce qui est capable de faire accroire à plusieurs lecteurs que Cicéron a écrit de Juventute, non moins que de Senectute. Vossius [19] a relevé une faute de Boulenger, qui a dit dans son livre de la Peinture, que ce fut Vénus et non Hélène que Zeuxis peignit, sur les cinq originaux vivans qu’il avait devant ses yeux : mais en relevant cette faute Vossius en a fait une autre, ayant assuré que Pline ne marque pas moins expressément que Cicéron, que Zeuxis peignit Hélène. Il n’est pas vrai que Pline marque cela ; il parle en général d’un portrait. Notez que Célius Rhodiginus a fait un gros solécisme en parlant du tableau d’Hélène la courtisane [20]. Zeuxin, dit-il, picturâ nobilem, inter cætera ejus artificii, haud parùm multa quæ circumferuntur, et hominum desideria vix explent, Helenam quandoque ab eo expictam ferunt, cui tantùm sanè attribuerit, ut non temerè nec quemlibet, ac (ut Græci dicunt) ὡς ἔτυχε, spectatum admitteretur, ni ῥητὸν ἀργύριον, id est propositam pecuniæ quantitatem erogâsset. Il est échappé de semblables fautes de langage aux meilleurs auteurs.

(E) Ces cinq filles furent fort louées de ce que leur beauté avait obtenu le suffrage de l’homme du monde qui s’y devait connaître le mieux. ] On pourrait douter si les cinq filles que Zeuxis choisit étaient chacune plus belle que celles qu’il ne choisit point. La raison de ce doute est qu’il ne voulut que rassembler en un corps les beautés qui se trouvaient séparément dans ces cinq filles : pour cela il n’était pas besoin qu’elles fussent toutes fort belles ; il suffisait que les unes eussent les beautés qui manquaient aux autres. Or qui peut nier qu’il n’y ait des femmes d’une beauté fort médiocre, qui, à ne comparer que quelque partie à quelque partie, surpassent les grandes beautés. Ainsi on ne voit pas que Cicéron ni les poëtes dont il parle aient été nécessairement bien fondés à préférer les cinq filles de Crotone choisies par le peintre d’Hélène, à celles qu’il renvoya. Peut-être en renvoya-t-il auxquelles il ne manquait que peu de chose pour être parfaitement belles, mais qui ne servaient de rien à son but, parce que les mêmes beautés dont elles étaient pourvues se trouvaient en un degré plus exquis dans l’une des cinq ; après quoi il suffisait qu’une autre des cinq, médiocrement jolie d’ailleurs, eût ce peu de chose qui manquait à celles qu’il renvoya. La question, comme chacun voit, n’est pas importante ; on peut la laisser là pour ce qu’elle vaut ; et si l’on veut mettre en fait que Zeuxis choisit les cinq plus belles, non pas à cause que cela était nécessaire à son entreprise, mais afin de jouir d’un spectacle plus divertissant, je ne m’y opposerai pas. Un des principaux fondemens de l’historiette a été ce que l’on dit ordinairement, qu’il n’y a rien de parfait en ce monde. Cela est surtout véritable en matière de beauté : je m’en rapporte à la critique que les belles femmes font les unes des autres ; et si ne voient-elles pas tout, comme Zeuxis voulut faire, résolu sans doute de ne suivre pas la méthode dont Horace parle dans sa seconde satire du Ier. livre :

........ Ne corporis optima lynceis
Contemplere oculis, Hypseâ cæcior illa
Quæ mala sunt spectes. Ô crus ! ô bracchia !
Depygis, nasuta, brevi latere ac pede longo est [21].


