Dictionnaire de théologie catholique/PRIÈRE .V. Qualités et conditions de la prière

Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 13.1 : PRÉEXISTENCE — PUY (ARCHANGE DU)p. 113-119).

V. Qualités et conditions de la. prière. —

II importe de distinguer la question que nous abordons maintenant de celle que nous nous poserons au sujet de l’efficacité de la prière : plus tard, nous nous demanderons à quelles conditions la prière sera efficace, c’est-à-dire sûre d’être exaucée ; parmi ces conditions figureront certaines des qualités de la prière que nous allons étudier, par exemple la persévérance, mais encore d’autres conditions qui n’ont rien à voir avec les qualités de la prière, par exemple qu’elle soit faite à l’intention de celui qui prie et non au profit du prochain. Ici, il s’agit de savoir quelles qualités doit avoir la prière pour être une vraie prière, une bonne prière, une prière chrétienne, selon les enseignements de l’Écriture et de la tradition catholique.

Ces qualités sont fort diverses et difficiles à classer selon un ordre logique. Saint Thomas, Opusc, v, Expositio orationis dominicæ, en énumère cinq : débet enim esse oratio secura, recta, ordinata, devola et humilis. Le P Grou, L’école de Jésus-Christ, 32e leçon, cinq aussi, mais qui ne coïncident pas tout à fait avec celles de saint Thomas : « Quelle autre prière peut nous inspirer ce divin Esprit qu’une prière attentive, une prière humble et respectueuse, une prière amoureuse, une prière pleine de confiance, une prière persévérante ? En outre, parlant, dans la 33e leçon, des dispositions requises pour bien prier, ce qui n’est guère différent des qualités de la prière, il en signale trois : l’humilité, la simplicité, la docilité. Landriot, dans Y Instruction pastorale de 1864, Œuvres, t. iii, p. 507-594, indique huit « conditions et qualités de la prière » : l’humilité, l’attention, la ferveur, la confiance, la persévérance, qu’elle soit faite au nom de Jésus-Christ, la pureté de vie, la joie. Enfin le Catéchisme romain, part. IV. c. viiviii, veut qu’on apporte à la prière les dispositions suivantes : l’humilité et la reconnaissance de sa misère spirituelle ; la douleur des fautes qu’on a commises, ou du moins une certaine peine de ne pas s’en repentir assez ; une conscience pure de certains péchés et de certaines passions : la foi et l’espérance certaine d’être exaucé ; la conformité à la loi et à la volonté de Dieu ; il faut prier « en esprit et en vérité », ce qui veut dire « de toute l’ardeur et de toute I’alTcction de son cœur » ; il ne faut pas prier comme les païens en multipliant les

paroles, ni comme les hypocrites ; il faut que la prière soit assidue et persévérante ; qu’elle soit faite au nom de Jésus-Christ ; il faut qu’on joigne l’action de grâces à la demande et que la prie re soit accompagnée du jeûne et de l’aumône. Et nous n’avons pas encore signalé la première condition de la prière : l’intention ; ni certaines circonstances qui peuvent influer sur la qualité de la prière : le temps, le lieu, l’attitude, cf. Suarez, op. cit., I. III, c. vii, n. 3, 7-13, 1(1. Sans compter encore cette condition primordiale de toute prière, à savoir qu’elle soit l’œuvre du Saint-Esprit agissant en nous par la grâce actuelle.

Il ne peut être dans notre dessein de nous étendre longuement sur chacune de ces qualités ou conditions <le la prière ; nous nous bornerons donc aux questions plus importantes et plus difficiles, qui sont généralement abordées par les théologiens en cette matière.

I. //A’L’INTENTION REQUISE POUR QU’IL Y Ml PRIÈRE, — Ne confondons pas l’intention et l’attention, comme on le fait quelquefois : l’intention est l’acte de la volonté qui se propose telle ou telle fin ; l’attention est l’acte de l’intelligence qui s’applique à tel ou tel objet, qui s’occupe de tel ou tel sujet ; cf. Sua rez, t. III, c. iii, n. 2.

Pour qu’il y ait prière, il faut qu’on ait Tintent ion de prier. On ne prie pas si l’on n’a pas l’intention de prier, encore « pie l’on prononce des formules de prière : le prêtre, par exemple, qui lit le bréviaire sludii vel rrcreationis causa, ne prie pas ; il étudie ou il s’amuse, mais il ne prie pas ; et par conséquent il ne s’acquitte pas de son obligation. Suarez. ibid., n. 3. El pour satisfaire à l’obligation du bréviaire, il faut vouloir prier ; il ne suffît pas de vouloir réciter ou chanter les formules imposées : non priecipitur tantum heec actio exterior legendi vel cantandi materialiter tumpta… ted preecipi(uraclio Ma exterior ut est oralia nrf Deum et cultuni e/us. Suarez, t. IV, c. xxvi, n. 5. Il est bien entendu que cette intention de prier n’a pas besoin d’être toujours expresse ou formelle, mais qu’une intention implicite et virtuelle suflit, t. III, c. ni, n. (i ; avoir Tint en lion de satisfaire à son obligation est une intention implicite ou équivalente de prier. I. IV, ibid. ; on sait, en outre, que virtuel s’oppose d’une part à actuel et de l’autre a habituel : une intention Virtuelle est une intention qui a cessé d’être actuelle, mais qui persévère et dure encore en quelque sorte, parce que c’est en vertu de cette intention que telle action continue ; pour (pudure la prière, il faut que soit maintenue l’intention de prier ; mais, tant que dure cette Intention, dure aussi la prière, du moins la prière vocale, quelles que soient les distractions involontaires, ou même volontaires, qui surviennent : nous revenons cela toul a l’heure.

