Dictionnaire de théologie catholique/ZACHARIE DE LISIEUX

Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 1073).

ZACHARIE DE LISIEUX, né en cette ville, le 25 mars 1596, de Jean Lambert et de Marie de Cauvigny, entra chez les capucins en 1612. Brillant prédicateur, il est surtout connu par son talent d’écrivain. Ses œuvres peuvent se partager en deux groupes : les œuvres satiriques, les œuvres de spiritualité.

Les premières intéressent peu la théologie. Cependant le P. Zacharie y prend à partie les libertins et les jansénistes. Contre ceux-là, il emploie l’argument augustinien de la vérité et il prétend que nous portons en nous l’idée innée de Dieu. Contre ceux-ci, il se montre mordant sans être pour autant original. Il leur reproche seulement d’être inhumains et de conduire par là les hommes au libertinage.

Les œuvres spirituelles sont au nombre de trois : dans la Philosophie chrétienne, le P. Zacharie a pour but d’exhorter les hommes à sortir du monde, à sortir d’eux-mêmes, à ne point faire état d’une vie malheureuse, à faire état d’une vie pécheresse ; il s’adresse d’abord aux séculiers dont les pratiques sont ordinairement plus matérielles et il leur suggère des pensées qui s’accommodent à leur condition, ensuite aux religieux qui trouveront dans ces pages les plus hauts exercices de la vie parfaite. De l’un à l’autre état, pas de solution de continuité. La contemplation est l’accomplissement normal de l’ascèse. — La monarchie du Verbe incarné n’est point, comme on pourrait l’attendre d’un capucin, consacrée à défendre la thèse franciscaine qui veut que le Christ soit roi des anges et des hommes. Le P. Zacharie se contente de montrer le parallélisme qui existe entre la royauté de Jésus-Christ et celle des princes terrestres. Roi par droit de naissance, élu dans les conseils secrets de son Père, il est sacré par la grâce d’union qui étend à la personne humaine les prérogatives de la personne divine. Sa puissance, il l’exerce sur toute la nature par ses miracles, sur les démons par la croix, sur les âmes par ses sacrements. La sagesse de ce monarque est discrète ; parfois même, on pourrait la mettre en doute ; cependant, pour qui sait voir, elle éclate partout : dans l’eucharistie, dans le choix des ministres, dans l’établissement et la promulgation des lois. Aussi bien faut-il se ranger dans les armées de ce monarque. C’est l’unique moyen d’assurer son salut.

— Le dernier des trois ouvrages spirituels, le Christus paliens, fut écrit pour les prédicateurs. Le P. Zacharie veut leur donner une méthode ainsi que des passages de l’Écriture et des Pères. L’ouvrage comprend deux parties. La première étudie les divers épisodes de la passion dont l’auteur s’attache à montrer le sens mystique. La seconde est surtout morale et porte principalement sur l’usage des richesses, sur le mariage et sur les jugements de Dieu.

Le P. Zacharie n’est pas un théologien profond. Il peut cependant nous renseigner sur la piété du xviie siècle. Il convient particulièrement de signaler l’usage qu’il fait des auteurs païens. Humaniste, il connaît fort bien son Cicéron et son César et il se plaît à appuyer ses développements ascétiques et mystiques sur des exemples pris dans les poètes, les moralistes et les historiens de l’antiquité. Le fait n’était pas rare à l’époque, et, quoi qu’en aient dit les jansénistes, il n’est pas tellement déplaisant.

Œuvres. — 1° Satiriques : Seeculi Genius, Paris, 1653 ; Somnia sapientis, Paris, 1659 ; Gyges Gallus, Paris, 1658 ; Les relations du pays de Jansénie, Paris, 1660. — 2° Spirituelles : La philosophie chrétienne, Paris, 1638 ; De la monarchie du Verbe incarné, Paris, 1649 ; Christus paliens, Paris, 1662.

Travaux. — Abbé Coupé, Bibliothèque universelle des romans, décembre 1779 ; Soirées littéraires, t. vii, p. 56, Paris, 1797 ; Edouard d’AIençon, Les capucins de Rouen. Paris, 1890 ; Ch. Guery, Les œuvres satiriques de Zacharie de Lisieux, Paris, 1913.

J. Eymard.