Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/T

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TABAC : Position critique. — « Ceux qui ont supporté tout le tabac, prenant ce qu’on leur donne. » (Commentaires de Loriot.)

TABAC (donner du) : Battre. — « Si tu m’échauffes la bile, je te f… du tabac pour la semaine ! » (Vidal, 33.)

TABAR, TABARIN : Manteau. (Grandval.) — C’est un vieux mot.

TABATIÈRE (ouvrir sa) : Péter. — Allusion au bruit qu’on faisait en ouvrant les tabatières sans charnière. — « Que son ponent te serv’ de tabatière. » (L’Après souper de la Halle, xviiie siècle.)

TABLE (se mettre à), Monter sur la table : Dénoncer à la justice. — Même image que dans manger le morceau, manger sur l’orgue, etc.

TAF, TAFE, TAFFERIE, TAFFETAS : Peur. — Pour l’étymologie, voyez taffer. — « Ce n’est pas toi ni tes paysans qui nous f… le tafe. » (Vidal, 33.) — « Seigneur ! qu’est-ce qu’il a donc, répétait Gervaise prise de taf. » (Zola.)

TAFFER : Avoir peur. — De l’allemand taffen. V. Tirer.

TAFFEUR : Peureux. (Rabasse.)

TALENT : « L’ensemble des connaisseurs réunis sur un hippodrome. On dit qu’un cheval a été soutenu par the talent. » (Parent.) Angl.

TAILBIN : Billet de complaisance. (Vidocq.)

TALBIN : Contre-marque de théâtre. Abréviation de tailbin. « J’ai goipé au théâtre, fesait la portière, et je vendai des talbins, cigare et du feu. » (Beauvillier.)

TALBIN : Billet de banque. (Rabasse.)

TALON ROUGE : Aristocrate. — Le droit de porter des talons rouges était un signe de noblesse. — « Tous les talons rouges de l’ancien régime qui trahissent le peuple. » (Hébert, 1793.)

TAMBOUR : Chien. — Allusion aux roulements de son aboiement.

TAMPON : Poing. — « Je lui ai envoyé un coup de tampon sur le mufle. » (Th. Gautier, 45.)

TAM-TAM : Fracas prémédité. — Allusion au bruit du tam-tam. — « Trop de boursouflure, trop de tam-tam dans ce factum. » (Éclair, 23 juin 72.)

TANDEM : Voiture à deux chevaux attelés l’un devant l’autre. — « Nul ne porte mieux un habit, ne conduit un tandem mieux que lui. » (Balzac.)

TANGENTE, TANGENTE AU POINT Q : Épée. — Jeu de mots. — « Le conscrit de l’École polytechnique est souvent absorbé avant d’avoir endossé l’uniforme et senti battre sur sa cuisse gauche l’arme que les élèves nomment une tangente au point q. » (La Bédollière.)

Échapper par la tangente, prendre la tangente : S’échapper. V. Absorption, Colle. — « Expression empruntée à la dynamique… elle doit être sortie de l’École polytechnique, car elle est familière aux élèves de cette école. » (Faucheux, 70.)

Tangente se dit aussi pour surveillant de collège.

TANNER : Ennuyer, assommer. — Un poëte du xiiie siècle, Rutebeuf, dit déjà : « Quar le réveil me tanne assez quand je m’esveil. »

« Les communes de Flandre, qui déjà commençaient à tanner, et désiraient fort de retourner en leur pays, lui demandèrent congé. » (1411, Monstrelet.) — « C’est insupportable. — Hein ! est-ce tannant ! » (E : Sue.)

Tanner le cuir : Rosser. — « Si vous vous permettez, je connais une personne qui vous tannera le cuir. » (Gavarni.)

TANNER LE CUIR, TANNER LE CASAQUIN : Rosser. — « Si vous vous permettez, je connais une personne qui vous tannera le cuir. » (Gavarni.)

TANTE : « Homme qui a des goûts de femmes.» (Vidocq, 37.) — « Avril offrait 2,000 fr. pour buter avec lui une tante, et vous savez, initiés que vous avez été aux secrets de cet horrible langage, comment ces mots désignaient clairement Chardon. » (Partarrieu-Lafosse, Réquisitoire contre Lacenaire, 36.) — « Pour donner une vague idée du personnage qu’on appelle une tante, il suffira de rapporter ce mot magnifique du directeur d’une maison centrale à feu lord Durham qui visita toutes les prisons pendant son séjour à Paris. Le directeur, après avoir montré toute la prison, désigne du doigt un local en faisant un geste de dégoût. Je ne mène pas là Votre Seigneurie, dit-il, car c’est le quartier des tantes… — Hao ! fit lord Durham, et qu’est-ce ?… — C’est le troisième sexe, milord. » (Balzac.) — « Enfants, on les appelle mômes ou gosselins ; adolescents, ce sont des cousines ; plus âgés, ce sont des tantes. » (Moreau Christophe.) — Dans un chapitre détaillé consacré à cette espèce, M. Canler reconnaît quatre catégories appartenant à diverses classes sociales : persilleuses, honteuses, travailleuses et rivettes. Cette dernière est seule exploitée par les chanteurs.

Dans le vocabulaire des injures, tante a fini par se dire comme bougre, sans portée précise. — « Bougre de greluchon… A-t-on jamais vu des tantes pareilles !… » (Zola.)

TANTE : Mont-de-piété. — Terme ironique à l’adresse de ceux qui déguisent la source d’un emprunt en disant qu’ils ont eu recours à leur famille. — « Tous mes bijoux sont chez ma tante, comme disent mes camarades lorsqu’elles parlent du mont-de-piété. » (Achard.)

TAPÉ, TAPÉ À L’AS, TAPÉ DANS LE NŒUD : Émouvant, frappant, réussi. — « Aussi a-t-on fait plusieurs couplets sur tous les ministres dont le portrait est bien tapé. » (1742, Journal de Barbier.) — « C’est un peu tapé dans le nœud. » (La Bédollière.) — « Une manière de sentiment bien r’tapé. » (1755, Vadé.) — « La gauche bat des mains à ce propos rudement tapé. » (A. Millaud, 76.) — « Je crois vous faire plaisir en vous adressant le récit d’une cure tapée à l’as, comme vous dites si élégamment. » (Tam-Tam, 76.)

TAPEDUR : Serrurier. (Vidocq.)

TAPÉE : Grosse réunion. — « Quelle tapée de monde, bon Dieu ! » (Commentaires de Loriot.)

TAPER : Aborder quelqu’un. (Rabasse.)

TAPER, TAPEUR : Emprunter par métier, emprunteur. — « Le roi des tapeurs vous accoste ; il vous prend le bras, il se penche à votre oreille ; — vous êtes tapé. Aurais-tu cent sous à prêter à ton ami ? vous dit-il. » (Almanach du Hanneton.) — « Aujourd’hui, elle les tapait de dix sous ; demain, ce serait de vingt. » (Zola.)