Celle intention de prier peut être viciée par quelque circonstance accidentelle sans cesser d’exister ; il J aura donc prière, puisqu’il y aura Intention de prier, mus prière plus ou moins m-, i-, : telle serait la pnsi :

de celui qui prierait surtout pour la gloriole ou pOUT l’argent, ex intentione lundis humante, ce/ alicujus cornmorfi temporalis, in illurf principaliter intuendo ; oere roijnt, quamvis non bene oret. Suarez, I. III, c. iii, n. 5, C’est du moins l’opinion commune. Et une telle prière est suffisante pour sal Isfaire à l’obligation du bréviaire.

II. DE L’ATTENTION REQUISE DANS LA PRIÈRE. — 1° Distinctions préalables. L’attention étant une

application de l’esprit à un objet, à une action, celle qu’on apporte a la prière vocale se diversifie suivant l’objet auquel l’esprit s’a Hache particulièrement qu and on prie.

On peut s’appliquer principalement a bien prononcer les mots de la prière, comme ferait une personne chargée de présenter une requête en une langue étrangère. On peut aussi porter plutôt son attention sur le sens des formules qu’on prononce pour les bien « réali ser, pour les dire avec sincérité et conviction. Enfin l’esprit peut être en quelque sorte absorbé par la pensée de la personne à qui l’on s’adresse, par quelqu’un des attributs de Dieu, sa grandeur qui impose le respect, sa bonté qui inspire la confiance, etc., ou par la pensée de la détresse où l’on se trouve, détresse qui précisément nous pousse à recourir a Dieu. Telles sont du moins les trois sortes d’attentions à la prière que reconnaît saint Thomas, In 1 V"’Sent., dist. XV, q. iv, a. 2, sol.."> ; Sain. Ineol., II’-11 1, q. ixxxiii. a. 13 ; cf. Bolley, GebeUstimmung undGebet, Dusseldbrꝟ. 1930 Saint Thomas s’exprime d’une manière un peu différente sur l’objet précis de la troisième espi Ie d’attention dans le Commentaire des Sentences et dans la Somme tldologique : la, l’objet sur lequel se porte l’attention c’est’" qute petitionem ipsam circumslant, sicut est nécessitas pro qua petitur, Deut qui rogatur, et alia hujusmodi ; ici. ce sera ad flnem orationis, teilicet arf Deum ci arf rem pro qua oratur. Saint Bonaventure, De profeetu religiosorum, t. II, c. i.x, distingue aussi trois sortes d’attentions qu’on peut apporter a la prière, et qu’il appelle respectivement superficielle,

littérale et spirituelle ; les deux premh Tes ((.incident a peu [ires avec (elles de saint Thomas, mais la troisième en diffère ; l’attention spirituelle ((insisterait a découvrir derrière le sens littéral des psaumes le sens spiri luel qu’ils recèlent ; cf. Suarez, I. III, c. iv, n.’_'.

Certains auteurs dis ! i liguent une attention interne cl une attention citerne : celle-ci consisterait a s’abstenir.

quand on prie, de toute occupation Incompatible avec le minimum d’attention interne, c’est-à duc d’atten

tion proprement dite, requis dans la prière ; cf. V « 

meersch, op. cit., p. 17

Enfin, certains théologiens parlent d’une attention formelle ou ad utile et d’une attention virtuelle : celK ( i consisterait dans l’intention, la volonté, le ferme propos non rétracté d’étK attentif, d’une manière ou d’une autre, à la prière ; ferme propos qui persiste

parmi les distractions Involontaires, mais qu’interrom

Dent les distractions volontaires (jininuliu Ma vol’filai

durât, cetuetur altentio rfurare virlualiter, seu moraliter Suarez, tbid., n. 7. Vermeerscfa fait remarquer, p. it.

que c’est la une distinction imaginée pour les besoins de la cause : quand on enseigne que l’attention est absolument nécessaire a la prière et que néanmoins les

distractions Involontaires n’en Interrompent pas le

cours, il faut bien recourir ; i ce subtertu

2° L’attention ne nuit elle pus a la prnre’Cf. saint

Thomas, In I Y’Sent., ! ". cit. olUumquestion

qui aurait pique la curiosité de Henri lircmond : vide

tur quod attentlo orationi noeeedl Hugues de Saint-Victor ne dit-il pas, en effet, que la prière est vrai ment pure quand, par suite de l’Intensité (le la dévo tion, l’Ame (mena I est tellement embrasée quc se tournant vers Dieu pour l’implorer fpoatulatura), elle ne

pense même pas a ce qu’elle demande letiain SUC pctl lionis ol’lii’iscutur) ». Or. qui est capable d’un tel oubli, continue saint’Thomas, ne semble pas prête ! attention a la prière. Donc, il semble bien que la vraie prière serait empêchée par l’attention… »

La solution de la question se trouve dans la distinction des trois sortes d’attentions, et comme on ne peut être très attentif a plusieurs choses en même temps, il faut reconnaître que la première attention, si elle empêche la seconde, et, de même (elle ci si elle empêche li troisième, nuiront à la prière, en ce sens qu’elles en diminueront le fruit ; l’inverse, d’ailleurs, n’est pas vrai. Cependant, on ne peut pas dire qu’en général l’attention nuise à la prière : elle lui est plutôt profitable, comme en fait foi l’autorité de s. dut AugUS tin ». qui nous adresse cette recommandation : cum oratis Deum. hoc rersetur in conte quod projcrtur in ore. Tes raisons qu’on peut apporter pour prouver que

l’attention nuit à la prière ne sont pas péremptoires : la prière « pure » n’est pas une prière inattentive : s’il lui manque la première ou la deuxième espèce d’attention, elle possède cependant la troisième, qui est de toutes la meilleure : quando mens per dilectionem in Deum ila rapiturut pelitionis suit immemor sit, atlenlio orationi adest, quamvis non secundo vel prima, sed terlia… Ad l"" 1.

