Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/André 2


◄  André (Jean)
Index alphabétique — A
André (Tobie)  ►
Index par tome


ANDRÉ (Jean), auteur d’un livre intitulé Confusion de la secte de Mahumed, était né mahométan, à Xativa, au royaume de Valence, et il avait succédé à son père dans la dignité d’alfaqui de la même ville. Il fut éclairé de la connaissance de Jésus-Christ, en assistant à un sermon, dans la grande église de Valence, le jour de l’Assomption de la Sainte Vierge, l’an 1487 [a]. Il demanda le baptême, et se souvenant de la vocation de saint Jean et de saint André, il obtint qu’on le nommerait Jean André. « Ayant reçu les ordres sacrez, dit-il [b], et d’alfaqui, et esclave de Lucifer, fait prêtre et ministre de Christ, je commence, comme saint-Paul, à prescher et publier le contraire de ce que j’avoye auparavant faulsement creu et affirmé, et avec l’ayde du Seigneur très-hault je converty premièrement en ce règne et guidé à la fin du salut plusieurs âmes d’infidèles Mores, qui s’en alloyent perdre en Enfer sous le pouvoir de Lucifer. De là, je fus appelé par les plus catholiques princes le roy don Fernand et la royne donne Ysabelle, afin que j’allasse prescher en Grenade aux Mores de ce royaume, que leurs altesses avoient conquis. Donc par ma prédication et volonté de Dieu (qui le vouloit ainsi) une tourbe infinie de Mores, reniant Muhamed, se convertit à Christ : et peu après je fu créé chanoine par leur benignité, et fu une autre fois appellé par la très-chrestienne royne donne Isabelle, afin que je n’en vinsse en Arragon, pour m’employer en la conversion des Mores de ces règnes, lesquels au grand mespris et deshonneur du Sauveur crucifié, et au dan et péril des princes chrestiens, persévèrent jusques aujourd’huy en leur erreur ; mais cette très-saincte intention de son altesse, pour la mort qui la prévint, ne put sortir son effect. » Il ajoute que, pour ne demeurer oisif, il se mit à traduire d’arabe en langue arragonoise toute la loi des Mores, c’est-à-dire, l’Alcoran et ses gloses, et les sept livres de la Suné. Il le fit par le commandement de Martin Garcia, évêque de Barcelone, et inquisiteur d’Arragon [c]. Ayant achevé cette entreprise, il fit l’ouvrage, dont j’ai parlé au commencement (A), et qui a été trouvé assez bon (B).

  1. Le prédicateur se nommait Marques Adesora.
  2. Jean André, Pourparler, ou Préface de sa Confusion de la secte de Mahumed, folio 3, verso.
  3. Tiré de la même préface.

(A) L’ouvrage dont j’ai parlé au commencement. ] J’entends le livre qu’il intitula Confusion de la Secte de Mahumed. Il contient XII chapitres. L’auteur y a recueilli les fabuleuses fictions, mocqueries, tromperies, bestialitez, folies, vilenies, inconveniens, impossibilitez, bourdes et contradictions de pas à pas, lesquels le pervers et meschant Mahumed, pour decevoir les simples peuples, a laissées semées et esparses és livres de la Secte, et principalement en l’Alcoran, lequel ainsi qu’il dict lui fut en une nuit révélé par l’ange en la cité de la Meke, combien qu’ailleurs en se contredisant il afferme l’avoir composé en vingt ans ; et ay intitulé l’œuvre susdit la Confusion de la Secte de Mahumed[1]. Il nous apprend[2] qu’il composa cet ouvrage, affin que, non-seulement les sages chrestiens, mais aussi les simples, cognoissans la diverse croyance des Mores, d’une part se gabent et se moquent de telles insolences et bestialitez ; et d’autre part facent complainte pour leur aveuglissement et perdition.

Ce livre publié premièrement en espagnol, a été traduit en diverses langues. Je me sers de la traduction française, que Guy le Fèvre de la Poderie en fit sur l’italien et qu’il publia à Paris, chez Martin le Jeune, l’an 1574, in-8o.

(B) Ce livre a été trouvé assez bon. ] Tous ceux qui écrivent contre les mahométans le citent beaucoup. Voyez entre autres Hoornbeek dans sa dispute de Muhammedismo[3], Hottinger dans son Historia Orientalis, et Samuel Scultet dans son Ecclesia Mahummedana breviter delineata.

  1. Jean André, dans sa préface, folio 4.
  2. La même.
  3. C’est une partie de sa Summa Controversiarum.

◄  André (Jean)
André (Tobie)  ►