Au fond ce peintre n’avait besoin que de son imagination pour faire le portrait d’une beauté achevée ; car il est certain que nos idées vont plus loin que la nature. Ego sic statuo nihil esse in ullo genere tam pulchrum quo non pulchrius id sit undè illud ut ex ore aliquo quasi imago exprimatur, neque oculis, neque auribus, noque ullo sensu percipi potest, cogitatione tantùm et mente complectimur..... Nec verò ille artifex (Phidias) quum faceret Jovis formam aut Minervæ, contemplabatur aliquem à quo similitudinem duceret, sed ipsius in mente insidebat species pulchritudinis eximia quædam, quam intuens, in eâque defixus, ad illius similitudinem artem et manum dirigebat [22]. Il ne serait pas plus impossible de trouver des hommes aussi parfaits que les héros de roman, que de trouver des femmes aussi belles que les héroïnes du même pays. Cela est si vrai, que quand les auteurs veulent représenter en peu de mots une personne parfaitement belle, ils se contentent de dire qu’elle surpasse les idées des poëtes et celles des peintres [23].

(F) Zeuxis ayant disputé le prix de la peinture avec Parrhasius, le perdit. ] Ordinairement on rapporte avec peu de netteté le fait qui concerne les oiseaux que Zeuxis trompa par des raisins en peinture. Si l’on consultait bien Pline, on ne tomberait pas dans la confusion ; car on verrait que Zeuxis fit deux différens tableaux qui se rapportent à ce fait, et qui eurent chacun leur aventure particulière. Je ne remarque point que beaucoup d’auteurs racontent que Zeuxis voulut tirer lui-même le rideau de Parrhasius : ce n’est pas ainsi que Pline rapporte la chose ; mais c’est une altération des circonstances trop petite pour en parler. On a beaucoup plus de raison de trouver étrange que le Dictionnaire de Moréri ne dise rien du défi ou de la gageure de ces deux peintres, et MM. Lloyd et Hofman n’en disent qu’un petit mot. Pour ce qui regarde l’autre tableau, où un garçon portait des raisins, M. Moréri en a parlé d’une manière qui ne lui saurait faire d’honneur, puisqu’il en a retranché les principales circonstances, n’ayant rien dit du jugement que Zeuxis porta lui-même de ce tableau. M. Hofman n’a pas oublié cela ; mais il s’est servi d’une phrase qu’il devait entièrement supprimer : eâdem ingenuitate, dit-il, processit (Zeuxis) iratus opert ac dixit. Ces paroles sont de Pline, et font un très-bel effet dans l’original, où elles ont relation à l’histoire de la gageure, c’est-à-dire au narré de Pline, touchant l’ingénuité avec laquelle Zeuxis avoua qu’il était vaincu. Mais lorsque dans un article où il n’y a rien de cette ingénuité, on nous vient apprendre que Zeuxis reconnut avec la même ingénuité, etc., on nous jette dans des ténèbres impénétrables, où nous pouvons seulement conjecturer que l’on nous donne une pièce toute tronquée. Presque tous les abréviateurs sont sujets à ce défaut [24]. M. Hofman est ici beaucoup plus excusable que M. Lloyd ; car quand ce dernier a gardé la phrase, eâdem ingenuitate processit, qu’il trouvait dans Charles Étienne, il lui était aisé de sentir qu’on la rapportait à une chose à quoi le lecteur de Charles Étienne était renvoyé. M. Lloyd a supprimé ce renvoi, et par ce moyen il a mis plus de ténèbres dans son article. Ce n’est pas que je prétende excuser entièrement Charles Étienne ; car son ut in Parrhasio suprà vidimus, ne lui pouvait pas donner droit de se servir de ces termes eâdem ingenuitate processit, puisqu’il ne venait pas de parler du succès de la gageure. L’article de Zeuxis est beaucoup meilleur dans Calepin [25] que dans tous les Dictionnaires dont je viens de parler. Mais je n’ai point vu d’auteur qui ait plus mal récité la dispute des deux peintres, que celui [26] qui fait le plus de figure dans le commentaire Variorum sur Valère Maxime. Il assure que Parrhasius peignit des oiseaux sur une toile, si semblables à la vérité, que Zeuxis, craignant le jugement des oiseaux, lui donna cause gagnée par une pudeur ingénue. Je suis fort trompé si la phrase qu’il emploie, Zeuxis alitum judicum timens, n’est une corruption de celle de Pline, Zeuxis alitum judicio tumens ; et si cela est, quel exemple n’avons-nous point ici des métamorphoses qui arrivent aux pensées ?