Pendant que nous touchons à cette question de la prière « pure, qu’on nous permette d’ajouter quelques références et quelques remarques : le texte d’Hugues de Saint-Victor auquel renvoie saint Thomas se trouve en Migne, P. L., t. clxxvi, col. 980 : il faut y joindre la parole, souvent citée, de saint Antoine, rapportée par Cassien : « Il n’y a pas de prière parfaite si le religieux s’aperçoit qu’il prie. » Cf. F. "Vernet, La spiritualité médiévale, p. 137 ; La vie spirituelle, t. xiii, p. 112 ; Landriot, op. cit., t. iii, p. 539. Autre est cependant la question de savoir si la prière doit être attentive ou si elle doit être consciente, et l’on peut avancer sans paradoxe que, moins elle sera consciente, plus elle sera attentive : « Celui qui, priant Dieu, s’aperçoit qu’il prie, n’est pas parfaitement attentif à prier ; car il divertit son attention de Dieu, lequel il prie, pour penser à la prière par laquelle il prie. Le soin même que nous avons à n’avoir point de distractions nous sert souvent de fort grande distraction… Celui qui est en une fervente oraison, ne sait s’il est en oraison ou non ; car il ne pense pas à l’oraison qu’il fait, mais à Dieu, auquel il la fait. » Saint François de Sales, Traité de l’amour de Dieu, I. IX, c. x, cité par Landriot, ibid. ; cf. H. Bremond, Introduction à la philosophie de la prière, p. 54-55, 226-227. C’est la distinction entre la prière « directe », inaperçue, et la prière « réfléchie », consciente. La prière pure, telle que la définit Hugues de Saint-Victor, s’identifie-t-elle avec la prière pure de saint Maxime et d’F vagre le Pontique ? Ce n’est pas le lieu de le rechercher. Cf. Rev. d’ascét. et de myst., 1930, p. 250-254. II faudrait aussi la comparer avec la prière « de feu », ignea oratio, de Cassien ; cf. La vie spirituelle, t. viii, p. 210-211.

3° L’attention est-elle nécessaire ù la prière ? — « La question se pose surtout pour la prière vocale », remarque saint Tl ornas, Sum. iheol, ID-II*. q. lxxxiii, a. 13. Ne devrait-on pas dire plutôt qu’elle se pose seulement pour la prière vocale ? cf. supra, col. 184. Quoi qu’en ait dit H. Bremond. Hist, lill…, t. viii, p. 150-107, les distractions involontaires qui nous arrivent dans l’oraison, entendons-nous bien, les véritables distractions qui nous emportent bien loin de Dieu ou nous plongent dans le sommeil, interrompent bel et bien notre oraison ; il n’y a pas à répliquer que l’union du cœur subsiste : oui, elle subsiste, exactement comme elle subsiste durant le sommeil, mais c’est une union habituelle, ce n’est pas une union actuelle, ce n’est pas une prière. La prière est un acte, acte du cœur ou de l’esprit, peu importe ; quand il n’y a plus d’acte, ni de l’esprit, ni du cœur, il ne peut plus y avoir de prière. Cf. Suarez, op. cit., t. II, c. v, n. 16 : « La prière vocale peut bien subsister quoad malerialem actum (xlrrnum, quand l’attention disparaît ; mais la prière mentale ne peut aucunement subsister, quand l’attention disparaît entièrement, parce qu’elle consiste essentiellement dans un acte purement interne qui ne peut exister sans l’attention. »

Donc, il s’agit ici de savoir si l’attention est aussi nécessaire à la prière vocale. Saint Alphonse. Theologia moral is, t. VI, De prseceptis jarticularibus, n. 177, déclare qu’il y a sur cette question trois opinions parmi les théologiens. La première, qu’il qualifie de communior il probabilior, affirme que l’attention dite externe ne suffit pas, encore que l’on prononce correctement les paroles et qu’on ait l’intention au moins implicite de

prier, pour que la prière vocale soit une véritable prière, donc pour satisfaire à l’obligation du bréviaire ; il faut en plus une véritable attention interne, que) qu’en soit d’ailleurs l’objet, c’est-à-dire qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre des trois espèces d’attentions distinguées par saint Thomas ; il n’est pas nécessaire cependant que cette intention interne soit actuelle : elle peut n’être que virtuelle, c’est-à-dire qu’elle subsiste moralement tant qu’elle n’a pas été rétractée par la distraction pleinement volontaire et aperçue comme telle. La conséquence pratique de cette opinion, c’est que la récitation de l’office qui n’est pas accompagnée de ce minimum d’attention interne n’est pas valide et donc ne donne pas droit à la perception des revenus qui en dépend. Telle est l’opinion de Suarez, t. III, c. iv, n. 3-8 ; t. IV, c. xiv et xxvi. La seconde opinion (que saint Alphonse place en dernier lieu), n’exige que l’attention externe, à condition, cela va sans dire, qu’elle soit suffisante pour permettre de prononcer correctement les paroles de l’office divin et qu’on ait l’intention, au moins implicite, de prier. Il s’ensuit que, pendant la récitation de l’office, laisser son imagination vagabonder ou occuper son esprit d’affaires toutes profanes peut bien être une irrévérence, mais qui n’excédera pas les limites du péché véniel et n’empêchera pas cette récitation d’être valide et de donner droit, s’il y a lieu, à la perception des revenus qui en dépend. Cette seconde opinion se réclame de saint Thomas et de saint Antonin ; elle est professée par un bon nombre de théologiens, entre autres par de Lugo, Vermeersch, op. cit., p. 48sq., et reconnue comme probable par un grand nombre d’autres. Enfin, saint Alphonse croit découvrir dans les Salmanlicenses une opinion qui tend à concilier les deux autres : « Étant donné, d’une part, que l’attentionadso/awfftasuffitpoursatisfaire à l’obligation, et, d’autre part, que, pour une récitation correcte, il faut absolument au moins cette attention ad verba, avec l’intention au moins confuse d’honorer Dieu, il y aura prière tant qu’il y aura cette attention ad verba ; or, il n’est pas impossible qu’on soit attentif à bien prononcer les paroles tout en occupant son esprit d’autre chose ; donc, on satisfera à l’obligation tant que l’on n’aura pas rétracté par une volonté contraire la volonté de se maintenir attentif, unde is bene satis/acicl semper ac per contrariam valuntatem non retractabit proposilum atlendendi. » Concina, ajoute saint Alphonse, fait remarquer à ce sujet que celui qui se distrait volontairement n’est justement plus attentif à bien prononcer les paroles, ou son attention sera tellement atténuée que ce ne sera plus une véritable attention. Ballerini-Palmieri, op. cit., t. iv, p. 327. observant que cette opinion attribuée aux Salmanticenses n’est en réalité que la première opinion, puisque, comme celle-ci, elle exige au moins l’attention ad verba, qui est classée parmi les attentions internes. C’est vrai ; seulement elle en dillère parce qu’elle admet que cette attention est compatible avec la distraction volontaire, cum non sit incempi ssibile aliquem ad alia distrahi et simul altendere ad verba recte proferenda.