TAPER : Enivrer. — « Ce scélérat de vin de Champagne avait joliment tapé ces messieurs. » (Festeau.)

TAPER DANS L’ŒIL : Séduire, attirer.

TAPER DE L’ŒIL : Dormir. — « Il y avait plus d’une heure que je tapais de l’œil quand je m’entends réveiller. » (Œuvres badines de Caylus, 1750.)

TAPER SUR LA BOULE : Enivrer.

Dans le gosier comme ça coule !
Comme ça tape sur la boule !
(J. Moineaux. Ch.)

TAPER SUR LES VIVRES, SUR LA BOISSON : Manger et boire avec avidité.

D’avoir trop tapé sur l’ pichet,
Qu’en avaient pleins la gargamelle.
(Chansonnier de 1836.)

TAPETTE. V. Être (en).

TAPEUR : V. Taper.

TAPIN : Tambour. — Il tape sa caisse. — « Le tapin qui tambourinait en tête de l’escouade. » (La Bédollière.)

TAPIS, tapis franc. : Auberge, cabaret. (Vidocq.) Tapis vient du vieux mot tapinet : lieu caché ; franc fait allusion aux habitués qui sont des affranchis (voleurs). V. Empoivrer, Crosser.

Tapis de grives : Cantine, cabaret de soldats.

Tapis de malades : Cantine de prisonniers.

Tapis de refaite : Table d’hôte.

TAPISSIER : Cabaretier. V. Baptême, Ogre.

TAQ, TAQUER, TAQUINE : Haut, hausser, hauteur. (Halbert.)

TAROQUE : Marque. V. Détaroquer.

TARTE : Qualité bonne ou mauvaise. (Vidocq.) — Plus souvent mauvaise. V. Escrache.

TARTINE : « Immenses phrases lardées de mots emphatiques, si ingénieusement nommées tartines dans l’argot du journalisme. » (Balzac.)

TARTINES : Souliers. (Rabasse.) Allusion à la forme des semelles qu’on tartine en pleine boue.

TARTINER : Rédiger. — « Tu n’as pas assez de style pour tartiner des brochures. » (Balzac.)

TARTUFERIE : Acte d’hypocrisie, air de Tartufe.

TAS (prendre sur le) : Prendre un voleur sur le fait, en présence du tas formé par les objets volés.

TASSE (la grande) : La mer. Ironie. — « C’est vrai qu’un peu plus vous buviez à la grande tasse. » (Ricard.)

TATOUILLE : Volée de coups. — Abréviation de ratatouille. — On met son adversaire en tatouille comme on le met en compote. C’est la même allusion culinaire. « Tu étais moins fort que moi. J’en ai profité pour t’administrer une horrible tatouille. » (L. Bienvenu.)

TAUDION : Petit logement, petit taudis. — « J’ai vendu ce que j’avais pour payer le taudion où nous couchons. » (Lynol.)

TAULE, TÔLE : Maison. — « Dans une tôle enquille en brave, fais-toi voleur. » (Vidocq.)

TAUPAGE : Égoïsme. (Vidocq.)

TAUPER : Travailler. (Idem.)

TAUPES (Royaume des) : « Il est au royaume des taupes, il est mort. » (Oudin, 1640.)

TAUPIER : Égoïste. (Idem.)

TAUPIN : Élève de mathématiques spéciales. — « Le simple taupin, le candidat qui se présente à la colle d’admission à l’École polytechnique, possède déjà des connaissances supérieures. » (La Bédollière.)

TEINT (bon) : Véritable, authentique. — Allusion aux étoffes mauvais teint qui ne durent pas. On dit mauvais teint pour faux, mensonger. — « Une vraie comtesse ?… Tout ce qu’il y a de meilleur teint. » (Brunesœur.)

TEINTÉ : Enluminé par l’ivresse.

TEINTURIER : Marchand de vins frelateur. — « Enfoncé Desnoyer le teinturier et son vin ! » (E. Bourget, 1845.)

TEINTURIER : « Tous les hommes politiques ont besoin d’avoir auprès d’eux des sous-hommes politiques ou des supérieurs qu’ils consultent, qu’ils laissent écrire ou qu’ils s’assimilent… Dans le style des affaires publiques, ceux qui exercent cette influence s’appellent des teinturiers, parce qu’en effet ils se chargent de donner de l’étoffe à des hommes d’État des couleurs différentes. » (Roqueplan.)

Il y a aussi des teinturiers littéraires. On lit dans les Mémoires secrets (25 sept. 1775) : « La comtesse de Beauharnais a fait présenter une comédie. Elle a été reçue : on ne doute pas que le sieur Dorat ne soit son teinturier. »

TEMPÉRAMENT (à) : À crédit. Mot à mot : en tempérant l’obligation de payer. « Vous me payerez quand vous pourrez, à tempérament. » (Alm. du Hanneton, 67.)

TEMPLE : Manteau. (Colombey.)

TEMPS (voir le coup de) : Prévoir à temps pour parer. — Terme d’escrime. (Dhautel, 08.)

En deux temps : En un instant.— Terme d’escrime. — « En deux temps, j’ remouque et j’ débride. » (Halbert.) — « En deux temps sa lessive est faite. » (Le Casse-Gueule, ch. 41.)

Prendre des temps de Paris signifie, au théâtre, préparer ce que l’on a à dire par une pantomime pour augmenter l’effet. Le mot a été inventé par des comédiens de province. (Couailhac.)

TENANTE : Chopine. (Halbert.)

TENIR (en) : Aimer d’amour. — « Est-ce de l’amour ? Alors, il faut qu’elle en tienne furieusement, puisqu’elle fait de tels sacrifices. » (Ricard.)

TENIR (se), TENIR SUR SES PIEDS : Être bien composé, bien agencé. Se dit d’une œuvre littéraire ou dramatique. — « Passez-moi le manuscrit : ça a l’air de se tenir sur ses pattes. » (Alm. du Hanneton, 67.)

TENIR (se) : Se bien conduire, se faire respecter. C’est l’opposé de se laisser aller.

TERNAUX : Châle de la fabrique Ternaux. — « Elle prit un schale de coton ; — le ternaux était au… Mont-de-Piété. » (Ricard.)

TERRER : Tuer. — Mot à mot : enterrer. — « Dans dix ans, je reviendrai pour te terrer, dussé-je être fauché. » (Balzac.)

TERRIÈRE : Raccrocheuse hantant les terrains vagues. (Ramasse.)

TÊTARD : Homme de lettres. (Rabasse.)

TÊTE (faire sa) : Prendre de grands airs. — « Tu y gagnes d’avoir l’exercice une fois de plus par jour pour apprendre à faire ta tête. » (Vidal, 33.)