Souvenons-nous que don Lancelot de Pérouse traite de fable tout ce qu’on a dit de l’effet de ces deux peintures. Il ne croit point que les oiseaux becquetassent la vigne de Zeuxis, ni que Zeuxis ait pris pour un vrai rideau celui de Parrhasius. Voilà comment il se tire de l’objection que cela fournit à ceux qui méprisent l’habileté des modernes : il nie le fait ; cette méthode de résoudre les difficultés est bien commode. Oh, Zeusi con l’uva dipinta, dite voi, trasse gli uccelli a beccarla, il che non habbiamo d’alcuno de’ nostri mentovati di sopra. Già io hò dato dentro con un libro di farfalloni contra gli antichi historici, ed hocci rotto, come suol dire il Volgo, un paio di scarpe, intendinla come vogliono i presenti o posteri bell’ ingegni, e però non temo, che sono millanterie della Grecia, e farfalloni di Plinio, e quello dell’ uva, e quelli degli animali, che dessero segno di riconoscere altri della loro specie fatti di colore per naturali [27]. M. Perrault, aussi zélé pour les modernes que don Lancelot, a trouvé une réponse bien plus solide ; car il allègue des faits semblables et de fraîche date, et qui prouvent que ce n’est pas en cela que consiste la délicatesse de la peinture. Voici ses paroles [28] : On dit que Zeuxis représenta si naïvement des raisins, que des oiseaux les vinrent becqueter : quelle grande merveille y a-t-il à cela ? Une infinité d’oiseaux se sont tués contre le ciel de la perspective de Ruel, en voulant passer outre, sans qu’on en ait été surpris, et cela même n’est pas beaucoup entré dans la louange de cette perspective .... [29]. Il y a quelque temps que passant sur le fossé des Religieuses Anglaises, je vis une chose aussi honorable à la peinture que l’histoire des raisins de Zeuxis, et beaucoup plus divertissante. On avait mis sécher dans la cour de M. le Brun, dont la porte était ouverte, un tableau nouvellement peint, où il y avait sur le devant un grand chardon parfaitement bien représenté. Une bonne femme vint à passer avec son âne qui, ayant vu le chardon, entre brusquement dans la cour, renverse la femme qui tâchait de le retenir par son licou ; et sans deux forts garçons qui lui donnèrent chacun quinze ou vingt coups de bâtons pour le faire retirer, il aurait mangé le chardon : je dis mangé, parce qu’étant nouvellement fait, il aurait emporté toute la peinture avec sa langue.... Pline raconte encore que Parrhasius avait contrefait si naïvement un rideau, que Zeuxis même y fut trompé. De semblables tromperies se font tous les jours par des ouvrages dont on ne fait aucune estime. Cent fois des cuisiniers ont mis la main sur des perdrix et sur des chapons naïvement représentés, pour les mettre à la broche : qu’en est-il arrivé ? on en a ri, et le tableau est demeuré à la cuisine.

(G) Sous lequel il mit un vers qui devint célèbre dans la suite. ] Si l’on en croit Plutarque [30], ce fut sous les tableaux d’Apollodore que ce vers fut mis. Il ne dit pas qu’Apollodore lui-même y marqua cette souscription, comme Vossius [31] et le père Hardouin [32] l’assurent ; il dit en général qu’on le voyait aux ouvrages d’Apollodore, οὗ τοῖς ἔργοις ἐπιγέγραπται, Μωμήσεταί
τις μᾶλλον ἢ μιμήσεται. Cujus operibus inscriptum fuit, faciliùs hæc culpabit quis quàm imitabitur. Ce n’est pas la seule chose que Plutarque attribue à Apollodore au lieu de l’attribuer à Zeuxis comme font d’autres ; il veut aussi qu’Apollodore ait été l’inventeur des ombres dans la peinture, ἀνθρώπων πρῶτος ἐξευρὼν φθορὰν καὶ ἀπόχρωσιν σκιᾶς.
Primus hominum invenit colorum temperationem diversorum et umbræ coloribus exprimendæ rationem. Voici tout le passage selon la version d’Amyot : Apollodorus, le premier de tous les hommes qui a inventé les definissemens et des coloremens ombres, estoit Athenien, sur les ouvrages duquel il y avoit escrit,

On l’ira plustost regrattant
Que l’on ne l’ira imitant.