Nous n’entreprendrons pas d’exposer et de discuter les preuves apportées à l’appui de chacune de ces opinions, mais il nous semble que certaines remarques, théoriques ou pratiques, s’imposent, ^i a-t-il d’abord une bien grande différence entre les deux premières opinions ? Il ne le semble pas. Cette attention ad verba dont se contente la première et l’attention externe qu’exige la seconde, qui doit être telle qu’elle permette une récitation correcte des formules, n’est-ce pas à peu près la même chose ? Il reste bien cette différence entre les deux opinions que l’une affirme et que l’autre nie que les distractions volontaires détruisent la prière. Qui a raison’? Il semble bien que ce soit la pre

mière opinion. Faisons appel au bon sens : à supposer 1 que celui qui se livre ainsi volontairement pesant la prière, à n’importe quelles pensées, rêves, calculs, réflexions, projets, etc., garde cependant assez d’attention pour prononcer correctement les paroles peut-on vrâ men dire qu’il prie encore, qu’il a cette in tention de prier qui est absolument requise pour quil y ait prière ? Prier, le bon sens nous en avertit, c’est s’occupe de Dieu, c’est lui parler, non seulement de bouche, mais de cœur ; or, celui qui volontairement s’occupe ïautre cho^e ne rétracte-t-il pas cette intention de prier qu’il a dû avoir en commençant la récitation de son formulaire ? Cf. Suarez, t. IV, c. xxv, , n. 13.

Pratiquement, puisque la seconde opinion es déclarée probable par un grand nombre de Un-, .kg » s môme ceux qui ne l’adoptent pas puisque 1 aut re ne revendique que la qualité de probabilwr, et pu sque nous sommes dans un domaine où l’on peut appliquer les principes qui règlent l’usage des opinions proba-’bles’étanî donné qu’il s’agit bien de IlljttBU oVune prière, mais non de celle d’un sacrement, il n y a pas à s’inquiéter, ni à fortiori à ^quiéter la conscience de ceux qui s’accuseraient d’avoir été distraits volontairement tout au long de la récitation de leur office ; évidemment ils ont mal prié et par là ils on pé hé mais ils ont tout de même prié. Lis ont satisfait tant bien que mal à leur obligation. Cf. saint À p muse ibid n 177 : Unde non auderem ad restituthnem dam’nare beneficiarium.-qm bona fuie, ojflcium ree’tasset cum distraction voluntaria, et bona fuir panier fructus

Dercepisset.., .

Il ne sera pas sans Intérêt, croyons-nous, Pourter. miner cette question, de glaner en saint I homas quelles remarques. Et d’abord lui aussi dis ingue une attention actuelle et une attention virtuelle celle-ci consiste dans la permanence de 1 Intention de prier, intention qui demeure bien quand l’attention dtepa raît involontairement, encore a condition que.cette distraction Involontaire ne soit pas trop forte, mais qui ne semble pas subsister quand on s’occupe vol°ntalrement d’autre chose ; cela n’est pas dit formel.-ne. t. mais paraît bien dans la ligne de la pensée de saint Thomas : Mancl autem attentio secundum virtutem, quando aliquis ad orationem aecedit cum intention aliquid impetrandl, vel Deo debitum obsequium reddendi, eliam si in prosecutione orationis mens ad alia rapiatur ; nisi tanta fuit eoagatio quod omntno *’P*™ » ois primas intentionls ; et ideo oporUt quod 1** ! ™% homo cor rcooccl ad seipsum. In I V Sent., dist. XV, „ iv a 2 sol. 4. La distraction même Involontata empêche l’un « les effets de la prière, qui es. une certaine Sdion spirituelle : Tertius effectua orationia est quantum spiritualia refectlo mentis ; et ad hoc de necessitaie requiritur in oratlone attentio. Sum. theoL, Il - M, a i xxxiii a. 13. On pourrait objecter a notre Interprétation de ce passage ce que dit saint Thomas dans 1-ad 3'">- evagatlo oero mentis qua M prêter proposi him, orationis fructum non tollit ; nous répondrions que cela se rapporte aux deux autres elle ! s de la prière, le mérite et T’impétration, pour lesquels saint rhoraas déclare, en elfe., dans le corps, te lar.iee. que les-hs