TÊTE CARRÉE, TÊTE DE CHOUCROUTE : Allemand. — « On ne résiste pas à tant d’attraits. La tête du baron, une tête carrée pourtant, tourne. » (E. Villars.)

TÊTE DE TURC : Plastron, homme en but à toutes les attaques. — Allusion à la tête de turc couronnant les mécaniques sur lesquelles on frappe aux jours de foire pour éprouver la force de son poing. — « M. Duvergier de Hauranne est écouté. Mais comme il faut une tête de turc à l’Assemblée, le général X… devient le souffre-douleur.» (Paris-Journal.)

TÊTES DE CLOUS : Caractère usé. — « Un journal, tiré sur papier à sucre, avec des caractères flétris du sobriquet de têtes de clous. » (Villemessant.)

TÉZIGUE : Toi. V. Zigue.

THIÉRISME : Sympathie pour la politique de M. Thiers. — « Ce journal flotte entre le droit divin, le radicalisme, l’orléanisme et le thiérisme sans se brouiller avec l’Empire. » (Giraudeau.)

THOMAS : Baquets faits en forme de petits tonneaux défoncés par le haut… avec des oreilles en fer de façon à être transportés et vidés facilement. — Équivoque sur les mots vide Thoma de l’hymne populaire de Pâques. — « Ce serviable meuble est baptisé du nom de Thomas. » (A. Lecomte, 61.) On l’appelle aussi job. — « Parmi les consignés occupés à passer la jambe à Thomas (vider les baquets d’urine.) » (La Bédollière.)

THUNE : Argent. V. Bille, Tune.

TIGNASSE, TIGNE : Chevelure en désordre. — Du vieux mot tigne : teigne. V. Aplomb.

TIGNE (la) : Le monde. (Rabasse.)

TIGRE : Groom. — « Leur chapeau à cocarde noire, leurs bottes à retroussis, leur veste bleue et leur gilet bariolé, couvrent des gamins arrachés au plaisir de la pigoche. » (A. Deriège, 1841.)

TIGRE : « Le rat débute et danse un pas seul ; son nom a été sur l’affiche en toutes lettres ; il passe tigre et devient premier, second, troisième sujet. » (Th. Gautier.)

TIP : Prophétie, annonce de tipster.

TIPSTER : Homme faisant métier d’annoncer à des abonnés les succès probables sur les champs de courses. Littéralement : prophète. (Parent.) Angl.

TIQUER : Voler a la care. (Colombey.)

TIRADES : Fers de forçat. (Rabasse.) Ils sont tirés par la jambe.

TIRAGE (il y a du) : c’est, long, c’est difficile. — Terme de cocher. Plus le chemin est rude, plus le cheval tire. — « Autrefois il avait eu joliment du tirage. Mais le travail menait à tout. » (Zola.) — « On tirait au sort. Un tire, prend un bon numéro… Courage, les autres ! Moi, j’en suis sorti sans trop de tirage. » (Flair.)

TIRANT : Bas. — On le tire pour le mettre. — « Ses tirants et sa montante, et son combre galuché, son frusque, aussi sa lisette. » (Vidocq.)

TIRANTE : Jarretière. (Halbert.)

TIRANT RADOUCI : Bas de soie. (Petit Dict. d’Argot, 44.) — Jeu de mots.

TIRE (faire la) : Voler à la tire. — « Ils font la tire à la chicane, en tournant le dos à celui qu’ils dépouillent. » (Du Camp.)

TIRE-BOGUES : Voleur de montre. (Vidocq.)

TIRE-FIACRE : Viande dure. (Rabasse.)

TIRE-JUS : Mouchoir (08).

TIRE-MOMES : Accoucheuse. V. Mome. — Autrefois on disait madame Tiremonde. Le Dictionnaire de Trévoux donne cette expression comme proverbiale.

TIRER : Passer, achever. — Un troupier libérable dans un semestre dit : « J’ai encore six mois à tirer. »

TIRER : Voler à la tire. — « Vous commencez par tirer en valade, puis au grand truc vous marchez en taffant. » (Lacenaire, 36.)

Tirer le chausson : S’enfuir. (Moreau Chr.)

TIRER (se la), SE TIRER : S’enfuir.

TIRER À LA LIGNE : Amplifier dans le seul but de gagner plus d’argent.

TIRER D’ÉPAISSEUR (se) : Sortir d’embarras. (Almanach des Débiteurs. 51.)

TIRER DE LONGUEUR (la) : Abréviation de tirer une carotte de longueur.

TIRER LA FICELLE : Passer à un autre, comme les montreurs de diorama qui tirent la ficelle pour amener un autre décor. — « Sur leurs discours, crois-moi, tir’ la ficelle. » (Debraux.)

TIRER L’ÉCHELLE : Cesser par impossibilité d’aller plus loin. Mot à mot : de monter plus haut. Très-usité quand on termine une énumération de choses étonnantes.

TIRER L’ŒIL : Attirer l’œil. V. Œil.

TIRER LES PIEDS (se), TIRER LES PATTES : S’enfuir. (Rabasse.) — « Nana avait un chic pour se tirer les pattes. » (Zola.)

TIRER SA COUPE : Aller se promener. — Terme de nageur.

D’ temps en temps nous tirons not’ coupe
Su’ l’ grand boulevard…

(Richepin.)

TIREUR : Voleur à la tire.

TIROIR : Filouterie de jeu. Elle consiste en l’enlèvement des trois as. — « Le tiroir peut se faire non-seulement en mêlant les cartes, mais aussi en passant la main. » (Cavaillé.)

TITI : Gamin de Paris. — « Mousqueton est le titi par excellence, c’est le vrai gamin de Paris avec sa gaieté, sa souplesse, ses bons mots. » (Alhoy.)

TOASTER : Porter des toasts, des santés. — Anglicanisme. — « Le mot anglais pourrait bien venir de l’ancien verbe français toster, qui signifiait choquer. » (Rozan.)

TOC : Cuivre doré, faux or. — Allusion à la différence de sonorité qui existe entre le cuivre et l’or. — « Bagues, boutons de manchette et croix de ma mère en toc, 6 fr. 50. » (Les Cocottes.)

TOC : Bourreau de bagne. (Rabasse.) Ainsi nommé de toc : méchant, ou parce que son métier est de toquer ou bâtonner les condamnés. V. Bridon.

TOC, TOCARD, TOCASSE, TOCASSON : Laid, méchant, de mauvaise qualité, faux comme le cuivre doré. V. Toc (1). — « L’article de Cascaret est toc. » (J. Rousseau.) — « Croiriez-vous qu’en parlant d’une femme laide, on dit : « Elle est toc, elle est tocarde… C’est un vieux tocard, c’est un vieux tocasson ! » (N. Vanecke.) — « Il goûta le pain dont les prisonnières se plaignaient : « Chouette ! dit-il, j’en ai mangé de plus toc. » (Chenu.)

TOCASSERIE : Méchanceté. (Vidocq.)