Un de nos poëtes [33] témoigna une pareille confiance eu égard à sa Franciade, par ces quatre vers :

Un lit ce livre pour apprendre,
L’autre le lit comme envieux :
Il est bien aisé de reprendre,
Mais mal aisé de faire mieux.

(H) Il ne se piquait pas d’achever bientôt ses tableaux. ] Plutarque rapporte que Zeuxis sachant qu’Agatarchus se glorifiait de peindre facilement, et en peu de temps, dit que pour lui il se glorifiait au contraire de sa lenteur, parce que c’était le moyen de faire un ouvrage de longue durée [34]. Le même Plutarque, dans un autre livre [35] rapporte la chose comme si Zeuxis avait avoué à quelques-uns qui lui reprochaient sa lenteur, qu’à la verité il estoit long-tems à peindre, mais que c’estoit aussi : pour long-tems. Tout le monde le fait répondre qu’il peignoit pour l’éternité : et c’est ainsi qu’en dernier lieu on a appliqué sa pensée au Dictionnaire de l’Académie française, dans la préface de celui de Furetière. C’est à ceux qui amplifient la vanterie de ce peintre à voir quels garans ils en ont.

(I) C’est Verrius Flaccus qui le rapporte. ] Il y joint deux vers qui font allusion à cette aventure,

Nam quid modi facturus risu denique,
Ni pictor fieri vult qua risu mortuus est ?


Mais s’il est vrai que Zeuxis soit mort de la sorte, comment a-t-il pu se faire que si peu d’auteurs en aient parlé ? Qu’y avait-il dans toute sa vie d’aussi digne de remarque qu’une telle singularité de sa fin ? Cependant parmi cette foule d’anciens qui ont fait mention de Zeuxis, il n’y a que Verrius Flaccus qui nous ait appris cette singularité. Encore l’a-t-il fait par hasard, et si peu à propos qu’il en a été grondé par son abréviateur Pompéius Festus, comme si un fait de cette nature n’eût pas dû entrer dans un ouvrage où l’on s’était proposé de traiter de la signification des mots. Je voudrais que nous eussions le passage de Verrius Flaccus en son entier. Ce qui nous en reste était dans le plus pitoyable état du monde avant que Joseph Scaliger y eût appliqué sa critique divinatrice. Si MM. Moréri et Hofman avaient connu cette source, ils l’auraient indiquée, comme cela se devait, et ils nous eussent donné les deux vers latins un peu plus intelligibles. Le bon Ravisius Textor [36] n’a point mis notre peintre dans son catalogue de ceux qui sont morts de rire : c’est sans doute une omission involontaire.

Notez que Simon Majol, évêque de Volturara, s’est fort trompé sur ce fait. Zeuxis pictor, dit-il [37], deformissimam spectans quandam picturam solutus in risum expiravit. Verrius alter pictor quòd anum quandam deformissimam pinxisset eandem mortem in risum solutus oblit, Rhodigino teste, l. IV, c. XVIII. Il y a un gros péché d’omission dans ce qu’il conte de Zeuxis, et un péché énorme de commission dans le reste : car ce Verrius, prétendu peintre, et mort de rire, est un personnage chimérique : outre que Rhodiginus est trés-mal cité. Voyez la note [38] ; vous admirerez la métamorphose des pensées copiées par certains compilateurs : elle est quelquefois aussi surprenante que celles d’Ovide.

(K) À cause du Junius de Picturâ Veterum. ] J’aime mieux renvoyer aux beaux et doctes recueils de Junius qu’entasser ici des choses qui se trouvent là. J’observe par occasion de cet ouvrage, imprimé à Rotterdam chez Régnier Leers, serait encore peut-être caché dans un cabinet, si M. l’abbé Nicaise [39] ne s’était donné mille mouvemens pour en procurer l’édition. On a oublié de faire savoir cela au public dans la préface. Ce bel ouvrage a été dédié à M. l’abbé Bignon, l’un des plus illustres protecteurs qu’aient aujourd’hui les sciences, et qui soutient si dignement par son esprit, par son éloquence et par l’étendue de son savoir, la gloire du nom qu’il porte. Lisez cette épître dédicatoire [40].