tractions involontaires ne les empêchent pas ; et. su rez 1 III. C. v, n. 2. Nous aurons à revenir sur ce im I de la prière, sur cette sorte de réfection spirituele de l’âme qui naît.le la prière au moment même oùe le s’accomplit et qui est inséparable de l’attention : su, ce dernier point et sans doute sur l’idée même qu U se fait de cette * réfection spirituelle., H. Bremond ne s’accorde pas avec saint Thomas, du moins a ce que semble penser saint Thomas » à première vue . Thomassin, et avec lui le P. Piny, et, explicitement ou non. tous les mystiques modernes, tiennent, au contraire, que, la réfection spirituelle étant précisé ment le fruit de l’attention du cœur - ^attention d’état [c’est l’attention virtuelle de saint Thomas | —les défaillances de l’attention intellectuelle ne suspendent pas nécessairement cette réfection. » H, st. Hit…, t. mi. p 405, note. Les distractions volontaires ne paraissent à’saint Thomas entraîner par elles-mêmes que la Culpabilité d’une faute vénielle ; mais, s elles constituent un péché grave, par exemple si ce sont de mauvais désirs pleinement consentis, sl’on pèche mortellement en priant, outre ce pèche > ""g"" ^ commettrait un péché grave contre la vertu de i rel. cion auando aliquis ex proposilo mentem adalia distrait inorando, tune sine culpa non est, prmeipue si in ali sponle se occupai quæ mentem d.slrahunt, s.cut sunt e eZa opéra ; et si ad amtrarium mens evagetur eliam culpa mortalis eril. In M" Sent., oc. « L.ad 2 " Vernecrsch, op. cit., p. 53, n’oserait pas aile [usqueda ; il assimile ce cas à celui dont parle sain Alphonse ibid., n. 178. celui d’un bénéficier qui récite ses heures alors qu’il a pris la détermination de pécher mortellement, si habet aduaU ProPosUum pec ] candr l’opinion verioret communior. « lit s ont Alphonse, ë, u et homme satisfait à sou obligation et ne pèche pas mortellement. Mais l’assiu.dation est-elle

Va "ô’o, W/e est U, meilleure sort- « f attention ? - Des trois sortes d’attention. qu’il a distinguées, saint rho nas affirme que la secondest meilleure llaudobl-r,

^rp^n^, mai.qu’dlelecèdeàla^U^

In IV><<.S’enL, toc. Cit. Dans la Il U, foc «  « …1

déclare même ceUe-ci maxime neceMona ; mais en

o ut qu’elle est possible a tous, même au gens

ïm. Uwtruction, Elle coiubte, « slon IuLnou. l’avons

vTàpen » rad/wemo « i//oni.. « /ZicefadDeiimef « d

f… mmv, i il en effet, de plus naturel rem pro qua oratur. Qu y a-i-u. en euei, i

, ., de plus facile’.' Dans les Sentences, saint 1 I oui, . es

d’que cette demie, , te d’attention n’empêche

, , , s de penser au sens des paroles qu’on prononce, pas dusquece.an’enipèehequoasoUat.entdaprouo, cer correctement ce. parole. ; mate. dans la "*- » -. « 

f, , t remarquer.., la.ulte d’Hugue. de Salnt-Vfcte*

que « parfois l’ela-il ne, qui nous porte ver. DtoU

, :, , si intense qu’on en oublie tout le reste Alors le deux choses l’une : ouhien cette n.vas.on de la contemplation suspend, ., la récitation de la prière, et

, ..liisuarcLl. III. c iv.n. n.sepoM.ra.pourees sujets atteints de ravissements extat.ques la quest.o

Sîavolr comment ils s’acquitteront de l’obi » Uon du

bréviaire ; voira ce sujel Éludes carmailaines, avril 1932 D 211-212 ; ou bien la conteniplatlon ne suspendra pasla récitation de l’office, mate alors tll y aura une Locution entre la parole et la pensée, 1a pensée sera occupée de tout autre cho » e que de ce que disent le.

lèvres ; la prière nen sera pas m uns valide, puisque

iiii, lirte quelle attention s, , , », , a ce. ede. ; elle n en

sera même que meUleure. puisque la troisième sorte

d’attention l’emporte sur la seconde.

Sais es., 1 permis, est-Il louable, est-ll préférable

d’opérer volontairement cette dissociation, de ne pas faire attention au sens des paroles qu’on prononce cl

de s’occuper plutôt de Dieu ou des choses divines, ouune toute de fane oraison sur unnporeque sujet, pendant que la bouche articule des mots qu peuvent avoir OU tout autre sens que ee a quoi OH

è se î Cela est permis évidemment ù ceux <, u. prient S n une langue qu’ils ne comprennent pa. : «  «  « » « . non ^telliguntpeliUonisoerba, adoridionemaIladtesa

, , Saint Thomas. In IV^SenL, toc. cit. Oui, mais on p’oïrait se demander s’il ne vaudrait pas mieux.prier en une langue que l’on comprend ; cf. Suarez. t. III, c v n 3-1 S’il faut en croue II. Hremoud. Hisl. litt’Lvii, p. 394 397, rhomassin n’eût pas été loin 1 de penser qu’il vaudrai, mieux que l’on ne comprit U

pas le sens des prières que l’on articule, que les mots étrangers que l’on prononce n’eussent plus ainsi qu’une valeur musicale et que, somme toute, on en revînt à la prière des glossolales de la primitive Église. II oubliait sans doute la critique assez verte qu’en a l’aile saint Paul, I Cor., xiv, 1-28 : « Si je prie en langue, mon esprit est en prière, mais mon intelligence demeure sans fruit. Que faire donc ? Je prierai avec l’esprit, mais je prierai aussi avec l’intelligence ; je chanterai avec l’esprit, mais je chanterai aussi avec l’intelligence. » Vs. 14-15. Voilà la charte de la vraie prière. La meilleure sorte d’attention, pour ceux qui en sont capables, est celle qui porte tout à la fois sur ce que l’on dit à Dieu et sur Dieu à qui l’on s’adresse. C’est l’avis de Lessius et de Lehmkuhl, cités par Vermeersch, op. cit., p. 46, note 3 ; c’est surtout l’avis de saint Thomas, In I Cor., c. xiv, lect. 3 : plus lucratur qui orat et intelligit, quam qui tantum lingua oral, qui scilicet non intelligit qux dicit ; nom ille qui intelligit, rejicitur et quantum ad intellcclum et quantum ad afjectum ; sed mens ejus qui non intelligit, est sine fructu refectionis.