TOILES SE TOUCHENT (les) : Il n’y a pas d’argent. Mot à mot : mes poches sont vides, puisque les toiles se touchent. — « Diable ! les toiles se touchent aussi chez moi. » (Ladimir.)

TOISE (à la) : Se dit des choses et des gens où la qualité cède à la quantité.

TOLÈDE (de) : De première qualité. — Se dit ironiquement par allusion aux fameuses lames de Tolède dont la littérature romantique faisait grande consommation. — « Allons ! arborez vos bons binocles de Tolède. » (Petits mystères de l’école lyrique.) — « L’Assemblée nationale a retrouvé son calme de Tolède. » (A. Millaud, 77.)

TOLLARD, TOLLE : Bourreau. (Grandval.)

TOLLARD : Lit des forçats au bagne. « Enchaînés deux à deux sur ce lit de camp qu’on nomme tollard. » (Ponson du Terrail.)

TOMBAGE : « Le tombage est un impôt prélevé sur une personne qui ne reverra jamais son argent. C’est le chantage pratiqué par des grecs à l’égard d’autres grecs. » (Cavaillé.)

TOMBER : Terrasser. Mot à mot : faire tomber. — « La couleur Metternich a tombé le Bismarck. » (Vie parisienne, 67.)

TOMBER DESSUS : Maltraiter en paroles ou en actions. — « Que demain je lâche ma place ! on me tomberait fièrement dessus. » (De Goncourt)

TOMBER MALADE : Être arrêté. (Moreau Chr.)

TOMBEUR : « Acteur trop mauvais pour être accepté nulle part. » (Ch. Friès.)

TOMBEUR : Lutteur invincible. — « Le tombeur de Renan y vient de temps en temps mépriser l’humanité. » (Les Cocottes, 64.)

TONDRE : Primer une carte, au jeu. — « Je joue piche ! (pique.) — Au lieu de dire je prends, une autre répond : « Je tonds. » (Alhoy.)

TONDU (le petit) : Napoléon Ier. — Il avait coupé ses longs cheveux de général. — « L’Empereur lui-même, le petit Tondu. » (L. Reybaud.)

TONNEAU : Degré. « Tu lui aurais rendu sa politesse. — Plus souvent ! à un daim de ce tonneau ! » (Monselet.) — Ce terme de comparaison n’a pu être inventé que par des buveurs. Il est ancien. — « Ha ! ha ! vous estiez en estat de péché mortel. — Cestuy là, dist Panurge, est d’un aultre tonneau. » (Rabelais, Pantagruel, l. IV, ch. lii.)

TOP-WEIGHT : « Le cheval le plus chargé dans un handicap. » (Parent.)

TOPER : « Chaque fois qu’un dévorant rencontre un autre ouvrier, il doit lui demander de quelle société il est. Ça s’appelle toper. » (Biéville.)

TOPISER : Dévisager, reconnaître. — « Il est venu une pureuse pour me topiser. » (Lettre de Minder. Introduction.)

TOPO : Officier d’état-major, plan topographique. — On sait que la topographie est une attribution de l’état-major.

TOQUADE : Caprice amoureux.

Je ressentis (effet de la musique)
Une toquade à l’endroit du ténor.
(E. Grangé.)

« Hortense est sur le chemin de la fortune… Une simple toquade, et elle est perdue. » (Les Pieds qui r’muent, 64.)

Toquade sérieuse : Amour vrai.

TOQUADE : Manie. — « Prémary a une toquade. On le débine, on le nie, on veut le tuer. » (A. Scholl.)

TOQUANTE, TOCANTE : Montre. — Harmonie imitative du toc-toc de la montre. — « Un monsieur qui me trouva gentille m’offrit un jour une toquante d’or… La montre me tentait. » (Rétif, 177e Contemporaine.) — « Le premier emporta la montre de Malvina qui regrettait sa tocante. » (L. Reybaud.)

TOQUÉ : À moitié fou. C’est un mot d’ancien français, car on le trouve dans la plupart de nos patois provinciaux. — On dit de même : il a reçu un coup de marteau. C’est-à-dire : son cerveau est bien près de se fêler. « Ma chère, les hommes, c’est farce ! toujours la même chanson : une femme à soi seul ! Toqués ! Toqués !! » (Gavarni.) — « Les collectionneurs sont toqués, disent leurs voisins. » (Balzac.)

TOQUER : Sonner. (Colombey.)

TOQUER (se), ÊTRE TOQUÉ : S’éprendre. — « Par exemple, il n’est pas toujours toqué de Lanrose. » (About.) — « Un homme si respectable qui se toquait d’une petite coureuse. » (Zola.)

TOQUET (en avoir dans le) : Être ivre. V. Casquette, qui a la même étymologie. — « Chez Dénoyer j’entre, un peu dans le toquet. » (Decourcelle, 39.)

TORCHÉ (bien) : Vigoureusement peint, bien fait. — « À ce couplet bien torché on crie dans la salle : Bis ! bis ! » (Marquet.)

TORCHER (se) : Se battre. Pour se donner un coup de torchon.

TORCHER LE NEZ (se) : Se passer. On dit de même qu’une chose passe devant le nez. — « Tout cela vient de Pitt envoyé par les alliés, mais ils s’en sont torchez le nez. » (Mauricault, Ch., 1793.)

Se torcher le cul : Faire peu de cas.

Torcher la gueule : Frapper au visage. — « Si j’ prends mon sabot, je vous en torcherai la gueule. » (1744, Vadé.)

TORCHETTE (net comme) : Aussi net que si la torchette (torchon) y avait passé.

TORCHON : Fille aussi sale qu’un torchon de cuisine.

TORCHON (se donner un coup de) : Se battre — « Allons jusqu’aux chouans leur donner un coup de torchon. » (Henry, 36).

TORCHON BRÛLE À LA MAISON (le) : Se dit pour annoncer une querelle domestique.

Je ne suis plus son Jupule,
Son chou, son rat, son trognon ;
L’ torchon brûle à la maison.
(Dalès.)

TORD-BOYAUX : Mauvaise eau-de-vie. — Elle donne la colique. — « Avaler un verre de tord-boyaux, comme l’appelait notre amphitryon. » (Vidal, 33.)

TORNIQUET : Moulin. (Vidocq.) — Allusion au tournoiement de sa roue.

TORSE : Estomac. — « Un verre de fil en quatre… Histoire de se velouter le torse. » — (Th. Gautier.) — « Il s’était, outre mesure, bourré le torse ; langage d’atelier. » (P. Borel, 33.)

TORSE (avoir du) : Avoir un beau corps.

TORSE (poser pour le) : Exhiber avec complaisance ses avantages physiques.

TORSEUR : Poseur. « Le torseur emprunte tous ses effets à son torse, toujours bardé d’une cravate, à gros nœuds et d’un gilet bien étudié. Le torseur projette sa poitrine sur le devant d’une loge ou dans l’embrasure de portes d’un salon, ou dans l’intervalle de deux rideaux de croisées. » (Roqueplan.)