(L) Elle concerne un ouvrage de Carlo Dati. ] Voici la dernière pièce des additions de mon projet : « Depuis l’impression de cet article, il m’est tombé entre les mains un livre qui m’aurait épargné beaucoup de peine, si je l’avais eu plus tôt. C’est la Vie de Zeuxis, composée en italien par Carlo Dati, et imprimée à Florence en 1667, avec celles de Parrhasius, d’Apelles et de Protogène. L’auteur a recueilli tout ce qui se trouve concernant ces quatres peintres, dans les ouvrages des anciens, et a donné à tout cela une liaison fort juste ; il a d’ailleurs ajouté à chaque vie plusieurs remarques remplies d’une belle et curieuse érudition. Celles qui regardent la vie de Zeuxis me fourniraient beaucoup de matière, si je n’étais pas à la dernière page de mon avant-coureur. Je dirai seulement qu’elles m’ont appris une chose que Vossius ne savait pas, c’est que Boulenger n’est pas le premier qui a dit que Zeuxis peignit Vénus, et non pas Hélène, sur les originaux vivans qu’il avait choisis parmi les plus belles filles de la ville. Volaterran et Jean de la Casa avaient déjà pris en cela l’un pour l’autre : Lipse, qui plus est, a dit quelque part [41] que ce fut Junon que Zeuxis peignit, et non pas Hélène. Je dirai en passant que Carlo Dati a fait un procès à Pline, qu’il n’a point soutenu de bonnes raisons. Il croit qu’à cause que le temple de Junon Lacinia était auprès de Crotone dans la Calabre, les Agrigentins n’ont point fait faire à Zeuxis un tableau qui dût être consacré dans ce temple. Mais le temple de Delphes et celui de Jupiter olympien, n’étaient-ils pas remplis des dons de toutes sortes de peuples ; comme aujourd’hui Notre-Dame de Lorette des ex voto de tous les pays catholiques ? »

Quand je publiais ce qu’on vient de lire, je ne savais pas que le Tassoni est tombé dans la même faute que Juste Lipse. Questi fu colui, dit-il [42] en parlant de Zeuxis, che chiamato dagli Agrigentini, o come hanno altri voluto dai Protoniati [43], a fare il ritratto di Giunone, il copiò dalle fattezze più belle di cinque vergine da loro elette fra un numero infinito, che ne vide d’ignude. La langue italienne n’est guère moins exposée aux équivoques que les langues mortes : si un Français donnait à ses termes l’arrangement que l’on vient de voir dans ceux du Tassoni, on lui attribuerait avec raison d’avoir dit que Zeuxis vit nues une infinité de filles, et que de ce grand nombre les habitans d’Agrigente en choisirent cinq qui servirent de patron au peintre. Ce n’est point ainsi qu’il faut rapporter les circonstances de ce tableau.

(M) Quelques imperfections générales du Dictionnaire de M. Moreri. ] Rapportons une autre pièce du projet : elle est tirée de la page 387. « Je n’ai garde de proposer cet article comme un modèle parfait : on me fera assez de justice si on le trouve exempt de quelques défauts, qui règnent dans le Dictionnaire de M. Moréri. C’est sans doute un grand défaut que la manière dont cet auteur cite : il entasse toutes ses citations à la fin de chaque article, sans faire savoir qu’une telle chose a été dite par celui-ci, et une telle autre par celui-là : il laisse donc à son lecteur une grande peine, puisqu’il faut quelquefois heurter à plus de cinq ou six portes, avant que de trouver à qui parler. C’est un défaut qui règne en bien d’autres livres, et dont les conséquences ont été connues à un écrivain fort éclairé et fort judicieux, qui nous a donné depuis peu l’Histoire des Empereurs romains [44]. J’ajoute que M. Moréri avance mille choses, ou qu’on ne trouve point dans ses citations, ou de quoi il ne fournit aucun garant, ou qui sont toutes mutilées, par le retranchement de certaines circonstances qui constituent l’espèce du fait, et qui en sont le principal agrément. Enfin je dis qu’il ne fait pas toujours connaître les gens par les endroits les plus remarquables. Il me semble qu’on ne trouvera pas ces défauts dans mon article de Zeuxis. »