Soit, dira-t-on, mais encore faudrait-il que les prières qu’on nous oblige à réciter aient un sens, et un sens édifiant, un sens qui corresponde à notre mentalité de chrétiens, à nos besoins spirituels. Or, tel n’est pas malheureusement le cas pour toutes les parties du bréviaire qu’on nous met entre les mains, en particulier pour le psautier, dont « un si grand nombre d’endroits n’ont rien de clair, rien de doux, rien de touchant que pour ceux qui sont remplis de la science du sens spirituel et qui peuvent extraire et sucer le miel d’une pierre ». Thomassin, cité par Bremond, ibid., p. 412. Si nous étions tenus d’appliquer notre intelligence à la récitation de l’office, nous risquerions de nous assimiler nombre de passages contraires « à l’esprit du Nouveau Testament, aux intentions de l'Église et à l’esprit de charité qui anime les fidèles. Car, à la lettre, ce sont souvent les désirs et les demandes du vieil homme que nous exprimons quand nous lisons les Écritures de l’ancien peuple qui était encore charnel… ». Ibid., p. 398. Saint Bonaventure reconnaissait que, pour retirer quelque fruit de la récitation des psaumes, il fallait bien souvent s'évader du sens littéral et recourir au sens spirituel : qualis enim devolio haberetur ex litterali sensu in istis verbis « qui emittis fontes in convallibus, etc. », quæ tamen omnia ibi scripta sunt juxta sensum spirituatem. De profectu religiosorum, t. II, c. lx. Enfin, ajoute-t-on, quel effort, partant quelle fatigue, ne supposerait pas l’application ininterrompue de l’intelligence au sens littéral d’une prière, qui, pour être récitée d’une manière simplement correcte et d’une allure assez rapide, exige plus d’une heure I « A qui voudrait appliquer sérieusement son esprit, ligne par ligne, à ce tissu de merveilles — il parle de l’office quotidien — il faudrait plusieurs semaines… On est bien obligé de prononcer tous les mots ; mais le savourer, et même le comprendre, ce qui s’appelle comprendre, ligne par ligne, qui nous persuadera jamais que l'Église attend de nous ce tour de force, d’ailleurs plus saugrenu encore qu’impossible ? » H. Bremond, ibid., p. 414 « Si la longueur excessive des offices, dit Duguet, était moins autorisée, le remède le plus sûr et le plus naturel serait de la réformer et de mettre une juste proportion entre les prières publiques et l’attention dont un homme de bien est capable. » Traité de la prière publique, éd. Sylvestre de Sacy, Paris, 1858, p. 4.

Que peut-on répondre à tout cela ? D’abord que l'Église n’attend pas, n’exige pas de nous « ce tour de force » : si l'Église nous impose, au dire de Vermeersch, op. cit., p. 49 et 53, plus que n’exigerait ce qui constitue essentiellement la prière vocale, præceptum dévote orandi horas canonicas, ab Ecclesia latnm, ultra pnrei pit quam quodorcdioni vocali est esse ntiale. (allusion probable au célèbre canon Dolentes, De celebr. miss., diversement interprété par les canonistes et les moralistes ; cf. Suarcz, t. IV, c. xiv ; le cari. 135 du Code de droit canon ne contient pas ce dévote), certainement elle ne nous impose pas de comprendre et de savourer tous les mots de l’office. Kst-ce à dire que notre prière ne serait pas meilleure si nous avions la possibilité de le faire ? Kst-ce à dire que la meilleure prière ne consiste pas précisément à comprendre et à savourer ce que l’on dit à Dieu ? À condition évidemment que cette prière soit compréhensible et vraiment religieuse. Si elle ne l’est pas, que l'Église réforme sa prière ; qu’elle nous donne, en particulier, comme le lui ont demandé « tous les prêtres du congrès liturgique de Malines » (1924), dans un vœu adressé au pape, « un texte latin officiel de prière, où les passages inintelligibles, obscurs, inexacts de la Vulgate seraient éclaircis et rapprochés du sens original du psalmiste, en fonction des conclusions les plus sûres de l’exégère catholique et sous la garantie de l’autorité pontificale » ; ce ne serait pas la première fois qu’on réformerait le bréviaire. Et. quant à la nécessité où nous sommes « de transposer le texte (des psaumes) sur le plan évangélique », Bremond, ibid., p. 398, de recourir au sens spirituel ou à d’autres industries pour adapter ces vieilles prières à des circonstances, à des situations bien différentes de celles qui en ont été l’occasion — cf. Duguet, op. cit., p. 218-239 ; Choix de discours extraits des Sermons de Neivman, III. De la condition des membres du royaume du Christ, 1. 1, p. 141166, trad. Saleilles, Paris, 1906 — elle ne prouve pas que la meilleure récitation d’une prière qui serait bien adaptée à la mentalité, à la condition, aux besoins permanents de la personne qui prie, ne consisterait pas précisément en ce que celle-ci entrerait totalement dans la pensée et dans les sentiments de celui qui l’a composée et s’y retrouverait complètement. Psalmis et hymnis cum oratis Deum, hoc versetur in corde, quod profertur in voce, prescrit saint Augustin dans sa Régula ad servos Dei, P. L., t. xxxii, col. 1379 ; Suarez, t. III, c. iv, n. 15, mentionne un certain nombre d’auteurs spirituels ou de théologiens, entre autres saint Bernard, Hugues de SaintVictor, Gerson, Médina, qui demandent que, dans la prière, on n’admette pas d’autres pieuses pensées que celles qui sont exprimées ou suggérées par les phrases qu’on prononce : in oratione vocali non licere admittere pias meditationes non pertinentes ad verba quæ proferuntur, neque in eis fundatas. Suarez, n. 22, n’est pas tout à fait de cet avis ; mais il déclare qu' « en règle générale, du moins pour les personnes qui ne sont pas accoutumées à la haute contemplation, il est préférable, pendant la prière, de penser aux choses suggérées par les mots. medilari aliquid pertinens ad sensum verborum, saltem myslicum, vel quod aliquo modo verba ipsa concernât, de manière que l’action intérieure et l’action extérieure, la pensée et la parole, ne forment plus qu’une seule chose ».