TORTILLADE : Nourriture. (Rabasse.) V. Larton.

TORTILLARD : Boiteux. (Vidocq.) Mot à mot : qui tortille en marchant.

TORTILLÉ (être) : Être mort. — « Il lui avait cassé quelque chose à l’intérieur. Mon Dieu ! en trois jours, elle a été tortillée. » (Zola.)

TORTILLER : Manger. — « En trois jours nous aurons tout tortillé. » (Vidal, 33.) — « Voyez-vous, j’avais tortillé une gibelotte et trois litres. » (Ricard.)

TORTILLER ; Faire des façons. — « L’ordre est formel. Il n’y a pas à tortiller.» (Desnoyer.)

Tortiller de l’œil : V. Œil.

TORTILLER : Avouer. (Vidocq.) — C’est un synonyme de manger le morceau, dénoncer.

TORTORER : Manger. (Rabasse.)

TORTU : Vin. (Vidocq.) Mot à mot : jus de bois tortu (vigne).

TORTUE (faire la) : Jeûner. (Vidocq.) — La tortue mange peu.

TOTO : Sein. — De téter.

TOUCHE : Se dit des dehors d’un personnage considérés en leur ensemble. — « Quelle touche ! » s’écrie-t-on à l’aspect d’un grotesque. — Le mot a dû naître dans les ateliers de peinture.

TOUCHÉ : Séduisant de figure. V. Touche. — « Hé ! hé ! pas mal touchée, la bobonne. » (Villars.)

TOUCHÉ : Peint, pensé ou écrit, vigoureusement fait. — Terme de peinture dans l’origine. — « Comme, c’est écrit ! comme c’est touché ! » (L. Reybaud.)

TOUCHÉ (il est) : Il est profondément atteint, il ne s’en relèvera pas. — Se dit au moral comme au physique.

TOUCHER : Frapper fort. — Ironie.

TOUPET : Grande effronterie. — Jeu de mots. — Le toupet est supérieur au front. — « Et dire qu’avec du toupet et de la mémoire tout le monde en f’rait autant. » (H. Monnier.) V. Créper.

Se payer de toupet : Payer d’audace. — « Que de gens font étalage. S’ payant de toupet, N’ont rien dans leur ménage. » (Chanson, 32.)

Se mettre dans le toupet : S’entêter à croire. — « Et mosieu se fichera dans le toupet que tout sera dit. » (Gavarni.)

Toupet de commissaire : Audace excessive. — Mot inventé par les gens que le commissaire de police interroge d’habitude.

TOUPIE : Femme de peu, tournant en toutes mains comme une toupie. — « Le roi autorisa la Lange à se livrer à toutes les extravagances qui sont l’unique mérite de la plus grande partie de ces toupies. » (Précis de la vie de la comtesse Du Barry, 1774.) — « L’insolent traite sa grande sœur de toupie. » (Colmance.)

TOUR (faire voir le) : Tromper. V. Pratique. — « Tu veilleras à ce que la donzelle n’essaye pas de nous faire voir le tour. » (Montépin.) — Connaître le tour : Connaître toutes les ruses.

TOURLOUROU : Soldat du centre, lorsque l’infanterie était divisée en compagnies du centre et compagnies d’élite. Du vieux mot turelureau : soldat de garnison. (V. Du Gange.) — Au xive siècle, la turelure (prononcez toureloure) était une sorte de château flanqué de tourelles. — « Si le tourlourou est solide sur l’école de peloton, il n’est pas moins ferré sur l’école de la séduction. » (M. Saint-Hilaire.)

TOURMENTE : Colique (Vidocq.) — Mot expressif.

TOURNANTE : Clef. (Rabasse.) — Elle tourne dans la serrure. V. Tremblant, Lourde.

TOURNÉE : Pile, correction faisant tourner et retourner la victime. — « Après, je donne une tournée à la Chouette. Je tiens à ça. » (E. Sue.)

TOURNÉE : Rasade offerte devant le comptoir du marchand de vins. — Ainsi nommée parce qu’elle fait le tour de l’assemblée. — « Il offre une tournée au café Robert. » (Monselet.)

« Oscar (le lorgnon dans l’œil). — Oui, vraiment. — Dîtes-moi, marquis, la belle Yseult ne serait pas de trop… si elle daignait accepter une tournée !

Le Marquis. — Toujours galant !

Oscar. — Quelque chose de doux…, du mêlé ? » (Marquet.)

Tourner au vinaigre : devenir malheureux. — « Tourné au vinaigre ! Hélas ! plus de femmes, je l’avais perdue. » (Beauvillier.)

TOURNER DE : Faire les frais de. — « Lorsqu’il arrivait à Blossac de dire : Les dalles de la Morgue me réclament, Grimaille se contentait de dire : Je vais tourner d’un déjeuner. » (D. Alonnier.)

TOURNER DE L’ŒIL : Mourir. — « Du poison !… Allons, bois… tu vas tourner de l’œil tout de suite. » (Chenu.)

TOURNER L’ŒIL : S’assoupir. — « Trois ou quatre méchantes chopines… et ça tourne l’œil. » (Gavarni.)

TOURNEVIS : Soldat d’infanterie.

À la santé des gros talons,
Des tournevis et des canons !
(Vieille Ch. du Hussard en camp.)

TOURNURE : « Toutes les dames et demoiselles qui, pour suppléer au manque de rondeur de certaines parties, portent ce que Mme  de Genlis appelle tout crûment un polisson et que nous appelons une tournure. » (Th. Gautier, 33.)

TOURTE : Tête. — Comparaison de la croûte à la boîte osseuse du crâne, et de la garniture à la cervelle. V. Vol-au-vent.

TOURTOUSE, TORTOUSE, TOURTOUSINE : Corde à menottes.

TOURTOUSER : Garrotter. (Vidocq.) — Mot expressif indiquant l’action de lier tout autour. V. Criblage, Coltiger.

TOUSER : Aller à la selle. (Colombey.)

TOUSSE (Non ! c’est que je) : Négation ironique. V. Mouche.

TOUT : Individu fréquentant les champs d’entraînement pour renseigner sur les chances probables des meilleurs chevaux de courses. (Parent.) Angl.

TOUT DE CÉ : Très-bien. (Vidocq.)

TOUTIME : Tout. (Halbert.)

TOUT PARIS : Le monde élégant.

« Le mois de juin est venu, mois fâcheux où tout Paris quitte Paris. » (De Boigne, 57.)

TRAC : Peur. — Onomatopée. — On donne le nom de trac à une maladie qui cause un frisson perpétuel. — Pendant le siège de Paris, on a publié le Trac, journal des peureux. — « Bien ! voilà mon trac qui me reprend. » (Marc Michel.)

