Dictionnaire des proverbes (Quitard)/clerc

clerc.Ce n’est pas un grand clerc.

Ce n’est pas un habile homme. Autrefois on disait clerc pour savant, mauclerc pour ignorant, et clergie pour science, parce qu’il n’y avait un peu d’instruction que parmi le clergé, les nobles tenant à honte de savoir quelque chose. — La vie d’un clerc était alors réputée si précieuse, qu’on avait établi en France, en Angleterre et en Allemagne, un privilége nommé bénéfice de clergie, beneficium clericorum, en vertu duquel on fesait grâce à un homme qui méritait la corde, lorsqu’il avait pu lire dans le livre des psaumes certains passages désignés par les juges ; mais comme ces juges eux-mêmes ne savaient pas lire, ils s’en rapportaient à l’aumônier de la prison. Dès que celui-ci avait dit : Legit ut clericus, il lit comme un clerc, le coupable était mis en liberté sans autre punition que d’être marqué légèrement d’un fer chaud à la paume de la main.

Faire un pas de clerc.

C’est commettre quelque faute par inadvertance ou par inexpérience. On disait autrefois vice de clerc dans le même sens que pas de clerc.

Les plus grands clercs ne sont pas les plus fins.

Ce qu’un personnage de Rabelais exprime plaisamment par ce mauvais latin : Magis magnos clericos non sunt magis magnos sapientes.

Les savants, toujours trop occupés de leurs travaux pour attacher beaucoup d’importance aux détails vulgaires, sont souvent dans une profonde ignorance des choses de la société. Ils ne paraissent guère dans un cercle sans se faire remarquer par leurs distractions ou leurs gaucheries, et c’est ce qui a donné lieu à cet autre proverbe : Que les gens d’esprit sont bêtes ! par lequel la médiocrité de l’homme du monde se console de leur supériorité.

Jean-Paul-Frédéric Richter a merveilleusement mis en action et développé cette pensée proverbiale dans un ouvrage fort original et fort comique, intitulé : « Voyage, aventures, exploits et jours d’angoisse d’un aumônier de régiment, avec une apologie de sa valeur, et une narration de ses hauts-faits, contenus dans une épître panégyrique et catéchétique. » Cet aumônier est un puits de science. Il n’y a rien qu’il ne connaisse et qu’il n’approfondisse, et avec tout cela il est le plus niais des mortels. Hors sa science, il ne sait absolument rien, comme disait le valet du père Griffet, en parlant de son maître.

L’un de nos meilleurs critiques, M. Philarète Chasles, a donné un excellent article sur cet ouvrage dans la Revue de Paris.