/II. LE SECO VRS Dl VIN NÉCESSAIRE À LA PRIÈRE. —

La grâce actuelle est-elle nécessaire pour prier, pour bien prier, pour prier sicut oportet ? Quand on se demande si, pour prier, nous avons besoin du secours divin, la question peut être entendue de deux manières : avons-nous besoin du secours divin pour avoir l’idée de recourir à Dieu dans nos besoins temporels ou spirituels et pour y recourir effectivement, pour adresser à Dieu notre supplication ? ou bien, avons-nous besoin de l’assistance divine pour bien prier, pour que notre prière possède toutes les qualités requises et pour que, en fin de compte, elle soit exaucée ?

Grâce excitante et prévenante.

C’est la grâce qui

nous pousse à prier, à recourir à Dieu pour en obtenir les secours, les grâces qui nous sont nécessaires pour 221

    1. PRIÈRE##


PRIÈRE. AUTRES CONDITIONS

Tl’l

parvenir au salut. Cela est de foi : l'Église l’a défini contre les pélagiens et les semi-pélagiens, qui refusaient à Dieu l’initiative dans l'œuvre de notre salut. Cf. Denz— Bannw, n. 17(i et 179 : « Si quelqu’un dit que c’est grâce à la prière de l’homme que le secours divin est accordé, mais que ce n’est pas grâce au secours divin que nous prions, il contredit l’enseignement du prophète Isaïe, repris par saint Paul. » S’ensuit-il qu’il n’est aucune prière qui ne soit d’origine purement humaine ? Non, évidemment ; il ne s’agit ici que de la prière faite pour obtenir de Dieu les secours spirituels dont nous avons besoin pour faire notre salut, faite en vue du salut. Quand la prière n’a d’autre objet que l’obtention de biens purement temporels, la guérison, le succès d’une entreprise, etc., pourquoi ne pourrait-elle pas jaillir spontanément, naturellement, du sentiment de notre indigence ? La grâce de Dieu ne paraît pas nécessaire pour nous porter ; i recourir à lui dans ces circonstances. Cf. Suarez, t. I, C. Vlll n. <>-H. Dans ce cas, nous aurions affaire à une prière purement naturelle, sans aucun rapport avec le salut ; en revanche, les textes conciliaires ou patriotiques concernant la nécessité de la grâce pour exciter en nous l’idée de recourir à Dieu, pour nous porter à la prière, n’ont en vue que la prière surnaturelle, la prière sicut oportet, comme ils l’appellent.

On a coutume d’apporter en preuve « le la thèse le célèbre texte de saint Paul, Rom., viii, 2 « >-'27 : ipse Spiritus s/inclus postulat pra nolns gemitlbus inenurru bilibus, en entendant, avec saint Augustin (De dono peneverantise, c. xxiii, n. 64, P. L., t. m.. col. 1032)

postulai au sens de poslularc faclt. enin itm ii, op. cit..

p. 38, note, n’admet pas cette Interprétation

2° Grâce adjuvante. - I.a grâce nous est nécessaire pour bien prier, pour donner à notre prière toutes lis qualités qu’elle doit posséder. « S’entretenir avec Dieu, dit saint Jean ChrysOStome, est une chose qui dépasse les forces de. l’homme, à moins qui] n' soit aidé par l’action du Saint-Espril », cité par Suarez, I. I, c. viii, n. 2. « Puisque c’est une chose qui dépasse les loues de l’homme, continue t ii, il faut que la grâce du Saint-Esprit, venant en nous, nous fortifie, nous donne confiance et nous apprenne la grandeur de l’honneur » qui nous est accordé de nous entretenir ainsi avec Dieu. ibid., n..'i. Qu’est-ce donc qui dépasse les forces de l’homme dans ce saint exercice ? D’abord et principe

lement, de savoir ce qu’il doit demander à Dieu, ce qu’il doit dire à Dieu, pour que sa prière honore Dieu et lui soit agréable ; c’est saint Paul qui nous en avertit : « L’Esprit vient en aide a notre faiblesse, car nous ne savons pas ce que nous devons, selon nos besoins, demander dans nos prières. Mais l’Esprit lui-même prie

pour nous par des gémissements Ineffables ; et celui qui

sonde les COBUTS connail quels sont les désirs de I I 9 prit, il sait qu’il prie selon Dieu pour des saints. »

Rom., viii, 2(i-'27. Saint Thomas, '/< Rom., c. viii, lect. 5, expose bien le commentaire traditionnel de ce

texte célèbre : c’est l’Psprit Saint qui dirigerait, qui produirait en nous notre prière ; elle s’exprimerait par des gémissements ineffables, Intraduisibles, par des

élans du COBUT vers un bien inconnu ; mais Dieu comprendrait et approuverait ces désirs obscurs â l’Ame elle-même, qui, provenant de l’Esprit, ne peuvent Être que conformes au bon plaisir de Dieu. Quoi qu’il en soit du sens précis de ce texte, il en ressort que, pour « pie noire prière soit., selon Mien >. nous avons besoin

de l’assistance de l’Esprit-Saint : c’est lui qui doit nous suggérer ce que nous devons demander.

L’homme a encore besoin du secours divin pour prier avec la foi et la confiance, avec la soumission à la volonté divine, avec l’ardeur et la persévérance inlassables, qui sont requises pour la prière < comme il faut > Nous pensons qu’il est inutile de nous attarder

sur un sujet qui relève, a vrai dire, du traité de la grâce plutôt que de celui de la prière. Mais ce que l’on peut ajouter ici, ce sont les conséquences pratiques qui découlent de cette doctrine et qu’on trouvera partieu lièrement bien formulées dans L'école de Jésus-Christ du P. Grou. Si notre prière ne peut être vraiment bonne « pie si c’est le Saint-Esprit qui la produit en nous, il importe donc, avant de prier, de lui demander son assistance, et, pendant que l’on prie, de se rendre docile a son action : « Puisque la prière est un acte surnaturel, il faut demander avec instance à Dieu qu’il la produise en nous, et la faire ensuite paisiblement sous sa direction ; il faut attirer en nous la grâce par notre ferveur et la seconder sans en troubler l’effet. 30° leçon, t. n. p. 4, de l'édition Desclée, de Brouwcr et Cie, Lille, 1923. Mais, dira-t-on, n’y a-t-il pas ici un cercle vicieux ? Pour bien prier, il faut demander l’assistance du Saint-Esprit ; mais, pour obtenir cette assistance. ne faut-il pas bien prier ? Il faudra donc qu’avant d’implorer l’assistance du Saint-Espril on lui demande « le nous aider dans cette imploration, et i nous voila au rouet » ! Réponse : ne nous préoccupons pas de cela ; taisons de notre mieux, avec l’assistance du Saint-Espilt qui ne nous manque jamais, notre prière pn pa ratoire à la prière, puis livrons-nous a la prière.