TRAIN (du) : Vite, à grand train. — « Asie prit un fiacre et dit au cocher : « Au Temple ! et du train ! il y a gras. » (Balzac.)

TRAIN (en) : En train de se griser. — « Ce sera fort heureux si votre ami reste, car je le crois un peu en train. » (P. de Kock.)

TRAÎNÉE. — Prostituée, qui traîne dans les mauvais lieux.

TRAÎNE-PAILLASSE : Fourrier. — C’est lui qui règle avec l’employé le prix des dégradations des lits militaires. V. Rogneur.

TRAIT : Infidélité. — Abréviation de trait d’inconstance. — « Son mari lui avait fait tant de traits, qu’elle l’avait quitté. » (Champfleury.) — « On ne peut plus faire de traits à sa Nini, c’est ce qui vous chiffonne. » (Gavarni.)

TRALALA : Grand appareil. — « Et puis, grand genre. Tout le tralala. Et du linge ! » (E. Villars.) — « La fougue, l’audace et tout le grand tralala de l’excentricité féminine. » (Monselet.)

TRANQUILLE : Comme Baptiste.

TRAQUER : Avoir le trac. V. Esgourne.

TRAQUEUR : Peureux. — V. Vrai. — « Il était très-traqueur et ne se souciait pas de finir à Bicêtre, (Zola.)

TRAVAIL : Filouterie de jeu. — « Un grec dont l’habileté est telle que, pendant trente années de travail, il n’a pas été pris une seule fois. » (Cavaillé.)

TRAVAILLER : Ce mot s’applique indistinctement à toute œuvre, bonne ou mauvaise, exécutée dans le but de gagner de l’argent.

Travailler, pour un malfaiteur, c’est tuer ou voler. Pour la prostituée, c’est provoquer le passant. — « X… était prudent ; il travaillait toujours seul, et son recéleur était des plus fins. » (Figaro.)

TRAVAILLER : Battre, tourmenter. — « Je vais la travailler dans le numéro de demain. — Et il écrivait : « Madame Desbrosses quitte enfin le théâtre… Bonheur ! » (Philipon).

Travailler la tire : Voler dans les poches. (Rabasse.)

TRAVAILLEUR : Voleur au jeu. — « Le grec a aussi reçu le nom de philosophe, de travailleur. » (Cavaillé.)

TRAVERSE : Bagne. (Rabasse.)

TRAVESTI : Rôle de femme travestie en homme. — « Madame Peschard débutait à ce théâtre dans un travesti. » (Bénédict, 75.)

TRAVIOLES (avoir des) : Avoir des inquiétudes. (Rabasse.)

TRÈFLE : Tabac. — Allusion à la couleur brune de ce fourrage, quand il est sec. — « Lui qui avait remué tant de trèfle de la régie. » (Aubryet.)

TRÈFLE : Anus. — C’est une image qu’on devine.

TRÉFOUIN : Tabac. (Rabasse.) — Déformation de trèfle.

TREIZIÈME (marié au) : En état de concubinage. — Pour comprendre l’ironie, il faut se rappeler que, avant 1859, cet arrondissement n’existait point à Paris. — « Jamais elle n’a été ma femme, pas même au treizième arrondissement. » (Bertall.)

TREMBLANT : Lit.

TREMBLANTE : Fièvre. (Rabasse.)

TREMBLEMENT : Réunion, mêlée générale. — « A l’union de l’infanterie, de la cavalerie, de tout le tremblement. » (La Barre.)

TREMBLEMENT : Bataille, engagement général. — « Mais, la veille du tremblement, fallait voir les feux des postes avancés. » (Chanson, 64,)

TREMPÉE : Correction. — V. Soupe. — « Si je ne me respectais pas, je vous ficherais une drôle de trempée. » (Gavarni.)

TRENTE ET UN, TRENTE-SIX (se mettre sur son) : Mettre sa plus belle toilette. — « Elle s’était mise sur son trente et un, et je puis vous assurer qu’elle était bien ficelée. » (Vidal, 33.)

TRENTE-SIX DU MOIS : Jamais. — Le mois ne dépasse pas 31 jours. — « Elle prenait du plaisir, ce qui lui arrivait le trente-six du mois. » (Zola.)

TRENTE-SIXIÈME DESSOUS (dans le) : Même sens que Troisième dessous. — « Le pauvre vicomte a été enfoncé dans le trente-sixième dessous. » (Montépin.)

TRÈPE : Foule. — C’est troupe avec modification de la première syllabe. V. Garçon.

TRÉPIGNÉE : Rossée.

TRÉPIGNER : Battre. — Mot à mot : trépigner sur le corps.

TRETON : Rat. — Diminutif de trotteur. V. Greffier.

TRICORNE : Gendarme. (Rabasse.)

TRICOTER : Battre. — Du vieux mot Tricote : gros bâton.

Prends vite un bâton,
Tricote cet homme sans cesse.
(Chanson carnavalesque, 1851.)

TRICOTER : Danser, fuir. Comparaison du jeu des jambes à celui des aiguilles. — « La peur m’a galopé et j’ai tricoté des fils de fer. » (La Correctionnelle.)

TRIFFOIS : Tabac. (Halbert.) — Pour Tréflois. V. Trèfle.

TRIFFOISIÈRE : Tabatière. (Idem.)

TRIMAR : Grande route où triment les voyageurs. — « Travailler sur le grand trimar, c’est voler sur le grand chemin. » (Cinquante mille voleurs de plus à Paris.)

Aller au trimar : Voler. (Rabasse.)

Faire son trimar : Raccrocher sur la voie publique. V. Quart.

TRIMARDER : Cheminer. (Grandval.)

TRIMBALLER : Marcher. Mot à mot : baller sur la trime, aller sur le chemin.

TRIMBALLEUR de conis : Croque-mort. (Vidocq.) — Mot à mot : trimballeur de cadavres.

TRIME : Rue. (Vidocq.)

TRIMELÉ : Fil. (Colombey.)

TRIMIN : Chemin. — Diminutif de Trimard.

Sur mon trimin rencontre
Un pègre du quartier.
(Vidocq.)

TRIMOIRE : Jambe. (Halbert.) — Elle trime par métier.

TRINGLETTE : N’avoir rien trouvé. (Rabasse.)

TRINGLOS : Soldat du train. — Diminutif de train. — « Ce que les tringlos, soldats du train des équipages militaires, ne pourront nous apporter. » (A. Camus.)

TRINQUER (faire) : Faire battre. (Rabasse.) — Mot à mot : faire choquer. On choque en trinquant.

TRIPOLI : Eau-de-vie. — Allusion à l’eau-de-vie qui entre dans la composition du tripoli. V. Astic.

TRIPOT : Garde de police. (Halbert.)

TRIPOTÉE : Correction. — Du vieux mot tripeter : fouler aux pieds. — « Oh ! quelle tripotée je vous ficherais, ma poule ! » (Gavarni.)