  1. * J’ai (dit Leclerc), ouï dire à un homme du métier, que Zeuxis et beaucoup d’autres peintres de l’antiquité étaient fort heureux de ce qu’il ne nous reste plus quoi que ce soit de leurs ouvrages.
  1. Luminum umbrarumaque invenisse rationem traditur. Quintilian., lib. XII, cap. X.
  2. De Poët., cap. VI.
  3. Plin., lib. XXXV, cap. IX, p. m. 199.
  4. Idem, ibid.
  5. Élien, lib. IV, cap. XII.
  6. Valère Maxime, lib. III, cap. VII.
  7. Le même auteur dit qu’on voyait dans le temple de la concorde le Marsyas lié de Zeuxis. Zeuxidis manus vidi, dit Pétrone, nondùm vetustatis injuriâ victas.
  8. Quarum nomina multi poetæ memoriæ tradiderunt, quòd ejus essent judicio probatæ qui verissimum pulchritudinis habere judicium debuisset. Cicer., lib. II de Invent.
  9. Tantus diligentiâ ut Agragantinis facturus tabulam quam in templo Junonis Laciniæ publicè dicarent, inspexerit virgines eorum nudas et quinque elegerit, ut quod in quâque laudatissimum esset picturâ redderet. Plin., lib. XXXV, cap IX.
  10. Idem, ibid., cap. X.
  11. Senec., Controv. V, lib. V.
  12. Ælian., Var. Hist., lib. XIV, cap. XVII.
  13. Adeò sibi in illo (Athletâ) placuit ut versùm subscriberet celebrem ex eo, invisurum aliquem facilius quàm imitaturum. Plinius, lib. XXXV, cap. X.
  14. M. Félibien, pag. 56, a dit Athalante au lieu d’Alcmène.
  15. Au mot Pictor.
  16. Il a été imprimé depuis mon projet, l’an 1694.
  1. M. Hofman a fait la même chose.
  2. M. Felibien, page 56 de son premier Entretien sur les Vies et sur les Ouvrages des peintres, met Zeuris à la 95e. olympiade ; mais son imprimeur a fait une faute, en faisant répondre cette olympiade à l’an du monde 583 : il faut 3583. Vossius, de IV Art. popul., le met aussi à l’olympiade 95.
  3. Je n’entend point que soit avec la dernière exactitude. Voyez la note suivante.
  4. Ab hoc (Apollodoro) artis fores apertas Zeuxis Heracleotes intravit, olympiadis nonagesimæ quintæ anno quarto, audentemque jam aliquid penicillum (de hoc enim adhuc loquimur) ad magnam gloriam perduxit, à quibusdam falsò in octogesimâ nonâ olympiade positus, cum fuisse necesse est Demophilum Himeræum, et Neseam Thasium, quoniam atrius eorum discipulus fuerit, ambigitur. Plin., lib. XXXV, cap. IX, page m. 198, 199.
  5. Eusèbe met la mort de cet Archélaüs à l’an 3 de la 94e. olympiade,
  6. Dans la Vie de Périclès.
  7. Lib. XXXIV, cap. VIII.
  8. Iliad. VIII, Histor. CXCVI.
  9. Lib. II, de Inventione.
  10. Plin., lib. XXXV, cap. IX.
  11. Var., Hist., lib. IV, cap. XII ; et lib. XIV, cap. XVII et XLVII.
  12. Harduin., in Plin., tome V, page 199. Jacob. Proust, in Cicer., lib. II de Invent. Notez que les anciens, qui se sont contentés de l’appeler Héracléotès, ont fais pis que si aujourd’hui nous désignions la patrie d’un homme en disant qu’il est de Clermont.
  13. Voyez le passage de Plutarque, touchant Appollodore, dans la remarque (G).
  14. La Mothe-le-Vayer, lettre IX, au Xe. tome de l’édition in-12, page m. 76
  15. Pline, que la Mothe-le-Vayer ne cite pas, nous l’apprend, lib. XXXV, cap. IX. Deprebenditur tamen Zeuxis grandior in capitibus articulisque. Ce dernier mot devait être traduit jointures, et non membres.
  16. La Mothe-le-Vayet cite lib. 12, Inst. c. 18 ; mais c’est cap. X.
  17. Posteà donare opera sua instituit, quòd ea nullo satis digno pretio permutari posse diceret. Plin., lib. XXXV, cap IX.
  18. Voyez Vossius, de Graphice, page 69.
  19. De Graphice, page 69, in libre de IV Artibus popular.
  20. Cœlius Rhodiginus, Ant. Lect., lib. XIX, cap. XCVII, page m. 1086.
  21. Voici comment Robert et Antoine le Chevalier d’Agneaux, natifs de Vire en Normandie, ont traduits ces vers ; rien de plus naïf :