17, NÉCESSITÉ DB L'ÉTAT DE QRACB. L'état de grâce est-il nécessaire pour prier, pour bien prier ?

Ci. saint Thomas, in i Sent, dist. l.. q. ii, a. i.

qu. 3 (il s’agit des prières faites par les pei lieins pour les morts) ; Sum. theol., II*-II", q. i xxxiii, a. 16 ; « I cLXXvni, a. '2, ad 1° : QusesL ditp De potentat, q. iii, a '.'. ad 5. Suarez, I. l. <-. viii, n.9 ; « . ix, n.7 ;

( ulrrli. mm., pari. I, c. m. n. 5.

il suffira, pour répondre à la question, de Iran* rln ce paragraphe « lu Catéchisme romain : Un autn degré « le la prière se trouve dans ceux qui, étant cou pailles de péchés mortels, s’efforcent néanmoins de s. relever par cette foi qu’on appelle morte, et « le retoui

m i a Dieu… I.a prière de CCS hommes est ailmist

devant Dieu, et non seulement elle est exaucée, mail encore la miséricorde divine Invite avec la plus grandi honte les pécheurs ft prier : Venu 'i mot, « lit ell<-, nous tous qui élis affligéi et charges, et je vous soulagerai

Ainsi le pulilieain. qui n’osait pas lever les eiix au

ciel, sortit néanmoins du temple plus juste que le pha

lisien. i Nous n’aurions rien dit de cette question, si la « philosophie <h' la prière (le II. Prcmond. fondée sui

une confusion constante entre la grâce actuelle et la grâce sanctifiante, entre l’action « lu Saint-Espril sur

les anus, qu’elles soient ou non Justifiées, et sa pré

seiiee dans les âmes Justifiées, ne ii uers.in l’eus, ment traditionnel sur cette question. Non « pie nous

refusions a ta prière « lu pécheur, écrit-il, Hût. lltt…, t viii, p. 371, tout caractère <i<- prière, il semble

cependant qu’on ne peut l’appeler prière au sens plein

du mot. Quasi prière, prière analogique, essai de

prière. El pourquoi ? Le Misettit ne serait donc pas une vraie prière'.' Est-ce « pie tout le monde ne rci’onnait pas « pie l’un des objets principaux « hla prière,

c’est l’imploration « lu pardon ? Orare, dit saint Gré goire le Grand, est amans gemitus m compunctioiu resonare, cf. supra, col. 183. Si ce n’est pas l’essence <i<

toute prière, c’est au moins une espèce « le prièn Cf. Pottier, S..1. Pour saint Ignace et les « lixercices

contre l’offensive de M Bremond, p 30, note

r. LONQUBVR // : i._ PBJÈBB. I.a prière doit elle

être longue ? Cf. saint Thomas, in l « Sent., dist

. q. iv. a. 2, qu. 2 : 1 1 11 '. q. i xxxiii. a. I I : Sua rez. I. 111, c. n. n. I ">.

il n’est évidemment question ici « pie de la prière

facultative : la prière obligatoire doit durer au moins le temps nécessaire pour la prononciation correcte « les formules prescrites, temps qui varie, remarque Suarez,

juxla velocilatem orantis. Pour suint Thomas, la durée, comme la fréquence, de la prière facultative doheni être calculées d’après les dispositions de celui qui prie et d’après l’utilité spirituelle qu’on en retire ; la refile ou le principe posé par saint Thomas n’est pas exactement le même dans les Sentences et dans la II-’-II 1’: là, il nous dit : « I) ; uis la prière, il faut tenir compte de la dévotion de celui qui prie, et par conséquent la prière devra se prolonger autant de temps que la dévotion pourra se conserver ; donc, si la dévotion peut se conserver longtemps, la prière doit être diuturna et prolixa ; si, au contraire. la prolixité engendre le dégoût ou l’ennui, il ne faut pas la prolonger. » Dans la IIM I’, la durée de la prière variera d’après le profit spirituel qui en résultera : « Toute chose doit se proportionner à sa fin. I) convient donc que la prière dure aussi longtemps qu’il est utile pour entretenir la ferveur du désir. Lorsqu’elle dépasse cette mesure au point de ne pouvoir se prolonger sans dégoût, il ne faut pas s’y étendre davantage. » Et cette règle si sage, qu’il emprunte à saint Augustin, saint Thomas voudrait qu’on l’appliquât à la prière publique aussi bien qu’à la prière privée : et sicut hoc est atlendendum in oratione singulari per comparationem ad intentionem orantis, ita etiam in oratione communi per comparationem ad populi devotionem. Donc, pas de trop longs offices pour « le peuple », et, a pari, pouvons-nous ajouter, que la longueur du bréviaire soit calculée de telle sorte que le prêtre puisse le réciter avec dévotion et qu’il ne lui soit pas trop à charge : la qualité vaut mieux que la quantité. De la règle posée par saint Thomas, Suarez tire cette conclusion qu’on ne doit pas s’imposer une multitude de prières vocales que, vu ses occupations, on ne pourrait réciter qu’en les expédiant : cavendum est ne tôt multiplicentur vocales oraliones, ut sese quodammodo impediant, quia, consideratis aliis occupationibus, non possunt nisi nimia velocitale expleri.