TRIPOTIER : « Les tripotiers, c’est-à-dire les individus qui donnent à jouer clandestinement sont nécessairement plus ou moins tarés. » (Cavaillé.)

TRIQUE : Dent, cabriolet. (Halbert.)

TROGNON : Mot d’amitié. — « En lorgnant la brunette, j’ lui dis : Mon petit trognon. » (Les Amours de Jeannette, 13.)

TROIS-ÉTOILES : Personne réelle ou fictive, dont on cache, ou dont on paraît cacher le nom. — « La femme légitime de ce peintre est la maîtresse du gros trois-étoiles. » (A. Second.)

TROIX-SIX : Eau-de-vie forte. — Allusion au degré d’alcool. V. Sacré-chien. — « Au moins, moi, j’ dis pas que j’aime pas le troix-six. » (Gavarni.)

TROISIÈME DESSOUS : « Dans le troisième dessous des sociétés, pour emprunter à l’art dramatique une expression vive et saisissante, le monde n’est-il pas un théâtre ? Le troisième dessous est la dernière cave pratiquée sous les planches de l’Opéra, pour en receler la rampe, les apparitions, les diables bleus que vomit l’enfer. » (Balzac.)

TROMBINE : Physionomie ridicule. — « Tous ces imbéciles, ça vous a des trombines prédestinées. » (Vie parisienne.)

TROMBLON : Gosier. — Il s’évase comme un tromblon. — « Vous avez demandé dans la guinguette du bleu pour rincer le tromblon. » (Almanach du Hanneton, 67.)

TROMBLON : Chapeau ridiculement évasé, comme l’arme à feu du même nom. — « Il ramasse les deux couvre-chef et tend au monsieur un horrible tromblon. » (Figaro, 75.)

TROMPETTE : Visage. — « Quelles drôles de binettes ! Quelles vilaines trompettes ! » (A. Meigne.)

TROMPETTE : Colporteur de nouvelles. — Allusion à la trompette allégorique de la Renommée. On dit d’un bavard : « C’est une fameuse trompette. »

TROMPETTE : Nez mouché avec bruit. — Nez en trompette : Nez relevé.

TRONCHE : « La Sorbonne est la tête qui pense, qui médite ; la Tronche est la tête lorsque le bourreau l’a séparée du tronc. » (Vidocq, 37.) — « Gare la tronche ! prends garde à la tête. » (Dhautel, 1808.)

TRÔNE (sur le) : Sur la lunette d’un cabinet d’aisances. Allusion au siège qui a souvent des marches comme un trône. V. Trou de balle.

TROQUET : Marchand de vins. Abréviation de mastroquet. V. Pille.

TROTTANTE : Souris. (Vidocq.)

TROTTE : Course pénible. — « J’étais sortie pour éviter ces trottes-là à Alfred. » (E. Sue.)

TROTTEUR : Rat. (Vidocq.)

TROTTIGNOLLES : Pieds. — Diminutif de trottin. V. Rien.

TROTTIN : Employé chargé des courses. Il trotte par la ville. — « Le trottin, toujours choisi parmi les grisettes les plus jeunes et les plus espiègles du magasin. » (L. Huart.) — « Et de trottin toujours crotté, on en fit un petit commis. » (Troisième suite du Parlement burlesque de Pontoise, 1652.)

TROTTINE : Botte, bottine. (Marquet).

TROTTINS : Pieds. — Les pieds trottent. — « Il faut trousser ses quilles et ses trottins de peur d’être pris de ce galliot. » (La Comédie des Proverbes, 1714.)

TROTTOIR (grand) : Au théâtre, veut dire : haut répertoire.

TROTTOIR (faire le) : Se dit des filles inscrites qui, le soir, se promènent sur le trottoir voisin de leur logis.

TROTTOIR (femme de) : Prostituée.

TROU (faire son) : Arriver à une bonne position, faire sa trouée dans la foule des ambitieux.

TROU SOUS LE NEZ (avoir un) : Être grand buveur. — « C’ n’est pas tout encore, sachez que c’te pécore a z’un trou sous l’ nez impossible à combler. » (Catéchisme poissard, 44.)

Être dans le trou : Être enterré.

Être dans le trou : Être en prison. — « Voilà pourquoi je suis dans le trou, c’est pour un malheureux poivrier, que je me suis permis de fouiller. » (Ch. de Mouchabœuf, 65.)

TROU D’AIX, TROU DE BALLE : Anus. (Colombey.) — « Ils rirent de ce qu’elles le trouvaient en fonctions, son trou de balle au grand air. » (Zola.)

TROUBADE, TROUBADOUR : Fantassin. Comme le troubadour, le fantassin fait en tous pays résonner sa clarinette. — Rousselot a fait le Troubade. (Chansonnette, 60.) — « Le troupier aujourd’hui est un troubadour qui compte tout au plus vingt ans de services. » (Marco Saint-Hilaire, 41.)

TROUBADOUR (genre), TROUBADOUR-ABRICOT, TROUBADOUR-PENDULE : Genre littéraire à la mode vers 1820, où l’on affectait, sans grand savoir archéologique, de se reporter aux troubadours des premiers temps de la monarchie. Les troubadours étaient représentés au théâtre armés de lyres et vêtus de tuniques à crevés couleur abricot. L’horlogerie même s’était emparée pour ses pendules du sujet à la mode. — « M. Paul Delaroche et tous ceux qui firent la première campagne du romantisme riaient des partisans du genre chevalier-troubadour-abricot. » (Privat d’Anglemont.)

TROUÉE : Dentelle. (Vidocq.) — La broderie fait trou.

TROUFIGNARD, TROUFIGNON : Mot à mot : Trou de la fine. V. ce mot. — « Et il menaçait de lui enlever le troufignon. » (Zola.)

TROUILLOTER DU GOULOT : Avoir une haleine infecte. — « Augustine, qui devait avoir mangé ses pieds, tant elle trouillotait du goulot. » (Zola.)

TROUSSEQUIN : Derrière. — Nom de la partie de la selle avoisinant le derrière du cavalier.

TROUVÉ : Neuf, original.

TRUC : Manière de voler. V. Roustir, Lem, Tirer. — Du vieux mot truche. — La truche était l’art d’exploiter la pitié des gens charitables. Au moyen âge, les mots truche, truffe, trulle et trut avaient le même sens de finesse et d’imposture. Ce dernier, qui ne diffère pas beaucoup de truc, se trouve, dès le xive siècle, dans une chronique rimée du duc de Bretagne, Jean IV. (Lobineau, t. II, col. 780.)

François prenoient trop divers noms
Pour faire paour aux Bretons ;
Mais ils avoient plus de vieil trut
Que vieille truie qui est en rut.