    Tout ainsi ce qu’en soy
    Le corps a de plus beau,

    D’ieux Lyncéens ne voy :
    Regarde plus qu’Hypsée aveugle les parties,
    Qui plus laide y sont.
    Esbaby tu t’escries :
    Ô La greve, ô les bras, mais long nés et courts flans,
    Et gresle cuisse ell’ a avecques les piés grands.

  22. Cicero, in Oratore, init.
  23. Lateri applicat meo mulierem omnibus simulacris emendatiorem. Pétrone.

    Spondebatque ducem celsi nitor igneus oris,
    Membrorumque modus qualem nec carmina fingunt
    Semidoïs.
    Claudian. de Laudib. Stilicon., lib. I.

  24. On en voir des exemples dans le livre de M. Gronovinus de Pernicie Judæ. Voyez les Nouvelles de la République des Lettres, 1684, mois de mai, art. VI.
  25. Il y faut corriger la citation de Pline, au livre 53 pour 35. Charles Étienne, et le père Cantel dans son Valère Maxime in usum Delphini, citent l. 55.
  26. Il s’appelle Olivérius. Voyez le Valère Maxime Variorum de Leyde, 1655, page 314.
  27. Secondo Lancelloti da Perugia abbate Olivetano, l’Hoggidi, parte II, disinganno XV, page 308.
  28. Perrault, Parallèle des Anciens et des Modernes, tome I, page 136, édition de Hollande.
  29. Là même, pag. 137.
  30. Plut., de Gloriâ Atheniens., page 346.
  31. De Graphice, page 79.
  32. In Plin., tome V, page 200.
  33. Ronsard. Voyez sa Vie.
  34. Plut., in Vitâ Periclis, page 159.
  35. Idem, de multitudine Amicorum, p. 94.
  36. Voyez son Officina ou Theatrum Historicum, lib. II, cap. LXXXVII.
  37. Simon Majolus, Dierum Canicularium, colloq. IV, page 165, edit. Romanæ 1597.
  38. Zeuxin pictorem risu emortuum prodidit Verrius, dum anum à se pictam ridet affluentius. Cœlius Rhodiginus, lib. II, cap. XVIII, page m. 207.
  39. Voyez touchant son humour officieuse pour les auteurs, et son zèle pour le bien des lettres, la préface du Traité de M. Nicolle, contre les quiétistes.
  40. Elle est très-bien écrite ; on l’attribue au père de la Baune.
  41. Lips., Monit. Polit., lib. I, cap. I.
  42. Alessandro Tassoni, Pensieri diversi, lib. X, cap. XIX, page 414.
  43. C’est sans doute une faute d’impression pour Crotoniati.
  44. M. de Tillemont. Le premier tome de son Ouvrage a été imprimé à Paris en 1690. (Voyez M. de Beauval dans son Journal du mois de juin 1691.) La manière de citer y est de la dernière exactitude.

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