On a donné au mot truc cinq sens : 1° Au théâtre, c’est la machine destinée à produire un changement à vue. Les féeries sont des pièces à trucs. — « Cette donnée a fourni matière à un certain nombre de trucs, de décors, de changements à vue. » (R. Deslandes, 49.) — 2° Pour un auteur dramatique, le truc est la science des détails. On dit d’un écrivain qui file la scène avec difficulté : il mangue de truc. — 3° C’est aussi un moyen d’existence. — « Il daigna nous donner quelques renseignements sur son truc, c’est-à-dire le métier qui le fait vivre. » (P. d’Anglemont.) — 4° Le truc est encore une ruse, un dehors trompeur. — « La vertu qu’on fait pour mieux cacher le vice, voilà le truc d’un sesque trompeur. » (Rousseliana, 05.) — 5° Faire du truc : faire un commerce illicite. (Rabasse.)

TRUFFE : Nez difforme du genre tubercule. V. ce mot.

TRUFFES (aux) : Soigné. La truffe est un aliment de luxe. — « Tu me feras un compte rendu aux truffes ! » (E. Augier.)

TRUFFÉ : Bourré. — Pris au figuré. — « La petite machinette est truffée de chic. » (Petite Revue, 66.)

TRUMEAU : Personnage suranné. — La mode des trumeaux date du siècle dernier. — « Il se l’est brisée, mon Bourdonnard… Vieux trumeau, va ! » (Almanach des Toqués, 64.)

TRUQUER : Vivre de roueries. (Halbert.)

TRUQUER : Commercer illicitement. (Rabasse.)

TRUQUEUR : Fabricant de fausses antiquités. — Champfleury a donné une physiologie du Truqueur dans son Hôtel des commissaires-priseurs.

TRUQUEUR : « À Paris, on appelle surtout truqueurs les vendeurs de contremarques et les ouvreurs de portières de voitures, qui parfois volent à la tire. On les trouve aussi sur les champs de course vendant des bouquets et des cigares. » (Rabasse.)

TRUQUEURS : « Gens qui passent leur vie à courir de foire en foire, n’ayant pour toute industrie qu’un petit jeu de hasard. » (P. d’Anglemont.) — C’est aussi un homme usant de trucs dans toutes les acceptions définies plus haut. V. Bouline.

TRYCHINE : Prostituée. — L’épithète, qui date du temps où on parlait fort des risques que faisaient courir les trychines dans la viande du cochon (1865), ne paraît pas s’être acclimatée. — « Trychines, qui dorez les vices, enguirlandez-moi. » (Michu.)

TUANT : Ennuyeux à crever. On dit aussi crevant.

TUBE : Estomac : Se fourrer dans le tube : manger. — Même allusion que dans fusil.

TUBE : Chapeau de soie. — Allusion à sa forme cylindrique.

TUBERCULE : Nez à loupes et à verrues, ressemblant au tubercule par excellence, à la pomme de terre.

TUER les mouches au vol, — à quinze pas : Avoir une haleine infecte. — « Mais, chère-amie, si je tuais les mouches comme tu te plais à te dire, il y a longtemps que tu ne vivrais plus. » (Grévin.)

TUER le ver : Boire de l’eau-de-vie ou du vin blanc ; libation matinale désignée par ces mots : Tuer le ver. (Murger.) — « Les ouvriers étaient allés tuer le ver chez le marchand de vins le plus proche. » (Figaro, 76.) — Prise à jeun, et par exception, l’eau-de-vie a des propriétés vermifuges.

TUFFRE : Tabac. (Halbert.) — Anagramme de trèfle, du moins pour cinq des premières lettres. V. Trèfle.

TUILE : Accident. — Allusion à la tuile qui tombe d’un toit sur la tête du premier passant venu. — « La tuile est forte, mais on peut s’en relever. » (L. Reybaud.)

TUILER : Toiser, dévisager. — Terme maçonnique.

TULIPE ORAGEUSE : Cancan. — « Tous quatre frétillant des tulipes de plus en plus orageuses. » (E. Sue.)

La jupe d’une danseuse qui lève la jambe à la hauteur de l’œil, tend à prendre la forme du calice de la tulipe. De là le mot.

TUNE : Pièce de cinq francs. — « J’allais dans les bureaux de placement avec une tune. » (Beauvillier.) Abrév. de Thune.

TUNE : Prison de Bicêtre. C’est un dépôt de mendicité. — De tuner : mendier. Vieux mot.

TUNEÇON : Maison d’arrêt. Diminutif de tune.

TUNER : Mendier.

TUNEUR : Mendiant.

TU QUOQUE : Et toi aussi, tu en es donc ? — Latinisme. — « La république de Saint-Marin, vient d’envoyer à l’empereur Guillaume le grand cordon de ses ordres. Tu quoque ! » (Moniteur, juin 72.)

TURBIN : Travail de voleur. — « A vingt-deux ans, je me remets au turbin. » (Beauvillier.)

TURBIN : Travail pénible.

Bon sang d’ bon Dieu ! quel turbin,
J’ viens d’ mettr’ mon pied dans une flaque.
(Richepin.)

Mettre une femme sur le turbin : La livrer à la prostitution et en tirer parti. — « Je la mets sur le turbin pendant dix mois, gagneuse d’argent gros comme elle. » (Beauvillier.)

TURBINEMENT : Jour de travail. — « Pour grinchir tu préféreras les fêtes aux turbinements. » (Vidocq.)

TURBINER : Travailler. (Rabasse.) — « Nous turbinons, en attendant, de façon à prendre Tlemcen en grippe. » (Comm. de Loriot, 69.)

TURBINEUR : Travailleur. (Vidocq.)

TURCO : Tirailleur indigène de l’armée d’Afrique. — « Un carré de turcos vint se former sous nos pieds. » (Mornand.)

TURF : Champ de course, et par extension, arène quelconque. — « Voilà de quoi faire envahir par toutes les fashions le turf littéraire. » (Aubryet.)

TURLUTINE : « La turlutine, qui joue le principal rôle de l’alimentation du soldat en campagne, se prépare en faisant cuire du biscuit pilé avec du riz et du lard. » (Cler, 56.)

TURNE : Logis malpropre. Du vieux mot tourne : prison. — « L’immeuble !… je me suis tout de suite souvenu de cette turne. » (Montépin.)

TUTTI QUANTI : Tous ceux qui sont tels. — Italianisme. — « Philippe de Girard, avec sa machine à filer ; Sauvage, avec son hélice, et tutti quanti, n’étaient que des idéologues… » (Éclair, juillet 72.)

TUYAU DE POÊLE : Chapeau rond, botte à l’écuyère. Allusion de forme. — « Il donna un coup de poing dans son tuyau de poêle, jeta son habit à queue de morue. » (Th. Gautier, 33.) V. Méchant.

TUYAU DE POÊLE : Botte. — Allusion de hauteur, de forme et de couleur.

TYPO : Ouvrier typographe.